Il s’agit des « Lois des douze tables » (« Leges duodecim tabularum »), un des monuments les plus curieux du droit romain (Ve siècle av. J.-C.). Les Romains furent naturellement des législateurs. Leur génie politique, leur souci de la règle, les particularités de leur histoire intérieure les poussèrent à ce rôle qu’ils remplirent admirablement. Les « Lois des douze tables » furent chez eux leurs premières lois. On les connaît aussi sous le nom de « Lois décemvirales » (« Leges decemvirales »), parce que la compilation en avait été faite par les soins et l’autorité de dix magistrats appelés « décemvirs ». Voici comment cela arriva. Il se trouva à Rome un certain Hermodore d’Éphèse1, ami d’Héraclite. Il persuada les Romains de traduire les lois de Solon et de les adapter à l’usage de la République. Pour cela, le peuple romain créa les « décemvirs » ; et un an après être entrés en fonction, ils firent graver lesdites lois sur dix tables, qu’on exposa dans le Forum. L’année suivante, comme il y manquait quelque chose pour une jurisprudence achevée, de nouveaux « décemvirs » en firent deux autres qui, ajoutées aux dix premières, formèrent la législation des « Lois des douze tables ». Telle fut l’origine de ce monument primitif du droit romain ; de ces lois fondamentales nommées, par excellence, la « Loi » (« Lex ») ; de cette « leçon indispensable » (« carmen necessarium »2) qu’on faisait apprendre par cœur aux enfants, et dans laquelle plusieurs auteurs sérieux — Tite-Live, Cicéron, Denys d’Halicarnasse, Diodore de Sicile — crurent voir un chef-d’œuvre.
un des monuments les plus curieux du droit romain
Ne tombons pas dans l’erreur de penser que l’étude des « Lois des douze tables » en particulier, et de la jurisprudence en général, doit être reléguée dans les oubliettes des écoles de droit. Tous les amateurs de la Rome antique, tous ceux qui cultivent les lettres ou la philologie, peuvent y retrouver le vieux langage des Romains. Or, parce que la plupart des mots de ce langage ont reçu, depuis, une acception différente ; que néanmoins les poètes les emploient souvent dans leur signification primitive, la connaissance des mots de la loi est la clef de beaucoup de passages des poètes anciens, passages qu’autrement on ne pourrait pas comprendre. Ensuite, si la philosophie de Platon, cette mère des sciences, nous intéresse, c’est dans les lois que nous trouvons quelques-uns des objets les plus importants de ses méditations. Enfin, au point de vue de la morale, les lois ne nous font-elles pas aimer la vertu, lorsque nous les voyons décerner à la vérité, à la justice, à la probité les honneurs et les récompenses, tandis qu’elles fustigent le vice par l’ignominie, la prison, l’exil et la mort. Toutes ces raisons et d’autres semblables faisaient dire à Cicéron « que le petit livre des “Douze tables” — source et principe de nos lois — était préférable à tous les livres des philosophes, et par son autorité imposante et par son utilité »3.
Il n’existe pas moins de trois traductions françaises des « Lois des douze tables », mais s’il fallait n’en choisir qu’une seule, je choisirais celle de Mathieu-Antoine Bouchaud.
« Qui parentem necassit4, caput obnubito, culeoque insutus in profluentem mergitor.
Hominem mortuum in urbe ne sepelito neve urito.
Patribus cum plube connubii jus nec esto. »
— Passage dans la langue originale
« Si quelqu’un a tué son père ou sa mère, qu’après lui avoir enveloppé la tête, il soit cousu dans un sac et jeté dans l’eau.
N’inhumez ni ne brûlez dans la ville aucun mort.
Que des patriciens ne puissent s’allier par des mariages avec des plébéiens5. »
— Passage dans la traduction de Bouchaud
« Si quelqu’un a tué son père ou sa mère, qu’on lui enveloppe la tête, qu’on le couse dans un sac, et qu’on le jette dans le fleuve.
N’inhumez ni ne brûlez aucun homme dans la ville.
Que le mariage n’ait pas lieu entre les sénateurs et les plébéiens. »
— Passage dans la traduction de l’abbé Pierre-Antoine-Sulpice de Bréard-Neuville (XIXe siècle)
« Tout parricide sera jeté dans la rivière, la tête voilée, et cousu dans un sac de cuir.
Qu’on n’enterre personne, et qu’on ne brûle aucun cadavre dans l’enceinte de la ville.
Qu’il ne soit pas permis aux patriciens de se choisir des femmes dans des familles plébéiennes. »
— Passage dans la traduction d’Antoine Terrasson (XVIIIe siècle)
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- Henri Berthaut et Charles Georgin, « Histoire illustrée de la littérature latine » (éd. Librairie Hatier, Paris).