«Le Livre des récompenses et des peines»

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du «Livre des ré­com­penses et des peines» («Tai­shang ga­nying­pian» 1, lit­té­ra­le­ment «Écrit sur la ré­tri­bu­tion par le Très-Haut» 2), pré­cis de mo­rale syn­cré­tique chi­noise, mê­lant croyances taoïstes, éthique confu­céenne et doc­trine du karma (XIIe siècle apr. J.-C.). Le «Ca­non taoïste» («Dao­zang» 3) com­prend une mul­ti­tude de trai­tés de mo­rale pour ex­hor­ter les lec­teurs à la plus haute vertu et leur en­sei­gner que «la ré­com­pense du bien et la pu­ni­tion du mal sont comme l’ombre qui suit le corps» 4; mais il n’y a au­cun parmi ces trai­tés qui ait joui d’une aussi grande po­pu­la­rité, et qu’on ait ré­im­primé aussi sou­vent que «Le Livre des ré­com­penses et des peines». Ce­pen­dant, il est rare qu’on l’ait ré­im­primé d’une ma­nière pu­re­ment dés­in­té­res­sée. Sa pro­pa­ga­tion était, d’après la su­per­sti­tion po­pu­laire, une œuvre mé­ri­toire et un mer­veilleux moyen d’obtenir ce qu’on dé­si­rait. En dis­tri­buant vingt ou trente exem­plaires du «Livre des ré­com­penses et des peines», on ob­te­nait ou bien une longue vie, ou bien la gué­ri­son d’un père, ou bien la nais­sance d’un fils. «Ho­no­rez-le donc», dit la pré­face d’un édi­teur chi­nois 5, «et met­tez-le en pra­tique, et vous aug­men­te­rez votre bon­heur, aussi bien que la du­rée de votre vie. En un mot, tout ce que vous sou­hai­te­rez vous sera ac­cordé.» Il n’en reste pas moins que c’est un beau et lu­mi­neux livre, rem­pli de conseils mo­raux et de sen­tences des vieux sages, pour ap­prendre à l’être hu­main d’être bon vis-à-vis d’autrui; de se te­nir dans l’amour et le res­pect; de dé­li­vrer les autres de leurs dan­gers et de les as­sis­ter dans leurs né­ces­si­tés; d’abandonner ses ri­chesses pour faire des heu­reux; de ne pas faire souf­frir non seule­ment un ani­mal, mais en­core un in­secte. Un com­men­ta­teur et poète com­pare ce livre à «une barque de mi­sé­ri­corde sur la­quelle nous pou­vons pas­ser une mer im­mense» ou bien «un arbre qui porte ses branches jusque dans les nues [et ou­vrant] nos cœurs aux plus dignes ef­forts» 6.

Il n’existe pas moins de trois tra­duc­tions fran­çaises du «Livre des ré­com­penses et des peines», mais s’il fal­lait n’en choi­sir qu’une seule, je choi­si­rais celle d’Abel Ré­mu­sat.

「太上曰:『禍福無門,惟人自召.善惡之報,如影隨形』.是以天地有司過之神.依人所犯輕重,以奪人算.」

 Dé­but dans la langue ori­gi­nale

«La su­blime doc­trine dit : “Le mal­heur et la fé­li­cité ne sont point in­dif­fé­rem­ment abor­dables. L’homme seul les at­tire sur sa tête. La ré­com­pense du bien et la pu­ni­tion du mal sont comme l’ombre qui suit le corps (et se pro­por­tionne à sa forme et à sa gran­deur)”. C’est pour cela qu’il y a dans le ciel et sur la terre des es­prits qui pré­sident aux pé­chés et qui se règlent sur la lé­gè­reté et la gra­vité des fautes des hommes pour leur re­tran­cher des pé­riodes de vie.»
— Dé­but dans la tra­duc­tion de Ré­mu­sat

«Le Très-Haut dit : “Les ma­lé­dic­tions et les bé­né­dic­tions (ac­cor­dées par les dieux) ne viennent pas par leurs propres voies, c’est chaque homme qui les pro­voque (par ses ac­tions); la ré­tri­bu­tion des bonnes et mau­vaises ac­tions sur­vient aussi sû­re­ment que l’ombre suit le corps”. Aussi, dans tout l’univers, il existe des dieux en charge de sur­veiller les fautes des hu­mains, et qui dé­duisent des an­nées de vie de leur des­tin à chaque trans­gres­sion, en fonc­tion de sa gra­vité.»
— Dé­but dans la tra­duc­tion de M. Vincent Goos­saert («Ver­sets du Très-Haut sur les ef­fets des actes» dans «Livres de mo­rale ré­vé­lés par les dieux», éd. Les Belles Lettres, coll. Bi­blio­thèque chi­noise, Pa­ris)

«Thaï-chang dit : “Le mal­heur et le bon­heur de l’homme ne sont point dé­ter­mi­nés d’avance; seule­ment l’homme s’attire lui-même l’un ou l’autre par sa conduite. La ré­com­pense du bien et la pu­ni­tion du mal les suivent comme l’ombre qui suit les corps”. C’est pour cela qu’il y a au ciel et sur la terre des es­prits char­gés de re­cher­cher les fautes des hommes, et qui, sui­vant la lé­gè­reté ou la gra­vité de ces fautes, re­tranchent de leur vie des pé­riodes de cent jours.»
— Dé­but dans la tra­duc­tion de Sta­nis­las Ju­lien («Le Livre des ré­com­penses et des peines», XIXe siècle)

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  1. En chi­nois «太上感應篇». Par­fois trans­crit «Thaï-chang kan ing phian», «Thaï chang kan yng pian», «Tae shang kan ying peen», «T’ai shang kan yin p’ien», «Thaï-chang kan ing phian», «Thaï-chang-kan-ing-pien» ou «Thai chang kan ying phien». Haut
  2. Par­fois tra­duit «Traité du Très-Haut sur la ré­tri­bu­tion des actes». Haut
  3. En chi­nois «道藏». Au­tre­fois trans­crit «Tao-tchang» ou «Tao Tsang». Haut
  1. p. 21. Haut
  2. p. 19. Haut
  3. p. 20. Haut