Il s’agit d’un recueil de proverbes chinois. Nul genre d’enseignement n’est plus ancien que celui des proverbes. Son origine remonte aux âges les plus reculés du globe. Dès que les hommes, mus par un instinct irrésistible ou poussés par la volonté divine, se furent réunis en société ; dès qu’ils eurent constitué un langage suffisant à l’expression de leurs besoins, les proverbes prirent naissance en tant que résumé naturel des idées communes de l’humanité. « S’ils avaient pu se conserver, s’ils étaient parvenus jusqu’à nous sous leur forme primitive », dit Pierre-Marie Quitard1, « ils seraient le plus curieux monument du progrès des premières sociétés ; ils jetteraient un jour merveilleux sur l’histoire de la civilisation, dont ils marqueraient le point de départ avec une irrécusable fidélité. » La Bible, qui contient plusieurs livres de proverbes, dit : « Celui qui applique son âme à réfléchir sur la Loi du Très-Haut… recherche le sens secret des proverbes et revient sans cesse sur les énigmes des maximes »2. Les sages de la Grèce eurent la même pensée que la Bible. Confucius imita les proverbes et fut à son tour imité par ses disciples. De même que l’âge de l’arbre peut se juger par le tronc ; de même, les proverbes nous apprennent le génie ou l’esprit propre à chaque nation, et les détails de sa vie privée. On en tenait certains en telle estime, qu’on les disait d’origine céleste : « C’est du ciel », dit Juvénal3, « que nous est venue la maxime : “Connais-toi toi-même”. Il la faudrait graver dans son cœur et la méditer toujours. » C’est pourquoi, d’ailleurs, on les gravait sur le devant des portes des temples, sur les colonnes et les marbres. Ces inscriptions, très nombreuses du temps de Platon, faisaient dire à ce philosophe qu’on pouvait faire un excellent cours de morale en voyageant à pied, si l’on voulait les lire ; les proverbes étant « le fruit de l’expérience de tous les peuples et comme le bon sens de tous les siècles réduit en formules »4.
les proverbes prirent naissance en tant que résumé naturel des idées communes de l’humanité
Voici un échantillon qui donnera une idée du style des proverbes chinois :
« En mourant, la panthère laisse sa peau ; en mourant, l’homme abandonne sa renommée.
Boire mille verres de vin avec un intime ami est peu de chose ; dire une demi-parole avec ceux qui ne partagent pas nos idées, c’est encore trop.
Partout les corbeaux sont noirs5.
Les filles d’une beauté remarquable ont rarement le sort heureux ; les jeunes gens très capables sont rarement de beaux hommes.
Ceux qui se plaisent à nous flatter en face sont les premiers à nous blâmer en notre absence.
Ce ne sont pas ceux qui savent le mieux parler qui ont de meilleures choses à dire.
Si une chanson donne de la célébrité dans un pays, c’est que la vertu n’y en donne guère.
Celui qui habite les rives d’un fleuve connaît la nature du poisson ; celui qui habite la montagne connaît le chant des oiseaux ».
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- Édition et traduction de Paul Perny (1869) [Source : Google Livres]
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- Édition et traduction de Paul Perny (1869) ; autre copie [Source : Bibliothèque nationale de France]
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- « Études historiques, littéraires et morales sur les proverbes français et le langage proverbial », p. 2.
- « Livre de l’Ecclésiastique », XXXIX, 1-3.
- « Satires », poème XI, v. 27-28.
- Antoine de Rivarol, « Discours sur l’universalité de la langue française ».
- Partout la nature est la même.