«Étude sur Nicolas de Grouchy (Nicolaus Gruchius Rothomagensis)»

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de Ni­co­las de Grou­chy 1, hu­ma­niste fran­çais d’expression la­tine, qui en­sei­gna Aris­tote en France et au Por­tu­gal, et dont Mon­taigne re­çut pen­dant quelque temps des le­çons pri­vées. Dans un vieux rè­gle­ment pour le col­lège de Bor­deaux, im­primé en 1583 et in­ti­tulé «Schola Aqui­ta­nica», on lit que «[parmi] les livres qu’on ex­plique dans la classe de phi­lo­so­phie», il ne faut pas en ex­pli­quer «d’autres que ceux d’Aristote, à l’exception… des “Præ­cep­tiones dia­lec­ticæ” (“Pré­ceptes de dia­lec­tique”) par Ni­co­las de Grou­chy, si on trouve bon de com­men­cer le cours par cet ou­vrage» 2. Et la «Schola Aqui­ta­nica» de pré­ci­ser : «De toutes les courtes in­tro­duc­tions à ce que les An­ciens ont ap­pelé “l’Instrument de la sa­gesse” [“l’Organon”], c’est la plus belle et la plus sa­vante qui ait paru, de notre temps, à l’usage des jeunes gens qui se plaisent à l’étude de la phi­lo­so­phie». Voici ce qu’on sait de ce Grou­chy ainsi vanté, le seul au­to­risé à ini­tier les jeunes gens à la pen­sée d’Aristote : Né au­tour de 1510, il fit ses études à Rouen, sa ville na­tale, et à Pa­ris, où il se lia avec un sa­vant d’origine por­tu­gaise, An­dré de Gou­véa, qui le fit ve­nir au col­lège de Bor­deaux. Ce col­lège était «très flo­ris­sant pour lors et le meilleur de France», dit Mon­taigne 3. Grou­chy y fut chargé par Gou­véa du cours de dia­lec­tique et oc­cupa cette chaire pen­dant treize ans. En 1547, sur les ins­tances du roi de Por­tu­gal, Gou­véa ren­tra dans son pays afin d’y fon­der un col­lège sur le mo­dèle de ce­lui de Bor­deaux; il amena avec lui l’élite du corps pro­fes­so­ral, à qui il donna de bons gages. Grou­chy l’y sui­vit, mais n’y resta pas très long­temps. Fa­ti­gué des luttes qu’il avait à sou­te­nir, en tant que pro­tes­tant, contre l’intolérance des jé­suites por­tu­gais, et en tant qu’étranger, contre leur ja­lou­sie, il re­tourna en France et vé­cut vingt-deux ans dans un état voi­sin de l’indigence, en s’adonnant à la pu­bli­ca­tion de ses tra­duc­tions la­tines d’Aristote. La di­rec­tion d’un col­lège à La Ro­chelle lui fut, en­fin, pro­po­sée par Jeanne III d’Albret, reine de Na­varre, qui lui écri­vit «qu’il n’est pas dé­fendu d’espérer de pou­voir po­lir un peuple rude [comme le mien] quand il est ma­nié par telles mains que sont les vôtres» 4. Et la reine de Na­varre d’ajouter : «Le pays est fort sain pour gens de votre âge, et vous y pour­rez dou­ce­ment vivre, exer­çant la vo­ca­tion en la­quelle Dieu vous ap­pelle». Notre pro­fes­seur s’empressa d’accepter cette fonc­tion et il était sur le point d’en prendre pos­ses­sion quand une fièvre ma­ligne, contrac­tée dans son voyage en plein hi­ver sur le che­min de La Ro­chelle, l’emporta en peu de jours.

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  1. On ren­contre aussi les gra­phies Ni­co­las de la Grouche et Ni­co­las Grou­chi. À ne pas confondre avec Ni­co­las de Grou­chy, sieur de La Court, qui vé­cut un siècle plus tard, et dont nous n’avons qu’un seul ou­vrage «bien peu fait pour don­ner à la pos­té­rité une haute idée de son ta­lent poé­tique et de son bon sens» (p. 159), c’est «La Béa­ti­tude, ou les Imi­tables [!] Amours de Theoys et de Ca­rite». Haut
  2. «“Schola Aqui­ta­nica”, Pro­gramme d’études du Col­lège de Guyenne au XVIe siècle, pu­blié pour la pre­mière fois par Élie Vi­net en 1583». Haut
  1. «Es­sais», liv. I, ch. XXV. Haut
  2. Dans Hip­po­lyte Au­bert de la Rüe, «Lettres de Jeanne d’Albret», p. 399. Haut