Icône Mot-clefPierre Somchine Nginn

tra­duc­teur ou tra­duc­trice

« Proverbes [laotiens] »

dans « France-Asie », vol. 12, nº 118-120, p. 1079-1082

dans «-», vol. 12, nº 118-120, p. 1079-1082

Il s’agit d’un re­cueil de lao­tiens. Nul genre d’ n’est plus an­cien que ce­lui des pro­verbes. Son ori­gine re­monte aux âges les plus re­cu­lés du globe. Dès que les hommes, mus par un ins­tinct ir­ré­sis­tible ou pous­sés par la vo­lonté di­vine, se furent réunis en ; dès qu’ils eurent consti­tué un suf­fi­sant à l’expression de leurs be­soins, les pro­verbes prirent nais­sance en tant que ré­sumé na­tu­rel des idées com­munes de l’. «S’ils avaient pu se conser­ver, s’ils étaient jusqu’à nous sous leur forme pri­mi­tive», dit -Ma­rie Qui­tard 1, «ils se­raient le plus cu­rieux mo­nu­ment du pro­grès des pre­mières so­cié­tés; ils jet­te­raient un jour sur l’ de la , dont ils mar­que­raient le point de dé­part avec une ir­ré­cu­sable fi­dé­lité.» La , qui contient plu­sieurs de pro­verbes, dit : «Ce­lui qui ap­plique son à ré­flé­chir sur la Loi du Très-Haut… le sens se­cret des pro­verbes et re­vient sans cesse sur les des » 2. Les de la eurent la même que la Bible. Confu­cius imita les pro­verbes et fut à son tour imité par ses dis­ciples. De même que l’âge de l’arbre peut se ju­ger par le tronc; de même, les pro­verbes nous ap­prennent le ou l’esprit propre à chaque , et les dé­tails de sa pri­vée. On en te­nait cer­tains en telle es­time, qu’on les di­sait d’origine cé­leste : «C’est du », dit Ju­vé­nal 3, «que nous est ve­nue la maxime : “Connais-toi toi-même”. Il la fau­drait gra­ver dans son cœur et la mé­di­ter tou­jours.» C’est pour­quoi, d’ailleurs, on les gra­vait sur le de­vant des portes des temples, sur les co­lonnes et les marbres. Ces , très nom­breuses du de Pla­ton, fai­saient dire à ce phi­lo­sophe qu’on pou­vait faire un ex­cellent cours de en voya­geant à pied, si l’on vou­lait les lire; les pro­verbes étant «le fruit de l’ de tous les peuples et comme le bon sens de tous les siècles ré­duit en for­mules»

  1. «Études his­to­riques, lit­té­raires et mo­rales sur les et le lan­gage pro­ver­bial», p. 2. Icône Haut
  2. «Livre de l’Ecclésiastique», XXXIX, 1-3. Icône Haut
  1. «Sa­tires», poème XI, v. 27-28. Icône Haut

Pangkham, « Sinsay : chef-d’œuvre de la littérature lao »

éd. Liang Ziang Chong Chareon, Bangkok

éd. Liang Ziang Chong Cha­reon, Bang­kok

Il s’agit du «sin jai» 1, un des ro­mans épiques du . Les Lao­tiens ont une pré­di­lec­tion mar­quée pour les longs ré­cits en vers, im­pré­gnés de , et re­le­vés par la et par l’agencement des . Ils les ap­pellent «bœ̄n2 văn­naḥ­gaḥtī» 2textes lit­té­raires»). Ils les lisent dans les réunions; ils les ré­citent pen­dant la aux jeunes ré­cem­ment ac­cou­chées, pour les em­pê­cher de suc­com­ber au som­meil et de de­ve­nir ainsi une proie fa­cile pour les mau­vais . Cer­tains de ces ro­mans épiques sont d’une lon­gueur ac­ca­blante : le «dāv2 kā­laḥ­ket» 3, par exemple, compte à peu près dix mille vers, et le «cāṃPā sī1 Tŏn2» 4 — en­vi­ron qua­torze mille. «Il faut croire que les pé­ri­pé­ties qui forment la trame du ré­cit en font to­lé­rer la lon­gueur», dit Louis Fi­not 5. «Pour­tant ni les ni les in­ci­dents du drame ne brillent par la va­riété : les mêmes fi­gures et les mêmes scènes se re­pré­sentent sans cesse avec une mo­no­to­nie qui las­se­rait le lec­teur le plus in­tré­pide, mais qui ne pa­raît pas dé­plaire aux âmes simples pour les­quelles des bardes ano­nymes ont com­posé ces en­fan­tines rhap­so­dies.» Je l’avoue : ces ro­mans épiques, en gé­né­ral fort mal­adroits, tra­cés pour la plu­part par des mains la­bo­rieuses, m’ont tou­ché. Je les ai ou­verts sou­vent avec dé­dain, et presque ja­mais je ne les ai fer­més sans être ému. La forme, à très peu d’exceptions près, en est dé­fec­tueuse, mais cela par ru­desse plu­tôt que par mau­vais goût. Ils res­pirent tant de sin­cé­rité, de sym­pa­thie, de bonne vo­lonté; on y trouve des si res­pec­tables dans leur naï­veté, que , qui étais dé­cidé à en , j’ai tou­jours fini par m’y plaire. Ja­mais je n’accueillerai par la raille­rie cette confes­sion hon­nête d’un poète :

«Moi, qui ai com­posé ce ré­cit ver­si­fié,
Je me suis en­fui au loin, tout comme la pe­tite [hé­roïne dont je vous parle]!
Car moi, votre ser­vi­teur, couche en so­li­taire;
Je suis bien seul, dans ma chambre, les bras pen­dant dans le vide…
De­puis que j’ai quitté ma mai­son pour al­ler chez les Thaï où je n’ai pas d’amis,
Je m’efforce d’écrire des vers pour me ré­chauf­fer le cœur.
Tout au fond de mon être… je me dis que je fi­ni­rai par ren­trer chez moi.
Ils sont évi­dem­ment bien éloi­gnés l’un de l’autre, la cité d’ et le pays na­tal!
»

  1. En «ສິນໄຊ». Par­fois trans­crit «Sin­say», «Sin­sai», «Sin Xay» ou «Sine Xay». Outre cette ap­pel­la­tion com­mu­né­ment em­ployée, le «sin jai» porte en­core di­vers titres, se­lon les édi­tions, tels que : «săṅkh silP jăy» («ສັງຂສິລປຊັຍ») ou «săṅ sin jai» («ສັງສິນໄຊ»). Par­fois trans­crit « Sin­xaï». Icône Haut
  2. En lao­tien ພື້ນວັນນະຄະດີ. Icône Haut
  3. En lao­tien «ທ້າວກາລະເກດ», in­édit en . Icône Haut
  1. En lao­tien «ຈໍາປາສີ່ຕົ້ນ», in­édit en fran­çais. Icône Haut
  2. «Re­cherches sur la », p. 116. Icône Haut