Il s’agit d’Hermagoras de Temnos 1 et d’Hermagoras disciple de Théodore 2, deux figures majeures de la rhétorique grecque.
Le premier Hermagoras, également connu sous le surnom d’Hermagoras l’Ancien 3, professait en grec probablement à l’époque où les rhéteurs n’étaient pas encore bien vus à Rome, c’est-à-dire au IIe siècle av. J.-C. Isidore le cite, avec Gorgias et Aristote, comme l’un des inventeurs de la rhétorique. Cicéron et Ælius Théon disent de lui qu’il prenait pour sujets de controverse des questions sans personnes définies ni circonstances précises, comme : « Y a-t-il un bien à part la vertu ? », « Les sens sont-ils fiables ? », « Quelle est la forme du monde ? », « Doit-on se marier ? », « Doit-on faire des enfants ? », etc. questions qu’il serait tout aussi facile de ranger parmi les thèses d’un philosophe que d’un rhéteur. Ce même Hermagoras publia un traité de rhétorique que Cicéron devait avoir entre les mains, puisqu’il en parle maintes fois, et qui « n’était pas tout à fait sans mérite » (« non mendosissime scripta ») ; c’était un abrégé des rhétoriques antérieures où « l’intelligence et le soin » (« ingeniose et diligenter ») ne faisaient pas défaut, et où, de plus, l’auteur « donnait plus d’une preuve de nouveauté » (« nonnihil ipse quoque novi protulisse »). Ailleurs, Cicéron parle de cet ouvrage dans ces termes : « Il donne des règles et des préceptes oratoires précis et sûrs qui, s’ils présentent très peu d’apprêt — car le style en est sec —, suivent malgré tout un ordre, et comportent certaines méthodes qui ne permettent pas de se fourvoyer quand on parle ». Ce traité, en six volumes, s’est malheureusement perdu assez vite ; il nous est connu uniquement sous la forme de témoignages, non de fragments.
deux figures majeures de la rhétorique grecque
Le deuxième Hermagoras a souvent été confondu avec le premier. Quintilien est le seul à le distinguer correctement d’Hermagoras de Temnos. Cet homonyme fréquenta de bonne heure l’école de Théodore de Gadara, le professeur renommé du jeune Tibère, et devenu professeur à son tour, il composa sur la rhétorique quatre livres aujourd’hui perdus, mais dont l’encyclopédie Souda a conservé les titres : « Sur l’élaboration » (« Peri exergasias » 4), « Sur la convenance » (« Peri prepontos » 5), « Sur l’expression » (« Peri phraseôs » 6) et « Sur les figures » (« Peri schêmatôn » 7). Il tint école à Rome sous l’Empereur Auguste, avec un autre rhéteur nommé Cæcilius 8, et mourut dans un âge fort avancé. On rapporte qu’il se plaisait à développer longuement une figure, en sorte qu’il frappait ses auditeurs s’ils suivaient attentivement, mais les embrouillait s’ils étaient froids ou distraits. On cite de lui ce début d’une figure : « Pauvres, fondons à part une ville pour nous ; car les riches, dans la leur… ». Quoi qu’il en soit, son enseignement a laissé un assez large souvenir dans la critique du temps : outre l’admiration de la jeunesse qui « brûlait de l’imiter » (« ad imitationem ejus ardescere »), il a reçu plus d’une mention honorable dans Sénèque le père et dans Quintilien, deux des juges les plus compétents sur cette période.
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- Émile Amiel, « L’Éloquence sous les Césars » (XIXe siècle) [Source : Google Livres].