Il s’agit de Kim So-wŏl 1, l’un des poètes coréens les plus représentatifs de l’époque de l’occupation japonaise. Né et mort dans la gêne, il n’alla à l’école que par intermittence. Il compta parmi ses maîtres d’école le poète Kim Ŏk 2 qui joua un rôle décisif en l’aidant à publier ses premières œuvres dans les revues littéraires « Ch’angjo » 3 (« Création ») et « Kaebyŏk » 4 (« Le Commencement du monde »). Bien que les thèmes de Kim So-wŏl ressemblent à ceux des écrivains réunis autour de ces deux revues, des doutes subsistent au sujet de ses influences exactes. En tout cas, il connaissait les symbolistes français (Verlaine, Gourmont, Samain…), traduits et portés aux nues par Kim Ŏk, sous l’influence des compilations japonaises de poèmes européens (« Murmures de mer » d’Ueda Bin, « Coraux » de Nagaï Kafû…) Quant à savoir si Kim So-wŏl était un poète de la résistance contre l’occupant japonais, la chose fait grand débat. Car, en 1923, les difficultés financières l’avaient poussé à déménager au Japon avec l’intention de faire des études de commerce et de sortir de la misère. Il échoua et revint plus pauvre que jamais. Désabusé, ne parvenant pas à vivre honnêtement de sa plume, il quitta la ville pour la campagne coréenne et passa les dernières années de sa brève existence au milieu de désagréments de toute sorte, qu’il noya le plus souvent dans l’alcool. Il se suicida à l’opium, en laissant derrière lui un unique recueil : « Fleurs d’azalée » (« Chindallaekkot » 5). Sa poésie nous touche et reste pourtant en pointillé, ébauche d’une œuvre inachevée. Son défaut tient à ce qu’elle est d’une inspiration trop courte. On voit des contours s’y tracer avec grâce ; mais ils se dissipent soudain dans les airs, comme les vapeurs chargeant l’horizon se déchirent au lever du soleil. Dans « L’Appel aux mânes » (« Ch’ohon » 6), peut-être son chef-d’œuvre, Kim So-wŏl donne l’impression momentanée de peindre tout un peuple abaissé, écrasé sous la botte étrangère. Puis, dès qu’on vient observer de près cette peinture, elle s’évanouit. Tout cela occupe à peine six ou sept vers
- En coréen 김소월. Parfois transcrit Kim So-weol. De son vrai nom Kim Chŏng-sik (김정식). Parfois transcrit Kim Jung Sik, Kim Chung-sik, Kim Chŏng-shik ou Gim Jeongsik.
- En coréen 김억. Parfois transcrit Kim Uk.
- En coréen « 창조 ».