Mot-clefgéorgien

pays, gen­tilé ou langue

«Les Proverbes géorgiens»

éd. É. Lechevalier-E. Leroux-J. Maisonneuve, Paris

éd. É. Le­che­va­lier-E. Le­roux-J. Mai­son­neuve, Pa­ris

Il s’agit d’un re­cueil de pro­verbes géor­giens. Nul genre d’enseignement n’est plus an­cien que ce­lui des pro­verbes. Son ori­gine re­monte aux âges les plus re­cu­lés du globe. Dès que les hommes, mus par un ins­tinct ir­ré­sis­tible ou pous­sés par la vo­lonté di­vine, se furent réunis en so­ciété; dès qu’ils eurent consti­tué un lan­gage suf­fi­sant à l’expression de leurs be­soins, les pro­verbes prirent nais­sance en tant que ré­sumé na­tu­rel des idées com­munes de l’humanité. «S’ils avaient pu se conser­ver, s’ils étaient par­ve­nus jusqu’à nous sous leur forme pri­mi­tive», dit Pierre-Ma­rie Qui­tard 1, «ils se­raient le plus cu­rieux mo­nu­ment du pro­grès des pre­mières so­cié­tés; ils jet­te­raient un jour mer­veilleux sur l’histoire de la ci­vi­li­sa­tion, dont ils mar­que­raient le point de dé­part avec une ir­ré­cu­sable fi­dé­lité.» La Bible, qui contient plu­sieurs livres de pro­verbes, dit : «Ce­lui qui ap­plique son âme à ré­flé­chir sur la Loi du Très-Haut… re­cherche le sens se­cret des pro­verbes et re­vient sans cesse sur les énigmes des maximes» 2. Les sages de la Grèce eurent la même pen­sée que la Bible. Confu­cius imita les pro­verbes et fut à son tour imité par ses dis­ciples. De même que l’âge de l’arbre peut se ju­ger par le tronc; de même, les pro­verbes nous ap­prennent le gé­nie ou l’esprit propre à chaque na­tion, et les dé­tails de sa vie pri­vée. On en te­nait cer­tains en telle es­time, qu’on les di­sait d’origine cé­leste : «C’est du ciel», dit Ju­vé­nal 3, «que nous est ve­nue la maxime : “Connais-toi toi-même”. Il la fau­drait gra­ver dans son cœur et la mé­di­ter tou­jours.» C’est pour­quoi, d’ailleurs, on les gra­vait sur le de­vant des portes des temples, sur les co­lonnes et les marbres. Ces ins­crip­tions, très nom­breuses du temps de Pla­ton, fai­saient dire à ce phi­lo­sophe qu’on pou­vait faire un ex­cellent cours de mo­rale en voya­geant à pied, si l’on vou­lait les lire; les pro­verbes étant «le fruit de l’expérience de tous les peuples et comme le bon sens de tous les siècles ré­duit en for­mules»

  1. «Études his­to­riques, lit­té­raires et mo­rales sur les pro­verbes fran­çais et le lan­gage pro­ver­bial», p. 2. Haut
  2. «Livre de l’Ecclésiastique», XXXIX, 1-3. Haut
  1. «Sa­tires», poème XI, v. 27-28. Haut

Roustavéli, «L’Homme à la peau de léopard»

éd. électronique

éd. élec­tro­nique

Il s’agit de «L’Homme à la peau de léo­pard» 1Vep­khis-tkaos­sani» 2), fa­meuse épo­pée géor­gienne du temps de la reine Tha­mar 3 (1184-1213 apr. J.-C.). Cette reine si belle, si sa­vante, si guer­rière dut lut­ter contre Georges Bo­go­lioubski, son pre­mier époux, pour im­po­ser Da­vid Sos­lane, son se­cond, ce qui n’empêcha pas son siècle de de­ve­nir le siècle d’or de la Géor­gie, qui s’étendit de la mer Noire à la Cas­pienne, des monts du Cau­case aux sources de l’Euphrate. Au cours de cette pé­riode, la vie in­tel­lec­tuelle pros­péra, su­bis­sant l’influence des ci­vi­li­sa­tions arabe, per­sane et grecque. Une foule d’écrivains cé­lèbres, qui en­tou­raient le trône, vinrent por­ter la ri­chesse de la langue à son apo­gée. Mais leur nom pâ­lit de­vant ce­lui de Chota Rous­ta­véli 4. Son épo­pée, «L’Homme à la peau de léo­pard», est vé­né­rée par tout le peuple géor­gien. Ses vers en sont les ac­cents de gloire; et ses pages, sui­vant une cou­tume, fai­saient une par­tie obli­gée de la cor­beille de ma­riage de la fian­cée — heu­reux pays où l’on es­ti­mait le livre au même prix que les bi­joux! Une œuvre ori­gi­nale que cette épo­pée? Non point par son su­jet, en tout cas, et de l’aveu même de Rous­ta­véli : «Cette lé­gende per­sane tra­duite en géor­gien, telle une perle so­li­taire dans le creux de la main je l’ai trou­vée et mise en vers» 5. Ce su­jet? Le roi d’Arabie cède son trône à sa fille Thi­mia­tine, ce qui ne peut al­ler sans de grandes chasses. Or, en cou­rant cerfs, biches, che­vreaux, ga­zelles, les chas­seurs dé­couvrent un étrange per­son­nage vêtu de la peau que vous sa­vez déjà, et qui réus­sit à se dé­ro­ber à leur cu­rio­sité. Ce n’est que grâce à l’astuce d’Avthandil qu’ils par­vien­dront à ap­prendre son nom : Ta­riel, prince in­dien, qui ne peut se conso­ler de la perte de la belle Nes­tane, re­te­nue par les Turcs. Mais ce ré­cit exo­tique est à clef. Thi­mia­tine mon­tée sur le trône, c’est Tha­mar en per­sonne, ce dont Rous­ta­véli ne fait point mys­tère : «Chan­tons la reine Tha­mar!», dit-il dans son pro­logue 6. «Mê­lant les larmes au sang, je lui ai dé­dié mes odes les plus choi­sies… Je suis fou de celle dont la vo­lonté su­prême com­mande les troupes… Je n’en peux plus, je suc­combe, il n’y a point de re­mède. Qu’elle me donne la gué­ri­son ou la terre pour ma tombe!» Mais pour­quoi ces «larmes» et ce «sang»? C’est que Tha­mar, «im­pi­toyable comme un roc» 7, au­rait re­fusé de cou­ron­ner la flamme de notre poète. De là à pré­tendre que, de déses­poir, il en prit le froc de moine, il n’y a qu’un pas; le peuple le fran­chit al­lè­gre­ment. Il n’empêche que pour joindre la pe­tite his­toire à la grande, l’archéologie au­rait dé­cou­vert dans le mo­nas­tère géor­gien de la Sainte-Croix, à Jé­ru­sa­lem, une fresque et une stèle au nom de Rous­ta­véli.

  1. Au­tre­fois tra­duit «Le Preux à la peau de tigre», «Le Hé­ros à la peau de léo­pard», «Le Che­va­lier à la peau de léo­pard» ou «Le Che­va­lier à la peau de tigre». Haut
  2. En géor­gien «ვეფხისტყაოსანი». Par­fois trans­crit «Vepxis tqao­sani», «Wep­kis tkaos­sani», «We­ph­khis tqao­sani», «Ve­ph­khis tkao­sani», «Ve­ph­kh­vis-tkao­sani», «Vepxis t’q’aosani», «Vepx­vis t’q(’)aosani», «Vep­khiss-tkaos­sani» ou «Vepkhist’q’aosani». Haut
  3. En géor­gien თამარი. Par­fois trans­crit Ta­mari, Ta­mar ou Ta­mara. Haut
  4. En géor­gien შოთა რუსთაველი. Par­fois trans­crit Rous­tha­véli, Rous­thawéli, Rust’haveli, Rus­ta­veli, Rus­ta­velli, Ros­ta­veli ou Rous­tha­wel. On ren­contre aussi la gra­phie რუსთველი (Rous­th­véli). Par­fois trans­crit Rous­th­wel. Haut
  1. p. 16. Haut
  2. p. 14. Haut
  3. p. 18. Haut