Il s’agit de la « Bibliothèque »1, le plus ancien abrégé qui nous soit parvenu sur la mythologie de la Grèce, ses dieux et ses héros (Ie ou IIe siècle apr. J.-C.). C’est un ouvrage relativement court, même en tenant compte de la perte d’une partie du troisième et dernier livre, qu’on ne connaît que par des « épitomés » (des « abrégés de l’abrégé »). Longtemps attribué au grammairien Apollodore d’Athènes, qui s’était occupé de mythologie, on est aujourd’hui certain qu’il n’est pas de lui. Il débute par l’origine des dieux et du monde, et va jusqu’aux pérégrinations des héros revenant de Troie. Il se termine donc par les événements qui forment la limite entre la fable et l’histoire. Bien qu’il soit d’un grand secours pour l’intelligence de certains auteurs anciens, cet ouvrage de vulgarisation ne reproduit pas le vrai esprit des mythes et est même considéré par les critiques comme médiocre, sans réel enthousiasme, sans génie. Pleines de vie, de sens, de vérité pour les poètes et les artistes qui les avaient animées de leur souffle, les fables mythologiques ne sont plus, dans la « Bibliothèque », que des lettres mortes, des objets de curiosité scolaire et non de foi. Il est évident que les Grecs cessèrent, dès cette époque, de croire en leurs dieux, et que les vénérables légendes nées de l’imagination primitive perdirent toute leur signification. Il faut considérer la « Bibliothèque » comme un catalogue de légendes desséchées et conservées en herbier, un inventaire fossilisé. Je ne veux pas nier ici l’utilité de ce genre d’ouvrage ; mais quel sacrilège, au point de vue religieux, de dépouiller de tous leurs ornements et de tout leur éclat les fables qui avaient inspiré les productions immortelles de la poésie et de l’art, et de les réduire à de viles listes de faits, lieux, alliances et filiations, « qui ressemblent aux mythes primitifs comme de vieilles fleurs en papier, jaunies et enfumées, ressemblent aux fleurs des champs »2.
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