Mot-clefAntoine Galland

au­teur • tra­duc­teur ou tra­duc­trice

Galland, « Journal, [pendant] la période parisienne. Volume IV (1714-1715) »

éd. Peeters, coll. Association pour la promotion de l’histoire et de l’archéologie orientales-Mémoires, Louvain

éd. Pee­ters, coll. As­so­cia­tion pour la pro­mo­tion de l’histoire et de l’archéologie orien­tales-Mé­moires, Lou­vain

Il s’agit du « Jour­nal » d’Antoine Gal­land, orien­ta­liste et nu­mis­mate fran­çais (XVIIe-XVIIIe siècle), à qui l’on doit une des œuvres qui mo­di­fièrent le plus l’imagination lit­té­raire, si­non pro­fon­dé­ment, du moins dans la fan­tai­sie, je veux dire les « Mille et une Nuits ». Toute sa vie, Gal­land vé­cut seul, presque sans autres amis que ses livres — les seuls qui ne le dé­çurent ja­mais. Sa­vant de pre­mier ordre, il s’attachait à étu­dier les langues orien­tales et les mé­dailles an­tiques, propres à je­ter quelque lu­mière — si in­fime fût-elle — sur les an­nales du passé. Voya­geur, il cher­chait les traits né­gli­gés par ses de­van­ciers. Sou­vent heu­reux dans ses re­cherches, simple et la­bo­rieux, il était, ce­pen­dant, d’une cer­taine hu­meur dans la lec­ture de ses contem­po­rains, qu’il ne pou­vait souf­frir d’y voir im­pri­mées des er­reurs sans prendre la plume pour les cor­ri­ger. « J’y trou­vai », écrit-il au su­jet d’un livre1, « des ex­pli­ca­tions si fort hors du bon sens, que je fus contraint de ces­ser la lec­ture pour la re­prendre le ma­tin, de crainte que je n’en puisse dor­mir. Mais je fus plus d’une heure et de­mie à m’endormir, non­obs­tant les ef­forts que je pus faire pour chas­ser de mon es­prit ces ex­tra­va­gances, dont l’auteur, qui ne s’était pas nommé, se fai­sait néan­moins as­sez connaître ». Ses écrits res­tèrent tou­jours, pour le nombre et l’importance, au-des­sous de son éru­di­tion. Un jour, il eut une dis­cus­sion très vive à l’Académie des ins­crip­tions ; dans une de ses ré­pliques, on re­marque ce pas­sage qui montre l’étendue de son ac­ti­vité in­las­sable et sa haute ri­gueur : « Py­tha­gore ne de­man­dait à ses dis­ciples que sept ans de si­lence pour s’instruire des prin­cipes de la phi­lo­so­phie avant que d’en écrire ou d’en vou­loir ju­ger. Sans que per­sonne l’eût exigé, j’ai gardé un si­lence plus ri­gide et plus long dans l’étude des mé­dailles. Ce si­lence a été de trente an­nées. Pen­dant tout ce temps-là, je ne me suis pas contenté d’écouter un grand nombre de maîtres ha­biles, de lire et d’examiner leurs ou­vrages ; j’ai en­core ma­nié et dé­chif­fré plu­sieurs mil­liers de mé­dailles grecques et la­tines, tant en France qu’en Sy­rie et en Pa­les­tine, à Smyrne, à Constan­ti­nople, à Alexan­drie et dans les îles de l’Archipel »

  1. « Jour­nal », 4 juin 1711. Haut

Galland, « Journal, [pendant] la période parisienne. Tome III (1712-1713) »

éd. Peeters, coll. Association pour la promotion de l’histoire et de l’archéologie orientales-Mémoires, Louvain

éd. Pee­ters, coll. As­so­cia­tion pour la pro­mo­tion de l’histoire et de l’archéologie orien­tales-Mé­moires, Lou­vain

Il s’agit du « Jour­nal » d’Antoine Gal­land, orien­ta­liste et nu­mis­mate fran­çais (XVIIe-XVIIIe siècle), à qui l’on doit une des œuvres qui mo­di­fièrent le plus l’imagination lit­té­raire, si­non pro­fon­dé­ment, du moins dans la fan­tai­sie, je veux dire les « Mille et une Nuits ». Toute sa vie, Gal­land vé­cut seul, presque sans autres amis que ses livres — les seuls qui ne le dé­çurent ja­mais. Sa­vant de pre­mier ordre, il s’attachait à étu­dier les langues orien­tales et les mé­dailles an­tiques, propres à je­ter quelque lu­mière — si in­fime fût-elle — sur les an­nales du passé. Voya­geur, il cher­chait les traits né­gli­gés par ses de­van­ciers. Sou­vent heu­reux dans ses re­cherches, simple et la­bo­rieux, il était, ce­pen­dant, d’une cer­taine hu­meur dans la lec­ture de ses contem­po­rains, qu’il ne pou­vait souf­frir d’y voir im­pri­mées des er­reurs sans prendre la plume pour les cor­ri­ger. « J’y trou­vai », écrit-il au su­jet d’un livre1, « des ex­pli­ca­tions si fort hors du bon sens, que je fus contraint de ces­ser la lec­ture pour la re­prendre le ma­tin, de crainte que je n’en puisse dor­mir. Mais je fus plus d’une heure et de­mie à m’endormir, non­obs­tant les ef­forts que je pus faire pour chas­ser de mon es­prit ces ex­tra­va­gances, dont l’auteur, qui ne s’était pas nommé, se fai­sait néan­moins as­sez connaître ». Ses écrits res­tèrent tou­jours, pour le nombre et l’importance, au-des­sous de son éru­di­tion. Un jour, il eut une dis­cus­sion très vive à l’Académie des ins­crip­tions ; dans une de ses ré­pliques, on re­marque ce pas­sage qui montre l’étendue de son ac­ti­vité in­las­sable et sa haute ri­gueur : « Py­tha­gore ne de­man­dait à ses dis­ciples que sept ans de si­lence pour s’instruire des prin­cipes de la phi­lo­so­phie avant que d’en écrire ou d’en vou­loir ju­ger. Sans que per­sonne l’eût exigé, j’ai gardé un si­lence plus ri­gide et plus long dans l’étude des mé­dailles. Ce si­lence a été de trente an­nées. Pen­dant tout ce temps-là, je ne me suis pas contenté d’écouter un grand nombre de maîtres ha­biles, de lire et d’examiner leurs ou­vrages ; j’ai en­core ma­nié et dé­chif­fré plu­sieurs mil­liers de mé­dailles grecques et la­tines, tant en France qu’en Sy­rie et en Pa­les­tine, à Smyrne, à Constan­ti­nople, à Alexan­drie et dans les îles de l’Archipel »

  1. « Jour­nal », 4 juin 1711. Haut

Galland, « Journal, [pendant] la période parisienne. Tome II (1710-1711) »

éd. Peeters, coll. Association pour la promotion de l’histoire et de l’archéologie orientales-Mémoires, Louvain

éd. Pee­ters, coll. As­so­cia­tion pour la pro­mo­tion de l’histoire et de l’archéologie orien­tales-Mé­moires, Lou­vain

Il s’agit du « Jour­nal » d’Antoine Gal­land, orien­ta­liste et nu­mis­mate fran­çais (XVIIe-XVIIIe siècle), à qui l’on doit une des œuvres qui mo­di­fièrent le plus l’imagination lit­té­raire, si­non pro­fon­dé­ment, du moins dans la fan­tai­sie, je veux dire les « Mille et une Nuits ». Toute sa vie, Gal­land vé­cut seul, presque sans autres amis que ses livres — les seuls qui ne le dé­çurent ja­mais. Sa­vant de pre­mier ordre, il s’attachait à étu­dier les langues orien­tales et les mé­dailles an­tiques, propres à je­ter quelque lu­mière — si in­fime fût-elle — sur les an­nales du passé. Voya­geur, il cher­chait les traits né­gli­gés par ses de­van­ciers. Sou­vent heu­reux dans ses re­cherches, simple et la­bo­rieux, il était, ce­pen­dant, d’une cer­taine hu­meur dans la lec­ture de ses contem­po­rains, qu’il ne pou­vait souf­frir d’y voir im­pri­mées des er­reurs sans prendre la plume pour les cor­ri­ger. « J’y trou­vai », écrit-il au su­jet d’un livre1, « des ex­pli­ca­tions si fort hors du bon sens, que je fus contraint de ces­ser la lec­ture pour la re­prendre le ma­tin, de crainte que je n’en puisse dor­mir. Mais je fus plus d’une heure et de­mie à m’endormir, non­obs­tant les ef­forts que je pus faire pour chas­ser de mon es­prit ces ex­tra­va­gances, dont l’auteur, qui ne s’était pas nommé, se fai­sait néan­moins as­sez connaître ». Ses écrits res­tèrent tou­jours, pour le nombre et l’importance, au-des­sous de son éru­di­tion. Un jour, il eut une dis­cus­sion très vive à l’Académie des ins­crip­tions ; dans une de ses ré­pliques, on re­marque ce pas­sage qui montre l’étendue de son ac­ti­vité in­las­sable et sa haute ri­gueur : « Py­tha­gore ne de­man­dait à ses dis­ciples que sept ans de si­lence pour s’instruire des prin­cipes de la phi­lo­so­phie avant que d’en écrire ou d’en vou­loir ju­ger. Sans que per­sonne l’eût exigé, j’ai gardé un si­lence plus ri­gide et plus long dans l’étude des mé­dailles. Ce si­lence a été de trente an­nées. Pen­dant tout ce temps-là, je ne me suis pas contenté d’écouter un grand nombre de maîtres ha­biles, de lire et d’examiner leurs ou­vrages ; j’ai en­core ma­nié et dé­chif­fré plu­sieurs mil­liers de mé­dailles grecques et la­tines, tant en France qu’en Sy­rie et en Pa­les­tine, à Smyrne, à Constan­ti­nople, à Alexan­drie et dans les îles de l’Archipel »

  1. « Jour­nal », 4 juin 1711. Haut

Galland, « Les “Mille et une Nuits” : contes arabes. Tome III »

XVIIIᵉ siècle

XVIIIe siècle

Il s’agit des « Mille et une Nuits » (« Alf layla wa-layla »1), contes arabes. Ra­re­ment, la ri­chesse de la nar­ra­tion et les tré­sors de l’imagination ont été dé­pen­sés dans une œuvre avec plus de pro­di­ga­lité ; et ra­re­ment, une œuvre a eu une réus­site plus écla­tante que celle des « Mille et une Nuits » de­puis qu’elle a été trans­por­tée en France par l’orientaliste An­toine Gal­land au com­men­ce­ment du XVIIIe siècle. De là, elle a im­mé­dia­te­ment rem­pli le monde de sa re­nom­mée, et de­puis, son suc­cès n’a fait que croître de jour en jour, sans souf­frir ni des ca­prices de la mode ni du chan­ge­ment des goûts. Quelle ex­tra­or­di­naire fé­con­dité dans ces contes ! Quelle va­riété ! Avec quel in­épui­sable in­té­rêt on suit les aven­tures en­chan­te­resses de Sind­bad le Ma­rin ou les mer­veilles opé­rées par la lampe d’Aladdin : « C’est dans l’Orient même que l’enfance du genre hu­main se montre avec toute sa grâce et toute sa naï­veté », dit Édouard Gaut­tier d’Arc2. « On y cher­che­rait en vain ou ces teintes mé­lan­co­liques du Nord, ou ces al­lu­sions sé­rieuses et pro­fondes [des] Grecs. [Ici], on voit que l’imagination ne s’est mise en œuvre que pour se créer à elle-même des plai­sirs… Ces gé­nies qu’elle a pro­duits, vont ré­pan­dant par­tout les perles, l’or, les dia­mants ; ils élèvent en un ins­tant des pa­lais su­perbes ; ils livrent à ce­lui qu’ils fa­vo­risent, des hou­ris3 en­chan­te­resses ; ils l’accablent, en un mot, de toutes les jouis­sances, sans qu’il se donne au­cune peine pour les ac­qué­rir. Il faut aux Orien­taux un bon­heur fa­cile et com­plet ; ils le veulent sans nuages, comme le so­leil qui les éclaire. »

  1. En arabe « ألف ليلة وليلة ». Au­tre­fois trans­crit « Alef léï­lét oué-léï­lét », « Alef lei­let we lei­let », « Alef leila wa leila » ou « Alf laila wa-laila ». Haut
  2. Pré­face à l’édition de 1822-1823. Haut
  1. Beau­tés cé­lestes qui, se­lon le Co­ran, se­ront les épouses des fi­dèles. Haut

Galland, « Les “Mille et une Nuits” : contes arabes. Tome II »

XVIIIᵉ siècle

XVIIIe siècle

Il s’agit des « Mille et une Nuits » (« Alf layla wa-layla »1), contes arabes. Ra­re­ment, la ri­chesse de la nar­ra­tion et les tré­sors de l’imagination ont été dé­pen­sés dans une œuvre avec plus de pro­di­ga­lité ; et ra­re­ment, une œuvre a eu une réus­site plus écla­tante que celle des « Mille et une Nuits » de­puis qu’elle a été trans­por­tée en France par l’orientaliste An­toine Gal­land au com­men­ce­ment du XVIIIe siècle. De là, elle a im­mé­dia­te­ment rem­pli le monde de sa re­nom­mée, et de­puis, son suc­cès n’a fait que croître de jour en jour, sans souf­frir ni des ca­prices de la mode ni du chan­ge­ment des goûts. Quelle ex­tra­or­di­naire fé­con­dité dans ces contes ! Quelle va­riété ! Avec quel in­épui­sable in­té­rêt on suit les aven­tures en­chan­te­resses de Sind­bad le Ma­rin ou les mer­veilles opé­rées par la lampe d’Aladdin : « C’est dans l’Orient même que l’enfance du genre hu­main se montre avec toute sa grâce et toute sa naï­veté », dit Édouard Gaut­tier d’Arc2. « On y cher­che­rait en vain ou ces teintes mé­lan­co­liques du Nord, ou ces al­lu­sions sé­rieuses et pro­fondes [des] Grecs. [Ici], on voit que l’imagination ne s’est mise en œuvre que pour se créer à elle-même des plai­sirs… Ces gé­nies qu’elle a pro­duits, vont ré­pan­dant par­tout les perles, l’or, les dia­mants ; ils élèvent en un ins­tant des pa­lais su­perbes ; ils livrent à ce­lui qu’ils fa­vo­risent, des hou­ris3 en­chan­te­resses ; ils l’accablent, en un mot, de toutes les jouis­sances, sans qu’il se donne au­cune peine pour les ac­qué­rir. Il faut aux Orien­taux un bon­heur fa­cile et com­plet ; ils le veulent sans nuages, comme le so­leil qui les éclaire. »

  1. En arabe « ألف ليلة وليلة ». Au­tre­fois trans­crit « Alef léï­lét oué-léï­lét », « Alef lei­let we lei­let », « Alef leila wa leila » ou « Alf laila wa-laila ». Haut
  2. Pré­face à l’édition de 1822-1823. Haut
  1. Beau­tés cé­lestes qui, se­lon le Co­ran, se­ront les épouses des fi­dèles. Haut

Galland, « Les “Mille et une Nuits” : contes arabes. Tome I »

XVIIIᵉ siècle

XVIIIe siècle

Il s’agit des « Mille et une Nuits » (« Alf layla wa-layla »1), contes arabes. Ra­re­ment, la ri­chesse de la nar­ra­tion et les tré­sors de l’imagination ont été dé­pen­sés dans une œuvre avec plus de pro­di­ga­lité ; et ra­re­ment, une œuvre a eu une réus­site plus écla­tante que celle des « Mille et une Nuits » de­puis qu’elle a été trans­por­tée en France par l’orientaliste An­toine Gal­land au com­men­ce­ment du XVIIIe siècle. De là, elle a im­mé­dia­te­ment rem­pli le monde de sa re­nom­mée, et de­puis, son suc­cès n’a fait que croître de jour en jour, sans souf­frir ni des ca­prices de la mode ni du chan­ge­ment des goûts. Quelle ex­tra­or­di­naire fé­con­dité dans ces contes ! Quelle va­riété ! Avec quel in­épui­sable in­té­rêt on suit les aven­tures en­chan­te­resses de Sind­bad le Ma­rin ou les mer­veilles opé­rées par la lampe d’Aladdin : « C’est dans l’Orient même que l’enfance du genre hu­main se montre avec toute sa grâce et toute sa naï­veté », dit Édouard Gaut­tier d’Arc2. « On y cher­che­rait en vain ou ces teintes mé­lan­co­liques du Nord, ou ces al­lu­sions sé­rieuses et pro­fondes [des] Grecs. [Ici], on voit que l’imagination ne s’est mise en œuvre que pour se créer à elle-même des plai­sirs… Ces gé­nies qu’elle a pro­duits, vont ré­pan­dant par­tout les perles, l’or, les dia­mants ; ils élèvent en un ins­tant des pa­lais su­perbes ; ils livrent à ce­lui qu’ils fa­vo­risent, des hou­ris3 en­chan­te­resses ; ils l’accablent, en un mot, de toutes les jouis­sances, sans qu’il se donne au­cune peine pour les ac­qué­rir. Il faut aux Orien­taux un bon­heur fa­cile et com­plet ; ils le veulent sans nuages, comme le so­leil qui les éclaire. »

  1. En arabe « ألف ليلة وليلة ». Au­tre­fois trans­crit « Alef léï­lét oué-léï­lét », « Alef lei­let we lei­let », « Alef leila wa leila » ou « Alf laila wa-laila ». Haut
  2. Pré­face à l’édition de 1822-1823. Haut
  1. Beau­tés cé­lestes qui, se­lon le Co­ran, se­ront les épouses des fi­dèles. Haut

Galland, « Journal, [pendant] la période parisienne. Tome I (1708-1709) »

éd. Peeters, coll. Association pour la promotion de l’histoire et de l’archéologie orientales-Mémoires, Louvain

éd. Pee­ters, coll. As­so­cia­tion pour la pro­mo­tion de l’histoire et de l’archéologie orien­tales-Mé­moires, Lou­vain

Il s’agit du « Jour­nal » d’Antoine Gal­land, orien­ta­liste et nu­mis­mate fran­çais (XVIIe-XVIIIe siècle), à qui l’on doit une des œuvres qui mo­di­fièrent le plus l’imagination lit­té­raire, si­non pro­fon­dé­ment, du moins dans la fan­tai­sie, je veux dire les « Mille et une Nuits ». Toute sa vie, Gal­land vé­cut seul, presque sans autres amis que ses livres — les seuls qui ne le dé­çurent ja­mais. Sa­vant de pre­mier ordre, il s’attachait à étu­dier les langues orien­tales et les mé­dailles an­tiques, propres à je­ter quelque lu­mière — si in­fime fût-elle — sur les an­nales du passé. Voya­geur, il cher­chait les traits né­gli­gés par ses de­van­ciers. Sou­vent heu­reux dans ses re­cherches, simple et la­bo­rieux, il était, ce­pen­dant, d’une cer­taine hu­meur dans la lec­ture de ses contem­po­rains, qu’il ne pou­vait souf­frir d’y voir im­pri­mées des er­reurs sans prendre la plume pour les cor­ri­ger. « J’y trou­vai », écrit-il au su­jet d’un livre1, « des ex­pli­ca­tions si fort hors du bon sens, que je fus contraint de ces­ser la lec­ture pour la re­prendre le ma­tin, de crainte que je n’en puisse dor­mir. Mais je fus plus d’une heure et de­mie à m’endormir, non­obs­tant les ef­forts que je pus faire pour chas­ser de mon es­prit ces ex­tra­va­gances, dont l’auteur, qui ne s’était pas nommé, se fai­sait néan­moins as­sez connaître ». Ses écrits res­tèrent tou­jours, pour le nombre et l’importance, au-des­sous de son éru­di­tion. Un jour, il eut une dis­cus­sion très vive à l’Académie des ins­crip­tions ; dans une de ses ré­pliques, on re­marque ce pas­sage qui montre l’étendue de son ac­ti­vité in­las­sable et sa haute ri­gueur : « Py­tha­gore ne de­man­dait à ses dis­ciples que sept ans de si­lence pour s’instruire des prin­cipes de la phi­lo­so­phie avant que d’en écrire ou d’en vou­loir ju­ger. Sans que per­sonne l’eût exigé, j’ai gardé un si­lence plus ri­gide et plus long dans l’étude des mé­dailles. Ce si­lence a été de trente an­nées. Pen­dant tout ce temps-là, je ne me suis pas contenté d’écouter un grand nombre de maîtres ha­biles, de lire et d’examiner leurs ou­vrages ; j’ai en­core ma­nié et dé­chif­fré plu­sieurs mil­liers de mé­dailles grecques et la­tines, tant en France qu’en Sy­rie et en Pa­les­tine, à Smyrne, à Constan­ti­nople, à Alexan­drie et dans les îles de l’Archipel »

  1. « Jour­nal », 4 juin 1711. Haut

Galland, « Journal, pendant le séjour à Constantinople (1672-1673). Tome II »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du « Jour­nal » d’Antoine Gal­land, orien­ta­liste et nu­mis­mate fran­çais (XVIIe-XVIIIe siècle), à qui l’on doit une des œuvres qui mo­di­fièrent le plus l’imagination lit­té­raire, si­non pro­fon­dé­ment, du moins dans la fan­tai­sie, je veux dire les « Mille et une Nuits ». Toute sa vie, Gal­land vé­cut seul, presque sans autres amis que ses livres — les seuls qui ne le dé­çurent ja­mais. Sa­vant de pre­mier ordre, il s’attachait à étu­dier les langues orien­tales et les mé­dailles an­tiques, propres à je­ter quelque lu­mière — si in­fime fût-elle — sur les an­nales du passé. Voya­geur, il cher­chait les traits né­gli­gés par ses de­van­ciers. Sou­vent heu­reux dans ses re­cherches, simple et la­bo­rieux, il était, ce­pen­dant, d’une cer­taine hu­meur dans la lec­ture de ses contem­po­rains, qu’il ne pou­vait souf­frir d’y voir im­pri­mées des er­reurs sans prendre la plume pour les cor­ri­ger. « J’y trou­vai », écrit-il au su­jet d’un livre1, « des ex­pli­ca­tions si fort hors du bon sens, que je fus contraint de ces­ser la lec­ture pour la re­prendre le ma­tin, de crainte que je n’en puisse dor­mir. Mais je fus plus d’une heure et de­mie à m’endormir, non­obs­tant les ef­forts que je pus faire pour chas­ser de mon es­prit ces ex­tra­va­gances, dont l’auteur, qui ne s’était pas nommé, se fai­sait néan­moins as­sez connaître ». Ses écrits res­tèrent tou­jours, pour le nombre et l’importance, au-des­sous de son éru­di­tion. Un jour, il eut une dis­cus­sion très vive à l’Académie des ins­crip­tions ; dans une de ses ré­pliques, on re­marque ce pas­sage qui montre l’étendue de son ac­ti­vité in­las­sable et sa haute ri­gueur : « Py­tha­gore ne de­man­dait à ses dis­ciples que sept ans de si­lence pour s’instruire des prin­cipes de la phi­lo­so­phie avant que d’en écrire ou d’en vou­loir ju­ger. Sans que per­sonne l’eût exigé, j’ai gardé un si­lence plus ri­gide et plus long dans l’étude des mé­dailles. Ce si­lence a été de trente an­nées. Pen­dant tout ce temps-là, je ne me suis pas contenté d’écouter un grand nombre de maîtres ha­biles, de lire et d’examiner leurs ou­vrages ; j’ai en­core ma­nié et dé­chif­fré plu­sieurs mil­liers de mé­dailles grecques et la­tines, tant en France qu’en Sy­rie et en Pa­les­tine, à Smyrne, à Constan­ti­nople, à Alexan­drie et dans les îles de l’Archipel »

  1. « Jour­nal », 4 juin 1711. Haut

Galland, « Journal, pendant le séjour à Constantinople (1672-1673). Tome I »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du « Jour­nal » d’Antoine Gal­land, orien­ta­liste et nu­mis­mate fran­çais (XVIIe-XVIIIe siècle), à qui l’on doit une des œuvres qui mo­di­fièrent le plus l’imagination lit­té­raire, si­non pro­fon­dé­ment, du moins dans la fan­tai­sie, je veux dire les « Mille et une Nuits ». Toute sa vie, Gal­land vé­cut seul, presque sans autres amis que ses livres — les seuls qui ne le dé­çurent ja­mais. Sa­vant de pre­mier ordre, il s’attachait à étu­dier les langues orien­tales et les mé­dailles an­tiques, propres à je­ter quelque lu­mière — si in­fime fût-elle — sur les an­nales du passé. Voya­geur, il cher­chait les traits né­gli­gés par ses de­van­ciers. Sou­vent heu­reux dans ses re­cherches, simple et la­bo­rieux, il était, ce­pen­dant, d’une cer­taine hu­meur dans la lec­ture de ses contem­po­rains, qu’il ne pou­vait souf­frir d’y voir im­pri­mées des er­reurs sans prendre la plume pour les cor­ri­ger. « J’y trou­vai », écrit-il au su­jet d’un livre1, « des ex­pli­ca­tions si fort hors du bon sens, que je fus contraint de ces­ser la lec­ture pour la re­prendre le ma­tin, de crainte que je n’en puisse dor­mir. Mais je fus plus d’une heure et de­mie à m’endormir, non­obs­tant les ef­forts que je pus faire pour chas­ser de mon es­prit ces ex­tra­va­gances, dont l’auteur, qui ne s’était pas nommé, se fai­sait néan­moins as­sez connaître ». Ses écrits res­tèrent tou­jours, pour le nombre et l’importance, au-des­sous de son éru­di­tion. Un jour, il eut une dis­cus­sion très vive à l’Académie des ins­crip­tions ; dans une de ses ré­pliques, on re­marque ce pas­sage qui montre l’étendue de son ac­ti­vité in­las­sable et sa haute ri­gueur : « Py­tha­gore ne de­man­dait à ses dis­ciples que sept ans de si­lence pour s’instruire des prin­cipes de la phi­lo­so­phie avant que d’en écrire ou d’en vou­loir ju­ger. Sans que per­sonne l’eût exigé, j’ai gardé un si­lence plus ri­gide et plus long dans l’étude des mé­dailles. Ce si­lence a été de trente an­nées. Pen­dant tout ce temps-là, je ne me suis pas contenté d’écouter un grand nombre de maîtres ha­biles, de lire et d’examiner leurs ou­vrages ; j’ai en­core ma­nié et dé­chif­fré plu­sieurs mil­liers de mé­dailles grecques et la­tines, tant en France qu’en Sy­rie et en Pa­les­tine, à Smyrne, à Constan­ti­nople, à Alexan­drie et dans les îles de l’Archipel »

  1. « Jour­nal », 4 juin 1711. Haut

« Les Paroles remarquables, les Bons Mots et les Maximes des Orientaux »

éd. Maisonneuve et Larose, coll. Dédale, Paris

éd. Mai­son­neuve et La­rose, coll. Dé­dale, Pa­ris

Il s’agit d’un re­cueil de pro­verbes arabes, per­sans et turcs. Nul genre d’enseignement n’est plus an­cien que ce­lui des pro­verbes. Son ori­gine re­monte aux âges les plus re­cu­lés du globe. Dès que les hommes, mus par un ins­tinct ir­ré­sis­tible ou pous­sés par la vo­lonté di­vine, se furent réunis en so­ciété ; dès qu’ils eurent consti­tué un lan­gage suf­fi­sant à l’expression de leurs be­soins, les pro­verbes prirent nais­sance en tant que ré­sumé na­tu­rel des idées com­munes de l’humanité. « S’ils avaient pu se conser­ver, s’ils étaient par­ve­nus jusqu’à nous sous leur forme pri­mi­tive », dit Pierre-Ma­rie Qui­tard1, « ils se­raient le plus cu­rieux mo­nu­ment du pro­grès des pre­mières so­cié­tés ; ils jet­te­raient un jour mer­veilleux sur l’histoire de la ci­vi­li­sa­tion, dont ils mar­que­raient le point de dé­part avec une ir­ré­cu­sable fi­dé­lité. » La Bible, qui contient plu­sieurs livres de pro­verbes, dit : « Ce­lui qui ap­plique son âme à ré­flé­chir sur la Loi du Très-Haut… re­cherche le sens se­cret des pro­verbes et re­vient sans cesse sur les énigmes des maximes »2. Les sages de la Grèce eurent la même pen­sée que la Bible. Confu­cius imita les pro­verbes et fut à son tour imité par ses dis­ciples. De même que l’âge de l’arbre peut se ju­ger par le tronc ; de même, les pro­verbes nous ap­prennent le gé­nie ou l’esprit propre à chaque na­tion, et les dé­tails de sa vie pri­vée. On en te­nait cer­tains en telle es­time, qu’on les di­sait d’origine cé­leste : « C’est du ciel », dit Ju­vé­nal3, « que nous est ve­nue la maxime : “Connais-toi toi-même”. Il la fau­drait gra­ver dans son cœur et la mé­di­ter tou­jours. » C’est pour­quoi, d’ailleurs, on les gra­vait sur le de­vant des portes des temples, sur les co­lonnes et les marbres. Ces ins­crip­tions, très nom­breuses du temps de Pla­ton, fai­saient dire à ce phi­lo­sophe qu’on pou­vait faire un ex­cellent cours de mo­rale en voya­geant à pied, si l’on vou­lait les lire ; les pro­verbes étant « le fruit de l’expérience de tous les peuples et comme le bon sens de tous les siècles ré­duit en for­mules »

  1. « Études his­to­riques, lit­té­raires et mo­rales sur les pro­verbes fran­çais et le lan­gage pro­ver­bial », p. 2. Haut
  2. « Livre de l’Ecclésiastique », XXXIX, 1-3. Haut
  1. « Sa­tires », poème XI, v. 27-28. Haut