Mot-clefroman japonais

Ôé, «Adieu, mon livre! : roman»

éd. Ph. Picquier, Arles

éd. Ph. Pic­quier, Arles

Il s’agit du ro­man «Adieu, mon livre!» («Sayô­nara, wa­ta­shi no hon yo!» 1) de M. Ken­za­burô Ôé 2, un des der­niers re­pré­sen­tants de la lit­té­ra­ture d’après-guerre. Il na­quit dans une pé­ri­phé­rie du monde ap­pe­lée Ja­pon, et qui plus est, dans un vil­lage pé­ri­phé­rique de ce pays. C’était un beau vil­lage perdu au cœur des grandes fo­rêts de l’île de Shi­koku, où sa fa­mille ha­bi­tait de­puis des cen­taines d’années sans que per­sonne ne s’en fût ja­mais éloi­gné; son père ve­nait d’y mou­rir. «L’angoisse de la mort et de la fo­lie m’avait saisi pour ne plus me lâ­cher, de­puis la mort sou­daine de mon père», dit-il 3. À dix-sept ans, dans un ou­vrage d’un pro­fes­seur de Tô­kyô in­ti­tulé «Fu­ransu ru­ne­sansu dan­shô» 4Frag­ments de la Re­nais­sance fran­çaise»), M. Ôé dé­cou­vrait, avec un en­thou­siasme dé­bor­dant, les hu­ma­nistes et le com­bat qu’ils avaient mené pour ré­pandre leurs idées. Et c’est pour étu­dier ces idées-là — ca­pables, pen­sait-il, de le pro­té­ger des ten­ta­tions ni­hi­listes d’un Mi­shima — qu’il quitta les fo­rêts na­tales et qu’il se ren­dit en ville pour prendre un train de nuit pour Tô­kyô. L’idée de de­ve­nir le dis­ciple de M. Ka­zuo Wa­ta­nabé 5, ce pro­fes­seur de lit­té­ra­ture fran­çaise dont il fai­sait d’ores et déjà son maître à pen­ser pour la vie, était là pour le sou­te­nir dans l’épreuve que re­pré­sen­tait ce voyage. Dans l’immense mé­tro­pole, M. Ôé se mon­tra un étu­diant brillant, mais ren­fermé, so­li­taire, et bé­gayant à cause de son ac­cent pro­vin­cial dont il avait honte. La nuit, l’ennui le dé­pri­mait, et tout en pre­nant des tran­quilli­sants avec du whisky, il fai­sait des es­quisses de ro­mans. «Quand j’ai com­mencé à écrire des ro­mans, je me suis dit qu’un jour ils se­raient pu­bliés en fran­çais par les édi­tions Gal­li­mard et que j’offrirais ce­lui qui me sem­ble­rait le mieux tra­duit à mon pro­fes­seur. Tout en gar­dant cette idée à l’esprit, j’ai tenté di­verses ex­pé­riences d’écriture ro­ma­nesque… C’est ce que j’ai tou­jours tenté de faire, et je ne le re­grette pas, mais j’ai aussi tou­jours eu le sen­ti­ment en pa­ral­lèle de ne ja­mais [avoir écrit] un ro­man li­béré de cette ob­ses­sion, équi­li­bré, bien construit», dit-il

  1. En ja­po­nais «さようなら,私の本よ!». Haut
  2. En ja­po­nais 大江健三郎. Haut
  3. «L’Homme, être fra­gile» («壊れものとしての人間»), in­édit en fran­çais. Haut
  1. En ja­po­nais «フランス・ルネサンス断章». Haut
  2. En ja­po­nais 渡辺一夫. Haut

Ôé, «Le Jeu du siècle»

éd. Gallimard, coll. Du monde entier, Paris

éd. Gal­li­mard, coll. Du monde en­tier, Pa­ris

Il s’agit du ro­man «Le Jeu du siècle» («Man’en gan­nen no fut­to­bôru» 1, lit­té­ra­le­ment «Foot­ball en l’an 1 de l’ère Man’en») de M. Ken­za­burô Ôé 2, un des der­niers re­pré­sen­tants de la lit­té­ra­ture d’après-guerre. Il na­quit dans une pé­ri­phé­rie du monde ap­pe­lée Ja­pon, et qui plus est, dans un vil­lage pé­ri­phé­rique de ce pays. C’était un beau vil­lage perdu au cœur des grandes fo­rêts de l’île de Shi­koku, où sa fa­mille ha­bi­tait de­puis des cen­taines d’années sans que per­sonne ne s’en fût ja­mais éloi­gné; son père ve­nait d’y mou­rir. «L’angoisse de la mort et de la fo­lie m’avait saisi pour ne plus me lâ­cher, de­puis la mort sou­daine de mon père», dit-il 3. À dix-sept ans, dans un ou­vrage d’un pro­fes­seur de Tô­kyô in­ti­tulé «Fu­ransu ru­ne­sansu dan­shô» 4Frag­ments de la Re­nais­sance fran­çaise»), M. Ôé dé­cou­vrait, avec un en­thou­siasme dé­bor­dant, les hu­ma­nistes et le com­bat qu’ils avaient mené pour ré­pandre leurs idées. Et c’est pour étu­dier ces idées-là — ca­pables, pen­sait-il, de le pro­té­ger des ten­ta­tions ni­hi­listes d’un Mi­shima — qu’il quitta les fo­rêts na­tales et qu’il se ren­dit en ville pour prendre un train de nuit pour Tô­kyô. L’idée de de­ve­nir le dis­ciple de M. Ka­zuo Wa­ta­nabé 5, ce pro­fes­seur de lit­té­ra­ture fran­çaise dont il fai­sait d’ores et déjà son maître à pen­ser pour la vie, était là pour le sou­te­nir dans l’épreuve que re­pré­sen­tait ce voyage. Dans l’immense mé­tro­pole, M. Ôé se mon­tra un étu­diant brillant, mais ren­fermé, so­li­taire, et bé­gayant à cause de son ac­cent pro­vin­cial dont il avait honte. La nuit, l’ennui le dé­pri­mait, et tout en pre­nant des tran­quilli­sants avec du whisky, il fai­sait des es­quisses de ro­mans. «Quand j’ai com­mencé à écrire des ro­mans, je me suis dit qu’un jour ils se­raient pu­bliés en fran­çais par les édi­tions Gal­li­mard et que j’offrirais ce­lui qui me sem­ble­rait le mieux tra­duit à mon pro­fes­seur. Tout en gar­dant cette idée à l’esprit, j’ai tenté di­verses ex­pé­riences d’écriture ro­ma­nesque… C’est ce que j’ai tou­jours tenté de faire, et je ne le re­grette pas, mais j’ai aussi tou­jours eu le sen­ti­ment en pa­ral­lèle de ne ja­mais [avoir écrit] un ro­man li­béré de cette ob­ses­sion, équi­li­bré, bien construit», dit-il

  1. En ja­po­nais «万延元年のフットボール». Par­fois trans­crit «Man’en gan­nen no foot­ball». Haut
  2. En ja­po­nais 大江健三郎. Haut
  3. «L’Homme, être fra­gile» («壊れものとしての人間»), in­édit en fran­çais. Haut
  1. En ja­po­nais «フランス・ルネサンス断章». Haut
  2. En ja­po­nais 渡辺一夫. Haut

Ôé, «Arrachez les bourgeons, tirez sur les enfants : récit»

éd. Gallimard, coll. Haute Enfance, Paris

éd. Gal­li­mard, coll. Haute En­fance, Pa­ris

Il s’agit du ro­man «Ar­ra­chez les bour­geons, ti­rez sur les en­fants» («Me­mu­shiri ko.uchi» 1) de M. Ken­za­burô Ôé 2, un des der­niers re­pré­sen­tants de la lit­té­ra­ture d’après-guerre. Il na­quit dans une pé­ri­phé­rie du monde ap­pe­lée Ja­pon, et qui plus est, dans un vil­lage pé­ri­phé­rique de ce pays. C’était un beau vil­lage perdu au cœur des grandes fo­rêts de l’île de Shi­koku, où sa fa­mille ha­bi­tait de­puis des cen­taines d’années sans que per­sonne ne s’en fût ja­mais éloi­gné; son père ve­nait d’y mou­rir. «L’angoisse de la mort et de la fo­lie m’avait saisi pour ne plus me lâ­cher, de­puis la mort sou­daine de mon père», dit-il 3. À dix-sept ans, dans un ou­vrage d’un pro­fes­seur de Tô­kyô in­ti­tulé «Fu­ransu ru­ne­sansu dan­shô» 4Frag­ments de la Re­nais­sance fran­çaise»), M. Ôé dé­cou­vrait, avec un en­thou­siasme dé­bor­dant, les hu­ma­nistes et le com­bat qu’ils avaient mené pour ré­pandre leurs idées. Et c’est pour étu­dier ces idées-là — ca­pables, pen­sait-il, de le pro­té­ger des ten­ta­tions ni­hi­listes d’un Mi­shima — qu’il quitta les fo­rêts na­tales et qu’il se ren­dit en ville pour prendre un train de nuit pour Tô­kyô. L’idée de de­ve­nir le dis­ciple de M. Ka­zuo Wa­ta­nabé 5, ce pro­fes­seur de lit­té­ra­ture fran­çaise dont il fai­sait d’ores et déjà son maître à pen­ser pour la vie, était là pour le sou­te­nir dans l’épreuve que re­pré­sen­tait ce voyage. Dans l’immense mé­tro­pole, M. Ôé se mon­tra un étu­diant brillant, mais ren­fermé, so­li­taire, et bé­gayant à cause de son ac­cent pro­vin­cial dont il avait honte. La nuit, l’ennui le dé­pri­mait, et tout en pre­nant des tran­quilli­sants avec du whisky, il fai­sait des es­quisses de ro­mans. «Quand j’ai com­mencé à écrire des ro­mans, je me suis dit qu’un jour ils se­raient pu­bliés en fran­çais par les édi­tions Gal­li­mard et que j’offrirais ce­lui qui me sem­ble­rait le mieux tra­duit à mon pro­fes­seur. Tout en gar­dant cette idée à l’esprit, j’ai tenté di­verses ex­pé­riences d’écriture ro­ma­nesque… C’est ce que j’ai tou­jours tenté de faire, et je ne le re­grette pas, mais j’ai aussi tou­jours eu le sen­ti­ment en pa­ral­lèle de ne ja­mais [avoir écrit] un ro­man li­béré de cette ob­ses­sion, équi­li­bré, bien construit», dit-il

  1. En ja­po­nais «芽むしり仔撃ち». Haut
  2. En ja­po­nais 大江健三郎. Haut
  3. «L’Homme, être fra­gile» («壊れものとしての人間»), in­édit en fran­çais. Haut
  1. En ja­po­nais «フランス・ルネサンス断章». Haut
  2. En ja­po­nais 渡辺一夫. Haut

Ôé, «Dites-nous comment survivre à notre folie»

éd. Gallimard, coll. Folio, Paris

éd. Gal­li­mard, coll. Fo­lio, Pa­ris

Il s’agit de «Dites-nous com­ment sur­vivre à notre fo­lie» («Wa­rera no kyôki wo iki­no­biru mi­chi wo oshie yo» 1) et autres nou­velles de M. Ken­za­burô Ôé 2, un des der­niers re­pré­sen­tants de la lit­té­ra­ture d’après-guerre. Il na­quit dans une pé­ri­phé­rie du monde ap­pe­lée Ja­pon, et qui plus est, dans un vil­lage pé­ri­phé­rique de ce pays. C’était un beau vil­lage perdu au cœur des grandes fo­rêts de l’île de Shi­koku, où sa fa­mille ha­bi­tait de­puis des cen­taines d’années sans que per­sonne ne s’en fût ja­mais éloi­gné; son père ve­nait d’y mou­rir. «L’angoisse de la mort et de la fo­lie m’avait saisi pour ne plus me lâ­cher, de­puis la mort sou­daine de mon père», dit-il 3. À dix-sept ans, dans un ou­vrage d’un pro­fes­seur de Tô­kyô in­ti­tulé «Fu­ransu ru­ne­sansu dan­shô» 4Frag­ments de la Re­nais­sance fran­çaise»), M. Ôé dé­cou­vrait, avec un en­thou­siasme dé­bor­dant, les hu­ma­nistes et le com­bat qu’ils avaient mené pour ré­pandre leurs idées. Et c’est pour étu­dier ces idées-là — ca­pables, pen­sait-il, de le pro­té­ger des ten­ta­tions ni­hi­listes d’un Mi­shima — qu’il quitta les fo­rêts na­tales et qu’il se ren­dit en ville pour prendre un train de nuit pour Tô­kyô. L’idée de de­ve­nir le dis­ciple de M. Ka­zuo Wa­ta­nabé 5, ce pro­fes­seur de lit­té­ra­ture fran­çaise dont il fai­sait d’ores et déjà son maître à pen­ser pour la vie, était là pour le sou­te­nir dans l’épreuve que re­pré­sen­tait ce voyage. Dans l’immense mé­tro­pole, M. Ôé se mon­tra un étu­diant brillant, mais ren­fermé, so­li­taire, et bé­gayant à cause de son ac­cent pro­vin­cial dont il avait honte. La nuit, l’ennui le dé­pri­mait, et tout en pre­nant des tran­quilli­sants avec du whisky, il fai­sait des es­quisses de ro­mans. «Quand j’ai com­mencé à écrire des ro­mans, je me suis dit qu’un jour ils se­raient pu­bliés en fran­çais par les édi­tions Gal­li­mard et que j’offrirais ce­lui qui me sem­ble­rait le mieux tra­duit à mon pro­fes­seur. Tout en gar­dant cette idée à l’esprit, j’ai tenté di­verses ex­pé­riences d’écriture ro­ma­nesque… C’est ce que j’ai tou­jours tenté de faire, et je ne le re­grette pas, mais j’ai aussi tou­jours eu le sen­ti­ment en pa­ral­lèle de ne ja­mais [avoir écrit] un ro­man li­béré de cette ob­ses­sion, équi­li­bré, bien construit», dit-il

  1. En ja­po­nais «われらの狂気を生き延びる道を教えよ». Haut
  2. En ja­po­nais 大江健三郎. Haut
  3. «L’Homme, être fra­gile» («壊れものとしての人間»), in­édit en fran­çais. Haut
  1. En ja­po­nais «フランス・ルネサンス断章». Haut
  2. En ja­po­nais 渡辺一夫. Haut

Ôé, «Le Faste des morts : nouvelles»

éd. Gallimard, coll. Du monde entier, Paris

éd. Gal­li­mard, coll. Du monde en­tier, Pa­ris

Il s’agit du «Faste des morts» («Shi­sha no ogori» 1) et autres nou­velles de M. Ken­za­burô Ôé 2, un des der­niers re­pré­sen­tants de la lit­té­ra­ture d’après-guerre. Il na­quit dans une pé­ri­phé­rie du monde ap­pe­lée Ja­pon, et qui plus est, dans un vil­lage pé­ri­phé­rique de ce pays. C’était un beau vil­lage perdu au cœur des grandes fo­rêts de l’île de Shi­koku, où sa fa­mille ha­bi­tait de­puis des cen­taines d’années sans que per­sonne ne s’en fût ja­mais éloi­gné; son père ve­nait d’y mou­rir. «L’angoisse de la mort et de la fo­lie m’avait saisi pour ne plus me lâ­cher, de­puis la mort sou­daine de mon père», dit-il 3. À dix-sept ans, dans un ou­vrage d’un pro­fes­seur de Tô­kyô in­ti­tulé «Fu­ransu ru­ne­sansu dan­shô» 4Frag­ments de la Re­nais­sance fran­çaise»), M. Ôé dé­cou­vrait, avec un en­thou­siasme dé­bor­dant, les hu­ma­nistes et le com­bat qu’ils avaient mené pour ré­pandre leurs idées. Et c’est pour étu­dier ces idées-là — ca­pables, pen­sait-il, de le pro­té­ger des ten­ta­tions ni­hi­listes d’un Mi­shima — qu’il quitta les fo­rêts na­tales et qu’il se ren­dit en ville pour prendre un train de nuit pour Tô­kyô. L’idée de de­ve­nir le dis­ciple de M. Ka­zuo Wa­ta­nabé 5, ce pro­fes­seur de lit­té­ra­ture fran­çaise dont il fai­sait d’ores et déjà son maître à pen­ser pour la vie, était là pour le sou­te­nir dans l’épreuve que re­pré­sen­tait ce voyage. Dans l’immense mé­tro­pole, M. Ôé se mon­tra un étu­diant brillant, mais ren­fermé, so­li­taire, et bé­gayant à cause de son ac­cent pro­vin­cial dont il avait honte. La nuit, l’ennui le dé­pri­mait, et tout en pre­nant des tran­quilli­sants avec du whisky, il fai­sait des es­quisses de ro­mans. «Quand j’ai com­mencé à écrire des ro­mans, je me suis dit qu’un jour ils se­raient pu­bliés en fran­çais par les édi­tions Gal­li­mard et que j’offrirais ce­lui qui me sem­ble­rait le mieux tra­duit à mon pro­fes­seur. Tout en gar­dant cette idée à l’esprit, j’ai tenté di­verses ex­pé­riences d’écriture ro­ma­nesque… C’est ce que j’ai tou­jours tenté de faire, et je ne le re­grette pas, mais j’ai aussi tou­jours eu le sen­ti­ment en pa­ral­lèle de ne ja­mais [avoir écrit] un ro­man li­béré de cette ob­ses­sion, équi­li­bré, bien construit», dit-il

  1. En ja­po­nais «死者の奢り». Haut
  2. En ja­po­nais 大江健三郎. Haut
  3. «L’Homme, être fra­gile» («壊れものとしての人間»), in­édit en fran­çais. Haut
  1. En ja­po­nais «フランス・ルネサンス断章». Haut
  2. En ja­po­nais 渡辺一夫. Haut

Ôé, «Une Existence tranquille»

éd. Gallimard, coll. Folio, Paris

éd. Gal­li­mard, coll. Fo­lio, Pa­ris

Il s’agit d’«Une Exis­tence tran­quille» («Shi­zu­kana sei­katsu» 1) et autres nou­velles de M. Ken­za­burô Ôé 2, un des der­niers re­pré­sen­tants de la lit­té­ra­ture d’après-guerre. Il na­quit dans une pé­ri­phé­rie du monde ap­pe­lée Ja­pon, et qui plus est, dans un vil­lage pé­ri­phé­rique de ce pays. C’était un beau vil­lage perdu au cœur des grandes fo­rêts de l’île de Shi­koku, où sa fa­mille ha­bi­tait de­puis des cen­taines d’années sans que per­sonne ne s’en fût ja­mais éloi­gné; son père ve­nait d’y mou­rir. «L’angoisse de la mort et de la fo­lie m’avait saisi pour ne plus me lâ­cher, de­puis la mort sou­daine de mon père», dit-il 3. À dix-sept ans, dans un ou­vrage d’un pro­fes­seur de Tô­kyô in­ti­tulé «Fu­ransu ru­ne­sansu dan­shô» 4Frag­ments de la Re­nais­sance fran­çaise»), M. Ôé dé­cou­vrait, avec un en­thou­siasme dé­bor­dant, les hu­ma­nistes et le com­bat qu’ils avaient mené pour ré­pandre leurs idées. Et c’est pour étu­dier ces idées-là — ca­pables, pen­sait-il, de le pro­té­ger des ten­ta­tions ni­hi­listes d’un Mi­shima — qu’il quitta les fo­rêts na­tales et qu’il se ren­dit en ville pour prendre un train de nuit pour Tô­kyô. L’idée de de­ve­nir le dis­ciple de M. Ka­zuo Wa­ta­nabé 5, ce pro­fes­seur de lit­té­ra­ture fran­çaise dont il fai­sait d’ores et déjà son maître à pen­ser pour la vie, était là pour le sou­te­nir dans l’épreuve que re­pré­sen­tait ce voyage. Dans l’immense mé­tro­pole, M. Ôé se mon­tra un étu­diant brillant, mais ren­fermé, so­li­taire, et bé­gayant à cause de son ac­cent pro­vin­cial dont il avait honte. La nuit, l’ennui le dé­pri­mait, et tout en pre­nant des tran­quilli­sants avec du whisky, il fai­sait des es­quisses de ro­mans. «Quand j’ai com­mencé à écrire des ro­mans, je me suis dit qu’un jour ils se­raient pu­bliés en fran­çais par les édi­tions Gal­li­mard et que j’offrirais ce­lui qui me sem­ble­rait le mieux tra­duit à mon pro­fes­seur. Tout en gar­dant cette idée à l’esprit, j’ai tenté di­verses ex­pé­riences d’écriture ro­ma­nesque… C’est ce que j’ai tou­jours tenté de faire, et je ne le re­grette pas, mais j’ai aussi tou­jours eu le sen­ti­ment en pa­ral­lèle de ne ja­mais [avoir écrit] un ro­man li­béré de cette ob­ses­sion, équi­li­bré, bien construit», dit-il

  1. En ja­po­nais «静かな生活». Haut
  2. En ja­po­nais 大江健三郎. Haut
  3. «L’Homme, être fra­gile» («壊れものとしての人間»), in­édit en fran­çais. Haut
  1. En ja­po­nais «フランス・ルネサンス断章». Haut
  2. En ja­po­nais 渡辺一夫. Haut

Kyôka, «La Ronde nocturne de l’agent de police, “Yakô junsa”»

dans « Anthologie de nouvelles japonaises contemporaines. Tome II » (éd. Gallimard, coll. Du monde entier, Paris)

dans «An­tho­lo­gie de nou­velles ja­po­naises contem­po­raines. Tome II» (éd. Gal­li­mard, coll. Du monde en­tier, Pa­ris)

Il s’agit de «La Ronde noc­turne de l’agent de po­lice» («Yakô junsa» 1) et autres œuvres d’Izumi Kyôka 2, écri­vain ja­po­nais (XIXe-XXe siècle) qui créa, aussi bien dans ses contes fan­tas­tiques que dans ses nou­velles proches du poème en prose, un monde fait d’êtres sur­na­tu­rels, de fan­tômes in­quié­tants et de femmes sen­suelles, un monde sans doute en par­tie ins­piré de sa mère ar­tiste, qu’il per­dit à l’âge de neuf ans. Fan­tasque, ca­pri­cieux, Kyôka vi­vait en­touré de ses peurs et su­per­sti­tions; il crai­gnait les chiens et les éclairs et en­le­vait les lu­nettes quand il pas­sait de­vant un temple, pour que rien ne brouillât son contact avec le di­vin. Il idéa­lisa le monde des gei­shas, au point d’en prendre une pour femme, en ajour­nant son ma­riage jusqu’au dé­cès de son maître Ozaki Kôyô qui désap­prou­vait cette union. De l’Occident, il ré­vé­rait les des­seins étranges et dé­ca­dents d’Aubrey Beard­sley; du Ja­pon — les vieilles es­tampes et scènes de nô. Hé­las! les œuvres les plus fortes et les plus vraies de Kyôka res­tent pour l’heure in­édites en fran­çais. Tel est le cas de «Ni­hon­ba­shi» 3, l’histoire d’un jeune homme à la re­cherche de sa sœur qui lui avait payé ses études en de­ve­nant gei­sha; ou bien «L’Ermite du mont Kôya» («Kôya hi­jiri» 4), les confes­sions d’un moine sou­mis à la ten­ta­tion par une ma­gi­cienne vo­lup­tueuse, une sorte de Circé, qui avait le pou­voir de mé­ta­mor­pho­ser les hommes en bêtes. Même au Ja­pon, mal­gré la po­pu­la­rité de ses œuvres, adap­tées très tôt au théâtre et au ci­néma, Kyôka s’éteignit dans une re­la­tive in­dif­fé­rence, laissé de côté par ses contem­po­rains. Sa pré­di­lec­tion pour le fan­tas­tique, ses étranges types fé­mi­nins qui rap­pe­laient sou­vent, par leur beauté té­né­breuse et trou­blante, les «belles dames sans merci» du ro­man­tisme oc­ci­den­tal, ne cor­res­pon­daient plus aux goûts du temps : «Quand je songe à Izumi Kyôka», dit un cri­tique 5, «ce qui ne cesse de me sur­prendre, c’est cet en­thou­siasme et cette in­flexible [obs­ti­na­tion] à vou­loir pré­ser­ver un tel uni­vers fan­tas­tique et plein de poé­sie, dans un Ja­pon où, de­puis [l’ère] Meiji, le cou­rant prin­ci­pal était le réa­lisme… Ozaki Kôyô, ce maître pour qui Kyôka avait tant de res­pect, reste, me semble-t-il, en der­nier lieu, un au­teur réa­liste. En France par exemple, même au XIXe siècle où le réa­lisme était le cou­rant lit­té­raire prin­ci­pal, [il] exis­tait un cer­tain nombre de ro­man­ciers fan­tas­tiques — Ner­val, parmi d’autres… Dans la lit­té­ra­ture ja­po­naise contem­po­raine, Kyôka fait fi­gure de cas unique et isolé».

  1. En ja­po­nais «夜行巡査». Haut
  2. En ja­po­nais 泉鏡花. Haut
  3. En ja­po­nais «日本橋». Haut
  1. En ja­po­nais «高野聖». Par­fois tra­duit «Le Saint du mont Kôya». Haut
  2. Iku­shima Ryûi­chi dans Fran­çois La­chaud, «“L’Ermite du mont Kôya”, une lec­ture d’Izumi Kyôka», p. 71-72. Haut

Kyôka, «Les Noix glacées, “Kurumi”»

dans « [Nouvelles japonaises]. Tome I. Les Noix, la Mouche, le Citron (1910-1926) » (éd. Ph. Picquier, Arles), p. 15-22

dans «[Nou­velles ja­po­naises]. Tome I. Les Noix, la Mouche, le Ci­tron (1910-1926)» (éd. Ph. Pic­quier, Arles), p. 15-22

Il s’agit des «Noix gla­cées» («Ku­rumi» 1) et autres œuvres d’Izumi Kyôka 2, écri­vain ja­po­nais (XIXe-XXe siècle) qui créa, aussi bien dans ses contes fan­tas­tiques que dans ses nou­velles proches du poème en prose, un monde fait d’êtres sur­na­tu­rels, de fan­tômes in­quié­tants et de femmes sen­suelles, un monde sans doute en par­tie ins­piré de sa mère ar­tiste, qu’il per­dit à l’âge de neuf ans. Fan­tasque, ca­pri­cieux, Kyôka vi­vait en­touré de ses peurs et su­per­sti­tions; il crai­gnait les chiens et les éclairs et en­le­vait les lu­nettes quand il pas­sait de­vant un temple, pour que rien ne brouillât son contact avec le di­vin. Il idéa­lisa le monde des gei­shas, au point d’en prendre une pour femme, en ajour­nant son ma­riage jusqu’au dé­cès de son maître Ozaki Kôyô qui désap­prou­vait cette union. De l’Occident, il ré­vé­rait les des­seins étranges et dé­ca­dents d’Aubrey Beard­sley; du Ja­pon — les vieilles es­tampes et scènes de nô. Hé­las! les œuvres les plus fortes et les plus vraies de Kyôka res­tent pour l’heure in­édites en fran­çais. Tel est le cas de «Ni­hon­ba­shi» 3, l’histoire d’un jeune homme à la re­cherche de sa sœur qui lui avait payé ses études en de­ve­nant gei­sha; ou bien «L’Ermite du mont Kôya» («Kôya hi­jiri» 4), les confes­sions d’un moine sou­mis à la ten­ta­tion par une ma­gi­cienne vo­lup­tueuse, une sorte de Circé, qui avait le pou­voir de mé­ta­mor­pho­ser les hommes en bêtes. Même au Ja­pon, mal­gré la po­pu­la­rité de ses œuvres, adap­tées très tôt au théâtre et au ci­néma, Kyôka s’éteignit dans une re­la­tive in­dif­fé­rence, laissé de côté par ses contem­po­rains. Sa pré­di­lec­tion pour le fan­tas­tique, ses étranges types fé­mi­nins qui rap­pe­laient sou­vent, par leur beauté té­né­breuse et trou­blante, les «belles dames sans merci» du ro­man­tisme oc­ci­den­tal, ne cor­res­pon­daient plus aux goûts du temps : «Quand je songe à Izumi Kyôka», dit un cri­tique 5, «ce qui ne cesse de me sur­prendre, c’est cet en­thou­siasme et cette in­flexible [obs­ti­na­tion] à vou­loir pré­ser­ver un tel uni­vers fan­tas­tique et plein de poé­sie, dans un Ja­pon où, de­puis [l’ère] Meiji, le cou­rant prin­ci­pal était le réa­lisme… Ozaki Kôyô, ce maître pour qui Kyôka avait tant de res­pect, reste, me semble-t-il, en der­nier lieu, un au­teur réa­liste. En France par exemple, même au XIXe siècle où le réa­lisme était le cou­rant lit­té­raire prin­ci­pal, [il] exis­tait un cer­tain nombre de ro­man­ciers fan­tas­tiques — Ner­val, parmi d’autres… Dans la lit­té­ra­ture ja­po­naise contem­po­raine, Kyôka fait fi­gure de cas unique et isolé».

  1. En ja­po­nais «胡桃». Haut
  2. En ja­po­nais 泉鏡花. Haut
  3. En ja­po­nais «日本橋». Haut
  1. En ja­po­nais «高野聖». Par­fois tra­duit «Le Saint du mont Kôya». Haut
  2. Iku­shima Ryûi­chi dans Fran­çois La­chaud, «“L’Ermite du mont Kôya”, une lec­ture d’Izumi Kyôka», p. 71-72. Haut

Kyôka, «Une Femme fidèle : récits»

éd. Ph. Picquier, Arles

éd. Ph. Pic­quier, Arles

Il s’agit d’«Une Femme fi­dèle» («Bake ichô» 1) et autres œuvres d’Izumi Kyôka 2, écri­vain ja­po­nais (XIXe-XXe siècle) qui créa, aussi bien dans ses contes fan­tas­tiques que dans ses nou­velles proches du poème en prose, un monde fait d’êtres sur­na­tu­rels, de fan­tômes in­quié­tants et de femmes sen­suelles, un monde sans doute en par­tie ins­piré de sa mère ar­tiste, qu’il per­dit à l’âge de neuf ans. Fan­tasque, ca­pri­cieux, Kyôka vi­vait en­touré de ses peurs et su­per­sti­tions; il crai­gnait les chiens et les éclairs et en­le­vait les lu­nettes quand il pas­sait de­vant un temple, pour que rien ne brouillât son contact avec le di­vin. Il idéa­lisa le monde des gei­shas, au point d’en prendre une pour femme, en ajour­nant son ma­riage jusqu’au dé­cès de son maître Ozaki Kôyô qui désap­prou­vait cette union. De l’Occident, il ré­vé­rait les des­seins étranges et dé­ca­dents d’Aubrey Beard­sley; du Ja­pon — les vieilles es­tampes et scènes de nô. Hé­las! les œuvres les plus fortes et les plus vraies de Kyôka res­tent pour l’heure in­édites en fran­çais. Tel est le cas de «Ni­hon­ba­shi» 3, l’histoire d’un jeune homme à la re­cherche de sa sœur qui lui avait payé ses études en de­ve­nant gei­sha; ou bien «L’Ermite du mont Kôya» («Kôya hi­jiri» 4), les confes­sions d’un moine sou­mis à la ten­ta­tion par une ma­gi­cienne vo­lup­tueuse, une sorte de Circé, qui avait le pou­voir de mé­ta­mor­pho­ser les hommes en bêtes. Même au Ja­pon, mal­gré la po­pu­la­rité de ses œuvres, adap­tées très tôt au théâtre et au ci­néma, Kyôka s’éteignit dans une re­la­tive in­dif­fé­rence, laissé de côté par ses contem­po­rains. Sa pré­di­lec­tion pour le fan­tas­tique, ses étranges types fé­mi­nins qui rap­pe­laient sou­vent, par leur beauté té­né­breuse et trou­blante, les «belles dames sans merci» du ro­man­tisme oc­ci­den­tal, ne cor­res­pon­daient plus aux goûts du temps : «Quand je songe à Izumi Kyôka», dit un cri­tique 5, «ce qui ne cesse de me sur­prendre, c’est cet en­thou­siasme et cette in­flexible [obs­ti­na­tion] à vou­loir pré­ser­ver un tel uni­vers fan­tas­tique et plein de poé­sie, dans un Ja­pon où, de­puis [l’ère] Meiji, le cou­rant prin­ci­pal était le réa­lisme… Ozaki Kôyô, ce maître pour qui Kyôka avait tant de res­pect, reste, me semble-t-il, en der­nier lieu, un au­teur réa­liste. En France par exemple, même au XIXe siècle où le réa­lisme était le cou­rant lit­té­raire prin­ci­pal, [il] exis­tait un cer­tain nombre de ro­man­ciers fan­tas­tiques — Ner­val, parmi d’autres… Dans la lit­té­ra­ture ja­po­naise contem­po­raine, Kyôka fait fi­gure de cas unique et isolé».

  1. En ja­po­nais «化銀杏». Haut
  2. En ja­po­nais 泉鏡花. Haut
  3. En ja­po­nais «日本橋». Haut
  1. En ja­po­nais «高野聖». Par­fois tra­duit «Le Saint du mont Kôya». Haut
  2. Iku­shima Ryûi­chi dans Fran­çois La­chaud, «“L’Ermite du mont Kôya”, une lec­ture d’Izumi Kyôka», p. 71-72. Haut

Kyôka, «La Femme ailée : récits»

éd. Ph. Picquier, coll. Picquier poche, Arles

éd. Ph. Pic­quier, coll. Pic­quier poche, Arles

Il s’agit de «La Femme ai­lée» («Ke­chô» 1) et autres œuvres d’Izumi Kyôka 2, écri­vain ja­po­nais (XIXe-XXe siècle) qui créa, aussi bien dans ses contes fan­tas­tiques que dans ses nou­velles proches du poème en prose, un monde fait d’êtres sur­na­tu­rels, de fan­tômes in­quié­tants et de femmes sen­suelles, un monde sans doute en par­tie ins­piré de sa mère ar­tiste, qu’il per­dit à l’âge de neuf ans. Fan­tasque, ca­pri­cieux, Kyôka vi­vait en­touré de ses peurs et su­per­sti­tions; il crai­gnait les chiens et les éclairs et en­le­vait les lu­nettes quand il pas­sait de­vant un temple, pour que rien ne brouillât son contact avec le di­vin. Il idéa­lisa le monde des gei­shas, au point d’en prendre une pour femme, en ajour­nant son ma­riage jusqu’au dé­cès de son maître Ozaki Kôyô qui désap­prou­vait cette union. De l’Occident, il ré­vé­rait les des­seins étranges et dé­ca­dents d’Aubrey Beard­sley; du Ja­pon — les vieilles es­tampes et scènes de nô. Hé­las! les œuvres les plus fortes et les plus vraies de Kyôka res­tent pour l’heure in­édites en fran­çais. Tel est le cas de «Ni­hon­ba­shi» 3, l’histoire d’un jeune homme à la re­cherche de sa sœur qui lui avait payé ses études en de­ve­nant gei­sha; ou bien «L’Ermite du mont Kôya» («Kôya hi­jiri» 4), les confes­sions d’un moine sou­mis à la ten­ta­tion par une ma­gi­cienne vo­lup­tueuse, une sorte de Circé, qui avait le pou­voir de mé­ta­mor­pho­ser les hommes en bêtes. Même au Ja­pon, mal­gré la po­pu­la­rité de ses œuvres, adap­tées très tôt au théâtre et au ci­néma, Kyôka s’éteignit dans une re­la­tive in­dif­fé­rence, laissé de côté par ses contem­po­rains. Sa pré­di­lec­tion pour le fan­tas­tique, ses étranges types fé­mi­nins qui rap­pe­laient sou­vent, par leur beauté té­né­breuse et trou­blante, les «belles dames sans merci» du ro­man­tisme oc­ci­den­tal, ne cor­res­pon­daient plus aux goûts du temps : «Quand je songe à Izumi Kyôka», dit un cri­tique 5, «ce qui ne cesse de me sur­prendre, c’est cet en­thou­siasme et cette in­flexible [obs­ti­na­tion] à vou­loir pré­ser­ver un tel uni­vers fan­tas­tique et plein de poé­sie, dans un Ja­pon où, de­puis [l’ère] Meiji, le cou­rant prin­ci­pal était le réa­lisme… Ozaki Kôyô, ce maître pour qui Kyôka avait tant de res­pect, reste, me semble-t-il, en der­nier lieu, un au­teur réa­liste. En France par exemple, même au XIXe siècle où le réa­lisme était le cou­rant lit­té­raire prin­ci­pal, [il] exis­tait un cer­tain nombre de ro­man­ciers fan­tas­tiques — Ner­val, parmi d’autres… Dans la lit­té­ra­ture ja­po­naise contem­po­raine, Kyôka fait fi­gure de cas unique et isolé».

  1. En ja­po­nais «化鳥». Haut
  2. En ja­po­nais 泉鏡花. Haut
  3. En ja­po­nais «日本橋». Haut
  1. En ja­po­nais «高野聖». Par­fois tra­duit «Le Saint du mont Kôya». Haut
  2. Iku­shima Ryûi­chi dans Fran­çois La­chaud, «“L’Ermite du mont Kôya”, une lec­ture d’Izumi Kyôka», p. 71-72. Haut

Akutagawa, «Jambes de cheval»

éd. Les Belles Lettres, coll. Japon-Série Fiction, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. Ja­pon-Sé­rie Fic­tion, Pa­ris

Il s’agit de «Jambes de che­val» («Uma no ashi» 1) et autres nou­velles d’Akutagawa Ryû­no­suke 2. L’œuvre de cet écri­vain, dis­crè­te­ment in­tel­lec­tuelle, tein­tée d’une iro­nie in­sou­ciante, cache as­sez mal, sous une ap­pa­rence lé­gère et élé­gante, quelque chose de ner­veux, d’obsédant, un sourd ma­laise, une «vague in­quié­tude» («bo­nyari-shita fuan» 3), se­lon les mots mêmes par les­quels Aku­ta­gawa tien­dra à dé­fi­nir le mo­tif de son sui­cide. Pour­tant, de tous les écri­vains ja­po­nais, nul n’était mieux dis­posé qu’Akutagawa à trou­ver re­fuge dans l’art. Il se dé­cri­vait comme avide de lec­ture, ju­ché sur l’échelle d’une li­brai­rie, toi­sant de là-haut les pas­sants qui lui pa­rais­saient étran­ge­ment pe­tits et aussi tel­le­ment mi­sé­rables : «La vie hu­maine ne vaut pas même une ligne de Bau­de­laire!», di­sait-il 4. Très tôt, il avait com­pris que rien de sé­dui­sant ne se fait sans qu’y col­la­bore une dou­leur. L’œuvre d’art, plu­tôt qu’à la pierre pré­cieuse, se com­pare à la flamme qui a be­soin d’un ali­ment vi­vant. Et Aku­ta­gawa mit son hon­neur à s’en faire la vic­time vo­lon­taire. Comme il écrira dans la «Lettre adres­sée à un vieil ami» («Aru kyûyû e okuru shuki» 5) im­mé­dia­te­ment avant sa mort : «Dans cet état ex­trême où je suis, la na­ture me semble plus émou­vante que ja­mais. Peut-être ri­ras-tu de la contra­dic­tion dans la­quelle je me trouve, moi qui, tout en ai­mant la beauté de la na­ture, dé­cide de me sup­pri­mer. Mais la na­ture est belle parce qu’elle se re­flète dans mon ul­time re­gard…» Et Ya­su­nari Ka­wa­bata de com­men­ter : «Le plus sou­vent ma­la­dif et af­fai­bli, [l’artiste] s’enflamme au der­nier mo­ment avant de s’éteindre tout à fait. C’est quelque chose de tra­gique en soi» 6. Le moins qu’on puisse en dire, c’est que c’est jus­te­ment ce «quelque chose de tra­gique» qui exerce sa puis­sante fas­ci­na­tion sur l’âme et sur l’imaginaire des lec­teurs d’Akutagawa. «Ces der­niers sentent que leurs pré­oc­cu­pa­tions pro­fondes — ou plu­tôt… “exis­ten­tielles” — se trouvent sai­sies et par­ta­gées par l’auteur qui, en les pré­ci­sant et en les am­pli­fiant jusqu’à une sorte de han­tise, les pro­jette sur un fond im­pré­gné d’un “spleen” qui lui est par­ti­cu­lier», dit M. Ari­masa Mori

  1. En ja­po­nais «馬の脚». Haut
  2. En ja­po­nais 芥川龍之介. Au­tre­fois trans­crit Riu­noské Aku­ta­gawa, Akou­ta­gawa Ryu­no­souké, Akou­ta­gaoua Ryou­no­souké ou Akou­ta­gava Ryou­no­souke. Haut
  3. En ja­po­nais «ぼんやりした不安». Haut
  1. En ja­po­nais «人生は一行のボオドレエルにも若かない». Haut
  2. En ja­po­nais «或旧友へ送る手記». Haut
  3. «Ro­mans et Nou­velles», p. 26. Haut

Ichiyô, «Le Trente et un Décembre, “Ôtsugomori”»

dans « Anthologie de nouvelles japonaises contemporaines. [Tome I] » (éd. Gallimard, coll. Du monde entier, Paris)

dans «An­tho­lo­gie de nou­velles ja­po­naises contem­po­raines. [Tome I]» (éd. Gal­li­mard, coll. Du monde en­tier, Pa­ris)

Il s’agit du «Trente et un Dé­cembre» («Ôt­su­go­mori» 1) de Hi­gu­chi Ichiyô 2, écri­vaine ja­po­naise, tom­bée à vingt-quatre ans comme la feuille au vent d’automne (son sur­nom Ichiyô si­gni­fie «Simple feuille») et qui, mal­gré la briè­veté de sa vie, fut un des au­teurs les plus in­té­res­sants de sa gé­né­ra­tion, an­non­çant avec éclat le re­tour des femmes sur la scène lit­té­raire de l’Empire du So­leil le­vant. De son vrai nom Hi­gu­chi Natsu 3 ou Hi­gu­chi Nat­suko 4, elle mon­tra un goût pré­coce pour la lit­té­ra­ture et don­nait déjà mieux que des es­pé­rances, lorsqu’en 1889, la mort de son père, sui­vie de celle de son frère, mit sa fa­mille dans une mi­sère ex­trême. De­ve­nue l’unique sou­tien de sa mère et de sa sœur ca­dette, Ichiyô s’essaya, pour ga­gner de quoi vivre, à écrire sous forme de feuille­tons dans la presse quo­ti­dienne. Son ini­tia­teur à ce genre as­sez nou­veau au Ja­pon fut un ré­dac­teur de l’«Asahi Shim­bun» 5Le Jour­nal du So­leil le­vant»), Na­ka­rai Tô­sui, qui de­vint son amant; mais, tra­hie et aban­don­née par ce der­nier, elle son­gea un mo­ment à re­non­cer à tout. Entre-temps, pour don­ner aux siens un peu de pain, elle ven­dait des ca­hiers dans les ruelles des uni­ver­si­tés, des ba­lais aux portes du quar­tier mal famé du Yo­shi­wara. Elle fût morte de faim si, en 1893, les ro­man­tiques du «Bun­ga­ku­kai» 6Le Monde lit­té­raire») ne s’étaient aper­çus de son gé­nie et ne lui avaient ou­vert les co­lonnes de leur re­vue. Elle y pu­blia, en l’espace de quatre ans, une quin­zaine de ré­cits et de ro­mans, avant d’être em­por­tée par la tu­ber­cu­lose. Ces œuvres, qui avaient pour ca­rac­té­ris­tique com­mune de trai­ter de la grande souf­france d’être née femme et sen­sible, furent cha­leu­reu­se­ment ac­cueillies, en par­ti­cu­lier par Mori Ôgai : «On se mo­quera peut-être de moi», dit-il 7, «en di­sant que je suis un ado­ra­teur d’Ichiyô, peu im­porte, je ne crains pas d’attribuer à celle-ci le titre de vrai poète». On peut dire, en ef­fet, qu’Ichiyô était un poète en prose. Ses œuvres ren­voient abon­dam­ment aux grandes an­tho­lo­gies d’autrefois, et quand elle écrit par exemple : «Du­rant l’hiver de ma quin­zième an­née, alors que j’ignorais tout en­core des choses de l’amour, les vents froids ap­por­tèrent avec eux une ru­meur. Bien­tôt… on ra­con­tait ici et là que j’étais amou­reuse… Les ru­meurs nous brisent comme les vagues d’une ri­vière… et nous écla­boussent»; elle trans­pose, en y ajou­tant le fré­mis­se­ment d’un cœur fé­mi­nin, af­finé par les épreuves de l’existence, le poème sui­vant du «Ko­kin-shû» : «À tra­vers le Mi­chi­noku coule la Ri­vière des Ru­meurs; moi, j’ai ac­quis la ré­pu­ta­tion de sé­duc­teur sans même avoir ren­con­tré l’être aimé; voilà qui m’est pé­nible!»

  1. En ja­po­nais «大つごもり». Haut
  2. En ja­po­nais 樋口一葉. Par­fois trans­crit Hi­gout­chi It­chiyo. Haut
  3. En ja­po­nais 樋口奈津. Haut
  4. En ja­po­nais 樋口夏子. Haut
  1. En ja­po­nais 朝日新聞. Haut
  2. En ja­po­nais 文學界. Haut
  3. Dans Claire Do­dane, «Post­face à “La Trei­zième Nuit”». Haut

Ichiyô, «Qui est le plus grand? : roman»

éd. Ph. Picquier, coll. Picquier poche, Arles

éd. Ph. Pic­quier, coll. Pic­quier poche, Arles

Il s’agit de «Qui est le plus grand?» («Ta­ke­ku­rabe» 1) de Hi­gu­chi Ichiyô 2, écri­vaine ja­po­naise, tom­bée à vingt-quatre ans comme la feuille au vent d’automne (son sur­nom Ichiyô si­gni­fie «Simple feuille») et qui, mal­gré la briè­veté de sa vie, fut un des au­teurs les plus in­té­res­sants de sa gé­né­ra­tion, an­non­çant avec éclat le re­tour des femmes sur la scène lit­té­raire de l’Empire du So­leil le­vant. De son vrai nom Hi­gu­chi Natsu 3 ou Hi­gu­chi Nat­suko 4, elle mon­tra un goût pré­coce pour la lit­té­ra­ture et don­nait déjà mieux que des es­pé­rances, lorsqu’en 1889, la mort de son père, sui­vie de celle de son frère, mit sa fa­mille dans une mi­sère ex­trême. De­ve­nue l’unique sou­tien de sa mère et de sa sœur ca­dette, Ichiyô s’essaya, pour ga­gner de quoi vivre, à écrire sous forme de feuille­tons dans la presse quo­ti­dienne. Son ini­tia­teur à ce genre as­sez nou­veau au Ja­pon fut un ré­dac­teur de l’«Asahi Shim­bun» 5Le Jour­nal du So­leil le­vant»), Na­ka­rai Tô­sui, qui de­vint son amant; mais, tra­hie et aban­don­née par ce der­nier, elle son­gea un mo­ment à re­non­cer à tout. Entre-temps, pour don­ner aux siens un peu de pain, elle ven­dait des ca­hiers dans les ruelles des uni­ver­si­tés, des ba­lais aux portes du quar­tier mal famé du Yo­shi­wara. Elle fût morte de faim si, en 1893, les ro­man­tiques du «Bun­ga­ku­kai» 6Le Monde lit­té­raire») ne s’étaient aper­çus de son gé­nie et ne lui avaient ou­vert les co­lonnes de leur re­vue. Elle y pu­blia, en l’espace de quatre ans, une quin­zaine de ré­cits et de ro­mans, avant d’être em­por­tée par la tu­ber­cu­lose. Ces œuvres, qui avaient pour ca­rac­té­ris­tique com­mune de trai­ter de la grande souf­france d’être née femme et sen­sible, furent cha­leu­reu­se­ment ac­cueillies, en par­ti­cu­lier par Mori Ôgai : «On se mo­quera peut-être de moi», dit-il 7, «en di­sant que je suis un ado­ra­teur d’Ichiyô, peu im­porte, je ne crains pas d’attribuer à celle-ci le titre de vrai poète». On peut dire, en ef­fet, qu’Ichiyô était un poète en prose. Ses œuvres ren­voient abon­dam­ment aux grandes an­tho­lo­gies d’autrefois, et quand elle écrit par exemple : «Du­rant l’hiver de ma quin­zième an­née, alors que j’ignorais tout en­core des choses de l’amour, les vents froids ap­por­tèrent avec eux une ru­meur. Bien­tôt… on ra­con­tait ici et là que j’étais amou­reuse… Les ru­meurs nous brisent comme les vagues d’une ri­vière… et nous écla­boussent»; elle trans­pose, en y ajou­tant le fré­mis­se­ment d’un cœur fé­mi­nin, af­finé par les épreuves de l’existence, le poème sui­vant du «Ko­kin-shû» : «À tra­vers le Mi­chi­noku coule la Ri­vière des Ru­meurs; moi, j’ai ac­quis la ré­pu­ta­tion de sé­duc­teur sans même avoir ren­con­tré l’être aimé; voilà qui m’est pé­nible!»

  1. En ja­po­nais «たけくらべ». Haut
  2. En ja­po­nais 樋口一葉. Par­fois trans­crit Hi­gout­chi It­chiyo. Haut
  3. En ja­po­nais 樋口奈津. Haut
  4. En ja­po­nais 樋口夏子. Haut
  1. En ja­po­nais 朝日新聞. Haut
  2. En ja­po­nais 文學界. Haut
  3. Dans Claire Do­dane, «Post­face à “La Trei­zième Nuit”». Haut