Aina, « Propos oisifs sous la tonnelle aux haricots »

éd. Gallimard, coll. Connaissance de l’Orient, Paris

éd. Gal­li­mard, coll. Connais­sance de l’Orient, Pa­ris

Il s’agit des « Pro­pos oi­sifs sous la ton­nelle aux ha­ri­cots » (« Dou­peng xian­hua »1), la der­nière des grandes col­lec­tions de contes chi­nois (XVIIe siècle apr. J.-C.). La prin­ci­pale ori­gi­na­lité des « Pro­pos oi­sifs » n’est pas tant dans les contes eux-mêmes, que dans la ma­nière soi­gnée dont ils sont pré­sen­tés et re­liés entre eux. « C’est à notre connais­sance », dit M. An­dré Lévy2, « la seule œuvre chi­noise qui fasse usage du cadre cy­clique ». Cette œuvre se di­vise, en ef­fet, en douze cha­pitres cor­res­pon­dant à douze jour­nées, un peu à la fa­çon du « Dé­ca­mé­ron ». Le cadre du ré­cit est une ton­nelle où grimpent des plants de ha­ri­cots, et sous la­quelle des vil­la­geois viennent se re­trou­ver tous les jours, pour pro­fi­ter de la fraî­cheur et pour ba­var­der. « Il y a là des jeunes et des vieux, des hommes et des femmes », disent les « Pro­pos oi­sifs »3. « Cer­tains ap­portent un ta­bou­ret, un pe­tit banc tressé, ou bien étalent une natte à même le sol ; cha­cun se fait une place comme il peut ». Ce cadre ru­ral per­met à l’auteur de mettre les contes dans la bouche des per­son­nages réunis sous la ton­nelle, et de re­je­ter sur eux la res­pon­sa­bi­lité de ses pa­roles. Lui-même se cache sous le pseu­do­nyme d’Aina ju­shi4 (« Aina, let­tré re­tiré »), et mal­gré les ef­forts des cher­cheurs, son nom vé­ri­table est in­connu. Dans son pro­logue, il évoque un poète du can­ton, ou­blié et peut-être fic­tif, Xu Ju­tan5, qui au­rait com­posé une « Chan­son de la ton­nelle aux ha­ri­cots ». Comme ce poète, Aina « a dis­paru dans la brume, et l’on ne sait rien de lui » (« yan mo wu chuan »6) ; et c’est en fin de compte sous la ton­nelle elle-même que nous pou­vons le re­trou­ver, puisque c’est la place qu’il a choi­sie pour y dé­po­ser le té­moi­gnage de sa vie en­tière.

Le cadre du ré­cit est une ton­nelle où grimpent des plants de ha­ri­cots, et sous la­quelle des vil­la­geois viennent se re­trou­ver

Voici un pas­sage qui don­nera une idée de la ma­nière d’Aina : « Ah ! la ja­lou­sie ! Il n’est, comme on sait, ni homme ni femme qui n’ait chaque jour cet air-là sur les lèvres ou qui n’en ait le cœur constam­ment re­tourné. Aussi, ne cher­che­rai-je pas plus loin mon su­jet d’aujourd’hui : ce mot de “ja­lou­sie” va me four­nir le thème d’une his­toire propre à vous di­ver­tir. C’est bien cela que nous avions en tête, n’est-ce pas, en construi­sant cette ton­nelle aux ha­ri­cots ? Soyez contents : le mo­ment est venu de prê­ter l’oreille ! »7

Consultez cette bibliographie succincte en langue française

  1. En chi­nois « 豆棚閒話 ». Haut
  2. « Études sur trois re­cueils an­ciens de contes chi­nois », p. 132. Haut
  3. p. 38. Haut
  4. En chi­nois 艾納居士. Haut
  1. En chi­nois 徐菊潭. Haut
  2. En chi­nois « 湮沒無傳 ». Haut
  3. p. 38. Haut