Il s’agit du « Livre de phrases de trois mots » 1 (« San zi jing » 2), manuel d’enseignement élémentaire (XIIIe siècle apr. J.-C.) que les maîtres ou les parents mettaient entre les mains des débutants, pour qu’il fût appris par cœur, retenu et récité. Le texte, comme le titre l’indique, était disposé par phrases de trois mots ou de trois caractères, de telle sorte qu’il offrait le précieux avantage de constituer une introduction idéale à la lecture du chinois classique, en même temps que le résumé des connaissances qui formaient la base de l’éducation confucéenne. « À l’origine de l’homme, sa nature est radicalement bonne ; la nature rapproche les hommes, mais leur conduite les éloigne ». Tel était le début du « Livre de phrases de trois mots » 3. La suite traitait de l’importance des devoirs, des trois grands pouvoirs, des quatre saisons, des cinq vertus constantes, des six espèces de grains, des sept passions, des huit notes de musique, des neuf degrés de parenté, des dix devoirs relatifs, de l’histoire générale et de la succession des dynasties impériales ; le tout complété par des remarques sur l’importance de l’étude. Pendant sept siècles et jusqu’à la Révolution culturelle, ce fut le livre le plus répandu dans les écoles primaires de l’Asie orientale : « Ce fut en réalité », dit un commentateur 4, « comme un radeau que, dans les commencements de leurs études, les jeunes gens qui cherchaient à s’instruire pouvaient employer pour arriver à atteindre les sources profondes de l’étude de l’Antiquité ». Son influence fut immense, et plusieurs de ses phrases de trois mots sont passées en locutions proverbiales dans l’usage courant : « C’est un livre d’une morale irréprochable », dit Marie-René Roussel, marquis de Courcy 5, « mais d’une parfaite aridité, procédant par sentences brèves, affirmatives, heurtées… La plupart de [ses] notions dépassent de beaucoup l’intelligence de l’enfant. Aussi, répète-t-il d’abord le “San zi jing” uniquement comme il répéterait un syllabaire, sans comprendre les signes qu’il lit, ni les sons qu’il émet. Quand, après deux années d’un labeur assidu, il énonce sans hésitation tous les caractères du classique trimétrique, avec les intonations voulues, et les retrace élégamment à l’aide du pinceau, son maître commence à lui en expliquer la signification ; et dès que son intelligence peut la saisir, il place sous ses yeux d’autres ouvrages, comme “Le Livre des mille mots” où il retrouve les mêmes mots et fait connaissance avec de nouveaux signes ».
Il n’existe pas moins de quatre traductions françaises du « Livre de phrases de trois mots », mais s’il fallait n’en choisir qu’une seule, je choisirais celle de Stanislas Julien.
「苟不學,
曷為人?
蠶吐絲,
蜂釀蜜;
人不學,
不如物.
幼而學,
壯而行……」— Passage dans la langue originale
« Si vous n’étudiez pas, comment pourrez-vous mériter le nom d’hommes ?
Le bombyx donne la soie, l’abeille produit le miel ; si l’homme n’étudie pas, il est inférieur à ces petits animaux.
Quand vous aurez étudié dans la jeunesse, vous serez capables d’agir dans l’âge mûr. »
— Passage dans la traduction de Julien
« S’il se trouve des individus qui ne veuillent pas étudier, comment pourrait-on les considérer comme des hommes ?
Le ver à soie vomit de son sein le fil de soie ; l’abeille recueille le miel qu’elle produit. L’homme qui n’a pas voulu étudier est resté inférieur aux animaux.
Jeunes gens, appliquez-vous à l’étude et, dans l’âge mûr, mettez vos connaissances en pratique. »
— Passage dans la traduction de Guillaume Pauthier (« Le Livre classique des trois caractères », XIXe siècle)
« Si vous n’étudiez pas, méritez-vous d’être appelés des hommes ?
Le ver tire la soie de son estomac ; l’abeille élabore le miel. L’homme qui n’étudie point ne vaut pas même un animal.
Étudiez pendant la jeunesse, agissez pendant l’âge mûr. »
— Passage dans la traduction d’Abel des Michels (« “Tam tu kinh”, ou le Livre des phrases de trois caractères », XIXe siècle)
« Si vous n’étudiez pas, quel genre d’homme deviendrez-vous ?
Le ver fabrique la soie, l’abeille le miel. Si l’homme n’étudie pas, il n’égalera même pas ces insectes.
Jeune, étudiez ; plus âgé, mettez en pratique (votre savoir)… »
— Passage dans la traduction de M. Michel Deverge (« Le Classique des trois caractères : un compendium du rudiment », éd. électronique)
« Si non studetis, quomodo fietis homines ?
Bombyx evomit filum sericum, apis fingit mel. Si homines non student, non sunt sicut hæc bestiolæ (sunt his bestiolis inferiores).
Cum in juventute studueritis, natu grandiores agetis. »
— Passage dans la traduction latine de Julien (« Trium litterarum Liber, “San-tseu-king” », XIXe siècle)
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- Édition et traduction d’Abel des Michels (1882) [Source : Bibliothèque nationale de France]
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- Traduction de M. Michel Deverge (éd. électronique) [Source : Bextes et Trouillons]
- Édition et traduction latine de Stanislas Julien (1864) [Source : Google Livres]
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Consultez cette bibliographie succincte en langue française
- « Variétés tonkinoises. Philologie, enseignement, littérature… » (éd. Imprimerie Schneider, Hanoï) [Source : Bibliothèque nationale de France]
- Léon de Rosny, « Les Livres élémentaires des écoles chinoises » dans « Variétés orientales » (XIXe siècle), p. 163-170 [Source : Google Livres].
- Parfois traduit « Classique trimétrique » ou « Le Livre classique des trois caractères ».
- En chinois « 三字經 ». Autrefois transcrit « San tzu ching », « San-tsi-king », « San-tsze-king », « San-tse-king », « San-ze-king » ou « San-tseu-king ».
- À rapprocher du grand principe de Rousseau « que la nature a fait l’homme heureux et bon, mais que la société le déprave », etc.