« Entretiens de Lin-tsi »

éd. Fayard, coll. Documents spirituels, Paris

éd. Fayard, coll. Do­cu­ments spi­ri­tuels, Pa­ris

Il s’agit des « de Linji» («Linji yulu» 1, ou plus sim­ple­ment «Linji lu» 2). L’école de Linji Yixuan 3, maître , est connue par ce re­cueil de pa­roles com­posé après la du maître. Re­belle à tout sa­voir, fa­rouche à toute vi­sion in­tel­lec­tuelle qu’elle dé­cri­vait comme une «taie sur l’» cette école de­vint cé­lèbre en au IXe et Xe siècle apr. J.-C. avant de se ré­pandre au où elle per­siste jusqu’à nos jours sous le nom d’école Rin­zai. L’usage du bâ­ton (en «bang», en «» 4) et de l’exclamation «khât!» (en ja­po­nais «katsu!» 5) est ca­rac­té­ris­tique de Linji, le­quel frap­pait ses dis­ciples et leur criait, comme s’il dé­si­rait les faire par­ve­nir d’un coup à la réa­li­sa­tion su­bite. Dans des termes vi­ru­lents, qui al­laient jusqu’au blas­phème, il prê­chait le meurtre spi­ri­tuel et le ren­ver­se­ment de toutes les va­leurs : «Si vous ren­con­trez un , tuez le Boud­dha! Si vous ren­con­trez un pa­triarche, tuez le pa­triarche!» 6 Et plus loin : «Je vous le dis : il n’y a pas de Boud­dha, il n’y a pas de Loi; pas de pra­tiques à culti­ver, pas de fruits à éprou­ver. Que vou­lez-vous donc tant cher­cher au­près d’?… Qu’est-ce qui vous manque? C’est vous, adeptes, qui êtes là de­vant mes yeux, c’est vous-mêmes qui ne dif­fé­rez en rien du Boud­dha-pa­triarche! Mais vous n’avez pas confiance, et vous cher­chez au-de­hors» 7. Lui de­man­dait-on quel était le bien le plus pré­cieux pour l’, Linji ré­pon­dait : «Se te­nir dans l’ordinaire et sans af­faires : chier et pis­ser, se vê­tir et man­ger» 8. Et aussi : «Être sans af­faires et res­ter as­sis dans [son] mo­nas­tère, les pieds croi­sés au coin de [sa] ban­quette» 9. À chaque page, cet de l’homme sans af­faires se re­trouve, poussé jusqu’à la pué­ri­lité. J’avoue, pour ma part, qu’il ne me convainc pas. Car, même à sup­po­ser que l’homme qui se garde de rien faire soit le plus heu­reux, ne vaut-il pas mieux être hon­nête et utile, qu’heureux et sans af­faires? L’homme de bien n’a-t-il pas , comme les autres, au noble tra­vail? Ne peut-il pas se su­bor­don­ner à une grande cause so­ciale, au lieu de jouir dans son coin sans se sou­cier que ce soit aux dé­pens des autres? La fin di­vine doit-elle donc être une fin égoïste?

«Se te­nir dans l’ordinaire et sans af­faires : chier et pis­ser, se vê­tir et man­ger»

Voici un pas­sage qui don­nera une idée du des «En­tre­tiens de Linji» : «Lors d’une ins­truc­tion col­lec­tive, le Maître dit : “Adeptes, il n’y a pas de tra­vail dans le … Quand vient la fa­tigue, je dors; le sot se rit de , le me connaît. Un An­cien 10 l’a dit : ‘Pour faire un tra­vail ex­té­rieur, il n’y a que les im­bé­ciles’. Soyez votre propre maître où que vous soyez, et sur-le-champ vous se­rez vrais…”» 11.

Consultez cette bibliographie succincte en langue française

  • Paul De­mié­ville, «Les En­tre­tiens de Lin-tsi» dans «Choix d’études boud­dhiques : 1929-1970» (éd. E. J. Brill, Leyde), p. 436-455
  • Étiemble, «Qua­rante Ans de mon maoïsme (1934-1974)» (éd. Gal­li­mard, Pa­ris)
  • Hoang-Thi-Bich, «Étude et Tra­duc­tion du “Ga­ku­dôyô­jin-shû”, re­cueil de l’application de l’esprit à l’étude de la Voie, du maître de zen Dô­gen» (éd. Droz, coll. Hautes Études Orien­tales, Ge­nève-Pa­ris).
  1. En chi­nois «臨濟語錄». Par­fois trans­crit «Lintsi yu­lou» ou «Lin-chi yü-lu». Icône Haut
  2. En chi­nois «臨濟錄». Par­fois trans­crit «Lintsi lou» ou «Lin-chi lu». Icône Haut
  3. En chi­nois 臨濟義玄. Au­tre­fois trans­crit Lin-tsi Yi-hiuan ou Lin-chi I-hsüan. Icône Haut
  4. . Icône Haut
  5. . Icône Haut
  6. sect. 20. Icône Haut
  1. sect. 21. Icône Haut
  2. sect. 13. Icône Haut
  3. sect. 18. Icône Haut
  4. Ré­fé­rence à Na­nyue Ming­zan (南嶽明瓚), sur­nommé Lan­zan (懶瓚), c’est-à-dire «Zan le Pa­res­seux», à qui l’on doit une in­ti­tu­lée «Se plaire dans le » (in­édite en ). Icône Haut
  5. sect. 13. Icône Haut