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su­jet

«Le Poète Jouan Tsi [ou Ruan Ji] (210-263)»

dans « Chine ancienne : actes du XXIXᵉ Congrès international des orientalistes » (éd. L’Asiathèque, Paris)

dans «Chine an­cienne : actes du XXIXe Congrès in­ter­na­tio­nal des orien­ta­listes» (éd. L’Asiathèque, Pa­ris)

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle de «“Ce que j’ai au cœur” de Ruan Ji» 1Ruan Ji “Yong­huai­shi”» 2) et autres œuvres des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» 3Zhu­lin qi xian» 4), un cé­nacle de sept an­ti­con­for­mistes chi­nois, hip­pies avant la lettre, qu’un même dé­goût des conven­tions et un même amour de «la spon­ta­néité na­tu­relle» («zi­ran» 5) réunis­saient vers 260 apr. J.-C. Ji Kang et Ruan Ji 6 ar­ri­vaient en tête de ce groupe d’amis in­sé­pa­rables; sui­vaient Shan Tao, Ruan Xian, Wang Rong, Liu Ling et Xiang Xiu 7. Ils par­cou­raient le bos­quet de Sha­nyang 8 en s’éloignant de l’embarras des af­faires. Ados­sés à de vieux arbres, ils en goû­taient l’ombrage. Au bord d’un ruis­seau, ils com­po­saient des poèmes. Égayés par le va-et-vient de la faune et par la splen­deur de la flore, ils jouaient des mé­lo­dies cé­lestes, sur le point de s’envoler en dan­sant dans les airs. De­man­dant à l’ivresse l’oubli de la tris­tesse, ils au­raient pu avoir pour de­vise : «Quand mon verre est plein, je le vide; quand il est vide, je le plains». Un jour que Ruan Ji, l’un des sept, était à jouer aux échecs, on vint lui ap­prendre la mort de sa mère; son ad­ver­saire vou­lut aus­si­tôt in­ter­rompre la par­tie, mais Ruan Ji, oc­cupé de son jeu, vou­lut conti­nuer. Il se fit même ap­por­ter deux vases de vin, qu’il vida, et sor­tit si saoul qu’il fal­lut le por­ter chez lui. Un contem­po­rain, Pei Kai 9, alla lui of­frir ses condo­léances et le vit fai­sant cuire de la viande de porc et sif­flant 10; il com­menta : «Ruan Ji est un homme au-delà de la mo­ra­lité or­di­naire; c’est pour­quoi il ne res­pecte pas les cé­ré­mo­nies ri­tuelles. Des gens comme vous et moi ap­par­te­nons [au contraire] au do­maine de la cou­tume…» 11 Ji Kang ren­dit alors vi­site à Ruan Ji en ap­por­tant sa ci­thare et du vin. Telle fut la pre­mière ren­contre entre ces er­mites hors des règles so­ciales, à l’origine du cé­nacle «du bos­quet de bam­bous». Pour­tant, l’attitude des sept à l’égard de la bois­son semble avoir été plus es­thé­tique que char­nelle. En voici une preuve : Le voi­sin de Ruan Ji avait une fort jo­lie femme. Elle ven­dait du vin, et Ruan Ji et Wang Rong al­laient boire chez elle; quel­que­fois, lorsque Ruan Ji était ivre, il s’endormait à côté d’elle. Au dé­but, na­tu­rel­le­ment, le mari de la jeune femme se mé­fiait beau­coup; puis, ayant ob­servé at­ten­ti­ve­ment ce qui se pas­sait, «il se ren­dit compte que Ruan Ji n’avait pas d’autre in­ten­tion»

  1. Par­fois tra­duit «Mes Pen­sées in­times», «Poèmes chan­tant le fond de mon cœur» ou «Poèmes in­times». Haut
  2. En chi­nois «阮籍詠懷詩». Haut
  3. Au­tre­fois tra­duit «Sept Amis de la fo­rêt de bam­bou», «Sept Hommes ver­tueux de la fo­rêt de bam­bous», «Sept Sages de la bam­bou­se­raie» ou «Sept Sages de Tchou-lin». Haut
  4. En chi­nois 竹林七賢. Au­tre­fois trans­crit «Tchou-lin ts’i-hien» ou «Chu-lin ch’i-hsien». Haut
  5. En chi­nois 自然. Haut
  6. En chi­nois 阮籍. Au­tre­fois trans­crit Yuan Tsi ou Jouan Tsi. Haut
  1. En chi­nois 山濤, 阮咸, 王戎, 劉伶 et 向秀 (res­pec­ti­ve­ment). Par­fois trans­crit Shan T’ao, Yüan Hsien, Wang Jung, Liu Ling et Hsiang Hsiu; ou Chan T’ao, Yuan Hien, Wang Jong, Lieou Ling et Hiang Sieou (res­pec­ti­ve­ment). Haut
  2. En chi­nois 山陽. Haut
  3. En chi­nois 裴楷. Haut
  4. Ce qui était ri­gou­reu­se­ment pros­crit dans les rites de deuil confu­céens. Haut
  5. Dans «Es­thé­tique de la mu­sique en Chine mé­dié­vale», p. 576. Haut

«Le Poète Xi Kang [ou Ji Kang] et le Club des “Sept Sages de la forêt de bambous”»

dans « Le Taoïsme et les Religions chinoises » (éd. Gallimard, coll. Bibliothèque des histoires, Paris), p. 331-340

dans «Le Taoïsme et les Re­li­gions chi­noises» (éd. Gal­li­mard, coll. Bi­blio­thèque des his­toires, Pa­ris), p. 331-340

Il s’agit de la «Chan­son de la vertu du vin» 1Jiude song» 2) et autres œuvres des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» 3Zhu­lin qi xian» 4), un cé­nacle de sept an­ti­con­for­mistes chi­nois, hip­pies avant la lettre, qu’un même dé­goût des conven­tions et un même amour de «la spon­ta­néité na­tu­relle» («zi­ran» 5) réunis­saient vers 260 apr. J.-C. Ji Kang et Ruan Ji 6 ar­ri­vaient en tête de ce groupe d’amis in­sé­pa­rables; sui­vaient Shan Tao, Ruan Xian, Wang Rong, Liu Ling et Xiang Xiu 7. Ils par­cou­raient le bos­quet de Sha­nyang 8 en s’éloignant de l’embarras des af­faires. Ados­sés à de vieux arbres, ils en goû­taient l’ombrage. Au bord d’un ruis­seau, ils com­po­saient des poèmes. Égayés par le va-et-vient de la faune et par la splen­deur de la flore, ils jouaient des mé­lo­dies cé­lestes, sur le point de s’envoler en dan­sant dans les airs. De­man­dant à l’ivresse l’oubli de la tris­tesse, ils au­raient pu avoir pour de­vise : «Quand mon verre est plein, je le vide; quand il est vide, je le plains». Un jour que Ruan Ji, l’un des sept, était à jouer aux échecs, on vint lui ap­prendre la mort de sa mère; son ad­ver­saire vou­lut aus­si­tôt in­ter­rompre la par­tie, mais Ruan Ji, oc­cupé de son jeu, vou­lut conti­nuer. Il se fit même ap­por­ter deux vases de vin, qu’il vida, et sor­tit si saoul qu’il fal­lut le por­ter chez lui. Un contem­po­rain, Pei Kai 9, alla lui of­frir ses condo­léances et le vit fai­sant cuire de la viande de porc et sif­flant 10; il com­menta : «Ruan Ji est un homme au-delà de la mo­ra­lité or­di­naire; c’est pour­quoi il ne res­pecte pas les cé­ré­mo­nies ri­tuelles. Des gens comme vous et moi ap­par­te­nons [au contraire] au do­maine de la cou­tume…» 11 Ji Kang ren­dit alors vi­site à Ruan Ji en ap­por­tant sa ci­thare et du vin. Telle fut la pre­mière ren­contre entre ces er­mites hors des règles so­ciales, à l’origine du cé­nacle «du bos­quet de bam­bous». Pour­tant, l’attitude des sept à l’égard de la bois­son semble avoir été plus es­thé­tique que char­nelle. En voici une preuve : Le voi­sin de Ruan Ji avait une fort jo­lie femme. Elle ven­dait du vin, et Ruan Ji et Wang Rong al­laient boire chez elle; quel­que­fois, lorsque Ruan Ji était ivre, il s’endormait à côté d’elle. Au dé­but, na­tu­rel­le­ment, le mari de la jeune femme se mé­fiait beau­coup; puis, ayant ob­servé at­ten­ti­ve­ment ce qui se pas­sait, «il se ren­dit compte que Ruan Ji n’avait pas d’autre in­ten­tion»

  1. Par­fois tra­duit «Éloge de la vertu du vin» ou «Hom­mage au mé­rite du vin». Haut
  2. En chi­nois «酒德頌». Au­tre­fois trans­crit «Tsieou tö hiong», «Tsieou-tö song» ou «Chiu-te sung». Haut
  3. Au­tre­fois tra­duit «Sept Amis de la fo­rêt de bam­bou», «Sept Hommes ver­tueux de la fo­rêt de bam­bous», «Sept Sages de la bam­bou­se­raie» ou «Sept Sages de Tchou-lin». Haut
  4. En chi­nois 竹林七賢. Au­tre­fois trans­crit «Tchou-lin ts’i-hien» ou «Chu-lin ch’i-hsien». Haut
  5. En chi­nois 自然. Haut
  6. En chi­nois 阮籍. Au­tre­fois trans­crit Yuan Tsi ou Jouan Tsi. Haut
  1. En chi­nois 山濤, 阮咸, 王戎, 劉伶 et 向秀 (res­pec­ti­ve­ment). Par­fois trans­crit Shan T’ao, Yüan Hsien, Wang Jung, Liu Ling et Hsiang Hsiu; ou Chan T’ao, Yuan Hien, Wang Jong, Lieou Ling et Hiang Sieou (res­pec­ti­ve­ment). Haut
  2. En chi­nois 山陽. Haut
  3. En chi­nois 裴楷. Haut
  4. Ce qui était ri­gou­reu­se­ment pros­crit dans les rites de deuil confu­céens. Haut
  5. Dans «Es­thé­tique de la mu­sique en Chine mé­dié­vale», p. 576. Haut

Ji Kang, «Le “Sheng wu aile lun”, [ou] Discussion sur l’absence de joie et de tristesse en musique»

dans « Esthétique de la musique en Chine médiévale : idéologies, débats et pratiques chez Ruan Ji et Ji Kang » (éd. électronique)

dans «Es­thé­tique de la mu­sique en Chine mé­dié­vale : idéo­lo­gies, dé­bats et pra­tiques chez Ruan Ji et Ji Kang» (éd. élec­tro­nique)

Il s’agit d’«Il n’est ni joie ni tris­tesse qui tienne en mu­sique» 1Sheng wu aile lun» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Dis­cus­sion sur l’absence de joie et de tris­tesse en mu­sique», «Dia­logue sur une mu­sique sans joie ni tris­tesse», «Le son n’a ni tris­tesse ni joie» ou «La mu­sique n’a ni joie ni tris­tesse». Haut
  2. En chi­nois «聲無哀樂論». Au­tre­fois trans­crit «Cheng wou ngai lo louen». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

Ji Kang, «La Description poétique du “qin”»

dans « L’Art du “qin” : deux textes d’esthétique musicale chinoise » (éd. Institut belge des hautes études chinoises, coll. Mélanges chinois et bouddhiques, Bruxelles), p. 19-46

dans «L’Art du “qin” : deux textes d’esthétique mu­si­cale chi­noise» (éd. Ins­ti­tut belge des hautes études chi­noises, coll. Mé­langes chi­nois et boud­dhiques, Bruxelles), p. 19-46

Il s’agit de «La Des­crip­tion poé­tique de la ci­thare» 1Qinfu» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «La Des­crip­tion poé­tique du “qin”», «Rhap­so­die sur la ci­thare», «“Fu” sur la ci­thare», «“Fou” du luth» ou «Éloge du luth». Haut
  2. En chi­nois «琴賦». Au­tre­fois trans­crit «K’in-fou». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

Ji Kang, «Se délivrer des sentiments personnels»

dans « La Vie et la Pensée de Hi K’ang [ou Ji Kang] (223-262 apr. J.-C.) », éd. E. J. Brill, Leyde, p. 122-130

dans «La Vie et la Pen­sée de Hi K’ang [ou Ji Kang] (223-262 apr. J.-C.)», éd. E. J. Brill, Leyde, p. 122-130

Il s’agit de «Se dé­li­vrer des sen­ti­ments per­son­nels» 1Shisi lun» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Es­sai sur la dé­prise de l’ego», «Traité sur la dé­prise du moi» ou «Se dé­li­vrer du moi». Haut
  2. En chi­nois «釋私論». Au­tre­fois trans­crit «Shih-ssû-lun», «Shih-tzu-lun» ou «Che sseu louen». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

«Réponse de Hsi K’ang [ou Ji Kang] à la réfutation par Hsiang Tseu-ts’i [ou Xiang Ziqi] de son essai sur l’art de nourrir le principe vital»

dans « Éloge de l’anarchie par deux excentriques chinois : polémiques du IIIᵉ siècle » (éd. de l’Encyclopédie des nuisances, Paris), p. 75-92

dans «Éloge de l’anarchie par deux ex­cen­triques chi­nois : po­lé­miques du IIIe siècle» (éd. de l’Encyclopédie des nui­sances, Pa­ris), p. 75-92

Il s’agit de la «Ré­ponse à la ré­fu­ta­tion (par Xiang Ziqi) de l’essai sur l’art de nour­rir le prin­cipe vi­tal» 1Da (Xiang Ziqi) nan yang­sheng lun» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Ré­ponse à la ré­fu­ta­tion du traité sur l’entretien du prin­cipe vi­tal», «Ré­ponse à la ré­fu­ta­tion du traité sur l’art de nour­rir sa vie», «Ré­ponse à la cri­tique de l’essai “Nour­rir la vie”» ou «Ré­ponse à la cri­tique du “Nour­rir la vie”». Haut
  2. En chi­nois «答(向子期)難養生論». Au­tre­fois trans­crit «Ta nan yang cheng louen». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

Ji Kang, «Essai sur l’art de nourrir le principe vital»

dans « Éloge de l’anarchie par deux excentriques chinois : polémiques du IIIᵉ siècle » (éd. de l’Encyclopédie des nuisances, Paris), p. 65-70

dans «Éloge de l’anarchie par deux ex­cen­triques chi­nois : po­lé­miques du IIIe siècle» (éd. de l’Encyclopédie des nui­sances, Pa­ris), p. 65-70

Il s’agit de l’«Es­sai sur l’art de nour­rir le prin­cipe vi­tal» 1Yang­sheng lun» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Traité sur l’entretien du prin­cipe vi­tal», «Traité sur l’art de nour­rir sa vie», «Nour­rir la vie» ou «Nour­rir le prin­cipe vi­tal». Haut
  2. En chi­nois «養生論». Au­tre­fois trans­crit «Yang cheng louen». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

Ji Kang, «Réfutation de l’essai sur le caractère inné du goût pour l’étude»

dans « Éloge de l’anarchie par deux excentriques chinois : polémiques du IIIᵉ siècle » (éd. de l’Encyclopédie des nuisances, Paris), p. 59-62

dans «Éloge de l’anarchie par deux ex­cen­triques chi­nois : po­lé­miques du IIIe siècle» (éd. de l’Encyclopédie des nui­sances, Pa­ris), p. 59-62

Il s’agit de la «Ré­fu­ta­tion de l’essai sur le ca­rac­tère inné du goût pour l’étude» 1Nan zi­ran haoxue lun» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Ré­fu­ta­tion du traité sur le goût spon­tané pour l’étude», «Cri­tique de l’essai sur l’amour na­tu­rel de l’étude», «Cri­tique de l’essai “Ai­mer les études est na­tu­rel”» ou «Cri­tique de l’essai “Il est na­tu­rel d’aimer les études”». Haut
  2. En chi­nois «難自然好學論». Au­tre­fois trans­crit «Nan tzu-jan hao hsüeh lun» ou «Nan tseu-jan hao hio louen». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

«Une Voix pour l’évasion : Tsi K’ang [ou Ji Kang] et sa lettre de rupture»

éd. Fata Morgana, coll. Les Immémoriaux, Saint-Clément-de-Rivière

éd. Fata Mor­gana, coll. Les Im­mé­mo­riaux, Saint-Clé­ment-de-Ri­vière

Il s’agit de la «Lettre de rup­ture avec Shan Juyuan [ou Shan Tao]» 1Yu Shan Juyuan [Tao] jue­jiao shu» 2) de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Lettre de rup­ture avec Chan Kiu-yuan [ou Chan T’ao]» ou «Lettre de re­fus à Shan Juyuan [ou Shan Tao]». Haut
  2. En chi­nois «與山巨源[濤]絕交書». Au­tre­fois trans­crit «Yü Shan Chü-yüan [T’ao] chüeh-chiao shu». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

«La Poésie de Ji Kang»

dans « Journal asiatique », vol. 248, p. 107-177 & 323-378

dans «Jour­nal asia­tique», vol. 248, p. 107-177 & 323-378

Il s’agit d’«An­goisse au ca­chot» 1You­fen shi» 2) et autres poèmes de Ji Kang 3, vir­tuose de la ci­thare, fervent taoïste, poète at­ta­chant par ses opi­nions et ses ma­nières de voir au­tant que par son ta­lent, chef de file des «Sept Sages du bos­quet de bam­bous» (fa­meux cé­nacle dont je par­le­rai ailleurs). Fier, in­dé­pen­dant, Ji Kang était un homme de la haute so­ciété, époux d’une prin­cesse, mais al­liant un amour mys­tique, presque re­li­gieux, de la na­ture et un pro­fond dé­goût pour les règles et les idées re­çues. Il pro­cla­mait haut et fort, seize siècles avant Flau­bert dans sa «Cor­res­pon­dance» 4, que «les hon­neurs désho­norent; le titre dé­grade; la fonc­tion abru­tit». Dans sa «Lettre de rup­ture avec Shan Tao», il confiait que l’éducation li­ber­taire qu’il a re­çue dans son en­fance a fait de lui «un cerf sau­vage» qui de­vient comme fou à la vue des liens ri­gides que porte au cou tout fonc­tion­naire en poste : «Un cerf sau­vage se pliera à ce qu’on lui a in­cul­qué, pourvu qu’on l’ait cap­turé et pris en main en­core jeune. Mais qu’on lui passe la bride, une fois adulte, et il se dé­bat­tra comme un dé­ment, pour faire vo­ler ses liens, quitte à ruer dans les flammes ou l’eau bouillante». Ji Kang se ju­geait, en somme, to­ta­le­ment in­apte au ser­vice man­da­ri­nal. Aux yeux de ses contem­po­rains, pour un homme de sa classe et de sa condi­tion, c’était un vé­ri­table crime de ne pas être fonc­tion­naire — un crime non seule­ment contre la tra­di­tion, mais contre les as­sises mêmes de l’autorité confu­cia­niste. Ji Kang s’en ren­dait compte, mais son es­prit ex­cen­trique et re­belle l’entraînait ir­ré­sis­ti­ble­ment vers la poé­sie, la mu­sique cé­leste, les ébats dans la na­ture, les pro­me­nades heu­reuses au cours des­quelles il se per­dait au point d’oublier le re­tour. La lé­gende se plaît à le re­pré­sen­ter va­ga­bon­dant dans le bos­quet de bam­bous de Sha­nyang où il réunis­sait ses amis, tous plus bi­zarres les uns que les autres, re­cher­chant des plantes dont il pré­pa­rait des drogues d’immortalité, et «se nour­ris­sant des va­peurs roses de l’aurore» («can xia» 5).

  1. Par­fois tra­duit «Rage de mon ca­chot», «Rage en mon ca­chot», «Rage au ca­chot», «Rage d’un pri­son­nier», «Tris­tesse obs­cure», «Ran­cœur se­crète» ou «Noire Exas­pé­ra­tion». Haut
  2. En chi­nois «幽憤詩». Au­tre­fois trans­crit «Yu-fên-shih» ou «Yeou-fen che». Haut
  3. En chi­nois 嵇康. Par­fois trans­crit Xi Kang, Ki Kang, Chi K’ang, Tsi K’ang, Hsi K’ang, Hi K’ang ou Si K’ang. Haut
  1. À Léo­nie Brainne, 10 ou 11.XII.1878; à Guy de Mau­pas­sant, 15.I.1879; à sa nièce Ca­ro­line, 28.II.1880. Haut
  2. En chi­nois 餐霞. L’une des ap­ti­tudes des im­mor­tels. Haut

«Petites Sagas islandaises»

éd. Les Belles Lettres, coll. Vérité des mythes-Sources, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. Vé­rité des mythes-Sources, Pa­ris

Il s’agit du «Dit de Gun­narr meur­trier de Þið­randi» («Gun­nars þáttr Þið­ran­da­bana») et autres sa­gas is­lan­daises. Du­rant le siècle et demi de leur ré­dac­tion, entre les an­nées 1200 et 1350 apr. J.-C., les sa­gas s’imposent par leur in­ten­sité dra­ma­tique, par leur style ra­massé et presque bourru, par leur réa­lisme dur, tem­péré d’héroïsme et d’exemples de vertu, comme la lec­ture fa­vo­rite des hommes du Nord et comme le fleu­ron de l’art nar­ra­tif eu­ro­péen. Le mot «saga» vient du verbe «segja» («dire», «ra­con­ter»), qu’on re­trouve dans toutes les langues du Nord : da­nois, «sige»; sué­dois, «säga»; al­le­mand, «sa­gen»; néer­lan­dais, «zeg­gen»; an­glais, «say». On au­rait tort ce­pen­dant d’attribuer à la Scan­di­na­vie en­tière la pa­ter­nité de ce genre qui, à une ou deux ex­cep­tions près, est ty­pi­que­ment et ex­clu­si­ve­ment is­lan­dais. Il faut avouer que l’Islande est peu connue, en de­hors de quelques spé­cia­listes. Il n’est donc pas éton­nant que le vul­gaire re­garde les ha­bi­tants de cette île loin­taine presque avec dé­dain. Il les consi­dère comme des demi-bar­bares ha­billés de peaux de bêtes. Et puis, lorsqu’on vient lui dire que ces mi­sé­rables sau­vages nous ont donné l’ensemble des sa­gas et tout ce que nous li­sons de plus an­cien sur les ci­vi­li­sa­tions nor­diques, à telle en­seigne que la vieille langue de ces ci­vi­li­sa­tions est sur­nom­mée «le vieil is­lan­dais», cela lui pa­raît un pa­ra­doxe. Mais es­sayons de ré­ta­blir la vé­rité! En 874 apr. J.-C. les Nor­vé­giens prirent pied en Is­lande, où ils ne tar­dèrent pas à éta­blir une ré­pu­blique aris­to­cra­tique. Quel était le nombre des pre­miers co­lons? C’est ce que rien n’indique. On sait seule­ment que, parmi ceux qui y construi­sirent leur de­meure, on comp­tait une ma­jo­rité de fa­milles nobles fuyant le des­pote Ha­rald Ier 1, trop lasses de sa do­mi­na­tion ou trop fières pour l’accepter : «Vers la fin de la vie de Ke­till», dit une saga 2, «s’éleva la puis­sance du roi Ha­rald à la Belle Che­ve­lure, si bien qu’aucun [sei­gneur], non plus qu’aucun autre homme d’importance, ne pros­pé­rait dans le pays si le roi ne dis­po­sait à lui seul de [toutes les] pré­ro­ga­tives… Lorsque Ke­till ap­prit que le roi Ha­rald lui des­ti­nait le même lot qu’aux autres puis­sants hommes, [il dit à ses proches] : “J’ai des in­for­ma­tions vé­ri­diques sur la haine que nous voue le roi Ha­rald…; j’ai l’impression que l’on nous donne à choi­sir entre deux choses : fuir le pays ou être tués cha­cun chez soi”». Tous ceux qui ne vou­laient pas cour­ber la tête sous le sceptre du roi, s’en al­laient à tra­vers les flots cher­cher une heu­reuse «terre de glace» où il n’y avait en­core ni au­to­rité ni mo­narque; où chaque chef de fa­mille pou­vait ré­gner en li­berté dans sa de­meure, sans avoir peur du roi : «Il y avait là de bonnes terres, et il n’y avait pas be­soin d’argent pour les ache­ter…; on y pre­nait du sau­mon et d’autres pois­sons à lon­gueur d’année», ajoute la même saga. Les émi­gra­tions de­vinrent en peu de temps si fré­quentes et si nom­breuses, que Ha­rald Ier, crai­gnant de voir la Nor­vège se dé­peu­pler, im­posa un tri­but à tous ceux qui la quit­te­raient et par­fois s’empara de leurs biens.

  1. On ren­contre aussi les gra­phies Ha­ral­dur et Ha­raldr. Haut
  1. «Saga des gens du Val-au-Sau­mon». Haut

«Quatre Sagas légendaires d’Islande»

éd. ELLUG, coll. Moyen Âge européen, Grenoble

éd. ELLUG, coll. Moyen Âge eu­ro­péen, Gre­noble

Il s’agit de la «Saga d’Egil le Man­chot et d’Asmund Tueur-de-guer­riers-fauves» («Egils Saga ein­henda ok Ás­mun­dar ber­serk­ja­bana») et autres sa­gas is­lan­daises. Du­rant le siècle et demi de leur ré­dac­tion, entre les an­nées 1200 et 1350 apr. J.-C., les sa­gas s’imposent par leur in­ten­sité dra­ma­tique, par leur style ra­massé et presque bourru, par leur réa­lisme dur, tem­péré d’héroïsme et d’exemples de vertu, comme la lec­ture fa­vo­rite des hommes du Nord et comme le fleu­ron de l’art nar­ra­tif eu­ro­péen. Le mot «saga» vient du verbe «segja» («dire», «ra­con­ter»), qu’on re­trouve dans toutes les langues du Nord : da­nois, «sige»; sué­dois, «säga»; al­le­mand, «sa­gen»; néer­lan­dais, «zeg­gen»; an­glais, «say». On au­rait tort ce­pen­dant d’attribuer à la Scan­di­na­vie en­tière la pa­ter­nité de ce genre qui, à une ou deux ex­cep­tions près, est ty­pi­que­ment et ex­clu­si­ve­ment is­lan­dais. Il faut avouer que l’Islande est peu connue, en de­hors de quelques spé­cia­listes. Il n’est donc pas éton­nant que le vul­gaire re­garde les ha­bi­tants de cette île loin­taine presque avec dé­dain. Il les consi­dère comme des demi-bar­bares ha­billés de peaux de bêtes. Et puis, lorsqu’on vient lui dire que ces mi­sé­rables sau­vages nous ont donné l’ensemble des sa­gas et tout ce que nous li­sons de plus an­cien sur les ci­vi­li­sa­tions nor­diques, à telle en­seigne que la vieille langue de ces ci­vi­li­sa­tions est sur­nom­mée «le vieil is­lan­dais», cela lui pa­raît un pa­ra­doxe. Mais es­sayons de ré­ta­blir la vé­rité! En 874 apr. J.-C. les Nor­vé­giens prirent pied en Is­lande, où ils ne tar­dèrent pas à éta­blir une ré­pu­blique aris­to­cra­tique. Quel était le nombre des pre­miers co­lons? C’est ce que rien n’indique. On sait seule­ment que, parmi ceux qui y construi­sirent leur de­meure, on comp­tait une ma­jo­rité de fa­milles nobles fuyant le des­pote Ha­rald Ier 1, trop lasses de sa do­mi­na­tion ou trop fières pour l’accepter : «Vers la fin de la vie de Ke­till», dit une saga 2, «s’éleva la puis­sance du roi Ha­rald à la Belle Che­ve­lure, si bien qu’aucun [sei­gneur], non plus qu’aucun autre homme d’importance, ne pros­pé­rait dans le pays si le roi ne dis­po­sait à lui seul de [toutes les] pré­ro­ga­tives… Lorsque Ke­till ap­prit que le roi Ha­rald lui des­ti­nait le même lot qu’aux autres puis­sants hommes, [il dit à ses proches] : “J’ai des in­for­ma­tions vé­ri­diques sur la haine que nous voue le roi Ha­rald…; j’ai l’impression que l’on nous donne à choi­sir entre deux choses : fuir le pays ou être tués cha­cun chez soi”». Tous ceux qui ne vou­laient pas cour­ber la tête sous le sceptre du roi, s’en al­laient à tra­vers les flots cher­cher une heu­reuse «terre de glace» où il n’y avait en­core ni au­to­rité ni mo­narque; où chaque chef de fa­mille pou­vait ré­gner en li­berté dans sa de­meure, sans avoir peur du roi : «Il y avait là de bonnes terres, et il n’y avait pas be­soin d’argent pour les ache­ter…; on y pre­nait du sau­mon et d’autres pois­sons à lon­gueur d’année», ajoute la même saga. Les émi­gra­tions de­vinrent en peu de temps si fré­quentes et si nom­breuses, que Ha­rald Ier, crai­gnant de voir la Nor­vège se dé­peu­pler, im­posa un tri­but à tous ceux qui la quit­te­raient et par­fois s’empara de leurs biens.

  1. On ren­contre aussi les gra­phies Ha­ral­dur et Ha­raldr. Haut
  1. «Saga des gens du Val-au-Sau­mon». Haut

«La Saga des Sturlungar»

éd. Les Belles Lettres, coll. Classiques du Nord-Racines, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. Clas­siques du Nord-Ra­cines, Pa­ris

Il s’agit de la «Saga des Stur­lun­gar» («Stur­lunga Saga») et autres sa­gas is­lan­daises. Du­rant le siècle et demi de leur ré­dac­tion, entre les an­nées 1200 et 1350 apr. J.-C., les sa­gas s’imposent par leur in­ten­sité dra­ma­tique, par leur style ra­massé et presque bourru, par leur réa­lisme dur, tem­péré d’héroïsme et d’exemples de vertu, comme la lec­ture fa­vo­rite des hommes du Nord et comme le fleu­ron de l’art nar­ra­tif eu­ro­péen. Le mot «saga» vient du verbe «segja» («dire», «ra­con­ter»), qu’on re­trouve dans toutes les langues du Nord : da­nois, «sige»; sué­dois, «säga»; al­le­mand, «sa­gen»; néer­lan­dais, «zeg­gen»; an­glais, «say». On au­rait tort ce­pen­dant d’attribuer à la Scan­di­na­vie en­tière la pa­ter­nité de ce genre qui, à une ou deux ex­cep­tions près, est ty­pi­que­ment et ex­clu­si­ve­ment is­lan­dais. Il faut avouer que l’Islande est peu connue, en de­hors de quelques spé­cia­listes. Il n’est donc pas éton­nant que le vul­gaire re­garde les ha­bi­tants de cette île loin­taine presque avec dé­dain. Il les consi­dère comme des demi-bar­bares ha­billés de peaux de bêtes. Et puis, lorsqu’on vient lui dire que ces mi­sé­rables sau­vages nous ont donné l’ensemble des sa­gas et tout ce que nous li­sons de plus an­cien sur les ci­vi­li­sa­tions nor­diques, à telle en­seigne que la vieille langue de ces ci­vi­li­sa­tions est sur­nom­mée «le vieil is­lan­dais», cela lui pa­raît un pa­ra­doxe. Mais es­sayons de ré­ta­blir la vé­rité! En 874 apr. J.-C. les Nor­vé­giens prirent pied en Is­lande, où ils ne tar­dèrent pas à éta­blir une ré­pu­blique aris­to­cra­tique. Quel était le nombre des pre­miers co­lons? C’est ce que rien n’indique. On sait seule­ment que, parmi ceux qui y construi­sirent leur de­meure, on comp­tait une ma­jo­rité de fa­milles nobles fuyant le des­pote Ha­rald Ier 1, trop lasses de sa do­mi­na­tion ou trop fières pour l’accepter : «Vers la fin de la vie de Ke­till», dit une saga 2, «s’éleva la puis­sance du roi Ha­rald à la Belle Che­ve­lure, si bien qu’aucun [sei­gneur], non plus qu’aucun autre homme d’importance, ne pros­pé­rait dans le pays si le roi ne dis­po­sait à lui seul de [toutes les] pré­ro­ga­tives… Lorsque Ke­till ap­prit que le roi Ha­rald lui des­ti­nait le même lot qu’aux autres puis­sants hommes, [il dit à ses proches] : “J’ai des in­for­ma­tions vé­ri­diques sur la haine que nous voue le roi Ha­rald…; j’ai l’impression que l’on nous donne à choi­sir entre deux choses : fuir le pays ou être tués cha­cun chez soi”». Tous ceux qui ne vou­laient pas cour­ber la tête sous le sceptre du roi, s’en al­laient à tra­vers les flots cher­cher une heu­reuse «terre de glace» où il n’y avait en­core ni au­to­rité ni mo­narque; où chaque chef de fa­mille pou­vait ré­gner en li­berté dans sa de­meure, sans avoir peur du roi : «Il y avait là de bonnes terres, et il n’y avait pas be­soin d’argent pour les ache­ter…; on y pre­nait du sau­mon et d’autres pois­sons à lon­gueur d’année», ajoute la même saga. Les émi­gra­tions de­vinrent en peu de temps si fré­quentes et si nom­breuses, que Ha­rald Ier, crai­gnant de voir la Nor­vège se dé­peu­pler, im­posa un tri­but à tous ceux qui la quit­te­raient et par­fois s’empara de leurs biens.

  1. On ren­contre aussi les gra­phies Ha­ral­dur et Ha­raldr. Haut
  1. «Saga des gens du Val-au-Sau­mon». Haut