Mot-clefcomédie latine

su­jet

« Sentences de Publius Syrus »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit des « Sen­tences du mime Pu­bli­lius Sy­rus » (« Pu­bli­lii Syri mimi Sen­ten­tiæ »). J’imagine que beau­coup de lec­teurs, même parmi les ama­teurs des lettres la­tines, n’ont ja­mais en­tendu par­ler de Pu­bli­lius Sy­rus1. Et pour­tant, le nom de cet au­teur de co­mé­dies bouf­fonnes nous est venu es­corté des éloges de la pos­té­rité ; car quatre siècles après sa mort, on le fai­sait lire en­core dans les écoles pu­bliques, pour ini­tier la jeu­nesse aux beau­tés de la langue la­tine. Au dire de saint Jé­rôme, Pu­bli­lius « ré­gna sur la scène de Rome » (« Romæ sce­nam te­net ») de Cé­sar à Au­guste, et sa re­nom­mée fut loin de pé­rir avec lui. Sé­nèque lui fait plu­sieurs em­prunts et re­vient sou­vent sur ses qua­li­tés : c’est, dit-il2, « un poète plus vi­gou­reux que les tra­giques et les co­miques, quand il re­nonce aux plates bouf­fon­ne­ries du mime et aux mots faits pour le pu­blic des [der­niers] gra­dins ». « Com­bien de vers », écrit-il ailleurs3, « d’une frappe ad­mi­rable, en­fouis dans la col­lec­tion de nos mimes ! Que de pen­sées de Pu­bli­lius qui de­vraient avoir pour in­ter­prètes non des pitres dé­chaus­sés, mais des tra­gé­diens en co­thurnes ! » (Les ac­teurs de co­mé­dies bouf­fonnes jouaient pieds nus.) Ma­crobe et Aulu-Gelle, qui ont le plus contri­bué, avec Sé­nèque, à nous conser­ver ces « Sen­tences », ne les vantent pas moins que lui. Pé­trone, qui en ad­mire l’auteur jusqu’à le mettre en pa­ral­lèle avec Ci­cé­ron, n’accorde à ce der­nier que la su­pé­rio­rité de l’éloquence : « Je crois », dit-il, « que Pu­bli­lius était plus hon­nête » (« ho­nes­tio­rem fuisse »). En­fin, La Bruyère a semé dans ses « Ca­rac­tères », qui sont sans contre­dit l’un des plus beaux ou­vrages que nous ayons en langue fran­çaise, la meilleure par­tie de ces « Sen­tences » : il en a tra­duit quelques-unes, il a donné aux autres un peu plus d’étendue, en les pré­sen­tant sous plu­sieurs angles dif­fé­rents. Je n’en rap­por­te­rai ici que deux exemples. 1o Pu­bli­lius : « La crainte de la mort est plus cruelle que la mort elle-même » (« Mor­tem ti­mere cru­de­lius est quam mori »). La Bruyère : « Il est plus dur d’appréhender la mort que de la souf­frir ». 2o Pu­bli­lius : « La vie, par elle-même, est courte, mais les mal­heurs la rendent bien longue » (« Bre­vis ipsa vita est, sed ma­lis fit lon­gior »). La Bruyère : « La vie est courte, si elle ne mé­rite ce nom que lorsqu’elle est agréable ».

  1. On ren­contre aussi les gra­phies Pu­blius Sy­rus, Pu­bli­lius Lo­chius et Pu­blia­nus, dit Pu­blian. Haut
  2. « Dia­logues. Tome IV. De la Pro­vi­dence • De la constance du sage • De la tran­quillité de l’âme • De l’oisiveté », liv. IX, ch. XI, sect. 8. Haut
  1. « Lettres à Lu­ci­lius », lettre VIII, sect. 8. Haut

Térence, « Les Comédies »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit des six « Co­mé­dies » (« Co­mœ­diæ ») de Té­rence1, dra­ma­turge la­tin, qui na­quit dans la condi­tion la plus vile et la plus dé­tes­table — celle d’esclave. Sans fa­mille et sans nom, il était dé­si­gné sous le sur­nom d’Afer (« l’Africain »), ce qui per­met de sup­po­ser qu’il était Car­tha­gi­nois de nais­sance. Ce­pen­dant, la pu­reté de son lan­gage — pu­reté ad­mi­rée par ses contem­po­rains — prouve que, s’il n’est pas né à Rome, il y fut amené dès sa plus tendre en­fance. Acheté ou reçu en pré­sent par un riche sé­na­teur, Te­ren­tius Lu­ca­nus, il fut élevé par ce der­nier avec un grand soin et af­fran­chi de bonne heure. Cet acte gé­né­reux porta bon­heur à Te­ren­tius Lu­ca­nus. Le nom du jeune af­fran­chi, Té­rence, ren­dit im­mor­tel ce­lui du vieux maître. C’était le IIe siècle av. J.-C. — le siècle où, se­lon le mot d’Horace, « la Grèce, vain­cue par les armes, triom­phait de ses vain­queurs par ses charmes et por­tait les arts dans la sau­vage Ita­lie »2. La culture grecque était plus que ja­mais à l’honneur. Té­rence y fut ini­tié, comme tous les brillants aris­to­crates qui fré­quen­taient la mai­son sé­na­to­riale. Ce sont eux sans doute qui l’encouragèrent vers la car­rière lit­té­raire, où ses goûts et ses ta­lents l’entraînaient. Il se tourna donc vers le genre de la co­mé­die athé­nienne, et sur­tout de la co­mé­die nou­velle, ap­pe­lée la « pal­liata ». Ses six pièces sont toutes imi­tées de Mé­nandre et d’Apollodore de Ca­ryste ; elles sont grecques par l’intrigue, par la pen­sée, par le ca­rac­tère des per­son­nages, par le titre même. Après les avoir don­nées sur le théâtre de Rome, Té­rence par­tit pour la Grèce afin d’étudier d’encore plus près les mœurs de cette contrée dont il re­pro­dui­sait l’esprit sur la scène. Com­bien de temps dura ce voyage ? Té­rence par­vint-il à Athènes ? On l’ignore. Ce qu’il y a de cer­tain, c’est qu’il ne re­vint ja­mais. Et comme on veut tou­jours don­ner quelque cause ex­tra­or­di­naire à la dis­pa­ri­tion d’un grand per­son­nage, on n’a pas man­qué d’attribuer celle de Té­rence au cha­grin que lui au­rait causé la perte de cent huit ma­nus­crits lors d’un nau­frage : re­cueilli par de pauvres gens, le res­capé se­rait tombé ma­lade, et le cha­grin au­rait hâté sa der­nière heure.

  1. En la­tin Pu­blius Te­ren­tius Afer. Au­tre­fois trans­crit Thé­rence. Haut
  1. « Épîtres », liv. II, poème 1, v. 156-157. Haut