Icône Mot-clefguerre

le comte de Maistre, « Œuvres complètes. Tome VII. Le Caractère extérieur du magistrat • Lettres d’un royaliste savoisien • etc. »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du «Ca­rac­tère ex­té­rieur du ma­gis­trat» et autres œuvres du comte , am­bas­sa­deur du roi de Sar­daigne en , mi­nistre d’État. Es­prit élevé et pé­né­trant, tou­jours en éveil et tou­jours phi­lo­so­phant, le comte de Maistre est pour­tant resté en de­hors des grands hé­ri­tiers du XVIIIe siècle dont on re­com­mande la lec­ture aux élèves. On a parlé de lui ou pour le com­battre ou pour l’encenser; et on a bien fait en un sens. Il mé­rite d’être com­battu en tant que pen­seur du ca­tho­li­cisme le plus obs­cu­ran­tiste et le moins ré­for­mable; mais en­censé en tant que cau­seur vif et écla­tant et de la pro­vo­ca­tion. Le sys­tème de de Maistre, comme la plu­part des faux sys­tèmes, peut se ré­su­mer en un mot : l’ ab­so­lue. Cette unité ne peut être at­teinte par les hommes que si un pou­voir tout aussi les réunit. Le re­pré­sen­tant de ce pou­voir, d’après Maistre, est le pape dans le do­maine spi­ri­tuel, le roi dans le do­maine tem­po­rel, qui lui donnent son ca­rac­tère su­prême, in­dé­fec­tible et  : «L’un et l’autre», dit-il 1, «ex­priment cette haute puis­sance qui les do­mine toutes… qui gou­verne et n’est pas gou­ver­née, qui juge et n’est pas ju­gée». Voilà l’autorité consti­tuée : au­to­rité re­li­gieuse d’une part, au­to­rité ci­vile de l’autre. Rien de tout cela ne doit être confié aux et aux ; et à plus forte au bas . L’anarchie me­nace dès que l’insolente du pou­voir est pos­sible : «Il fau­drait avoir perdu l’esprit», s’exclame Maistre 2, «pour croire que ait chargé les aca­dé­mies de nous ap­prendre ce qu’Il est et ce que nous Lui de­vons; il ap­par­tient aux pré­lats, aux nobles… d’être les dé­po­si­taires et les gar­diens des vé­ri­tés conser­va­trices, d’apprendre aux na­tions… ce qui est vrai et ce qui est faux dans l’ordre mo­ral et spi­ri­tuel. Les autres n’ont pas de rai­son­ner sur ces sortes de ma­tières!» Ce n’est pas à la masse aveugle qu’il ap­par­tient de ré­flé­chir sur les prin­cipes obs­curs et sans ap­pel aux­quels elle est as­su­jet­tie; car «il y a des choses qu’on dé­truit en les mon­trant» 3. Maistre va bien plus loin. Dans ses «Lettres sur l’», il épouse la cause d’un tri­bu­nal qui a fait cou­ler des tor­rents de , et qu’il ose dé­crire comme le «plus cir­cons­pect» et le «plus hu­main» de tout l’univers. Il lui at­tri­bue le main­tien en de la et de la contre les­quelles est ve­nue s’user la puis­sance de Na­po­léon. Si la avait eu le de jouir de l’Inquisition, les dé­sastres de la au­raient été évi­tés. De là à croire que «les abus valent in­fi­ni­ment mieux que les » 4 il n’y a qu’un pas. Maistre le fran­chit! Il est si dé­rai­son­nable, si ré­ac­tion­naire qu’il semble avoir été in­venté pour nous aga­cer : «Il brave, il dé­fie, il in­vec­tive, il ir­rite…; il va jusqu’à l’absurde et jusqu’au sup­plice… Que se­rait un au­tel en­touré de po­tences? Est-ce là de la per­sua­sive? N’est-ce pas plu­tôt une pro­vo­ca­tion à toute in­dé­pen­dante qui veut ado­rer et non trem­bler?», écrira La­mar­tine dans son «Cours fa­mi­lier de lit­té­ra­ture».

  1. «Tome II», p. 2. Icône Haut
  2. «Tome V», p. 108. Icône Haut
  1. «Tome VII», p. 38. Icône Haut
  2. «Cor­res­pon­dance di­plo­ma­tique de 1803 à 1810». Icône Haut

le comte de Maistre, « Œuvres complètes. Tome VI. Examen de la philosophie de Bacon (ouvrage posthume) »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit d’«Exa­men de la de Ba­con» du comte , am­bas­sa­deur du roi de Sar­daigne en , mi­nistre d’État. Es­prit élevé et pé­né­trant, tou­jours en éveil et tou­jours phi­lo­so­phant, le comte de Maistre est pour­tant resté en de­hors des grands hé­ri­tiers du XVIIIe siècle dont on re­com­mande la lec­ture aux élèves. On a parlé de lui ou pour le com­battre ou pour l’encenser; et on a bien fait en un sens. Il mé­rite d’être com­battu en tant que pen­seur du ca­tho­li­cisme le plus obs­cu­ran­tiste et le moins ré­for­mable; mais en­censé en tant que cau­seur vif et écla­tant et de la pro­vo­ca­tion. Le sys­tème de de Maistre, comme la plu­part des faux sys­tèmes, peut se ré­su­mer en un mot : l’ ab­so­lue. Cette unité ne peut être at­teinte par les hommes que si un pou­voir tout aussi les réunit. Le re­pré­sen­tant de ce pou­voir, d’après Maistre, est le pape dans le do­maine spi­ri­tuel, le roi dans le do­maine tem­po­rel, qui lui donnent son ca­rac­tère su­prême, in­dé­fec­tible et  : «L’un et l’autre», dit-il 1, «ex­priment cette haute puis­sance qui les do­mine toutes… qui gou­verne et n’est pas gou­ver­née, qui juge et n’est pas ju­gée». Voilà l’autorité consti­tuée : au­to­rité re­li­gieuse d’une part, au­to­rité ci­vile de l’autre. Rien de tout cela ne doit être confié aux et aux ; et à plus forte au bas . L’anarchie me­nace dès que l’insolente du pou­voir est pos­sible : «Il fau­drait avoir perdu l’esprit», s’exclame Maistre 2, «pour croire que ait chargé les aca­dé­mies de nous ap­prendre ce qu’Il est et ce que nous Lui de­vons; il ap­par­tient aux pré­lats, aux nobles… d’être les dé­po­si­taires et les gar­diens des vé­ri­tés conser­va­trices, d’apprendre aux na­tions… ce qui est vrai et ce qui est faux dans l’ordre mo­ral et spi­ri­tuel. Les autres n’ont pas de rai­son­ner sur ces sortes de ma­tières!» Ce n’est pas à la masse aveugle qu’il ap­par­tient de ré­flé­chir sur les prin­cipes obs­curs et sans ap­pel aux­quels elle est as­su­jet­tie; car «il y a des choses qu’on dé­truit en les mon­trant» 3. Maistre va bien plus loin. Dans ses «Lettres sur l’», il épouse la cause d’un tri­bu­nal qui a fait cou­ler des tor­rents de , et qu’il ose dé­crire comme le «plus cir­cons­pect» et le «plus hu­main» de tout l’univers. Il lui at­tri­bue le main­tien en de la et de la contre les­quelles est ve­nue s’user la puis­sance de Na­po­léon. Si la avait eu le de jouir de l’Inquisition, les dé­sastres de la au­raient été évi­tés. De là à croire que «les abus valent in­fi­ni­ment mieux que les » 4 il n’y a qu’un pas. Maistre le fran­chit! Il est si dé­rai­son­nable, si ré­ac­tion­naire qu’il semble avoir été in­venté pour nous aga­cer : «Il brave, il dé­fie, il in­vec­tive, il ir­rite…; il va jusqu’à l’absurde et jusqu’au sup­plice… Que se­rait un au­tel en­touré de po­tences? Est-ce là de la per­sua­sive? N’est-ce pas plu­tôt une pro­vo­ca­tion à toute in­dé­pen­dante qui veut ado­rer et non trem­bler?», écrira La­mar­tine dans son «Cours fa­mi­lier de lit­té­ra­ture».

  1. «Tome II», p. 2. Icône Haut
  2. «Tome V», p. 108. Icône Haut
  1. «Tome VII», p. 38. Icône Haut
  2. «Cor­res­pon­dance di­plo­ma­tique de 1803 à 1810». Icône Haut

le comte de Maistre, « Œuvres complètes. Tome V. Les Soirées de Saint-Pétersbourg (suite et fin) • Éclaircissement sur les sacrifices »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit des «Soi­rées de Saint-Pé­ters­bourg» et autres œuvres du comte , am­bas­sa­deur du roi de Sar­daigne en , mi­nistre d’État. Es­prit élevé et pé­né­trant, tou­jours en éveil et tou­jours phi­lo­so­phant, le comte de Maistre est pour­tant resté en de­hors des grands hé­ri­tiers du XVIIIe siècle dont on re­com­mande la lec­ture aux élèves. On a parlé de lui ou pour le com­battre ou pour l’encenser; et on a bien fait en un sens. Il mé­rite d’être com­battu en tant que pen­seur du ca­tho­li­cisme le plus obs­cu­ran­tiste et le moins ré­for­mable; mais en­censé en tant que cau­seur vif et écla­tant et de la pro­vo­ca­tion. Le sys­tème de de Maistre, comme la plu­part des faux sys­tèmes, peut se ré­su­mer en un mot : l’ ab­so­lue. Cette unité ne peut être at­teinte par les hommes que si un pou­voir tout aussi les réunit. Le re­pré­sen­tant de ce pou­voir, d’après Maistre, est le pape dans le do­maine spi­ri­tuel, le roi dans le do­maine tem­po­rel, qui lui donnent son ca­rac­tère su­prême, in­dé­fec­tible et  : «L’un et l’autre», dit-il 1, «ex­priment cette haute puis­sance qui les do­mine toutes… qui gou­verne et n’est pas gou­ver­née, qui juge et n’est pas ju­gée». Voilà l’autorité consti­tuée : au­to­rité re­li­gieuse d’une part, au­to­rité ci­vile de l’autre. Rien de tout cela ne doit être confié aux et aux ; et à plus forte au bas . L’anarchie me­nace dès que l’insolente du pou­voir est pos­sible : «Il fau­drait avoir perdu l’esprit», s’exclame Maistre 2, «pour croire que ait chargé les aca­dé­mies de nous ap­prendre ce qu’Il est et ce que nous Lui de­vons; il ap­par­tient aux pré­lats, aux nobles… d’être les dé­po­si­taires et les gar­diens des vé­ri­tés conser­va­trices, d’apprendre aux na­tions… ce qui est vrai et ce qui est faux dans l’ordre mo­ral et spi­ri­tuel. Les autres n’ont pas de rai­son­ner sur ces sortes de ma­tières!» Ce n’est pas à la masse aveugle qu’il ap­par­tient de ré­flé­chir sur les prin­cipes obs­curs et sans ap­pel aux­quels elle est as­su­jet­tie; car «il y a des choses qu’on dé­truit en les mon­trant» 3. Maistre va bien plus loin. Dans ses «Lettres sur l’», il épouse la cause d’un tri­bu­nal qui a fait cou­ler des tor­rents de , et qu’il ose dé­crire comme le «plus cir­cons­pect» et le «plus hu­main» de tout l’univers. Il lui at­tri­bue le main­tien en de la et de la contre les­quelles est ve­nue s’user la puis­sance de Na­po­léon. Si la avait eu le de jouir de l’Inquisition, les dé­sastres de la au­raient été évi­tés. De là à croire que «les abus valent in­fi­ni­ment mieux que les » 4 il n’y a qu’un pas. Maistre le fran­chit! Il est si dé­rai­son­nable, si ré­ac­tion­naire qu’il semble avoir été in­venté pour nous aga­cer : «Il brave, il dé­fie, il in­vec­tive, il ir­rite…; il va jusqu’à l’absurde et jusqu’au sup­plice… Que se­rait un au­tel en­touré de po­tences? Est-ce là de la per­sua­sive? N’est-ce pas plu­tôt une pro­vo­ca­tion à toute in­dé­pen­dante qui veut ado­rer et non trem­bler?», écrira La­mar­tine dans son «Cours fa­mi­lier de lit­té­ra­ture».

  1. «Tome II», p. 2. Icône Haut
  2. «Tome V», p. 108. Icône Haut
  1. «Tome VII», p. 38. Icône Haut
  2. «Cor­res­pon­dance di­plo­ma­tique de 1803 à 1810». Icône Haut

le comte de Maistre, « Œuvres complètes. Tome IV. Les Soirées de Saint-Pétersbourg (les six premiers entretiens) »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit des «Soi­rées de Saint-Pé­ters­bourg» et autres œuvres du comte , am­bas­sa­deur du roi de Sar­daigne en , mi­nistre d’État. Es­prit élevé et pé­né­trant, tou­jours en éveil et tou­jours phi­lo­so­phant, le comte de Maistre est pour­tant resté en de­hors des grands hé­ri­tiers du XVIIIe siècle dont on re­com­mande la lec­ture aux élèves. On a parlé de lui ou pour le com­battre ou pour l’encenser; et on a bien fait en un sens. Il mé­rite d’être com­battu en tant que pen­seur du ca­tho­li­cisme le plus obs­cu­ran­tiste et le moins ré­for­mable; mais en­censé en tant que cau­seur vif et écla­tant et de la pro­vo­ca­tion. Le sys­tème de de Maistre, comme la plu­part des faux sys­tèmes, peut se ré­su­mer en un mot : l’ ab­so­lue. Cette unité ne peut être at­teinte par les hommes que si un pou­voir tout aussi les réunit. Le re­pré­sen­tant de ce pou­voir, d’après Maistre, est le pape dans le do­maine spi­ri­tuel, le roi dans le do­maine tem­po­rel, qui lui donnent son ca­rac­tère su­prême, in­dé­fec­tible et  : «L’un et l’autre», dit-il 1, «ex­priment cette haute puis­sance qui les do­mine toutes… qui gou­verne et n’est pas gou­ver­née, qui juge et n’est pas ju­gée». Voilà l’autorité consti­tuée : au­to­rité re­li­gieuse d’une part, au­to­rité ci­vile de l’autre. Rien de tout cela ne doit être confié aux et aux ; et à plus forte au bas . L’anarchie me­nace dès que l’insolente du pou­voir est pos­sible : «Il fau­drait avoir perdu l’esprit», s’exclame Maistre 2, «pour croire que ait chargé les aca­dé­mies de nous ap­prendre ce qu’Il est et ce que nous Lui de­vons; il ap­par­tient aux pré­lats, aux nobles… d’être les dé­po­si­taires et les gar­diens des vé­ri­tés conser­va­trices, d’apprendre aux na­tions… ce qui est vrai et ce qui est faux dans l’ordre mo­ral et spi­ri­tuel. Les autres n’ont pas de rai­son­ner sur ces sortes de ma­tières!» Ce n’est pas à la masse aveugle qu’il ap­par­tient de ré­flé­chir sur les prin­cipes obs­curs et sans ap­pel aux­quels elle est as­su­jet­tie; car «il y a des choses qu’on dé­truit en les mon­trant» 3. Maistre va bien plus loin. Dans ses «Lettres sur l’», il épouse la cause d’un tri­bu­nal qui a fait cou­ler des tor­rents de , et qu’il ose dé­crire comme le «plus cir­cons­pect» et le «plus hu­main» de tout l’univers. Il lui at­tri­bue le main­tien en de la et de la contre les­quelles est ve­nue s’user la puis­sance de Na­po­léon. Si la avait eu le de jouir de l’Inquisition, les dé­sastres de la au­raient été évi­tés. De là à croire que «les abus valent in­fi­ni­ment mieux que les » 4 il n’y a qu’un pas. Maistre le fran­chit! Il est si dé­rai­son­nable, si ré­ac­tion­naire qu’il semble avoir été in­venté pour nous aga­cer : «Il brave, il dé­fie, il in­vec­tive, il ir­rite…; il va jusqu’à l’absurde et jusqu’au sup­plice… Que se­rait un au­tel en­touré de po­tences? Est-ce là de la per­sua­sive? N’est-ce pas plu­tôt une pro­vo­ca­tion à toute in­dé­pen­dante qui veut ado­rer et non trem­bler?», écrira La­mar­tine dans son «Cours fa­mi­lier de lit­té­ra­ture».

  1. «Tome II», p. 2. Icône Haut
  2. «Tome V», p. 108. Icône Haut
  1. «Tome VII», p. 38. Icône Haut
  2. «Cor­res­pon­dance di­plo­ma­tique de 1803 à 1810». Icône Haut

le comte de Maistre, « Œuvres complètes. Tome III. De l’Église gallicane • Lettres sur l’Inquisition espagnole »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de «Lettres sur l’ es­pa­gnole» et autres œuvres du comte , am­bas­sa­deur du roi de Sar­daigne en , mi­nistre d’État. Es­prit élevé et pé­né­trant, tou­jours en éveil et tou­jours phi­lo­so­phant, le comte de Maistre est pour­tant resté en de­hors des grands hé­ri­tiers du XVIIIe siècle dont on re­com­mande la lec­ture aux élèves. On a parlé de lui ou pour le com­battre ou pour l’encenser; et on a bien fait en un sens. Il mé­rite d’être com­battu en tant que pen­seur du ca­tho­li­cisme le plus obs­cu­ran­tiste et le moins ré­for­mable; mais en­censé en tant que cau­seur vif et écla­tant et de la pro­vo­ca­tion. Le sys­tème de de Maistre, comme la plu­part des faux sys­tèmes, peut se ré­su­mer en un mot : l’ ab­so­lue. Cette unité ne peut être at­teinte par les hommes que si un pou­voir tout aussi les réunit. Le re­pré­sen­tant de ce pou­voir, d’après Maistre, est le pape dans le do­maine spi­ri­tuel, le roi dans le do­maine tem­po­rel, qui lui donnent son ca­rac­tère su­prême, in­dé­fec­tible et  : «L’un et l’autre», dit-il 1, «ex­priment cette haute puis­sance qui les do­mine toutes… qui gou­verne et n’est pas gou­ver­née, qui juge et n’est pas ju­gée». Voilà l’autorité consti­tuée : au­to­rité re­li­gieuse d’une part, au­to­rité ci­vile de l’autre. Rien de tout cela ne doit être confié aux et aux ; et à plus forte au bas . L’anarchie me­nace dès que l’insolente du pou­voir est pos­sible : «Il fau­drait avoir perdu l’esprit», s’exclame Maistre 2, «pour croire que ait chargé les aca­dé­mies de nous ap­prendre ce qu’Il est et ce que nous Lui de­vons; il ap­par­tient aux pré­lats, aux nobles… d’être les dé­po­si­taires et les gar­diens des vé­ri­tés conser­va­trices, d’apprendre aux na­tions… ce qui est vrai et ce qui est faux dans l’ordre mo­ral et spi­ri­tuel. Les autres n’ont pas de rai­son­ner sur ces sortes de ma­tières!» Ce n’est pas à la masse aveugle qu’il ap­par­tient de ré­flé­chir sur les prin­cipes obs­curs et sans ap­pel aux­quels elle est as­su­jet­tie; car «il y a des choses qu’on dé­truit en les mon­trant» 3. Maistre va bien plus loin. Dans ses «Lettres sur l’Inquisition», il épouse la cause d’un tri­bu­nal qui a fait cou­ler des tor­rents de , et qu’il ose dé­crire comme le «plus cir­cons­pect» et le «plus hu­main» de tout l’univers. Il lui at­tri­bue le main­tien en de la et de la contre les­quelles est ve­nue s’user la puis­sance de Na­po­léon. Si la avait eu le de jouir de l’Inquisition, les dé­sastres de la au­raient été évi­tés. De là à croire que «les abus valent in­fi­ni­ment mieux que les » 4 il n’y a qu’un pas. Maistre le fran­chit! Il est si dé­rai­son­nable, si ré­ac­tion­naire qu’il semble avoir été in­venté pour nous aga­cer : «Il brave, il dé­fie, il in­vec­tive, il ir­rite…; il va jusqu’à l’absurde et jusqu’au sup­plice… Que se­rait un au­tel en­touré de po­tences? Est-ce là de la per­sua­sive? N’est-ce pas plu­tôt une pro­vo­ca­tion à toute in­dé­pen­dante qui veut ado­rer et non trem­bler?», écrira La­mar­tine dans son «Cours fa­mi­lier de lit­té­ra­ture».

  1. «Tome II», p. 2. Icône Haut
  2. «Tome V», p. 108. Icône Haut
  1. «Tome VII», p. 38. Icône Haut
  2. «Cor­res­pon­dance di­plo­ma­tique de 1803 à 1810». Icône Haut

le comte de Maistre, « Œuvres complètes. Tome II. Du pape »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de «Du pape» du comte , am­bas­sa­deur du roi de Sar­daigne en , mi­nistre d’État. Es­prit élevé et pé­né­trant, tou­jours en éveil et tou­jours phi­lo­so­phant, le comte de Maistre est pour­tant resté en de­hors des grands hé­ri­tiers du XVIIIe siècle dont on re­com­mande la lec­ture aux élèves. On a parlé de lui ou pour le com­battre ou pour l’encenser; et on a bien fait en un sens. Il mé­rite d’être com­battu en tant que pen­seur du ca­tho­li­cisme le plus obs­cu­ran­tiste et le moins ré­for­mable; mais en­censé en tant que cau­seur vif et écla­tant et de la pro­vo­ca­tion. Le sys­tème de de Maistre, comme la plu­part des faux sys­tèmes, peut se ré­su­mer en un mot : l’ ab­so­lue. Cette unité ne peut être at­teinte par les hommes que si un pou­voir tout aussi les réunit. Le re­pré­sen­tant de ce pou­voir, d’après Maistre, est le pape dans le do­maine spi­ri­tuel, le roi dans le do­maine tem­po­rel, qui lui donnent son ca­rac­tère su­prême, in­dé­fec­tible et  : «L’un et l’autre», dit-il 1, «ex­priment cette haute puis­sance qui les do­mine toutes… qui gou­verne et n’est pas gou­ver­née, qui juge et n’est pas ju­gée». Voilà l’autorité consti­tuée : au­to­rité re­li­gieuse d’une part, au­to­rité ci­vile de l’autre. Rien de tout cela ne doit être confié aux et aux ; et à plus forte au bas . L’anarchie me­nace dès que l’insolente du pou­voir est pos­sible : «Il fau­drait avoir perdu l’esprit», s’exclame Maistre 2, «pour croire que ait chargé les aca­dé­mies de nous ap­prendre ce qu’Il est et ce que nous Lui de­vons; il ap­par­tient aux pré­lats, aux nobles… d’être les dé­po­si­taires et les gar­diens des vé­ri­tés conser­va­trices, d’apprendre aux na­tions… ce qui est vrai et ce qui est faux dans l’ordre mo­ral et spi­ri­tuel. Les autres n’ont pas de rai­son­ner sur ces sortes de ma­tières!» Ce n’est pas à la masse aveugle qu’il ap­par­tient de ré­flé­chir sur les prin­cipes obs­curs et sans ap­pel aux­quels elle est as­su­jet­tie; car «il y a des choses qu’on dé­truit en les mon­trant» 3. Maistre va bien plus loin. Dans ses «Lettres sur l’», il épouse la cause d’un tri­bu­nal qui a fait cou­ler des tor­rents de , et qu’il ose dé­crire comme le «plus cir­cons­pect» et le «plus hu­main» de tout l’univers. Il lui at­tri­bue le main­tien en de la et de la contre les­quelles est ve­nue s’user la puis­sance de Na­po­léon. Si la avait eu le de jouir de l’Inquisition, les dé­sastres de la au­raient été évi­tés. De là à croire que «les abus valent in­fi­ni­ment mieux que les » 4 il n’y a qu’un pas. Maistre le fran­chit! Il est si dé­rai­son­nable, si ré­ac­tion­naire qu’il semble avoir été in­venté pour nous aga­cer : «Il brave, il dé­fie, il in­vec­tive, il ir­rite…; il va jusqu’à l’absurde et jusqu’au sup­plice… Que se­rait un au­tel en­touré de po­tences? Est-ce là de la per­sua­sive? N’est-ce pas plu­tôt une pro­vo­ca­tion à toute in­dé­pen­dante qui veut ado­rer et non trem­bler?», écrira La­mar­tine dans son «Cours fa­mi­lier de lit­té­ra­ture».

  1. «Tome II», p. 2. Icône Haut
  2. «Tome V», p. 108. Icône Haut
  1. «Tome VII», p. 38. Icône Haut
  2. «Cor­res­pon­dance di­plo­ma­tique de 1803 à 1810». Icône Haut

le comte de Maistre, « Œuvres complètes. Tome I. Considérations sur la France • Fragments sur la France • etc. »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de «Consi­dé­ra­tions sur la » et autres œuvres du comte , am­bas­sa­deur du roi de Sar­daigne en , mi­nistre d’État. Es­prit élevé et pé­né­trant, tou­jours en éveil et tou­jours phi­lo­so­phant, le comte de Maistre est pour­tant resté en de­hors des grands hé­ri­tiers du XVIIIe siècle dont on re­com­mande la lec­ture aux élèves. On a parlé de lui ou pour le com­battre ou pour l’encenser; et on a bien fait en un sens. Il mé­rite d’être com­battu en tant que pen­seur du ca­tho­li­cisme le plus obs­cu­ran­tiste et le moins ré­for­mable; mais en­censé en tant que cau­seur vif et écla­tant et de la pro­vo­ca­tion. Le sys­tème de de Maistre, comme la plu­part des faux sys­tèmes, peut se ré­su­mer en un mot : l’ ab­so­lue. Cette unité ne peut être at­teinte par les hommes que si un pou­voir tout aussi les réunit. Le re­pré­sen­tant de ce pou­voir, d’après Maistre, est le pape dans le do­maine spi­ri­tuel, le roi dans le do­maine tem­po­rel, qui lui donnent son ca­rac­tère su­prême, in­dé­fec­tible et  : «L’un et l’autre», dit-il 1, «ex­priment cette haute puis­sance qui les do­mine toutes… qui gou­verne et n’est pas gou­ver­née, qui juge et n’est pas ju­gée». Voilà l’autorité consti­tuée : au­to­rité re­li­gieuse d’une part, au­to­rité ci­vile de l’autre. Rien de tout cela ne doit être confié aux et aux ; et à plus forte au bas . L’anarchie me­nace dès que l’insolente du pou­voir est pos­sible : «Il fau­drait avoir perdu l’esprit», s’exclame Maistre 2, «pour croire que ait chargé les aca­dé­mies de nous ap­prendre ce qu’Il est et ce que nous Lui de­vons; il ap­par­tient aux pré­lats, aux nobles… d’être les dé­po­si­taires et les gar­diens des vé­ri­tés conser­va­trices, d’apprendre aux na­tions… ce qui est vrai et ce qui est faux dans l’ordre mo­ral et spi­ri­tuel. Les autres n’ont pas de rai­son­ner sur ces sortes de ma­tières!» Ce n’est pas à la masse aveugle qu’il ap­par­tient de ré­flé­chir sur les prin­cipes obs­curs et sans ap­pel aux­quels elle est as­su­jet­tie; car «il y a des choses qu’on dé­truit en les mon­trant» 3. Maistre va bien plus loin. Dans ses «Lettres sur l’», il épouse la cause d’un tri­bu­nal qui a fait cou­ler des tor­rents de , et qu’il ose dé­crire comme le «plus cir­cons­pect» et le «plus hu­main» de tout l’univers. Il lui at­tri­bue le main­tien en de la et de la contre les­quelles est ve­nue s’user la puis­sance de Na­po­léon. Si la France avait eu le de jouir de l’Inquisition, les dé­sastres de la au­raient été évi­tés. De là à croire que «les abus valent in­fi­ni­ment mieux que les » 4 il n’y a qu’un pas. Maistre le fran­chit! Il est si dé­rai­son­nable, si ré­ac­tion­naire qu’il semble avoir été in­venté pour nous aga­cer : «Il brave, il dé­fie, il in­vec­tive, il ir­rite…; il va jusqu’à l’absurde et jusqu’au sup­plice… Que se­rait un au­tel en­touré de po­tences? Est-ce là de la per­sua­sive? N’est-ce pas plu­tôt une pro­vo­ca­tion à toute in­dé­pen­dante qui veut ado­rer et non trem­bler?», écrira La­mar­tine dans son «Cours fa­mi­lier de lit­té­ra­ture».

  1. «Tome II», p. 2. Icône Haut
  2. «Tome V», p. 108. Icône Haut
  1. «Tome VII», p. 38. Icône Haut
  2. «Cor­res­pon­dance di­plo­ma­tique de 1803 à 1810». Icône Haut

Hugo, « Les Chants du crépuscule • Les Voix intérieures • Les Rayons et les Ombres »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit des «Rayons et les Ombres» et autres œuvres de (XIXe siècle). Il faut re­con­naître que Hugo est non seule­ment le pre­mier en rang des de fran­çaise, de­puis que cette langue a été fixée; mais le seul qui ait un vrai­ment à ce titre d’écrivain dans sa pleine ac­cep­tion. Toutes les ca­té­go­ries de l’ lit­té­raire se trouvent en lui dé­jouées. La qui vou­drait dé­mê­ler cette ti­ta­nique, stu­pé­fiante, te­nant quelque chose de la di­vi­nité, est en pré­sence du pro­blème le plus in­so­luble. Fut-il poète, ro­man­cier ou pen­seur? Fut-il spi­ri­tua­liste ou réa­liste? Il fut tout cela et plus en­core. Nou­veau Qui­chotte, cet est allé por­ter ses pas sur tous les che­mins de l’esprit, mon­ter sur toutes les bar­ri­cades qu’il ren­con­trait, sou­tien des faibles et pour­fen­deur des ty­rans, son­neur de clai­rons et amant de la vio­lette; si bien qu’aucune des fa­milles qui se par­tagent l’espèce hu­maine au et au mo­ral ne peut se l’attribuer en­tiè­re­ment. Tan­tôt égal à la , com­paré à la mon­tagne, rap­pro­ché du , as­si­milé à l’ouragan, tan­tôt phi­lo­sophe, re­dres­seur des abus du siècle, pro­fes­seur d’histoire et guide , tan­tôt chargé d’apitoyer le sur la femme, de le mettre à ge­noux de­vant le vieillard pour le vé­né­rer et de­vant l’enfant pour le conso­ler, il fut je ne sais quel suc­cé­dané de la . Avec sa , c’est un monde cy­clo­péen d’idées et d’impressions qui est parti, un conti­nent de gra­nit qui s’est dé­ta­ché et a roulé avec fra­cas au fond des abîmes. «Qui pour­rait dire : “J’aime ceci ou cela dans Hugo”?», dit Édouard Dru­mont 1. «Comme l’océan, comme la mon­tagne, comme la fo­rêt, ce éveille l’idée de l’. Ce qu’on aime dans l’océan, ce n’est point une vague, ce sont des vagues in­ces­sam­ment re­nou­ve­lées; ce qu’on aime dans la fo­rêt, ce n’est point un arbre ou une feuille, ce sont ces mil­liers d’ et ces mil­liers de feuilles qui confondent leur ver­dure et leur bruit.»

  1. «Vic­tor Hugo de­vant l’opinion», p. 104. Icône Haut

Hugo, « Les Orientales • Les Feuilles d’automne »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit des «Feuilles d’automne» et autres œuvres de (XIXe siècle). Il faut re­con­naître que Hugo est non seule­ment le pre­mier en rang des de fran­çaise, de­puis que cette langue a été fixée; mais le seul qui ait un vrai­ment à ce titre d’écrivain dans sa pleine ac­cep­tion. Toutes les ca­té­go­ries de l’ lit­té­raire se trouvent en lui dé­jouées. La qui vou­drait dé­mê­ler cette ti­ta­nique, stu­pé­fiante, te­nant quelque chose de la di­vi­nité, est en pré­sence du pro­blème le plus in­so­luble. Fut-il poète, ro­man­cier ou pen­seur? Fut-il spi­ri­tua­liste ou réa­liste? Il fut tout cela et plus en­core. Nou­veau Qui­chotte, cet est allé por­ter ses pas sur tous les che­mins de l’esprit, mon­ter sur toutes les bar­ri­cades qu’il ren­con­trait, sou­tien des faibles et pour­fen­deur des ty­rans, son­neur de clai­rons et amant de la vio­lette; si bien qu’aucune des fa­milles qui se par­tagent l’espèce hu­maine au et au mo­ral ne peut se l’attribuer en­tiè­re­ment. Tan­tôt égal à la , com­paré à la mon­tagne, rap­pro­ché du , as­si­milé à l’ouragan, tan­tôt phi­lo­sophe, re­dres­seur des abus du siècle, pro­fes­seur d’histoire et guide , tan­tôt chargé d’apitoyer le sur la femme, de le mettre à ge­noux de­vant le vieillard pour le vé­né­rer et de­vant l’enfant pour le conso­ler, il fut je ne sais quel suc­cé­dané de la . Avec sa , c’est un monde cy­clo­péen d’idées et d’impressions qui est parti, un conti­nent de gra­nit qui s’est dé­ta­ché et a roulé avec fra­cas au fond des abîmes. «Qui pour­rait dire : “J’aime ceci ou cela dans Hugo”?», dit Édouard Dru­mont 1. «Comme l’océan, comme la mon­tagne, comme la fo­rêt, ce éveille l’idée de l’. Ce qu’on aime dans l’océan, ce n’est point une vague, ce sont des vagues in­ces­sam­ment re­nou­ve­lées; ce qu’on aime dans la fo­rêt, ce n’est point un arbre ou une feuille, ce sont ces mil­liers d’ et ces mil­liers de feuilles qui confondent leur ver­dure et leur bruit.»

  1. «Vic­tor Hugo de­vant l’opinion», p. 104. Icône Haut

Hugo, « Odes et Ballades »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit des « et Bal­lades» et autres œuvres de (XIXe siècle). Il faut re­con­naître que Hugo est non seule­ment le pre­mier en rang des de fran­çaise, de­puis que cette langue a été fixée; mais le seul qui ait un vrai­ment à ce titre d’écrivain dans sa pleine ac­cep­tion. Toutes les ca­té­go­ries de l’ lit­té­raire se trouvent en lui dé­jouées. La qui vou­drait dé­mê­ler cette ti­ta­nique, stu­pé­fiante, te­nant quelque chose de la di­vi­nité, est en pré­sence du pro­blème le plus in­so­luble. Fut-il poète, ro­man­cier ou pen­seur? Fut-il spi­ri­tua­liste ou réa­liste? Il fut tout cela et plus en­core. Nou­veau Qui­chotte, cet est allé por­ter ses pas sur tous les che­mins de l’esprit, mon­ter sur toutes les bar­ri­cades qu’il ren­con­trait, sou­tien des faibles et pour­fen­deur des ty­rans, son­neur de clai­rons et amant de la vio­lette; si bien qu’aucune des fa­milles qui se par­tagent l’espèce hu­maine au et au mo­ral ne peut se l’attribuer en­tiè­re­ment. Tan­tôt égal à la , com­paré à la mon­tagne, rap­pro­ché du , as­si­milé à l’ouragan, tan­tôt phi­lo­sophe, re­dres­seur des abus du siècle, pro­fes­seur d’histoire et guide , tan­tôt chargé d’apitoyer le sur la femme, de le mettre à ge­noux de­vant le vieillard pour le vé­né­rer et de­vant l’enfant pour le conso­ler, il fut je ne sais quel suc­cé­dané de la . Avec sa , c’est un monde cy­clo­péen d’idées et d’impressions qui est parti, un conti­nent de gra­nit qui s’est dé­ta­ché et a roulé avec fra­cas au fond des abîmes. «Qui pour­rait dire : “J’aime ceci ou cela dans Hugo”?», dit Édouard Dru­mont 1. «Comme l’océan, comme la mon­tagne, comme la fo­rêt, ce éveille l’idée de l’. Ce qu’on aime dans l’océan, ce n’est point une vague, ce sont des vagues in­ces­sam­ment re­nou­ve­lées; ce qu’on aime dans la fo­rêt, ce n’est point un arbre ou une feuille, ce sont ces mil­liers d’ et ces mil­liers de feuilles qui confondent leur ver­dure et leur bruit.»

  1. «Vic­tor Hugo de­vant l’opinion», p. 104. Icône Haut

« La Colonne trajane au musée de Saint-Germain »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de la co­lonne tra­jane. De tous les fo­rums ro­mains, ce­lui de l’Empereur Tra­jan était le plus beau, le plus ré­gu­lier, avec sa place en­tou­rée de ta­vernes à l’usage des mar­chands, ses de toute es­pèce, sa ba­si­lique, son , ses deux , l’une pour les col­lec­tions grecques et l’autre pour les la­tines, et tant d’autres somp­tuo­si­tés. L’ de ceux qui voyaient pour la pre­mière fois cet en­semble unique de construc­tions en était vi­ve­ment frap­pée, comme en té­moigne Am­mien Mar­cel­lin : «construc­tions gi­gan­tesques» («gi­gan­teos contex­tus»), dit-il, «qui dé­fient la » («nec re­latu ef­fa­biles»), «et que les mor­tels ne cher­che­ront plus à re­pro­duire» («nec rur­sus mor­ta­li­bus ad­pe­ten­dos»). Qu’est de­ve­nue cette si pro­di­gieuse ma­gni­fi­cence? Il n’en reste aujourd’hui que la co­lonne qui se trou­vait au mi­lieu et qui est bien conser­vée. L’idée de ce mo­nu­ment est gran­diose. D’un pié­des­tal sur le­quel on peut lire : «Le sé­nat et le (ont consa­cré cette co­lonne) à l’Empereur, fils du di­vin Nerva, Tra­jan… père de la pa­trie, pour mar­quer de quelle hau­teur était la mon­tagne et la place qu’on a dé­blayées pour y construire de si grands » s’élance une de ces co­lonnes creuses que l’on ap­pe­lait «co­lumna co­chleata», à cause de l’escalier tour­nant en co­li­ma­çon («co­chlea») creusé dans le marbre et condui­sant au som­met, là où re­po­sait la sta­tue de l’Empereur Tra­jan. Mais le mé­rite prin­ci­pal de ce mo­nu­ment est ailleurs : il est dans les qui, en forme de spi­rale, le dé­corent de haut en bas. Tous les ex­ploits que Tra­jan a faits pen­dant son règne, entre autres les vic­toires qu’il a rem­por­tées sur les Daces (en ), fi­gurent sur ces bas-re­liefs his­to­riques ser­pen­tant au­tour de la co­lonne comme les pages im­mor­telles d’un rou­leau ma­nus­crit («vo­lu­men»). La suite conti­nue qu’ils forment, monte vers l’Empereur vic­to­rieux et vient se pros­ter­ner à ses pieds. L’effet est ma­jes­tueux. L’ensemble est d’une puis­sance, d’une éner­gie in­con­tes­tables. «On y voit des , des , des en­seignes, des marches, des camps, des ma­chines, des ha­rangues aux , des sa­cri­fices, des , des vic­toires, des tro­phées… Tout est ex­primé avec , comme on peut l’observer dans l’intrépidité de ces daces qui se jettent, ar­mées de torches, sur les pri­son­niers ro­mains; et… le déses­poir de leurs ma­ris qui, pour ne pas tom­ber dans l’, brûlent leur ville et s’empoisonnent», dit très bien Fran­cesco Mi­li­zia

Nosaka, « Nosaka aime les chats »

éd. Ph. Picquier, Arles

éd. Ph. Pic­quier, Arles

Il s’agit de «No­saka aime les chats» («Wa­ga­hai wa neko ga suki» 1) de M.  2, écri­vain de ta­lent, mais qui, har­celé par le sen­ti­ment de , a semé dans presque toutes les pages de ses ré­cits l’obscénité la plus gro­tesque et la plus ani­male. Ce sen­ti­ment de culpa­bi­lité est né en lui au len­de­main de la Se­conde mon­diale, quand il a vu mou­rir sa sœur âgée d’un an et quatre mois, toute dé­char­née après des mois de fa­mine : «Quand je pense com­ment ma sœur, qui n’avait plus que les os et la peau, ne par­ve­nait plus à re­le­ver la tête ni même à pleu­rer, com­ment elle mou­rut seule, com­ment en­fin il ne res­tait que des cendres après sa cré­ma­tion, je me rends compte que j’avais été trop pré­oc­cupé par ma propre sur­vie. Dans les hor­reurs de la fa­mine, j’avais mangé ses parts de nour­ri­ture» 3. Son tra­vail d’écrivain s’est en­tiè­re­ment construit sur cette qu’il a ce­pen­dant tra­ves­tie, nar­rée en se fai­sant plai­sir à lui-même, dans «La Tombe des lu­cioles». Car, en , il n’était pas aussi tendre que l’adolescent du ré­cit. Il était cruel : c’est en man­geant le dû de sa sœur qu’il a sur­vécu, et c’est en re­fou­lant cette qu’il a écrit «La Tombe des lu­cioles» qui lui a per­mis par la suite de ga­gner sa  : «J’ai tri­ché avec cette — la plus grande, je crois, qui se puisse ima­gi­ner — celle d’[un pa­rent plongé] dans l’incapacité de nour­rir son en­fant. Et qui suis plu­tôt d’un na­tu­rel al­lègre, j’en garde une dette, une bles­sure pro­fonde, même si les sou­ve­nirs à la longue s’estompent» 4. C’est cette bles­sure in­fec­tée, sa­tu­rée d’odeurs nau­séa­bondes, que M. No­saka ouvre au dans ses ré­cits et qu’il met sous le nez de son pu­blic, en criant aussi haut qu’il peut, la bouche en­core amère des ab­sinthes hu­maines : Re­gar­dez!

  1. En ja­po­nais «吾輩は猫が好き». Icône Haut
  2. En ja­po­nais 野坂昭如. Icône Haut
  1. Akiyuki No­saka, «五十歩の距離» («La Dis­tance de cin­quante pas»), in­édit en . Icône Haut
  2. Phi­lippe Pons, «“Je garde une bles­sure pro­fonde” : un en­tre­tien avec le ro­man­cier». Icône Haut

Nosaka, « Le Moine-Cigale, “Iro hôshi” »

dans « [Nouvelles japonaises]. Tome III. Les Paons, la Grenouille, le Moine-Cigale (1955-1970) » (éd. Ph. Picquier, Arles), p. 125-144

dans «[]. Tome III. Les Paons, la Gre­nouille, le Moine-Ci­gale (1955-1970)» (éd. Ph. Pic­quier, Arles), p. 125-144

Il s’agit du «Moine-Ci­gale» («Iro hô­shi» 1) de M.  2, écri­vain de ta­lent, mais qui, har­celé par le sen­ti­ment de , a semé dans presque toutes les pages de ses ré­cits l’obscénité la plus gro­tesque et la plus ani­male. Ce sen­ti­ment de culpa­bi­lité est né en lui au len­de­main de la Se­conde mon­diale, quand il a vu mou­rir sa sœur âgée d’un an et quatre mois, toute dé­char­née après des mois de fa­mine : «Quand je pense com­ment ma sœur, qui n’avait plus que les os et la peau, ne par­ve­nait plus à re­le­ver la tête ni même à pleu­rer, com­ment elle mou­rut seule, com­ment en­fin il ne res­tait que des cendres après sa cré­ma­tion, je me rends compte que j’avais été trop pré­oc­cupé par ma propre sur­vie. Dans les hor­reurs de la fa­mine, j’avais mangé ses parts de nour­ri­ture» 3. Son tra­vail d’écrivain s’est en­tiè­re­ment construit sur cette qu’il a ce­pen­dant tra­ves­tie, nar­rée en se fai­sant plai­sir à lui-même, dans «La Tombe des lu­cioles». Car, en , il n’était pas aussi tendre que l’adolescent du ré­cit. Il était cruel : c’est en man­geant le dû de sa sœur qu’il a sur­vécu, et c’est en re­fou­lant cette qu’il a écrit «La Tombe des lu­cioles» qui lui a per­mis par la suite de ga­gner sa  : «J’ai tri­ché avec cette — la plus grande, je crois, qui se puisse ima­gi­ner — celle d’[un pa­rent plongé] dans l’incapacité de nour­rir son en­fant. Et qui suis plu­tôt d’un na­tu­rel al­lègre, j’en garde une dette, une bles­sure pro­fonde, même si les sou­ve­nirs à la longue s’estompent» 4. C’est cette bles­sure in­fec­tée, sa­tu­rée d’odeurs nau­séa­bondes, que M. No­saka ouvre au dans ses ré­cits et qu’il met sous le nez de son pu­blic, en criant aussi haut qu’il peut, la bouche en­core amère des ab­sinthes hu­maines : Re­gar­dez!

  1. En ja­po­nais «色法師». Icône Haut
  2. En ja­po­nais 野坂昭如. Icône Haut
  1. Akiyuki No­saka, «五十歩の距離» («La Dis­tance de cin­quante pas»), in­édit en . Icône Haut
  2. Phi­lippe Pons, «“Je garde une bles­sure pro­fonde” : un en­tre­tien avec le ro­man­cier». Icône Haut