Il s’agit des « Entretiens de Linji » (« Linji yulu » 1, ou plus simplement « Linji lu » 2). L’école de Linji Yixuan 3, maître zen, est connue par ce recueil de paroles composé après la mort du maître. Rebelle à tout savoir, farouche à toute vision intellectuelle qu’elle décrivait comme une « taie sur l’œil » cette école devint célèbre en Chine au IXe et Xe siècle apr. J.-C. avant de se répandre au Japon où elle persiste jusqu’à nos jours sous le nom d’école Rinzai. L’usage du bâton (en chinois « bang », en japonais « bô » 4) et de l’exclamation « khât ! » (en japonais « katsu ! » 5) est caractéristique de Linji, lequel frappait ses disciples et leur criait, comme s’il désirait les faire parvenir d’un coup à la réalisation subite. Dans des termes virulents, qui allaient jusqu’au blasphème, il prêchait le meurtre spirituel et le renversement de toutes les valeurs : « Si vous rencontrez un Bouddha, tuez le Bouddha ! Si vous rencontrez un patriarche, tuez le patriarche ! » 6 Et plus loin : « Je vous le dis : il n’y a pas de Bouddha, il n’y a pas de Loi ; pas de pratiques à cultiver, pas de fruits à éprouver. Que voulez-vous donc tant chercher auprès d’autrui ?… Qu’est-ce qui vous manque ? C’est vous, adeptes, qui êtes là devant mes yeux, c’est vous-mêmes qui ne différez en rien du Bouddha-patriarche ! Mais vous n’avez pas confiance, et vous cherchez au-dehors » 7. Lui demandait-on quel était le bien le plus précieux pour l’homme, Linji répondait : « Se tenir dans l’ordinaire et sans affaires : chier et pisser, se vêtir et manger » 8. Et aussi : « Être sans affaires et rester assis dans [son] monastère, les pieds croisés au coin de [sa] banquette » 9. À chaque page, cet idéal de l’homme sans affaires se retrouve, poussé jusqu’à la puérilité. J’avoue, pour ma part, qu’il ne me convainc pas. Car, même à supposer que l’homme qui se garde de rien faire soit le plus heureux, ne vaut-il pas mieux être honnête et utile, qu’heureux et sans affaires ? L’homme de bien n’a-t-il pas droit, comme les autres, au noble travail ? Ne peut-il pas se subordonner à une grande cause sociale, au lieu de jouir dans son coin sans se soucier que ce soit aux dépens des autres ? La fin divine doit-elle donc être une fin égoïste ?
livres sacrés
sujet
« Sri Gourou Granth Sahib. Tome IV »
Il s’agit de l’« Adi Granth » 1 (le « Premier Livre ») ou « Gourou Granth Sahib » 2 (le « Maître Livre »), le livre saint des sikhs, compilé par le cinquième gourou Arjan Dev 3, puis révisé et achevé par le dixième gourou Gobind Singh 4. Les sikhs le désignent souvent sous la vague appellation de « Granth » (le « Livre »), de même que les chrétiens citent le leur sous celle de « Bible » (« Biblia » signifiant les « Livres »). Le « Granth » est une œuvre tout à fait unique par rapport aux canons des autres religions. Ce qui l’en distingue, c’est qu’il se présente comme une fascinante anthologie poétique, qui ne contient pas seulement les psaumes et les hymnes de ses propres fondateurs, comme gourou Nanak 5, mais aussi ceux de poètes mystiques antérieurs : Kabîr, Jayadeva, Bhikhan, Nâm-dev… En tout, quinze poètes non sikhs (appelés « bhagats » 6) sont incorporés au « Granth », dont le plus ancien est Sheikh Farid né en 1175 apr. J.-C. Les gourous, eux, vécurent entre 1469 et 1708 apr. J.-C. Voilà donc plus de cinq siècles de poésie indienne, totalisant 3 384 poèmes ou 15 575 strophes, et mêlant le pendjabi à diverses autres langues : le sanscrit, le persan, le hindi… Une tradition universellement reçue rapporte que le dixième gourou, à son lit de mort, ne nomma pas de successeur, mais décida que la Parole du « Granth » serait désormais l’éternel gourou : « Ici-bas, tous les sikhs sont chargés de reconnaître le “Granth” comme leur gourou. Reconnais “Gourou Granth Sahib” comme la personne visible des gourous. Ceux qui cherchent à rencontrer le Seigneur dans la Parole telle qu’elle s’est manifestée dans le livre, Le découvriront » 7. Depuis ce jour-là, le « Granth » reste l’unique autorité des sikhs, ainsi que le seul objet de vénération que l’on voit dans leurs lieux de culte. Leur temple central, qui s’élève toujours à Amritsar 8, au milieu de l’étang sacré (Amritsar signifiant « étang de l’immortalité »), ne renferme aucune idole, mais seulement des exemplaires du « Granth » déposés sur des coussins de soie : « Jour et nuit, sans désemparer, comme pour réaliser une sorte d’adoration perpétuelle, des “granthis” chantent sous ces voûtes révérées des fragments du livre saint en s’accompagnant d’instruments à cordes. Ailleurs les sikhs ont simplement des salles d’édification, où un “granthi” leur lit… le texte sacré », explique Albert Réville
« Sri Gourou Granth Sahib. Tome III »
Il s’agit de l’« Adi Granth » 1 (le « Premier Livre ») ou « Gourou Granth Sahib » 2 (le « Maître Livre »), le livre saint des sikhs, compilé par le cinquième gourou Arjan Dev 3, puis révisé et achevé par le dixième gourou Gobind Singh 4. Les sikhs le désignent souvent sous la vague appellation de « Granth » (le « Livre »), de même que les chrétiens citent le leur sous celle de « Bible » (« Biblia » signifiant les « Livres »). Le « Granth » est une œuvre tout à fait unique par rapport aux canons des autres religions. Ce qui l’en distingue, c’est qu’il se présente comme une fascinante anthologie poétique, qui ne contient pas seulement les psaumes et les hymnes de ses propres fondateurs, comme gourou Nanak 5, mais aussi ceux de poètes mystiques antérieurs : Kabîr, Jayadeva, Bhikhan, Nâm-dev… En tout, quinze poètes non sikhs (appelés « bhagats » 6) sont incorporés au « Granth », dont le plus ancien est Sheikh Farid né en 1175 apr. J.-C. Les gourous, eux, vécurent entre 1469 et 1708 apr. J.-C. Voilà donc plus de cinq siècles de poésie indienne, totalisant 3 384 poèmes ou 15 575 strophes, et mêlant le pendjabi à diverses autres langues : le sanscrit, le persan, le hindi… Une tradition universellement reçue rapporte que le dixième gourou, à son lit de mort, ne nomma pas de successeur, mais décida que la Parole du « Granth » serait désormais l’éternel gourou : « Ici-bas, tous les sikhs sont chargés de reconnaître le “Granth” comme leur gourou. Reconnais “Gourou Granth Sahib” comme la personne visible des gourous. Ceux qui cherchent à rencontrer le Seigneur dans la Parole telle qu’elle s’est manifestée dans le livre, Le découvriront » 7. Depuis ce jour-là, le « Granth » reste l’unique autorité des sikhs, ainsi que le seul objet de vénération que l’on voit dans leurs lieux de culte. Leur temple central, qui s’élève toujours à Amritsar 8, au milieu de l’étang sacré (Amritsar signifiant « étang de l’immortalité »), ne renferme aucune idole, mais seulement des exemplaires du « Granth » déposés sur des coussins de soie : « Jour et nuit, sans désemparer, comme pour réaliser une sorte d’adoration perpétuelle, des “granthis” chantent sous ces voûtes révérées des fragments du livre saint en s’accompagnant d’instruments à cordes. Ailleurs les sikhs ont simplement des salles d’édification, où un “granthi” leur lit… le texte sacré », explique Albert Réville
« Sri Gourou Granth Sahib. Tome II »
Il s’agit de l’« Adi Granth » 1 (le « Premier Livre ») ou « Gourou Granth Sahib » 2 (le « Maître Livre »), le livre saint des sikhs, compilé par le cinquième gourou Arjan Dev 3, puis révisé et achevé par le dixième gourou Gobind Singh 4. Les sikhs le désignent souvent sous la vague appellation de « Granth » (le « Livre »), de même que les chrétiens citent le leur sous celle de « Bible » (« Biblia » signifiant les « Livres »). Le « Granth » est une œuvre tout à fait unique par rapport aux canons des autres religions. Ce qui l’en distingue, c’est qu’il se présente comme une fascinante anthologie poétique, qui ne contient pas seulement les psaumes et les hymnes de ses propres fondateurs, comme gourou Nanak 5, mais aussi ceux de poètes mystiques antérieurs : Kabîr, Jayadeva, Bhikhan, Nâm-dev… En tout, quinze poètes non sikhs (appelés « bhagats » 6) sont incorporés au « Granth », dont le plus ancien est Sheikh Farid né en 1175 apr. J.-C. Les gourous, eux, vécurent entre 1469 et 1708 apr. J.-C. Voilà donc plus de cinq siècles de poésie indienne, totalisant 3 384 poèmes ou 15 575 strophes, et mêlant le pendjabi à diverses autres langues : le sanscrit, le persan, le hindi… Une tradition universellement reçue rapporte que le dixième gourou, à son lit de mort, ne nomma pas de successeur, mais décida que la Parole du « Granth » serait désormais l’éternel gourou : « Ici-bas, tous les sikhs sont chargés de reconnaître le “Granth” comme leur gourou. Reconnais “Gourou Granth Sahib” comme la personne visible des gourous. Ceux qui cherchent à rencontrer le Seigneur dans la Parole telle qu’elle s’est manifestée dans le livre, Le découvriront » 7. Depuis ce jour-là, le « Granth » reste l’unique autorité des sikhs, ainsi que le seul objet de vénération que l’on voit dans leurs lieux de culte. Leur temple central, qui s’élève toujours à Amritsar 8, au milieu de l’étang sacré (Amritsar signifiant « étang de l’immortalité »), ne renferme aucune idole, mais seulement des exemplaires du « Granth » déposés sur des coussins de soie : « Jour et nuit, sans désemparer, comme pour réaliser une sorte d’adoration perpétuelle, des “granthis” chantent sous ces voûtes révérées des fragments du livre saint en s’accompagnant d’instruments à cordes. Ailleurs les sikhs ont simplement des salles d’édification, où un “granthi” leur lit… le texte sacré », explique Albert Réville
« Sri Gourou Granth Sahib. Tome I »
Il s’agit de l’« Adi Granth » 1 (le « Premier Livre ») ou « Gourou Granth Sahib » 2 (le « Maître Livre »), le livre saint des sikhs, compilé par le cinquième gourou Arjan Dev 3, puis révisé et achevé par le dixième gourou Gobind Singh 4. Les sikhs le désignent souvent sous la vague appellation de « Granth » (le « Livre »), de même que les chrétiens citent le leur sous celle de « Bible » (« Biblia » signifiant les « Livres »). Le « Granth » est une œuvre tout à fait unique par rapport aux canons des autres religions. Ce qui l’en distingue, c’est qu’il se présente comme une fascinante anthologie poétique, qui ne contient pas seulement les psaumes et les hymnes de ses propres fondateurs, comme gourou Nanak 5, mais aussi ceux de poètes mystiques antérieurs : Kabîr, Jayadeva, Bhikhan, Nâm-dev… En tout, quinze poètes non sikhs (appelés « bhagats » 6) sont incorporés au « Granth », dont le plus ancien est Sheikh Farid né en 1175 apr. J.-C. Les gourous, eux, vécurent entre 1469 et 1708 apr. J.-C. Voilà donc plus de cinq siècles de poésie indienne, totalisant 3 384 poèmes ou 15 575 strophes, et mêlant le pendjabi à diverses autres langues : le sanscrit, le persan, le hindi… Une tradition universellement reçue rapporte que le dixième gourou, à son lit de mort, ne nomma pas de successeur, mais décida que la Parole du « Granth » serait désormais l’éternel gourou : « Ici-bas, tous les sikhs sont chargés de reconnaître le “Granth” comme leur gourou. Reconnais “Gourou Granth Sahib” comme la personne visible des gourous. Ceux qui cherchent à rencontrer le Seigneur dans la Parole telle qu’elle s’est manifestée dans le livre, Le découvriront » 7. Depuis ce jour-là, le « Granth » reste l’unique autorité des sikhs, ainsi que le seul objet de vénération que l’on voit dans leurs lieux de culte. Leur temple central, qui s’élève toujours à Amritsar 8, au milieu de l’étang sacré (Amritsar signifiant « étang de l’immortalité »), ne renferme aucune idole, mais seulement des exemplaires du « Granth » déposés sur des coussins de soie : « Jour et nuit, sans désemparer, comme pour réaliser une sorte d’adoration perpétuelle, des “granthis” chantent sous ces voûtes révérées des fragments du livre saint en s’accompagnant d’instruments à cordes. Ailleurs les sikhs ont simplement des salles d’édification, où un “granthi” leur lit… le texte sacré », explique Albert Réville
« Le Veda : premier livre sacré de l’Inde. Tome II »
Il s’agit du « Ṛgveda » 1, de l’« Atharvaveda » 2 et autres hymnes hindous portant le nom de Védas (« sciences sacrées ») — nom dérivé de la même racine « vid » qui se trouve dans nos mots « idée », « idole ». Il est certain que ces hymnes sont le plus ancien monument de la littérature de l’Inde (IIe millénaire av. J.-C.). On peut s’en convaincre déjà par leur langue désuète qui arrête à chaque pas interprètes et traducteurs ; mais ce qui le prouve encore mieux, c’est qu’on n’y trouve aucune trace du culte aujourd’hui omniprésent de Râma et de Kṛṣṇa. Je ne voudrais pas, pour autant, qu’on se fasse une opinion trop exagérée de leur mérite. On a affaire à des bribes de magie décousues, à des formules de rituel déconcertantes, sortes de balbutiements du verbe, dont l’originalité finit par agacer. « Les savants, depuis [Abel] Bergaigne surtout, ont cessé d’admirer dans les Védas les premiers hymnes de l’humanité ou de la “race aryenne” en présence [de] la nature… À parler franc, les trois quarts et demi du “Ṛgveda” sont du galimatias. Les indianistes le savent et en conviennent volontiers entre eux », dit Salomon Reinach 3. La rhétorique védique est, en effet, une rhétorique bizarre, qui effarouche les meilleurs savants par la disparité des images et le chevauchement des sens. Elle se compose de métaphores sacerdotales, compliquées et obscures à dessein, parce que les prêtres védiques, qui vivaient de l’autel, entendaient s’en réserver le monopole. Souvent, ces métaphores font, comme nous dirions, d’une pierre deux coups. Deux idées, associées quelque part à une troisième, sont ensuite associées l’une à l’autre, alors qu’elles hurlent de dégoût de se voir ensemble. Voici un exemple dont l’étrangeté a, du moins, une saveur mythologique : Le « soma » (« liqueur céleste ») sort de la nuée. La nuée est une vache. Le « soma » est donc un lait, ou plutôt, c’est un beurre qui a des « pieds », qui a des « sabots », et qu’Indra trouve dans la vache. Le « soma » est donc un veau qui sort d’un « pis », et ce qui est plus fort, du pis d’un mâle, par suite de la substitution du mot « nuée » avec le mot « nuage ». De là, cet hymne :
« Voilà le nom secret du beurre :
“Langue des dieux”, “nombril de l’immortel”.
Proclamons le nom du beurre,
Soutenons-le de nos hommages en ce sacrifice !…
Le buffle aux quatre cornes l’a excrété.
Il a quatre cornes, trois pieds…
Elles jaillissent de l’océan spirituel,
Ces coulées de beurre cent fois encloses,
Invisibles à l’ennemi. Je les considère :
La verge d’or est en leur milieu », etc.
- En sanscrit « ऋग्वेद ». Parfois transcrit « Rk Veda », « Rak-véda », « Ragveda », « Rěgveda », « Rik-veda », « Rick Veda » ou « Rig-ved ».
- En sanscrit « अथर्ववेद ».
- « Orpheus : histoire générale des religions », p. 77-78. On peut joindre à cette opinion celle de Voltaire : « Les Védas sont le plus ennuyeux fatras que j’aie jamais lu. Figurez-vous la “Légende dorée”, les “Conformités de saint François d’Assise”, les “Exercices spirituels” de saint Ignace et les “Sermons” de Menot joints ensemble, vous n’aurez encore qu’une idée très imparfaite des impertinences des Védas » (« Lettres chinoises, indiennes et tartares », lettre IX).
« Le Livre des récompenses et des peines »
Il s’agit du « Livre des récompenses et des peines » (« Taishang ganyingpian » 1, littéralement « Écrit sur la rétribution par le Très-Haut » 2), précis de morale syncrétique chinoise, mêlant croyances taoïstes, éthique confucéenne et doctrine du karma (XIIe siècle apr. J.-C.). Le « Canon taoïste » (« Daozang » 3) comprend une multitude de traités de morale pour exhorter les lecteurs à la plus haute vertu et leur enseigner que « la récompense du bien et la punition du mal sont comme l’ombre qui suit le corps » 4 ; mais il n’y a aucun parmi ces traités qui ait joui d’une aussi grande popularité, et qu’on ait réimprimé aussi souvent que « Le Livre des récompenses et des peines ». Cependant, il est rare qu’on l’ait réimprimé d’une manière purement désintéressée. Sa propagation était, d’après la superstition populaire, une œuvre méritoire et un merveilleux moyen d’obtenir ce qu’on désirait. En distribuant vingt ou trente exemplaires du « Livre des récompenses et des peines », on obtenait ou bien une longue vie, ou bien la guérison d’un père, ou bien la naissance d’un fils. « Honorez-le donc », dit la préface d’un éditeur chinois 5, « et mettez-le en pratique, et vous augmenterez votre bonheur, aussi bien que la durée de votre vie. En un mot, tout ce que vous souhaiterez vous sera accordé. » Il n’en reste pas moins que c’est un beau et lumineux livre, rempli de conseils moraux et de sentences des vieux sages, pour apprendre à l’être humain d’être bon vis-à-vis d’autrui ; de se tenir dans l’amour et le respect ; de délivrer les autres de leurs dangers et de les assister dans leurs nécessités ; d’abandonner ses richesses pour faire des heureux ; de ne pas faire souffrir non seulement un animal, mais encore un insecte. Un commentateur et poète compare ce livre à « une barque de miséricorde sur laquelle nous pouvons passer une mer immense » ou bien « un arbre qui porte ses branches jusque dans les nues [et ouvrant] nos cœurs aux plus dignes efforts »
- En chinois « 太上感應篇 ». Parfois transcrit « Thaï-chang kan ing phian », « Thaï chang kan yng pian », « Tae shang kan ying peen », « T’ai shang kan yin p’ien », « Thaï-chang kan ing phian », « Thaï-chang-kan-ing-pien » ou « Thai chang kan ying phien ».
- Parfois traduit « Traité du Très-Haut sur la rétribution des actes ».
- En chinois « 道藏 ». Autrefois transcrit « Tao-tchang » ou « Tao Tsang ».
Vâlmîki, « Le Rāmāyaṇa »
Il s’agit du « Râmâyaṇa » 1 de Vâlmîki 2. Le « Râmâyaṇa » ressemble à un de ces grands monuments où toute une nation se reconnaît et s’admire avec complaisance, et qui excitent la curiosité des autres peuples. Toute l’Inde se reconnaît et s’admire dans cette monumentale « Iliade » de vingt-quatre mille versets, dont l’Homère s’appelle Vâlmîki ; elle est vue, à bon droit, comme le chef-d’œuvre de la poésie indienne. On n’en sait pas plus sur l’Homère indien que sur l’Homère grec ; on ignore jusqu’au siècle où il a vécu (quelque part au Ier millénaire av. J.-C.). Dans le chapitre I.2, il est raconté que c’est Brahmâ lui-même, le créateur des mondes, qui a incité Vâlmîki à écrire cette épopée, en promettant au poète que « tant qu’il y aura sur terre des montagnes et des rivières, l’histoire du “Râmâyaṇa” circulera dans les mondes ». La promesse a été tenue. Les éloges dithyrambiques de Michelet, les pages enthousiastes de Laprade attestent l’émotion qui saisit aujourd’hui encore les esprits cultivés en présence de ce chef-d’œuvre : « L’année… où j’ai pu lire le grand poème sacré de l’Inde, le divin “Râmâyaṇa”… me restera chère et bénie… “La récitation d’un seul vers de ce poème suffit à laver de ses fautes même celui qui en commet chaque jour” 3… Notre péché permanent, la lie, le levain amer qu’apporte et laisse le temps, ce grand fleuve de poésie l’emporte et nous purifie. Quiconque a séché son cœur, qu’il l’abreuve au “Râmâyaṇa”… Quiconque a trop fait, trop voulu, qu’il boive à cette coupe profonde un long trait de vie, de jeunesse », dit Michelet 4. C’est que, dans tout le cours de cette épopée, on se trouve, à chaque pas, aux prises avec un être et une forme provisoires : homme, animal, plante, rien de définitif, rien d’immuable. De là ce respect et cette crainte religieuse de la nature, qui fournissent à la poésie de Vâlmîki des détails si touchants ; de là aussi ces méditations rêveuses, ces peintures de la vie ascétique, enfin ces dissertations philosophiques, qui tiennent non moins de place que les combats. Celle-ci par exemple : « La vieillesse ruine l’homme : que peut-il faire pour s’y opposer ? Les hommes se réjouissent quand le soleil se lève, ils se réjouissent quand le jour s’éteint… Ils sont heureux de voir commencer une saison nouvelle, comme si c’était un renouveau : mais le retour des saisons ne fait qu’épuiser la vigueur des créatures » 5. Quelle grandeur dans ces versets pleins de mélancolie !
Kumârajîva, Sengzhao et Daosheng, « Introduction aux pratiques de la non-dualité : commentaire du “Soûtra de la Liberté inconcevable” »
Il s’agit du « Commentaire sur “L’Enseignement de Vimalakîrti” » (« Zhu “Weimojie Jing” » 1) par Kumârajîva 2 et par ses disciples, Sengzhao 3 et Daosheng 4. L’arrivée de Kumârajîva à Ch’ang-an 5 en 402 apr. J.-C. inaugure la période indianiste du bouddhisme chinois. À partir de cette date, les Chinois ne se contentent plus d’avoir une idée approximative de la pensée venue d’ailleurs, mais ils se lancent dans de grands travaux d’exégèse et de traduction directement du sanscrit, pour lesquels ils font appel à des moines venus de l’Inde ou de la Sérinde 6. Né à Kucha, l’une des principales étapes de la Route de la soie, Kumârajîva reçoit une formation qui lui permettra de jouer un rôle déterminant dans cette indianisation. Dès son arrivée au grand temple de Chang’an, où il est invité par le souverain Yao Xing, Kumârajîva s’attelle à une série impressionnante de traductions, qui rejetteront dans l’ombre tous les travaux précédents et qui seront pour beaucoup dans l’acclimatation durable du bouddhisme en Asie. « En prenant en considération les révisions d’ouvrages déjà traduits et ses traductions inédites, Kumârajîva aurait “transmis” plus de cinquante œuvres, comptant plus de trois cents volumes… Si nous… considérons que Kumârajîva est décédé en 409, on arrive à la conclusion que, durant ses [huit] années de résidence à Ch’ang-an, il devait traduire environ un chapitre tous les dix jours », dit M. Daisaku Ikeda 7. Selon les préfaces faites par ses disciples, Kumârajîva traduisait à voix haute, tout en commentant, en présence d’une assemblée de mille deux cents moines et laïcs, comprenant tout ce que le bouddhisme comptait alors de plus cultivé en Chine, les raisons pour lesquelles il avait traduit d’une manière plutôt que d’une autre ; il exposait, en outre, les sens profonds cachés dans le texte sanscrit. On prétend que le souverain Yao Xing assistait à certaines des séances : « Le souverain en personne tenait en main le texte des anciennes traductions des soûtras, y relevant les erreurs, s’enquérant de la signification générale du passage, et contribuant ainsi à éclairer les doctrines de la secte » 8. On prétend aussi que les membres présents, qui recevaient la traduction et le commentaire, étaient transportés de bonheur, éprouvant le sentiment de se trouver sur les sommets des montagnes Kunlun par une belle journée claire, regardant le monde s’étendant sous leurs pieds.
« L’Enseignement de Vimalakīrti, “Vimalakīrtinirdeśa” »

éd. Publications universitaires-Institut orientaliste, coll. Bibliothéque du Muséon, Louvain
Il s’agit d’une traduction indirecte de « L’Enseignement de Vimalakîrti » (« Vimalakîrti Nirdeśa » 1) ou « Soûtra de Vimalakîrti » (« Vimalakîrti Sûtra » 2) ou « La Liberté inconcevable » (« Acintya Vimokṣa » 3). Ce livre est au canon bouddhique ce que le « Livre de l’Ecclésiaste » est à la Bible juive, je veux dire un chef-d’œuvre de scepticisme, de fatalisme, de modernité surtout, et qui s’adresse aux athées aussi bien qu’aux croyants, sans distinction d’écoles ou de races. « Tout est impermanent, c’est-à-dire transitoire, douloureux et vide. » Tel est le résumé de l’ouvrage. Cette conclusion, le saint Vimalakîrti (« Gloire sans tache ») la tire des expériences les plus diverses. Il s’y complaît ; il en fait le refrain continuel de sa pensée. Le monde présente à ses yeux une série de phénomènes, toujours les mêmes, où « absolument rien n’a été produit, n’est produit et ne sera produit ; absolument rien n’a disparu, ne disparaît et ne disparaîtra » 4. Toute tentative pour améliorer les choses humaines est chimérique, « le corps ne durant pas longtemps… pareil à la bulle d’eau ; le corps étant issu de la soif des passions… pareil au mirage » 5. Toute dualité est fausse et illusoire. Les contraires se concilient, ce qui est impensable et indicible. Aussi, « les sons et les idées sont sans emploi » 6. On croirait lire Tchouang-tseu. « “L’Enseignement de Vimalakîrti” est une œuvre d’art », dit un sinologue 7. « La mise en scène est conduite avec une habileté de dramaturge… Le paradoxe, l’ironie sont maniés de main de maître, comme dans le célèbre épisode de Śâriputra, ce saint des saints… qu’une déesse maligne couvre de fleurs dont il ne peut se dépêtrer, et qui finit par se voir changé en femme. » Cette histoire et d’autres semblables, faites pour scandaliser les orthodoxes indiens, amusèrent et charmèrent les Tibétains et les Chinois qui lisaient « L’Enseignement de Vimalakîrti » dans une dizaine d’excellentes traductions. La plus ancienne d’entre elles fut celle effectuée par Zhi Qian 8 entre 222 et 229 apr. J.-C. à Nankin. Le texte de l’original sanscrit, regardé comme perdu, fut retrouvé en 1999 dans la bibliothèque du Potala, au Tibet.
Kôbô-daishi, « La Vérité finale des trois enseignements »
Il s’agit de « La Vérité finale pour les sourds et les aveugles » (« Rôko-shiiki » 1), traité de morale en action, plus connu sous le titre de « La Vérité finale des trois enseignements » (« Sangô-shiiki » 2). Son auteur, l’introducteur du bouddhisme ésotérique au Japon et le fondateur de l’école tantrique Shingon (« la vraie parole »), naquit en 774 apr. J.-C. Ses qualités intellectuelles le poussaient, dès son enfance, à se retirer dans les montagnes. Il en éprouvait à chaque fois une grande joie, disant : « Une fois dans les forêts montagneuses, j’en oublie de rentrer chez moi… La rivière pure de la montagne ne cesse de compatir envers les personnes se noyant dans le poison de l’honneur et de l’argent ! Qu’ils ne soient pas brûlés dans le [tourbillon] du monde ! Qu’ils quittent tout de suite ce lieu impur pour entrer dans la terre de la Loi ! » 3 Il fut envoyé, à l’âge de quinze ans, à la capitale impériale pour entrer dans la carrière des lettres — voie qu’il abandonna cependant pour s’engager dans celle, plus austère, des canons bouddhiques. Remarqué pour son érudition, on lui conféra d’abord le titre de Kûkai 4 (« l’Océan du vide » 5), et bien plus tard, celui de Kôbô-daishi 6 (« le Grand Maître qui répand la Loi » 7) sous lequel il est connu. En 804 apr. J.-C., il fut nommé pour aller à une ambassade en Chine, où il demeura plus de deux ans à se perfectionner dans la connaissance des soûtras ésotériques. À son retour, par un pieux et habile mensonge, il soutint que la déesse shintoïste du soleil — la Grande-Auguste-Kami-Illuminant-le-Ciel — était une incarnation du Bouddha. Ainsi harmonisée avec les croyances nationales, la religion bouddhique se propagea avec une rapidité extraordinaire, et il y eut bientôt une mode, chez les nobles, de se raser la tête pour se retirer du monde. Quant à Kôbô-daishi, sa figure emblématique suscita l’apparition de nombreuses légendes et de récits hagiographiques, en particulier le « Rouleau enluminé sur la vie du saint homme Kôbô-daishi » (« Kôbô-daishi gyôjô emaki » 8) où l’on le représente chassant les êtres maléfiques, repoussant les ténèbres de l’ignorance qu’ils incarnent et diffusant « la vraie parole » dans l’archipel. Parmi les ouvrages qu’il laissa à sa mort, le plus accessible et le moins aride, en même temps que le moins rebutant, est « La Vérité finale des trois enseignements ». C’est à peine si l’on y reconnaît quelques traces des soûtras ésotériques, et il faut y voir plutôt un recueil d’instruction morale qu’un livre religieux proprement dit. On ne peut pas en dire autant du reste de ses ouvrages, qui reposent sur l’usage de formules invocatoires (« mantra »), de diagrammes mystiques (« mandala »), réservés au cercle restreint des initiés.
« Le Veda : premier livre sacré de l’Inde. Tome I »
Il s’agit du « Ṛgveda » 1, de l’« Atharvaveda » 2 et autres hymnes hindous portant le nom de Védas (« sciences sacrées ») — nom dérivé de la même racine « vid » qui se trouve dans nos mots « idée », « idole ». Il est certain que ces hymnes sont le plus ancien monument de la littérature de l’Inde (IIe millénaire av. J.-C.). On peut s’en convaincre déjà par leur langue désuète qui arrête à chaque pas interprètes et traducteurs ; mais ce qui le prouve encore mieux, c’est qu’on n’y trouve aucune trace du culte aujourd’hui omniprésent de Râma et de Kṛṣṇa. Je ne voudrais pas, pour autant, qu’on se fasse une opinion trop exagérée de leur mérite. On a affaire à des bribes de magie décousues, à des formules de rituel déconcertantes, sortes de balbutiements du verbe, dont l’originalité finit par agacer. « Les savants, depuis [Abel] Bergaigne surtout, ont cessé d’admirer dans les Védas les premiers hymnes de l’humanité ou de la “race aryenne” en présence [de] la nature… À parler franc, les trois quarts et demi du “Ṛgveda” sont du galimatias. Les indianistes le savent et en conviennent volontiers entre eux », dit Salomon Reinach 3. La rhétorique védique est, en effet, une rhétorique bizarre, qui effarouche les meilleurs savants par la disparité des images et le chevauchement des sens. Elle se compose de métaphores sacerdotales, compliquées et obscures à dessein, parce que les prêtres védiques, qui vivaient de l’autel, entendaient s’en réserver le monopole. Souvent, ces métaphores font, comme nous dirions, d’une pierre deux coups. Deux idées, associées quelque part à une troisième, sont ensuite associées l’une à l’autre, alors qu’elles hurlent de dégoût de se voir ensemble. Voici un exemple dont l’étrangeté a, du moins, une saveur mythologique : Le « soma » (« liqueur céleste ») sort de la nuée. La nuée est une vache. Le « soma » est donc un lait, ou plutôt, c’est un beurre qui a des « pieds », qui a des « sabots », et qu’Indra trouve dans la vache. Le « soma » est donc un veau qui sort d’un « pis », et ce qui est plus fort, du pis d’un mâle, par suite de la substitution du mot « nuée » avec le mot « nuage ». De là, cet hymne :
« Voilà le nom secret du beurre :
“Langue des dieux”, “nombril de l’immortel”.
Proclamons le nom du beurre,
Soutenons-le de nos hommages en ce sacrifice !…
Le buffle aux quatre cornes l’a excrété.
Il a quatre cornes, trois pieds…
Elles jaillissent de l’océan spirituel,
Ces coulées de beurre cent fois encloses,
Invisibles à l’ennemi. Je les considère :
La verge d’or est en leur milieu », etc.
- En sanscrit « ऋग्वेद ». Parfois transcrit « Rk Veda », « Rak-véda », « Ragveda », « Rěgveda », « Rik-veda », « Rick Veda » ou « Rig-ved ».
- En sanscrit « अथर्ववेद ».
- « Orpheus : histoire générale des religions », p. 77-78. On peut joindre à cette opinion celle de Voltaire : « Les Védas sont le plus ennuyeux fatras que j’aie jamais lu. Figurez-vous la “Légende dorée”, les “Conformités de saint François d’Assise”, les “Exercices spirituels” de saint Ignace et les “Sermons” de Menot joints ensemble, vous n’aurez encore qu’une idée très imparfaite des impertinences des Védas » (« Lettres chinoises, indiennes et tartares », lettre IX).
Lie-tseu, « L’Authentique Classique de la parfaite vacuité »
Il s’agit du traité « L’Authentique Classique de la vertu suprême de la parfaite vacuité » (« Chong xu zhi de zhen jing »), plus connu sous le titre abrégé de « L’Authentique Classique de la parfaite vacuité » (« Chong xu zhen jing » 1), ouvrage fondamental du taoïsme chinois. On l’appelle encore communément le « Lie-tseu » 2, du nom du philosophe chinois qui en est le personnage principal. Ce Lie-tseu est, aux côtés de Lao-tseu et de Tchouang-tseu, l’un des fondateurs de l’école du tao. Il est certainement le moins connu des trois. On ignore tout de sa personne, sinon qu’il avait la faculté de chevaucher le vent et de voyager dans les airs. Son confrère Tchouang-tseu lui prête ce pouvoir magique dans le passage suivant : « Lie-tseu se déplaçait en chevauchant le vent. Il voyageait de la façon la plus agréable et s’en revenait au bout de quinze jours. Certes, un tel homme est rare » 3. Dans le « Lie-tseu » actuel, qui ne date que du IIIe siècle apr. J.-C., il y a une part de « Lie-tseu » original et une part d’interpolations tardives, venant de recueils divers et quelquefois opposés au taoïsme : « Les Entretiens de Confucius », « Printemps et Automnes du sieur Lü », etc. Son contenu est de la disparité la plus complète : « Nous devons… noter que les principes philosophiques qu’on y trouve développés le sont sans aucune méthode ; ils sont au contraire répandus çà et là, sans le moindre souci d’un ordre ou d’une méthode quelconque », dit monseigneur Charles de Harlez. Malgré ces disparates, ce chapelet de bons mots et de conseils pour une vie humaine convenable, rattachés entre eux par le fil le plus léger, tient notre attention sous le charme par son agrément et sa simplicité. « Lie-tseu est sans doute le plus accessible des fondateurs du taoïsme », dit M. Rémi Mathieu.
- En chinois « 沖虛眞經 ». Autrefois transcrit « Tch’oung-hu-tchenn-king », « Tch’ong siu tchen king », « Tchoung-hiu-tchin-king », « Tchong-hiu tchen-king » ou « Tchong xu zhen jing ».
- En chinois « 列子 ». Parfois transcrit « Liä Dsi », « Liehtzyy », « Lie-tze », « Lie-tse », « Lie-tsée », « Lieh Tzǔ », « Lie-tzeu » ou « Liezi ».
- « L’Œuvre complète », ch. I.