Mot-clefallégorie de la caverne

su­jet

Ibn Thofaïl, « Hayy ben Yaqdhân : roman philosophique »

éd. Imprimerie catholique, coll. Institut d’études orientales de la Faculté des lettres d’Alger, Beyrouth

éd. Im­pri­me­rie ca­tho­lique, coll. Ins­ti­tut d’études orien­tales de la Fa­culté des lettres d’Alger, Bey­routh

Il s’agit du « Hayy ben Ya­qd­hân »1 (« Le Vi­vant fils du Vi­gi­lant »), connu en la­tin sous le titre du « Phi­lo­so­phus au­to­di­dac­tus » (« Le Phi­lo­sophe au­to­di­dacte »), traité du phi­lo­sophe an­da­lou Aboû Bekr Ibn Tho­faïl2 (XIIe siècle apr. J.-C.). « De tous les mo­nu­ments de la phi­lo­so­phie arabe », dit Er­nest Re­nan en par­lant du « Hayy ben Ya­qd­hân »3, « c’est peut-être le seul qui puisse nous of­frir plus qu’un in­té­rêt his­to­rique ». Cet ou­vrage, cu­rieux à plus d’un égard, offre six cents ans avant Da­niel De­foe un pro­to­type scien­ti­fique, phi­lo­so­phique et mys­tique du « Ro­bin­son Cru­soé ». Il s’ouvre par la sup­po­si­tion d’un en­fant qui naît sans père ni mère, dans une île dé­serte. Cet en­fant, c’est Hayy ben Ya­qd­hân. Il est adopté par une ga­zelle, qui l’allaite. Il gran­dit, ob­serve, ré­flé­chit. Doué d’une in­tel­li­gence su­pé­rieure, non seule­ment il sait in­gé­nieu­se­ment pour­voir à tous ses be­soins, mais il ar­rive bien­tôt à dé­cou­vrir de lui-même, par les seules forces de son rai­son­ne­ment, les no­tions les plus éle­vées que la science hu­maine pos­sède sur l’univers. Avec le temps, il re­con­naît que les êtres qui l’entourent ren­ferment la mul­ti­pli­cité et l’unité, at­tendu que, s’ils sont mul­tiples du côté de leurs formes, ils sont une même chose quant à l’essence. En­fin, le sys­tème au­quel il abou­tit, le conduit à cher­cher dans l’extase mys­tique l’union in­time avec Dieu, qui consti­tue à la fois la plé­ni­tude de la science hu­maine et la fé­li­cité sou­ve­raine et ab­so­lue. « Seul parmi les au­teurs arabes d’allégories phi­lo­so­phiques, Ibn Tho­faïl a su gar­der la juste me­sure, te­nir la ba­lance égale entre les [dif­fé­rents] genres [lit­té­raires] », dit Léon Gau­thier4. « [Sa] phrase est courte, alerte, d’une cor­rec­tion ab­so­lue, d’une élé­gance par­faite, d’une lu­mi­neuse clarté… Si donc il fal­lait in­di­quer à des étu­diants orien­ta­listes un mo­dèle à imi­ter de style phi­lo­so­phique arabe, nous dé­si­gne­rions sans hé­si­ter le style d’Ibn Tho­faïl, c’est-à-dire du “Hayy ben Ya­qd­hân”. S’il fal­lait leur choi­sir, en outre, le meilleur ou­vrage arabe à lire pour prendre, au prix d’un mi­ni­mum de temps et de peine, une idée d’ensemble de la phi­lo­so­phie mu­sul­mane, et de la science arabe dont elle fait la syn­thèse, nous leur nom­me­rions en­core, sans ba­lan­cer, le “Hayy ben Ya­qd­hân”… Di­sons, en un mot, qu’Ibn Tho­faïl est à tous égards, dans la pléiade des “fa­lâ­cifa”5… le mo­dèle des vul­ga­ri­sa­teurs. »

  1. En arabe « حي بن يقظان ». Par­fois trans­crit « Hay ben Yo­qth­sân », « Hai ebn Yokd­han », « Hay ibn-Iokd­han », « Hây ben Ya­qzân », « Ḥaij ibn Ia­qẓân », « Hayy ibn Yag­zan », « Hayi ibn Iak­zan » ou « Ḥayy b. Yaḳẓān ». À ne pas confondre avec le traité épo­nyme d’Avicenne, dont Ibn Tho­faïl n’a em­prunté que les noms de ses per­son­nages. Haut
  2. En arabe أبو بكر بن طفيل. Par­fois trans­crit Ebn To­phail, Aben­to­fail, Ibn al-Tou­faïl, Ibn-To­faïl, Ibn To­feïl, Ibn Ṭu­fail ou Ibn Ṭu­fayl. Haut
  3. « Aver­roès et l’Averroïsme », p. 99. Haut
  1. « Ibn Tho­faïl : sa vie, ses œuvres », p. 93 & 95-96. Haut
  2. Le mot « fa­lâ­cifa », plu­riel de « faï­la­çoûf » (فيلسوف), est une simple trans­crip­tion du mot grec « phi­lo­so­phos » (φιλόσοφος). Haut