Icône Mot-clefDenis Matringe

tra­duc­teur ou tra­duc­trice

Waris Shah, « Hīr : poème panjabi du XVIIIᵉ siècle. Tome I »

éd. Institut français, coll. Publications de l’Institut français d’indologie, Pondichéry

éd. Ins­ti­tut , coll. Pu­bli­ca­tions de l’Institut fran­çais d’indologie, Pon­di­chéry

Il s’agit de l’« de Hîr et de Rân­jhâ» («Qissa Hîr-Rân­jhâ» 1, ou plus sim­ple­ment «Hîr-Rân­jhâ» 2) dans la ver­sion de Wa­ris Shah 3. C’est pen­dant le siècle et demi entre la du der­nier grand Mo­ghol (en l’an 1707) et l’annexion du à la cou­ronne bri­tan­nique (en l’an 1849) que le poème nar­ra­tif a at­teint son apo­gée. L’on ap­pelle ce genre de poème «qissa» («his­toire»). Ti­rée le plus sou­vent de quelque lé­gende amou­reuse et tra­gique, la «qissa» a ré­sulté de la ren­contre de deux tra­di­tions : l’une, celle pu­re­ment in­dienne des my­tho­lo­giques; l’autre, celle des ro­mans en vers per­sans, dont l’ sur la et la lit­té­ra­ture pend­ja­bis a été consi­dé­rable. De toutes les «qis­sas», la plus chère au cœur des Pend­ja­bis, c’est l’«His­toire de Hîr et de Rân­jhâ». La ver­sion de Wa­ris Shah, qui se dis­tingue de celles de Da­mo­dar et de Mu­q­bal par ses nom­breuses pé­ri­pé­ties, peut être ré­su­mée ainsi : Il était une fois un chef de vil­lage qui avait huit fils, dont le ca­det, Rân­jhâ, était son pré­féré; mais il n’avait pas en­core rendu son der­nier sou­pir, que ses fils s’arrangèrent pour dé­pouiller Rân­jhâ de l’héritage et lui faire quit­ter le pays, avec sa seule flûte sous le bras. Le jeune se mit en route, le cœur af­fligé, et ar­riva à la ri­vière Che­nab. Il y vit un bac et pria le pas­seur de bien vou­loir le faire tra­ver­ser. Sé­duites par sa beauté, les deux épouses du pas­seur convain­quirent ce der­nier de le lais­ser mon­ter à bord. Rân­jhâ y trouva un beau lit déjà fait, et s’étant cou­ché, il som­bra bien­tôt dans un pro­fond som­meil. Il en fut tiré par un grand tu­multe au­tour de lui : Hîr, la fille d’un riche pro­prié­taire, ar­ri­vée au bac avec ses soixante com­pagnes, était en train de ré­pri­man­der le nau­to­nier pour avoir laissé un étran­ger souiller son lit; mais à peine Rân­jhâ eut-il ou­vert les yeux, que la de Hîr s’évanouit, et qu’elle s’éprit éper­du­ment de lui. Mal­gré l’interdiction du père de Hîr, les deux jeunes gens n’auront dé­sor­mais rien en eux qui ne soit consa­cré à l’. L’«His­toire de Hîr et de Rân­jhâ» conti­nue d’être po­pu­laire jusqu’à nos jours dans les cam­pagnes du Pend­jab, qui ont à peine changé de vi­sage. Les Mi­ra­sis ou les Bhats, races de col­por­teurs et de am­bu­lants, chantent tou­jours ce poème fa­mi­lier, comme les rhap­sodes de la chan­taient «L’Iliade» : «Lorsque les la­bou­reurs se ras­semblent sur la “dara” (la “place du vil­lage”) à la fin d’une longue jour­née de tra­vail, on est frappé de voir com­bien ils sont dé­si­reux d’entendre “Hîr et Rân­jhâ” pour apai­ser et dé­las­ser leur es­prit fa­ti­gué. Un homme qui sait bien ré­ci­ter cette his­toire est tou­jours très de­mandé. La po­pu­la­rité de ce poème ne se borne pas aux . Les ci­ta­dins [l’]écoutent avec un égal ra­vis­se­ment à la ra­dio» 4.

  1. En pend­jabi «ਕਿੱਸਾ ਹੀਰ ਰਾਂਝਾ». Par­fois trans­crit «Kissa Hir-Ran­jha» ou «Quissa Heer-Ran­jah». Icône Haut
  2. En pend­jabi «ਹੀਰ ਰਾਂਝਾ». Par­fois trans­crit «Hīr-Rāṃjhā», «Hir-Rand­jha», «Hîr-Rân­j­han», «Hir-Ra­jha» ou «Heer-Ran­jha». Icône Haut
  1. En pend­jabi ਵਾਰਿਸ ਸ਼ਾਹ. Par­fois trans­crit Wa­ris Schah ou Vā­ris̤ Śāh. Icône Haut
  2. Dans Ha­kim Mo­ham­med Said, «Hir et Ran­jha, les amants du Pend­jab», p. 32. Icône Haut