« Printemps et Automnes de Lü Buwei »

éd. du Cerf, coll. Patrimoines-Confucianisme, Paris

éd. du Cerf, coll. Pa­tri­moines-Confu­cia­nisme, Pa­ris

Il s’agit des « Prin­temps et Au­tomnes du sieur Lü »1 (« Lü­shi chun­qiu »2). Ce n’est pas un ou­vrage his­to­rique comme son titre pour­rait le faire croire (« Prin­temps et Au­tomnes » si­gni­fiant « An­née » ou « An­nales » en chi­nois), mais une col­lec­tion d’essais phi­lo­so­phiques ré­di­gés pour le compte du sieur Lü (IIIe siècle av. J.-C.) et clas­sés sous les ru­briques des douze mois de l’année. D’abord très riche mar­chand, puis pre­mier mi­nistre, le sieur Lü, de son nom com­plet Lü Bu­wei3, est une sorte de Ma­za­rin chi­nois. Il exerça la ré­gence pen­dant la mi­no­rité du jeune prince qui de­vait être un jour Em­pe­reur ; d’aucuns veulent même qu’il en ait été le père na­tu­rel, en rai­son de son rap­port in­time avec l’Impératrice. Sans être un lit­té­ra­teur, il sa­vait soi­gner sa ré­pu­ta­tion et il en­tre­te­nait au­tour de lui une Cour de trois mille phi­lo­sophes et écri­vains ha­biles ; il leur fit mettre en ordre ce qu’ils avaient en­tendu dire ou di­saient eux-mêmes, et c’est là les « Prin­temps et Au­tomnes du sieur Lü ». « La tra­di­tion veut que trois mille let­trés eussent ainsi été ras­sem­blés, hé­ber­gés, en­tre­te­nus [par lui], avec toutes les com­mo­di­tés de tra­vail que cela im­plique, plu­sieurs an­nées du­rant », ex­plique M. Ivan Ka­me­na­ro­vić4. « Quand bien même ce chiffre se­rait fort exa­géré, il n’empêche que le ré­sul­tat éton­nant au­quel cette en­tre­prise a per­mis d’aboutir est à lui seul le sym­bole et l’expression d’un mo­ment ca­pi­tal de l’histoire de la pen­sée chi­noise. » Une anec­dote cé­lèbre veut que, l’ouvrage ter­miné, le sieur Lü l’ait fait pla­cer à la porte du mar­ché de Xia­nyang5, la ca­pi­tale des Qin, et sus­pendre au-des­sus une grosse somme d’or, pro­mise à qui­conque trou­ve­rait un seul mot à chan­ger dans le texte ; per­sonne n’osa se pré­sen­ter. Pour­tant, bien des dé­fauts au­raient pu être re­le­vés dans cette com­pi­la­tion éru­dite et terne.

« La tra­di­tion veut que trois mille let­trés eussent ainsi été ras­sem­blés »

Voici un pas­sage qui don­nera une idée du style des « Prin­temps et Au­tomnes du sieur Lü » : « Si l’on met en ac­tion les ver­tus et le sens mo­ral, il n’est be­soin ni de ré­com­penses pour en­cou­ra­ger le peuple ni de châ­ti­ments pour re­fré­ner les mau­vais pen­chants. Telle était la po­li­tique de Shen­nong et de l’Empereur Jaune6… Leurs pro­pos por­taient, la ci­vi­li­sa­tion qu’ils ré­pan­daient était flo­ris­sante, et toute chose sous le ciel y trou­vait son compte… Pour­quoi eussent-ils eu re­cours à de lourdes peines ou à de grandes ré­com­penses ? Les châ­ti­ments sé­vères et les ré­com­penses consé­quentes sont la po­li­tique des époques de dé­clin »7.

Consultez cette bibliographie succincte en langue française

  1. À ne pas confondre avec la chro­nique des « Prin­temps et Au­tomnes » re­la­tant l’histoire de Lu, pa­trie de Confu­cius. Haut
  2. En chi­nois « 呂氏春秋 ». Au­tre­fois trans­crit « Lu-chi tchun-tsieou », « Liu-cheu tch’oen-ts’ieou », « Liu-che tch’ouen-ts’ieou » ou « Lü shih ch’un-ch’iu ». Haut
  3. En chi­nois 呂不韋. Au­tre­fois trans­crit Lu-pou-ouei, Lu-pou-ouey, Lu Pou-wei, Liu Pou-wei, Lü Pu-wei ou Lü Bu We. Haut
  4. p. 24. Haut
  1. En chi­nois 咸陽. Par­fois trans­crit Hian yang, Sie­nyang, Hien-yang ou Hsien-yang. Haut
  2. Em­pe­reurs lé­gen­daires dans la tra­di­tion chi­noise. Haut
  3. p. 363-364. Haut