Parthénios, « Aventures d’amour »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit des « Aven­tures d’amour » (« Peri erô­ti­kôn pa­thê­ma­tôn »1) de Par­thé­nios de Ni­cée2, poète grec (Ier siècle av. J.-C.). Les guerres des Ro­mains contre le roi Mi­thri­date dé­ci­dèrent de toute son exis­tence. Il fut fait pri­son­nier, pro­ba­ble­ment en 73 av. J.-C. lorsque sa ville na­tale de Ni­cée tomba au pou­voir des lieu­te­nants de Lu­cul­lus. Il fut amené à Rome, où il ob­tint fi­na­le­ment la li­berté en consi­dé­ra­tion de son ta­lent et de son éru­di­tion. Il fut lié avec Cor­né­lius Gal­lus et connut Vir­gile, qui tra­dui­sit un de ses vers dans les « Géor­giques ». Plu­sieurs de ses poé­sies, aujourd’hui per­dues, por­taient sur la my­tho­lo­gie : « Aphro­dite », « Mé­ta­mor­phoses », etc. ; d’autres se rap­por­taient à sa vie pri­vée. L’encyclopédie Souda men­tionne un poème fu­nèbre (« epi­kê­deion »3) et trois livres d’élégies qu’il fit pour ho­no­rer la mé­moire de sa femme Arété. « [Ce] nom d’Arété in­dique suf­fi­sam­ment l’origine grecque de celle qu’il avait épou­sée ; éloi­gné de sa pa­trie, il avait voulu du moins en re­trou­ver les mœurs et le lan­gage dans sa fa­mille », ex­plique Mau­rice Croi­set4. Il ne nous est par­venu qu’un seul de ses ou­vrages : « Aven­tures d’amour ». C’est un mince vo­lume en prose ; un ré­sumé de trente-six lé­gendes re­la­tives à l’amour, qui abou­tissent le plus sou­vent à des dé­noue­ments tra­giques. Les tra­hi­sons, les pas­sions in­ces­tueuses, les ca­tas­trophes san­glantes y abondent. À me­sure que Par­thé­nios ren­con­trait, dans ses lec­tures, quelque his­toire qui lui pa­rais­sait conve­nir à son re­cueil, il la no­tait. Il vou­lait, ce fai­sant, four­nir des su­jets d’élégies à Cor­né­lius Gal­lus : « J’ai pensé, mon cher Gal­lus », dit-il dans sa pré­face5, « que les “Aven­tures d’amour” ne pou­vaient man­quer de vous plaire, et je vous les en­voie réunies en ex­traits fort courts… C’est en quelque sorte une col­lec­tion de sou­ve­nirs que j’ai for­mée, et j’espère qu’elle ne vous sera pas in­utile. » Ce genre de ser­vice était, du reste, conforme aux usages du temps, comme l’explique Croi­set6 : « Les his­to­riens et les poètes la­tins qui vou­laient s’épargner de trop longues re­cherches em­prun­taient l’érudition d’un gram­mai­rien of­fi­cieux ; ce­lui-ci leur four­nis­sait des notes qu’ils se ré­ser­vaient de mettre en œuvre… Il n’est pas sur­pre­nant que Par­thé­nios ait voulu rendre le même of­fice à Cor­né­lius Gal­lus, si l’on songe an ca­rac­tère ar­ti­fi­ciel qu’avait alors la [poé­sie] la­tine et à la grande place qu’y oc­cu­pait la my­tho­lo­gie ». Dans l’histoire d’un genre illus­tré par des noms cé­lèbres, Par­thé­nios ser­vit ainsi d’intermédiaire entre la longue sé­rie des poètes élé­giaques grecs qui se ter­mina avec lui, et celle des poètes élé­giaques de Rome qui ne fit que com­men­cer avec Cor­né­lius Gal­lus. Ac­cor­dons-lui donc ce rôle, sans ju­ger de son ta­lent, puisque ses poé­sies nous font dé­faut.

Il n’existe pas moins de quatre tra­duc­tions fran­çaises des « Aven­tures d’amour », mais s’il fal­lait n’en choi­sir qu’une seule, je choi­si­rais celle de Ro­main Mer­lin.

« Ὡς δὲ τῶν Κρητικῶν τινες πόλεων ἐπισυνέστησαν Κύδωνι καὶ πολὺ περιῆσαν, πέμπει τοὺς πευσομένους εἰς θεοῦ, ὅ τι ἂν ποιῶν κρατήσειεν τῶν πολεμίων. Καὶ αὐτῷ θεσπίζεται τοῖς ἐγχωρίοις ἥρωσι σφαγιάσαι παρθένον. Ἀκούσας δὲ τοῦ χρηστηρίου Κύδων διεκλήρου τὰς παρθένους πάσας καὶ κατὰ δαίμονα ἡ θυγάτηρ λαγχάνει. Λύκαστος δὲ δείσας περὶ αὐτῆς μηνύει τὴν φθορὰν καὶ ὡς ἐκ πολλοῦ χρόνου συνείη αὐτῇ, ὁ δὲ πολὺς ὅμιλος πολὺ μᾶλλον ἐδικαίου αὐτὴν τεθνάναι. Ἐπειδὴ δὲ ἐσφαγιάσθη, ὁ Κύδων τὸν ἱερέα κελεύει αὐτῆς διατεμεῖν τὸ ἐπομφάλιον καὶ οὕτως εὑρέθη ἔγκυος. »
— Pas­sage dans la langue ori­gi­nale

« Il ar­riva que quelques villes de Crète se sou­le­vèrent contre Cy­don, et rem­por­tèrent de grands avan­tages ; le roi fit consul­ter l’oracle sur les moyens de triom­pher des re­belles, et l’oracle conseilla de sa­cri­fier une vierge aux dieux du pays. Cette ré­ponse fut rap­por­tée à Cy­don, qui sou­mit au choix du sort toutes les jeunes filles : le sort dé­si­gna Eu­li­mène. Trem­blant pour son amie, Ly­caste dé­clare sa sé­duc­tion et les liens qui de­puis long­temps l’unissent à la fille du roi : mais cet aveu ne fait que re­dou­bler l’acharnement du peuple à de­man­der sa mort ; on l’immole, et sur l’ordre du roi, son sein, ou­vert par la main du sa­cri­fi­ca­teur, offre la preuve de sa gros­sesse. »
— Pas­sage dans la tra­duc­tion de Mer­lin

« Comme cer­taines ci­tés cré­toises s’étaient li­guées contre Ky­don, et que leurs forces étaient bien su­pé­rieures, Ky­don en­voie des émis­saires au sanc­tuaire du dieu pour lui de­man­der ce qu’il doit faire pour sou­mettre ses en­ne­mis. L’oracle lui fait sa­voir qu’il doit im­mo­ler une vierge aux hé­ros du pays. Lorsqu’il eut [pris] connais­sance de l’oracle, Ky­don tira au sort parmi toutes les vierges, et le des­tin veut que sa fille soit dé­si­gnée. Ly­cas­tos, crai­gnant pour la vie d’Euliméné, ré­vèle qu’elle a perdu sa vertu, et dé­clare qu’il en­tre­tient avec elle de­puis long­temps des re­la­tions sexuelles. Mais la foule ras­sem­blée ju­gea qu’elle mé­ri­tait d’autant plus de mou­rir. Lorsqu’elle a été égor­gée, Ky­don de­mande an prêtre de lui ou­vrir le ventre ; et l’on dé­cou­vrit ainsi qu’elle était en­ceinte. »
— Pas­sage dans la tra­duc­tion de Mmes Mi­chèle Bi­raud et Do­mi­nique Voi­sin et M. Ar­naud Zu­cker (« Pas­sions d’amour », éd. J. Mil­lon, Gre­noble)

« Mais comme quelques-unes des ci­tés de Crète s’étaient ré­vol­tées contre lui et dé­mon­traient une grande su­pé­rio­rité, Cy­don en­voya des mes­sa­gers in­ter­ro­ger l’oracle, pour sa­voir ce qu’il conve­nait de faire pour ve­nir à bout de ses en­ne­mis. Le dieu lui ré­pon­dit qu’il de­vait im­mo­ler une vierge aux hé­ros de la pa­trie. Obéis­sant à l’oracle, Cy­don tira au sort parmi toutes les vierges ; le des­tin vou­lut que sa fille soit dé­si­gnée. Ly­cas­tos, crai­gnant pour sa vie, ré­véla qu’elle n’avait plus sa vir­gi­nité, et que de­puis long­temps elle cou­chait avec lui ; mais le peuple s’était réuni, et à plus forte rai­son il la condamna à mou­rir. Après qu’elle eut été sa­cri­fiée, Cy­don or­donna au prêtre d’ouvrir son ventre ; ainsi fut-elle trou­vée en­ceinte. »
— Pas­sage dans la tra­duc­tion de M. Ugo Bra­telli (éd. élec­tro­nique)

« Cum au­tem quæ­dam ex Cre­ten­si­bus ur­bi­bus ad­ver­sum Cy­do­nem in­sur­gerent, ac eum ve­he­men­ter ur­gerent, mit­tit ad Nu­men le­ga­tos, qui per­con­ten­tur quid fa­cien­dum es­set, ut hos­ti­bus su­per­ior eva­de­ret. Et res­pon­sum ac­ce­pit, im­mo­lan­dam esse vir­gi­nem he­roi­bus pa­triis. Ac­cepto ergo ora­culo sor­tie­ba­tur Cy­don de vir­gi­ni­bus om­ni­bus, et for­tuna sic fe­rente, ob­tin­git fi­lia. Ly­cas­tus au­tem illi ti­mens, in­di­cat ejus cor­rup­tio­nem, et quod multo jam tem­pore cum ea coi­ve­rit. Plu­ri­mus vero po­puli cœ­tus eo am­plius jus­tum cen­se­bat eam mori. Post­quam ergo mac­tata est, ju­bet Cy­don sa­cri­fi­cum dis­cin­dere eam circa um­bi­li­cum, atque ita in­venta est præ­gnans. »
— Pas­sage dans la tra­duc­tion la­tine de Jo­hannes Hain­pol, dit Ja­nus Cor­na­rius (« De ama­to­riis af­fec­tio­ni­bus », XVIe siècle)

« Quand quelqu’unes des villes de Crète se furent le­vées contre Cy­don, et le pres­saient fort, il en­voya am­bas­sa­deurs à l’oracle pour sa­voir qu’était ce qu’il avait à faire pour sur­mon­ter ses en­ne­mis ; dont il eut ré­ponse qu’il fal­lait im­mo­ler une vierge aux demi-dieux de la pa­trie. Cy­don jeta le sort sur toutes les filles, et la for­tune porta qu’il chut sur sa fille. Ly­cas­tus, crai­gnant la mort d’Eulimené, dit qu’elle n’était point vierge, et que jà de long­temps il avait abusé d’elle ; mais la plus grande voix de la congré­ga­tion du peuple ju­geait qu’elle en de­vait plu­tôt mou­rir. Donc, après l’avoir oc­cise, Cy­don com­manda que le sa­cri­fi­ca­teur la fen­dît au nom­bril, et ainsi fut trou­vée en­ceinte… »
— Pas­sage dans la tra­duc­tion in­di­recte de Jean Four­nier7 (« Les Af­fec­tions d’amour », XVIe siècle)

Avertissement Cette tra­duc­tion n’a pas été faite sur l’original.

« Cum vero Cretæ quæ­dam urbes ad­ver­sus Cy­do­nem in­sur­gerent, et longe su­per­iores essent, mit­tit ad ora­cu­lum ali­quos consul­tum, quid fa­ciens vic­tu­rus es­set hostes. Et res­pon­sum ac­ce­pit hoc, ut vir­gi­nem in­di­ge­nis he­roi­bus sa­cri­fi­ca­ret. Au­dito ora­culo Cy­don sor­tiri jus­sit omnes vir­gines et nu­mine dei fi­liæ ejus sors ob­tin­git. Ly­cas­tus au­tem ti­mens illi, nar­rat ejus cor­rup­tio­nem et se a multo tem­pore jam cum illa coiisse ; ma­gna turba multo ma­gis cen­se­bant eam in­ter­fi­cien­dam esse. Mac­tatæ Cy­don sa­cer­do­tem ju­bet um­bi­li­cum dis­cin­dere, atque ita præ­gnans in­venta est. »
— Pas­sage dans la tra­duc­tion la­tine de Wil­helm Adrian Hir­schig (« De ama­to­riis af­fec­ti­bus », XIXe siècle)

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Consultez cette bibliographie succincte en langue française

  1. En grec « Περὶ ἐρωτικῶν παθημάτων ». Haut
  2. En grec Παρθένιος ὁ Νικαεύς. Par­fois trans­crit Par­the­nius de Ni­cée. Haut
  3. En grec ἐπικήδειον. Haut
  4. « Par­the­nius de Ni­cée », p. 163. Haut
  1. p. CIII-CIV. Haut
  2. « Par­the­nius de Ni­cée », p. 165. Haut
  3. Cette tra­duc­tion a été faite sur la pré­cé­dente. Haut