Mot-cleftraité

genre lit­té­raire

Ji Kang, «Le “Sheng wu aile lun”, [ou] Discussion sur l’absence de joie et de tristesse en musique»

dans « Esthétique de la musique en Chine médiévale : idéologies, débats et pratiques chez Ruan Ji et Ji Kang » (éd. électronique)

dans «Es­thé­tique de la mu­sique en Chine mé­dié­vale : idéo­lo­gies, dé­bats et pra­tiques chez Ruan Ji et Ji Kang» (éd. élec­tro­nique)

Il s’agit d’«Il n’est ni joie ni tris­tesse qui tienne en mu­sique» 1Sheng wu aile lun» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Dis­cus­sion sur l’absence de joie et de tris­tesse en mu­sique», «Dia­logue sur une mu­sique sans joie ni tris­tesse», «Le son n’a ni tris­tesse ni joie» ou «La mu­sique n’a ni joie ni tris­tesse». Haut
  2. En chi­nois «聲無哀樂論». Au­tre­fois trans­crit «Cheng wou ngai lo louen». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

Ji Kang, «La Description poétique du “qin”»

dans « L’Art du “qin” : deux textes d’esthétique musicale chinoise » (éd. Institut belge des hautes études chinoises, coll. Mélanges chinois et bouddhiques, Bruxelles), p. 19-46

dans «L’Art du “qin” : deux textes d’esthétique mu­si­cale chi­noise» (éd. Ins­ti­tut belge des hautes études chi­noises, coll. Mé­langes chi­nois et boud­dhiques, Bruxelles), p. 19-46

Il s’agit de «La Des­crip­tion poé­tique de la ci­thare» 1Qinfu» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «La Des­crip­tion poé­tique du “qin”», «Rhap­so­die sur la ci­thare», «“Fu” sur la ci­thare», «“Fou” du luth» ou «Éloge du luth». Haut
  2. En chi­nois «琴賦». Au­tre­fois trans­crit «K’in-fou». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

Ji Kang, «Se délivrer des sentiments personnels»

dans « La Vie et la Pensée de Hi K’ang [ou Ji Kang] (223-262 apr. J.-C.) », éd. E. J. Brill, Leyde, p. 122-130

dans «La Vie et la Pen­sée de Hi K’ang [ou Ji Kang] (223-262 apr. J.-C.)», éd. E. J. Brill, Leyde, p. 122-130

Il s’agit de «Se dé­li­vrer des sen­ti­ments per­son­nels» 1Shisi lun» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Es­sai sur la dé­prise de l’ego», «Traité sur la dé­prise du moi» ou «Se dé­li­vrer du moi». Haut
  2. En chi­nois «釋私論». Au­tre­fois trans­crit «Shih-ssû-lun», «Shih-tzu-lun» ou «Che sseu louen». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

«Réponse de Hsi K’ang [ou Ji Kang] à la réfutation par Hsiang Tseu-ts’i [ou Xiang Ziqi] de son essai sur l’art de nourrir le principe vital»

dans « Éloge de l’anarchie par deux excentriques chinois : polémiques du IIIᵉ siècle » (éd. de l’Encyclopédie des nuisances, Paris), p. 75-92

dans «Éloge de l’anarchie par deux ex­cen­triques chi­nois : po­lé­miques du IIIe siècle» (éd. de l’Encyclopédie des nui­sances, Pa­ris), p. 75-92

Il s’agit de la «Ré­ponse à la ré­fu­ta­tion (par Xiang Ziqi) de l’essai sur l’art de nour­rir le prin­cipe vi­tal» 1Da (Xiang Ziqi) nan yang­sheng lun» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Ré­ponse à la ré­fu­ta­tion du traité sur l’entretien du prin­cipe vi­tal», «Ré­ponse à la ré­fu­ta­tion du traité sur l’art de nour­rir sa vie», «Ré­ponse à la cri­tique de l’essai “Nour­rir la vie”» ou «Ré­ponse à la cri­tique du “Nour­rir la vie”». Haut
  2. En chi­nois «答(向子期)難養生論». Au­tre­fois trans­crit «Ta nan yang cheng louen». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

Ji Kang, «Essai sur l’art de nourrir le principe vital»

dans « Éloge de l’anarchie par deux excentriques chinois : polémiques du IIIᵉ siècle » (éd. de l’Encyclopédie des nuisances, Paris), p. 65-70

dans «Éloge de l’anarchie par deux ex­cen­triques chi­nois : po­lé­miques du IIIe siècle» (éd. de l’Encyclopédie des nui­sances, Pa­ris), p. 65-70

Il s’agit de l’«Es­sai sur l’art de nour­rir le prin­cipe vi­tal» 1Yang­sheng lun» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Traité sur l’entretien du prin­cipe vi­tal», «Traité sur l’art de nour­rir sa vie», «Nour­rir la vie» ou «Nour­rir le prin­cipe vi­tal». Haut
  2. En chi­nois «養生論». Au­tre­fois trans­crit «Yang cheng louen». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

Ji Kang, «Réfutation de l’essai sur le caractère inné du goût pour l’étude»

dans « Éloge de l’anarchie par deux excentriques chinois : polémiques du IIIᵉ siècle » (éd. de l’Encyclopédie des nuisances, Paris), p. 59-62

dans «Éloge de l’anarchie par deux ex­cen­triques chi­nois : po­lé­miques du IIIe siècle» (éd. de l’Encyclopédie des nui­sances, Pa­ris), p. 59-62

Il s’agit de la «Ré­fu­ta­tion de l’essai sur le ca­rac­tère inné du goût pour l’étude» 1Nan zi­ran haoxue lun» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Ré­fu­ta­tion du traité sur le goût spon­tané pour l’étude», «Cri­tique de l’essai sur l’amour na­tu­rel de l’étude», «Cri­tique de l’essai “Ai­mer les études est na­tu­rel”» ou «Cri­tique de l’essai “Il est na­tu­rel d’aimer les études”». Haut
  2. En chi­nois «難自然好學論». Au­tre­fois trans­crit «Nan tzu-jan hao hsüeh lun» ou «Nan tseu-jan hao hio louen». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

Ibn Rushd (Averroès), «La Doctrine de l’intellect matériel dans le “Commentaire moyen au ‘De anima’ d’Aristote”»

dans « Langages et Philosophie : hommage à Jean Jolivet » (éd. J. Vrin, coll. Études de philosophie médiévale, Paris), p. 281-307

dans «Lan­gages et Phi­lo­so­phie : hom­mage à Jean Jo­li­vet» (éd. J. Vrin, coll. Études de phi­lo­so­phie mé­dié­vale, Pa­ris), p. 281-307

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle du «Com­men­taire moyen sur le traité “De l’âme”» («Tal­khîs ki­tâb al-nafs» 1) d’Ibn Ru­shd 2 (XIIe siècle apr. J.-C.). De tous les phi­lo­sophes que l’islam donna à l’Espagne, ce­lui qui laissa le plus de traces dans la mé­moire des peuples, grâce à ses re­mar­quables com­men­taires sur les écrits d’Aris­tote, fut Ibn Ru­shd, éga­le­ment connu sous les noms cor­rom­pus d’Aben-Rost, Aver­roïs, Aver­rhoës ou Aver­roès 3. Dans son An­da­lou­sie na­tale, ce coin pri­vi­lé­gié du monde, le goût des sciences et des belles choses avait éta­bli au Xe siècle une to­lé­rance dont notre époque mo­derne peut à peine of­frir un exemple. «Chré­tiens, juifs, mu­sul­mans par­laient la même langue, chan­taient les mêmes poé­sies, par­ti­ci­paient aux mêmes études lit­té­raires et scien­ti­fiques. Toutes les bar­rières qui sé­parent les hommes étaient tom­bées; tous tra­vaillaient d’un même ac­cord à l’œuvre de la ci­vi­li­sa­tion com­mune», dit Re­nan. Abû Ya‘ḳûb Yû­suf 4, ca­life de l’Andalousie et contem­po­rain d’Ibn Ru­shd, fut le prince le plus let­tré de son temps. L’illustre phi­lo­sophe Ibn Tho­faïl ob­tint à sa Cour une grande in­fluence et en pro­fita pour y at­ti­rer les sa­vants de re­nom. Ce fut d’après le vœu ex­primé par Yû­suf et sur les ins­tances d’Ibn Tho­faïl qu’Ibn Ru­shd en­tre­prit de com­men­ter Aris­tote. Ja­mais ce der­nier n’avait reçu de soins aussi éten­dus, aussi sin­cères et dé­voués que ceux que lui pro­di­guera Ibn Ru­shd. L’aristotélisme ne sera plus grec; il sera arabe. «Mais la cause fa­tale qui a étouffé chez les mu­sul­mans les plus beaux germes de dé­ve­lop­pe­ment in­tel­lec­tuel, le fa­na­tisme re­li­gieux, pré­pa­rait déjà la ruine [de la phi­lo­so­phie]», dit Re­nan. Vers la fin du XIIe siècle, l’antipathie des imams et du peuple contre les études ra­tion­nelles se dé­chaîne sur toute la sur­face du monde mu­sul­man. Bien­tôt il suf­fira de dire d’un homme : «Un tel tra­vaille à la phi­lo­so­phie ou donne des le­çons d’astronomie», pour que les gens du peuple lui ap­pliquent im­mé­dia­te­ment le nom d’«im­pie», de «mé­créant», etc.; et que, si par mal­heur il per­sé­vère, ils le frappent dans la rue ou lui brûlent sa mai­son.

  1. En arabe «تلخيص كتاب النفس». Par­fois trans­crit «Tal­khiç», «Talḫīṣ» ou «Tel­khis». Haut
  2. En arabe ابن رشد. Au­tre­fois trans­crit Ibn-Ro­sched, Ebn-Roëch, Ebn Ro­schd, Ibn-Ro­shd, Ibn Ro­chd ou Ibn Rušd. Haut
  1. Par sub­sti­tu­tion d’Aven (Aben) à Ibn. Haut
  2. En arabe أبو يعقوب يوسف. Au­tre­fois trans­crit Abu Ya­qub Yu­suf, Abou Ya‘qoûb Yoû­çof ou Abou-Ya’coub You­souf. Haut

Ibn Rushd (Averroès), «L’Intelligence et la Pensée, [ou] Grand Commentaire du “De anima”, livre III»

éd. Flammarion, coll. GF, Paris

éd. Flam­ma­rion, coll. GF, Pa­ris

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle du «Grand Com­men­taire sur le traité “De l’âme”» («Sharḥ ki­tâb al-nafs» 1) d’Ibn Ru­shd 2 (XIIe siècle apr. J.-C.). De tous les phi­lo­sophes que l’islam donna à l’Espagne, ce­lui qui laissa le plus de traces dans la mé­moire des peuples, grâce à ses re­mar­quables com­men­taires sur les écrits d’Aris­tote, fut Ibn Ru­shd, éga­le­ment connu sous les noms cor­rom­pus d’Aben-Rost, Aver­roïs, Aver­rhoës ou Aver­roès 3. Dans son An­da­lou­sie na­tale, ce coin pri­vi­lé­gié du monde, le goût des sciences et des belles choses avait éta­bli au Xe siècle une to­lé­rance dont notre époque mo­derne peut à peine of­frir un exemple. «Chré­tiens, juifs, mu­sul­mans par­laient la même langue, chan­taient les mêmes poé­sies, par­ti­ci­paient aux mêmes études lit­té­raires et scien­ti­fiques. Toutes les bar­rières qui sé­parent les hommes étaient tom­bées; tous tra­vaillaient d’un même ac­cord à l’œuvre de la ci­vi­li­sa­tion com­mune», dit Re­nan. Abû Ya‘ḳûb Yû­suf 4, ca­life de l’Andalousie et contem­po­rain d’Ibn Ru­shd, fut le prince le plus let­tré de son temps. L’illustre phi­lo­sophe Ibn Tho­faïl ob­tint à sa Cour une grande in­fluence et en pro­fita pour y at­ti­rer les sa­vants de re­nom. Ce fut d’après le vœu ex­primé par Yû­suf et sur les ins­tances d’Ibn Tho­faïl qu’Ibn Ru­shd en­tre­prit de com­men­ter Aris­tote. Ja­mais ce der­nier n’avait reçu de soins aussi éten­dus, aussi sin­cères et dé­voués que ceux que lui pro­di­guera Ibn Ru­shd. L’aristotélisme ne sera plus grec; il sera arabe. «Mais la cause fa­tale qui a étouffé chez les mu­sul­mans les plus beaux germes de dé­ve­lop­pe­ment in­tel­lec­tuel, le fa­na­tisme re­li­gieux, pré­pa­rait déjà la ruine [de la phi­lo­so­phie]», dit Re­nan. Vers la fin du XIIe siècle, l’antipathie des imams et du peuple contre les études ra­tion­nelles se dé­chaîne sur toute la sur­face du monde mu­sul­man. Bien­tôt il suf­fira de dire d’un homme : «Un tel tra­vaille à la phi­lo­so­phie ou donne des le­çons d’astronomie», pour que les gens du peuple lui ap­pliquent im­mé­dia­te­ment le nom d’«im­pie», de «mé­créant», etc.; et que, si par mal­heur il per­sé­vère, ils le frappent dans la rue ou lui brûlent sa mai­son.

  1. En arabe «شرح كتاب النفس». Par­fois trans­crit «Šarḥ» ou «Scharh». Ce com­men­taire, perdu en arabe, est conservé dans la tra­duc­tion la­tine de Mi­chel Scot. Haut
  2. En arabe ابن رشد. Au­tre­fois trans­crit Ibn-Ro­sched, Ebn-Roëch, Ebn Ro­schd, Ibn-Ro­shd, Ibn Ro­chd ou Ibn Rušd. Haut
  1. Par sub­sti­tu­tion d’Aven (Aben) à Ibn. Haut
  2. En arabe أبو يعقوب يوسف. Au­tre­fois trans­crit Abu Ya­qub Yu­suf, Abou Ya‘qoûb Yoû­çof ou Abou-Ya’coub You­souf. Haut

Nârâyaṇa, «Le “Hitopadesha” : recueil de contes de l’Inde ancienne»

éd. L’Harmattan, coll. Recherches asiatiques, Paris

éd. L’Harmattan, coll. Re­cherches asia­tiques, Pa­ris

Il s’agit du «Hi­to­pa­deśa» 1Ins­truc­tion pro­fi­table» 2), re­cueil en langue sans­crite (sans doute IXe ou Xe siècle apr. J.-C.). C’est une es­pèce de traité d’éducation, où les fables sont en prose, et les sen­tences et maximes mo­rales et po­li­tiques — en vers. Les pre­mières sont comme les branches de l’arbre, et les se­condes — comme ses fruits, la par­tie vé­ri­ta­ble­ment suc­cu­lente que les lec­teurs sa­vourent avec dé­lices. Les maximes sur la science et la sa­gesse y abondent, car c’est là, comme on sait, un des thèmes fa­vo­ris des Orien­taux. «De tous les biens», dit le «Hi­to­pa­deśa» 3, «la science est le bien le plus haut, parce qu’on ne peut ni l’enlever ni en es­ti­mer le prix, et qu’à ja­mais elle est im­pé­ris­sable. Même pos­sé­dée par un quel­conque in­di­vidu, la science rap­proche du prince in­ac­ces­sible un homme… comme une ri­vière, même cou­lant en basse ré­gion, re­joint l’océan in­ac­ces­sible!» «Le fa­bu­liste in­dien», dit Théo­dore Pa­vie 4, «ne se contente donc pas de re­cueillir au pas­sage la fable qui a cours au­tour de lui, quitte à la je­ter dans un moule plus achevé. Il veut com­po­ser un code de sa­gesse à l’usage des pe­tits et des grands… parce qu’il est non seule­ment poète, mais brah­mane; et le brah­mane dans l’Inde a le droit ex­clu­sif d’enseigner et de dog­ma­ti­ser. Aussi, après avoir parlé dans les deux pre­mières par­ties de son livre — “L’Acquisition” et “La Sé­pa­ra­tion des amis” — au peuple, à la so­ciété en gé­né­ral… l’auteur du “Hi­to­pa­deśa” s’adresse har­di­ment aux rois.» Des trente-huit contes conte­nus dans le «Hi­to­pa­deśa», vingt sont ti­rés du «Pañ­ca­tan­tra». Mais comme l’auteur nous l’annonce lui-même dans son «In­tro­duc­tion» 5, le «Pañ­ca­tan­tra» n’est pas la seule source où il ait puisé ces his­toires in­gé­nieuses qu’il a, de toute fa­çon, dis­po­sées dans un ordre nou­veau et or­nées de sen­tences à sa ma­nière, qui élèvent le «Hi­to­pa­deśa» au-des­sus des autres re­cueils de fables in­diennes. Qui peut nous dire, au reste, si les livres pri­mi­tifs d’après les­quels il a tra­vaillé n’étaient pas eux-mêmes des imi­ta­tions de livres plus an­ciens? Il est à re­gret­ter que notre fa­bu­liste n’ait laissé au­cun ren­sei­gne­ment sur sa vie et sa car­rière. Il n’a donné que son nom, Nâ­râyaṇa 6, en guise de si­gna­ture : «Tant que Lakṣmî étin­cel­lera dans le cœur de l’Ennemi de Mura 7 comme l’éclair dans un nuage, tant que le mont Doré, que le so­leil in­cen­die, à un feu de fo­rêt res­sem­blera, puisse cir­cu­ler cette col­lec­tion d’histoires com­po­sée par Nâ­râyaṇa!»

  1. En sans­crit «हितोपदेश». Par­fois trans­crit «Hito-pa­deça», «Hĕĕtōpădēs», «Hi­to­pa­dès», «Hi­to­pa­desh» ou «Hi­to­pa­de­sha». Haut
  2. Au­tre­fois tra­duit «Ins­truc­tion ami­cale», «Le Bon Conseil», «L’Instruction utile», «L’Enseignement du bien», «L’Enseignement bé­né­fique» ou «Avis sa­lu­taire». Haut
  3. p. 25. Haut
  4. «L’Apologue dans la so­ciété hin­doue», p. 828. Haut
  1. p. 26. Haut
  2. En sans­crit नारायण. Par­fois trans­crit Na­rayan. Haut
  3. «Mu­râri» (मुरारि), c’est-à-dire «l’Ennemi de Mura», est le sur­nom de Viṣṇu, époux de Lakṣmî. Haut

Yang Xiong, «Maîtres Mots»

éd. Les Belles Lettres, coll. Bibliothèque chinoise, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. Bi­blio­thèque chi­noise, Pa­ris

Il s’agit des «Maîtres Mots», ou lit­té­ra­le­ment «Pro­pos mo­dèles» 1Fayan» 2), de Yang Xiong 3, un des re­pré­sen­tants mi­neurs de la lit­té­ra­ture et de la pen­sée chi­noise, imi­ta­teur des clas­siques. Il vit le jour en l’an 53 av. J.-C. et mou­rut en l’an 18 apr. J.-C. Issu d’une fa­mille noble, mais dont «les pos­ses­sions n’atteignaient pas même dix “jin” d’or», et qui «man­quait de ré­serves en grains», il réus­sit à avoir pour maîtres les meilleurs pro­fes­seurs de Shu 4 (l’actuelle pro­vince de Si­chuan) : Zhuang Zun, Li Hong et Lin Lü. Tous les trois étaient ex­perts en di­vi­na­tion, en si­no­grammes «étranges» (ceux an­té­rieurs à la gra­phie qui s’imposa sous les Qin) et en tra­di­tions confu­céennes et taoïstes. La qua­ran­taine pas­sée, il par­tit de Shu et s’en alla à la ca­pi­tale Chang’an 5 où on le mo­qua pour sa pa­role em­bar­ras­sée et sa fa­çon d’écrire en style de sa pro­vince — «un style», di­sait-on, «dé­tes­table» 6. En l’an 11 apr. J.-C., tou­jours obs­cur et pauvre mal­gré ses fonc­tions de «gen­til­homme de la porte jaune» 7huang­men lang» 8), il fut faus­se­ment ac­cusé d’avoir trempé dans le com­plot contre le nou­vel Em­pe­reur Wang Mang. En déses­poir de cause, il sauta du haut d’une tour de la Bi­blio­thèque im­pé­riale, mais sur­vé­cut à ses bles­sures et fut mis hors de cause par l’Empereur en per­sonne. Peu après, cette épi­gramme cir­cula dans la ca­pi­tale, lui re­pro­chant ses ha­bi­tudes d’ermite, son goût presque sus­pect pour la so­li­tude et le si­lence :

«“So­li­taire et si­len­cieux”
Il se jette du haut de la tour!
“Pur et tran­quille”
Il com­pose des pré­sages!
»

  1. Au­tre­fois tra­duit «Pa­roles sur la loi» ou «Les Pa­roles exem­plaires». Haut
  2. En chi­nois «法言». Par­fois trans­crit «Fa-yen», «Fa jen» ou «Fă-jan». Haut
  3. En chi­nois 揚雄. Au­tre­fois trans­crit Jang-hiong, Yang Hsiung, Yang Hyong ou Yang-hioung. Éga­le­ment connu sous les noms de Yang Ziyun (揚子雲) et de Yang Zi (揚子). Par­fois trans­crit Yang Tzu-yün, Yang Tse Yün ou Yang-tseu. Haut
  4. En chi­nois . Par­fois trans­crit Chu ou Chou. Haut
  1. Aujourd’hui Xi’an (西安). Au­tre­fois trans­crit Tch’ang-ngan. Haut
  2. Dans le père Léon Wie­ger, «His­toire des croyances re­li­gieuses et des opi­nions phi­lo­so­phiques en Chine : de­puis l’origine jusqu’à nos jours», p. 315. Haut
  3. Au­tre­fois tra­duit «gen­til­homme des portes im­pé­riales» ou «se­cré­taire des portes im­pé­riales». Haut
  4. En chi­nois 黃門郎. Au­tre­fois trans­crit «houang-men lang». Haut

Sénèque le philosophe, «L’Apocoloquintose du divin Claude»

éd. Les Belles Lettres, coll. des universités de France, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. des uni­ver­si­tés de France, Pa­ris

Il s’agit de «L’Apocoloquintose du di­vin Claude» 1Divi Clau­dii Apo­co­lo­cyn­to­sis» 2) de Sé­nèque le phi­lo­sophe 3, mo­ra­liste la­tin dou­blé d’un psy­cho­logue, dont les œuvres as­sez dé­cou­sues, mais riches en re­marques in­es­ti­mables, sont «un tré­sor de mo­rale et de bonne phi­lo­so­phie» 4. Il na­quit à Cor­doue vers 4 av. J.-C. Il en­tra, par le conseil de son père, dans la car­rière du bar­reau, et ses dé­buts eurent tant d’éclat que le prince Ca­li­gula, qui avait des pré­ten­tions à l’éloquence, ja­loux du bruit de sa re­nom­mée, parla de le faire mou­rir. Sé­nèque ne dut son sa­lut qu’à sa santé chan­ce­lante, mi­née par les veilles stu­dieuses à la lueur de la lampe. On rap­porta à Ca­li­gula que ce jeune phti­sique avait à peine le souffle, que ce se­rait tuer un mou­rant. Et Ca­li­gula se ren­dit à ces rai­sons et se contenta d’adresser à son ri­val des cri­tiques quel­que­fois fon­dées, mais tou­jours mal­veillantes, ap­pe­lant son style «du sable sans chaux» («arena sine calce»), et ses dis­cours ora­toires — «de pures ti­rades théâ­trales». Dès lors, Sé­nèque ne pensa qu’à se faire ou­blier; il s’adonna tout en­tier à la phi­lo­so­phie et n’eut d’autres fré­quen­ta­tions que des stoï­ciens. Ce­pen­dant, son père, crai­gnant qu’il ne se fer­mât l’accès aux hon­neurs, l’exhorta à re­ve­nir à la car­rière pu­blique et à ne pas bou­der les com­pro­mis­sions. En 49 apr. J.-C., Sé­nèque se vit confier par Agrip­pine l’éducation de Né­ron. On sait ce que fut Né­ron. Sé­nèque ne pou­vait pas rai­son­na­ble­ment es­pé­rer de faire un homme re­com­man­dable de ce sale gar­ne­ment, de ce triste élève, «mal élevé, va­ni­teux, in­so­lent, sen­suel, hy­po­crite, pa­res­seux» 5. Né­ron, en re­vanche, fit de notre au­teur un «ami» forcé, un col­la­bo­ra­teur mal­gré lui, le char­geant de ré­di­ger ses al­lo­cu­tions au sé­nat, dont celle où il re­pré­sen­tait le meurtre de sa mère Agrip­pine comme un bon­heur in­es­péré pour Rome. Toutes les belles le­çons, tous les bons of­fices de Sé­nèque en tant que mi­nistre de Né­ron n’aboutirent qu’à re­tar­der de quelques an­nées l’éclosion des pires mons­truo­si­tés. Alors, il cher­cha à échap­per à ses hautes, mais désho­no­rantes fonc­tions. Il de­manda de par­tir à la cam­pagne, en re­non­çant à ses biens qui, dit-il, l’exposaient à l’envie gé­né­rale. Mal­gré les re­fus de Né­ron, qui se ren­dait compte que la re­traite de son mi­nistre se­rait in­ter­pré­tée comme un désa­veu de la po­li­tique im­pé­riale, Sé­nèque ne re­cula pas. «En réa­lité, sa vertu lui fai­sait ha­bi­ter une autre ré­gion de l’univers; il n’avait [plus] rien de com­mun avec vous» («At illum in aliis mundi fi­ni­bus sua vir­tus col­lo­ca­vit, ni­hil vo­bis­cum com­mune ha­ben­tem») 6. Il se re­tira du monde et des af­faires du monde avec sa femme, Pau­line, et il pré­texta quelque ma­la­die pour ne point sor­tir de chez lui.

  1. Par­fois tra­duit «Fa­cé­tie sa­ti­rique sur la mort du Cé­sar Claude, vul­gai­re­ment ap­pe­lée Apo­ko­lo­kyn­tose», «Apo­lo­chin­tose, ou In­cu­cur­bi­ta­tion, c’est-à-dire Mé­ta­mor­phose de l’Empereur Claude en ci­trouille», «Apo­co­lo­cyn­tose, ou Dis­cours plein de mo­que­rie sur la mort de Clau­dius» ou «L’Apocolokintosis sur la mort de l’Empereur Claude». Haut
  2. Éga­le­ment connu sous les titres de «Divi Clau­dii Apo­theo­sis per sa­tu­ram» («L’Apothéose bur­lesque du di­vin Claude») et de «Lu­dus de morte Clau­dii Cæ­sa­ris» («Fan­tai­sie sur la mort du Cé­sar Claude»), le mot forgé «apo­co­lo­quin­tose» ayant déso­rienté les co­pistes qui lui ont sub­sti­tué le mot propre «apo­théose bur­lesque». Haut
  3. En la­tin Lu­cius Annæus Se­neca. Haut
  1. le comte Jo­seph de Maistre, «Œuvres com­plètes. Tome V. Les Soi­rées de Saint-Pé­ters­bourg (suite et fin)». Haut
  2. Waltz, «Vie de Sé­nèque» (éd. Per­rin, Pa­ris), p. 160. Haut
  3. «De la constance du sage», ch. XV, sect. 2. Haut

Sénèque le philosophe, «Questions naturelles. Tome II. Livres IV-VII»

éd. Les Belles Lettres, coll. des universités de France, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. des uni­ver­si­tés de France, Pa­ris

Il s’agit de «Ques­tions na­tu­relles» 1Na­tu­rales Quæs­tiones») de Sé­nèque le phi­lo­sophe 2, mo­ra­liste la­tin dou­blé d’un psy­cho­logue, dont les œuvres as­sez dé­cou­sues, mais riches en re­marques in­es­ti­mables, sont «un tré­sor de mo­rale et de bonne phi­lo­so­phie» 3. Il na­quit à Cor­doue vers 4 av. J.-C. Il en­tra, par le conseil de son père, dans la car­rière du bar­reau, et ses dé­buts eurent tant d’éclat que le prince Ca­li­gula, qui avait des pré­ten­tions à l’éloquence, ja­loux du bruit de sa re­nom­mée, parla de le faire mou­rir. Sé­nèque ne dut son sa­lut qu’à sa santé chan­ce­lante, mi­née par les veilles stu­dieuses à la lueur de la lampe. On rap­porta à Ca­li­gula que ce jeune phti­sique avait à peine le souffle, que ce se­rait tuer un mou­rant. Et Ca­li­gula se ren­dit à ces rai­sons et se contenta d’adresser à son ri­val des cri­tiques quel­que­fois fon­dées, mais tou­jours mal­veillantes, ap­pe­lant son style «du sable sans chaux» («arena sine calce»), et ses dis­cours ora­toires — «de pures ti­rades théâ­trales». Dès lors, Sé­nèque ne pensa qu’à se faire ou­blier; il s’adonna tout en­tier à la phi­lo­so­phie et n’eut d’autres fré­quen­ta­tions que des stoï­ciens. Ce­pen­dant, son père, crai­gnant qu’il ne se fer­mât l’accès aux hon­neurs, l’exhorta à re­ve­nir à la car­rière pu­blique et à ne pas bou­der les com­pro­mis­sions. En 49 apr. J.-C., Sé­nèque se vit confier par Agrip­pine l’éducation de Né­ron. On sait ce que fut Né­ron. Sé­nèque ne pou­vait pas rai­son­na­ble­ment es­pé­rer de faire un homme re­com­man­dable de ce sale gar­ne­ment, de ce triste élève, «mal élevé, va­ni­teux, in­so­lent, sen­suel, hy­po­crite, pa­res­seux» 4. Né­ron, en re­vanche, fit de notre au­teur un «ami» forcé, un col­la­bo­ra­teur mal­gré lui, le char­geant de ré­di­ger ses al­lo­cu­tions au sé­nat, dont celle où il re­pré­sen­tait le meurtre de sa mère Agrip­pine comme un bon­heur in­es­péré pour Rome. Toutes les belles le­çons, tous les bons of­fices de Sé­nèque en tant que mi­nistre de Né­ron n’aboutirent qu’à re­tar­der de quelques an­nées l’éclosion des pires mons­truo­si­tés. Alors, il cher­cha à échap­per à ses hautes, mais désho­no­rantes fonc­tions. Il de­manda de par­tir à la cam­pagne, en re­non­çant à ses biens qui, dit-il, l’exposaient à l’envie gé­né­rale. Mal­gré les re­fus de Né­ron, qui se ren­dait compte que la re­traite de son mi­nistre se­rait in­ter­pré­tée comme un désa­veu de la po­li­tique im­pé­riale, Sé­nèque ne re­cula pas. «En réa­lité, sa vertu lui fai­sait ha­bi­ter une autre ré­gion de l’univers; il n’avait [plus] rien de com­mun avec vous» («At illum in aliis mundi fi­ni­bus sua vir­tus col­lo­ca­vit, ni­hil vo­bis­cum com­mune ha­ben­tem») 5. Il se re­tira du monde et des af­faires du monde avec sa femme, Pau­line, et il pré­texta quelque ma­la­die pour ne point sor­tir de chez lui.

  1. Par­fois tra­duit «La Phi­lo­so­phie na­tu­relle, ou Mé­téo­ro­lo­gie». Haut
  2. En la­tin Lu­cius Annæus Se­neca. Haut
  3. le comte Jo­seph de Maistre, «Œuvres com­plètes. Tome V. Les Soi­rées de Saint-Pé­ters­bourg (suite et fin)». Haut
  1. Waltz, «Vie de Sé­nèque» (éd. Per­rin, Pa­ris), p. 160. Haut
  2. «De la constance du sage», ch. XV, sect. 2. Haut

Sénèque le philosophe, «Questions naturelles. Tome I. Livres I-III»

éd. Les Belles Lettres, coll. des universités de France, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. des uni­ver­si­tés de France, Pa­ris

Il s’agit de «Ques­tions na­tu­relles» 1Na­tu­rales Quæs­tiones») de Sé­nèque le phi­lo­sophe 2, mo­ra­liste la­tin dou­blé d’un psy­cho­logue, dont les œuvres as­sez dé­cou­sues, mais riches en re­marques in­es­ti­mables, sont «un tré­sor de mo­rale et de bonne phi­lo­so­phie» 3. Il na­quit à Cor­doue vers 4 av. J.-C. Il en­tra, par le conseil de son père, dans la car­rière du bar­reau, et ses dé­buts eurent tant d’éclat que le prince Ca­li­gula, qui avait des pré­ten­tions à l’éloquence, ja­loux du bruit de sa re­nom­mée, parla de le faire mou­rir. Sé­nèque ne dut son sa­lut qu’à sa santé chan­ce­lante, mi­née par les veilles stu­dieuses à la lueur de la lampe. On rap­porta à Ca­li­gula que ce jeune phti­sique avait à peine le souffle, que ce se­rait tuer un mou­rant. Et Ca­li­gula se ren­dit à ces rai­sons et se contenta d’adresser à son ri­val des cri­tiques quel­que­fois fon­dées, mais tou­jours mal­veillantes, ap­pe­lant son style «du sable sans chaux» («arena sine calce»), et ses dis­cours ora­toires — «de pures ti­rades théâ­trales». Dès lors, Sé­nèque ne pensa qu’à se faire ou­blier; il s’adonna tout en­tier à la phi­lo­so­phie et n’eut d’autres fré­quen­ta­tions que des stoï­ciens. Ce­pen­dant, son père, crai­gnant qu’il ne se fer­mât l’accès aux hon­neurs, l’exhorta à re­ve­nir à la car­rière pu­blique et à ne pas bou­der les com­pro­mis­sions. En 49 apr. J.-C., Sé­nèque se vit confier par Agrip­pine l’éducation de Né­ron. On sait ce que fut Né­ron. Sé­nèque ne pou­vait pas rai­son­na­ble­ment es­pé­rer de faire un homme re­com­man­dable de ce sale gar­ne­ment, de ce triste élève, «mal élevé, va­ni­teux, in­so­lent, sen­suel, hy­po­crite, pa­res­seux» 4. Né­ron, en re­vanche, fit de notre au­teur un «ami» forcé, un col­la­bo­ra­teur mal­gré lui, le char­geant de ré­di­ger ses al­lo­cu­tions au sé­nat, dont celle où il re­pré­sen­tait le meurtre de sa mère Agrip­pine comme un bon­heur in­es­péré pour Rome. Toutes les belles le­çons, tous les bons of­fices de Sé­nèque en tant que mi­nistre de Né­ron n’aboutirent qu’à re­tar­der de quelques an­nées l’éclosion des pires mons­truo­si­tés. Alors, il cher­cha à échap­per à ses hautes, mais désho­no­rantes fonc­tions. Il de­manda de par­tir à la cam­pagne, en re­non­çant à ses biens qui, dit-il, l’exposaient à l’envie gé­né­rale. Mal­gré les re­fus de Né­ron, qui se ren­dait compte que la re­traite de son mi­nistre se­rait in­ter­pré­tée comme un désa­veu de la po­li­tique im­pé­riale, Sé­nèque ne re­cula pas. «En réa­lité, sa vertu lui fai­sait ha­bi­ter une autre ré­gion de l’univers; il n’avait [plus] rien de com­mun avec vous» («At illum in aliis mundi fi­ni­bus sua vir­tus col­lo­ca­vit, ni­hil vo­bis­cum com­mune ha­ben­tem») 5. Il se re­tira du monde et des af­faires du monde avec sa femme, Pau­line, et il pré­texta quelque ma­la­die pour ne point sor­tir de chez lui.

  1. Par­fois tra­duit «La Phi­lo­so­phie na­tu­relle, ou Mé­téo­ro­lo­gie». Haut
  2. En la­tin Lu­cius Annæus Se­neca. Haut
  3. le comte Jo­seph de Maistre, «Œuvres com­plètes. Tome V. Les Soi­rées de Saint-Pé­ters­bourg (suite et fin)». Haut
  1. Waltz, «Vie de Sé­nèque» (éd. Per­rin, Pa­ris), p. 160. Haut
  2. «De la constance du sage», ch. XV, sect. 2. Haut