Mot-clefvie rurale

su­jet

Blaga, «Les Différentielles divines»

éd. Librairie du savoir, coll. Philosophia perennis, Paris

éd. Li­brai­rie du sa­voir, coll. Phi­lo­so­phia per­en­nis, Pa­ris

Il s’agit des «Dif­fé­ren­tielles di­vines» («Di­fe­renția­lele di­vine») de Lu­cian Blaga, poète, dra­ma­turge et phi­lo­sophe rou­main, dont l’œuvre su­blime se ré­sume en un vers : «Je crois que l’éternité est née au vil­lage» 1. Né en 1895 au vil­lage de Lan­crăm, dont le nom, dit-il, rap­pelle «la so­no­rité des larmes» («su­ne­tele la­cri­mei»), fils d’un prêtre or­tho­doxe, Blaga fit son en­trée à l’Académie rou­maine sans pro­non­cer, comme de cou­tume, l’éloge de son pré­dé­ces­seur. Son dis­cours de ré­cep­tion fut un éloge du vil­lage ro­main, comme le fut aussi toute son œuvre. Pour l’auteur de «L’Âme du vil­lage» («Su­fle­tul sa­tu­lui»), les pay­sages cam­pa­gnards, les che­mins de terre et de boue sont «le seuil du monde» («prag de lume»), le vil­lage-idée d’où partent les vastes ho­ri­zons de la créa­tion ar­tis­tique et poé­tique. Les re­gards rê­veurs des pay­sans sondent l’univers, se per­dant dans l’infini. L’homme de la ville au contraire vit «dans le frag­ment, la re­la­ti­vité, le concret mé­ca­nique, dans une tris­tesse constante et dans une su­per­fi­cia­lité lu­cide». Cet éloge de l’âme du vil­lage comme creu­set, comme âme de la na­tion est dou­blé de l’angoisse de­vant le mys­tère de ce que Blaga ap­pelle «le Grand Ano­nyme» («Ma­rele Ano­nim»), c’est-à-dire Dieu. Face à cette an­goisse-là, la so­lu­tion qu’il ébauche, en s’inspirant des ro­man­tiques al­le­mands, passe par le sa­cri­fice de l’individu en tant qu’individu au pro­fit d’une spi­ri­tua­lité col­lec­tive, ano­nyme et spon­ta­née. Puisque les grandes ques­tions du monde res­tent sans ré­ponse, la sa­gesse se­rait de se taire et de se fondre avec la terre dans les sillons de l’éternité :

«Re­garde, c’est le soir», dit Blaga 2.
«L’âme du vil­lage pal­pite près de nous
Comme une odeur ti­mide d’herbe cou­pée,
Comme une chute de fu­mée des avant-toits de paille…
»

  1. En rou­main «Eu cred că veș­ni­cia s-a năs­cut la sat». Haut
  1. Dans Constan­tin Cio­praga, «La Per­son­na­lité de la lit­té­ra­ture rou­maine». Haut

Hésiode, «La Théogonie • Les Travaux et les Jours • Le Catalogue des femmes» • «La Dispute d’Homère et d’Hésiode»

éd. Librairie générale française, coll. Classiques de poche, Paris

éd. Li­brai­rie gé­né­rale fran­çaise, coll. Clas­siques de poche, Pa­ris

Il s’agit de la «Théo­go­nie» («Theo­go­nia» 1), des «Tra­vaux et des Jours» («Erga kai Hê­me­rai» 2) et du «Ca­ta­logue des femmes» («Ka­ta­lo­gos gy­nai­kôn» 3), sorte de ma­nuels en vers où Hé­siode 4 a jeté un peu confu­sé­ment my­tho­lo­gie, mo­rale, na­vi­ga­tion, construc­tion de cha­riots, de char­rues, ca­len­drier des la­bours, des se­mailles, des mois­sons, al­ma­nach des fêtes qui in­ter­rompent chaque an­née le tra­vail du pay­san; car à une époque où les connais­sances hu­maines n’étaient pas en­core sé­pa­rées et dis­tinctes, chaque chef de fa­mille avait be­soin de tout cela (VIIIe siècle av. J.-C.). Hé­siode a été mis en pa­ral­lèle avec Ho­mère par les Grecs eux-mêmes, et nous pos­sé­dons une fic­tion in­ti­tu­lée «La Dis­pute d’Homère et d’Hésiode» («Agôn Ho­mê­rou kai Hê­sio­dou» 5). En fait, bien que l’un et l’autre puissent être re­gar­dés comme les pères de la my­tho­lo­gie, on ne sau­rait ima­gi­ner deux poètes plus op­po­sés. La poé­sie ho­mé­rique, par ses ori­gines et par son prin­ci­pal dé­ve­lop­pe­ment, ap­par­tient à la Grèce d’Asie; elle est d’emblée l’expression la plus brillante de l’humanité. Un lec­teur sous le charme du gé­nie d’Homère, de ses épi­sodes si re­mar­quables d’essor et de dé­ploie­ment, ne re­trou­vera chez Hé­siode qu’une mé­diocre par­tie de toutes ces beau­tés. Simple ha­bi­tant des champs, prêtre d’un temple des muses sur le mont Hé­li­con, Hé­siode est loin d’avoir dans l’esprit un mo­dèle com­pa­rable à ce­lui du hé­ros ho­mé­rique. Il dé­teste «la guerre mau­vaise» 6 chan­tée par les aèdes; il la consi­dère comme un fléau que les dieux épargnent à leurs plus fi­dèles su­jets. Son ob­jet pré­féré, à lui, Grec d’Europe, n’est pas la gloire du com­bat, chose étran­gère à sa vie, mais la paix du tra­vail, ré­glée au rythme des jours et des sa­cri­fices re­li­gieux. C’est là sa le­çon constante, sa per­pé­tuelle ren­gaine. «Hé­siode était plus agri­cul­teur que poète. Il songe tou­jours à ins­truire, ra­re­ment à plaire; ja­mais une di­gres­sion agréable ne rompt chez lui la conti­nuité et l’ennui des pré­ceptes», dit l’abbé Jacques De­lille 7. Son poème des «Tra­vaux» nous per­met de nous le re­pré­sen­ter as­sez exac­te­ment. Nous le voyons sur les pentes de l’Hélicon, vêtu d’«un man­teau moel­leux ainsi qu’une longue tu­nique», re­tour­ner la terre et en­se­men­cer. «Une paire de bons bœufs de neuf ans», dont il touche de l’aiguillon le dos, traîne len­te­ment la char­rue. C’est un pay­san qui parle aux pay­sans. Le tra­vail de la terre est tout pour lui : il est la condi­tion de l’indépendance et du bien-être; il est en même temps le de­voir en­vers les dieux, qui n’ont pas im­posé aux hommes de loi plus vive et plus im­pé­rieuse. Par­tout il re­com­mande l’effort, il blâme par­tout l’oisiveté.

  1. En grec «Θεογονία». Haut
  2. En grec «Ἔργα καὶ Ἡμέραι». Haut
  3. En grec «Κατάλογος γυναικῶν». Haut
  4. En grec Ἡσίοδος. Au­tre­fois trans­crit Éziode. Haut
  1. En grec «Ἀγὼν Ὁμήρου καὶ Ἡσιόδου». Haut
  2. «Les Tra­vaux et les Jours», v. 161. Haut
  3. «Dis­cours pré­li­mi­naire aux “Géor­giques” de Vir­gile». Haut

Blaga, «Manole, Maître bâtisseur : drame en cinq actes»

éd. Librairie bleue, coll. Théâtre, Troyes

éd. Li­brai­rie bleue, coll. Théâtre, Troyes

Il s’agit de «Ma­nole, Maître bâ­tis­seur» («Meș­te­rul Ma­nole») de Lu­cian Blaga, poète, dra­ma­turge et phi­lo­sophe rou­main, dont l’œuvre su­blime se ré­sume en un vers : «Je crois que l’éternité est née au vil­lage» 1. Né en 1895 au vil­lage de Lan­crăm, dont le nom, dit-il, rap­pelle «la so­no­rité des larmes» («su­ne­tele la­cri­mei»), fils d’un prêtre or­tho­doxe, Blaga fit son en­trée à l’Académie rou­maine sans pro­non­cer, comme de cou­tume, l’éloge de son pré­dé­ces­seur. Son dis­cours de ré­cep­tion fut un éloge du vil­lage ro­main, comme le fut aussi toute son œuvre. Pour l’auteur de «L’Âme du vil­lage» («Su­fle­tul sa­tu­lui»), les pay­sages cam­pa­gnards, les che­mins de terre et de boue sont «le seuil du monde» («prag de lume»), le vil­lage-idée d’où partent les vastes ho­ri­zons de la créa­tion ar­tis­tique et poé­tique. Les re­gards rê­veurs des pay­sans sondent l’univers, se per­dant dans l’infini. L’homme de la ville au contraire vit «dans le frag­ment, la re­la­ti­vité, le concret mé­ca­nique, dans une tris­tesse constante et dans une su­per­fi­cia­lité lu­cide». Cet éloge de l’âme du vil­lage comme creu­set, comme âme de la na­tion est dou­blé de l’angoisse de­vant le mys­tère de ce que Blaga ap­pelle «le Grand Ano­nyme» («Ma­rele Ano­nim»), c’est-à-dire Dieu. Face à cette an­goisse-là, la so­lu­tion qu’il ébauche, en s’inspirant des ro­man­tiques al­le­mands, passe par le sa­cri­fice de l’individu en tant qu’individu au pro­fit d’une spi­ri­tua­lité col­lec­tive, ano­nyme et spon­ta­née. Puisque les grandes ques­tions du monde res­tent sans ré­ponse, la sa­gesse se­rait de se taire et de se fondre avec la terre dans les sillons de l’éternité :

«Re­garde, c’est le soir», dit Blaga 2.
«L’âme du vil­lage pal­pite près de nous
Comme une odeur ti­mide d’herbe cou­pée,
Comme une chute de fu­mée des avant-toits de paille…
»

  1. En rou­main «Eu cred că veș­ni­cia s-a năs­cut la sat». Haut
  1. Dans Constan­tin Cio­praga, «La Per­son­na­lité de la lit­té­ra­ture rou­maine». Haut

Blaga, «Poèmes»

éd. Minerva, Bucarest

éd. Mi­nerva, Bu­ca­rest

Il s’agit des «Poèmes» («Poeme») de Lu­cian Blaga, poète, dra­ma­turge et phi­lo­sophe rou­main, dont l’œuvre su­blime se ré­sume en un vers : «Je crois que l’éternité est née au vil­lage» 1. Né en 1895 au vil­lage de Lan­crăm, dont le nom, dit-il, rap­pelle «la so­no­rité des larmes» («su­ne­tele la­cri­mei»), fils d’un prêtre or­tho­doxe, Blaga fit son en­trée à l’Académie rou­maine sans pro­non­cer, comme de cou­tume, l’éloge de son pré­dé­ces­seur. Son dis­cours de ré­cep­tion fut un éloge du vil­lage ro­main, comme le fut aussi toute son œuvre. Pour l’auteur de «L’Âme du vil­lage» («Su­fle­tul sa­tu­lui»), les pay­sages cam­pa­gnards, les che­mins de terre et de boue sont «le seuil du monde» («prag de lume»), le vil­lage-idée d’où partent les vastes ho­ri­zons de la créa­tion ar­tis­tique et poé­tique. Les re­gards rê­veurs des pay­sans sondent l’univers, se per­dant dans l’infini. L’homme de la ville au contraire vit «dans le frag­ment, la re­la­ti­vité, le concret mé­ca­nique, dans une tris­tesse constante et dans une su­per­fi­cia­lité lu­cide». Cet éloge de l’âme du vil­lage comme creu­set, comme âme de la na­tion est dou­blé de l’angoisse de­vant le mys­tère de ce que Blaga ap­pelle «le Grand Ano­nyme» («Ma­rele Ano­nim»), c’est-à-dire Dieu. Face à cette an­goisse-là, la so­lu­tion qu’il ébauche, en s’inspirant des ro­man­tiques al­le­mands, passe par le sa­cri­fice de l’individu en tant qu’individu au pro­fit d’une spi­ri­tua­lité col­lec­tive, ano­nyme et spon­ta­née. Puisque les grandes ques­tions du monde res­tent sans ré­ponse, la sa­gesse se­rait de se taire et de se fondre avec la terre dans les sillons de l’éternité :

«Re­garde, c’est le soir», dit Blaga 2.
«L’âme du vil­lage pal­pite près de nous
Comme une odeur ti­mide d’herbe cou­pée,
Comme une chute de fu­mée des avant-toits de paille…
»

  1. En rou­main «Eu cred că veș­ni­cia s-a năs­cut la sat». Haut
  1. Dans Constan­tin Cio­praga, «La Per­son­na­lité de la lit­té­ra­ture rou­maine». Haut

Blaga, «Poèmes choisis»

éd. Grai și Suflet, coll. Ianus, Bucarest

éd. Grai și Su­flet, coll. Ia­nus, Bu­ca­rest

Il s’agit des «Poèmes choi­sis» («Poeme alese») de Lu­cian Blaga, poète, dra­ma­turge et phi­lo­sophe rou­main, dont l’œuvre su­blime se ré­sume en un vers : «Je crois que l’éternité est née au vil­lage» 1. Né en 1895 au vil­lage de Lan­crăm, dont le nom, dit-il, rap­pelle «la so­no­rité des larmes» («su­ne­tele la­cri­mei»), fils d’un prêtre or­tho­doxe, Blaga fit son en­trée à l’Académie rou­maine sans pro­non­cer, comme de cou­tume, l’éloge de son pré­dé­ces­seur. Son dis­cours de ré­cep­tion fut un éloge du vil­lage ro­main, comme le fut aussi toute son œuvre. Pour l’auteur de «L’Âme du vil­lage» («Su­fle­tul sa­tu­lui»), les pay­sages cam­pa­gnards, les che­mins de terre et de boue sont «le seuil du monde» («prag de lume»), le vil­lage-idée d’où partent les vastes ho­ri­zons de la créa­tion ar­tis­tique et poé­tique. Les re­gards rê­veurs des pay­sans sondent l’univers, se per­dant dans l’infini. L’homme de la ville au contraire vit «dans le frag­ment, la re­la­ti­vité, le concret mé­ca­nique, dans une tris­tesse constante et dans une su­per­fi­cia­lité lu­cide». Cet éloge de l’âme du vil­lage comme creu­set, comme âme de la na­tion est dou­blé de l’angoisse de­vant le mys­tère de ce que Blaga ap­pelle «le Grand Ano­nyme» («Ma­rele Ano­nim»), c’est-à-dire Dieu. Face à cette an­goisse-là, la so­lu­tion qu’il ébauche, en s’inspirant des ro­man­tiques al­le­mands, passe par le sa­cri­fice de l’individu en tant qu’individu au pro­fit d’une spi­ri­tua­lité col­lec­tive, ano­nyme et spon­ta­née. Puisque les grandes ques­tions du monde res­tent sans ré­ponse, la sa­gesse se­rait de se taire et de se fondre avec la terre dans les sillons de l’éternité :

«Re­garde, c’est le soir», dit Blaga 2.
«L’âme du vil­lage pal­pite près de nous
Comme une odeur ti­mide d’herbe cou­pée,
Comme une chute de fu­mée des avant-toits de paille…
»

  1. En rou­main «Eu cred că veș­ni­cia s-a năs­cut la sat». Haut
  1. Dans Constan­tin Cio­praga, «La Per­son­na­lité de la lit­té­ra­ture rou­maine». Haut