Huili et Yancong, « Histoire de la vie de Xuanzang et de ses voyages dans l’Inde, depuis l’an 629 jusqu’en 645 »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de la « Bio­gra­phie de Xuan­zang », ou lit­té­ra­le­ment « Bio­gra­phie du Maître des Trois Cor­beilles de la Loi du mo­nas­tère de la Grande Bien­veillance »1 (« Da ci en si san zang fa shi zhuan »2) de Huili3 et Yan­cong4. La vaste lit­té­ra­ture de la Chine contient une sé­rie de bio­gra­phies et de mé­moires où se trouvent re­la­tés les voyages d’éminents moines boud­dhistes qui — à des dates dif­fé­rentes, mais com­prises pour la plu­part entre le Ve et le VIIe siècle — sor­tirent de leur propre pa­trie (la Chine) pour se rendre dans celle de leur Dieu (l’Inde), en bra­vant des dif­fi­cul­tés in­sur­mon­tables : « Ils sont al­lés jusqu’aux li­mites du monde et ils ont vu là où toutes choses fi­nissent »5. L’immense en­tre­prise sino-in­dienne de ces pè­le­rins, qui s’en al­laient cher­cher une idée plus claire de leur foi, doit être sa­luée — au-delà de son sens re­li­gieux — comme l’une des ma­ni­fes­ta­tions les plus évi­dentes de l’humanisme. Non contents de re­mon­ter, sur les pas du Boud­dha, jusqu’aux lieux saints de l’Inde, ces hommes d’action et d’étude ap­pre­naient le sans­crit et se pro­cu­raient des masses de ma­nus­crits, qu’ils em­me­naient avec eux au re­tour et qu’ils consa­craient tout le reste de leur vie à tra­duire, en­tou­rés de dis­ciples. Leur im­por­tance dans l’histoire spi­ri­tuelle de l’Asie fut in­ouïe. N’eût été leur rôle de mé­dia­teurs, le sen­ti­ment boud­dhique ne se fût sans doute ja­mais per­pé­tué en Chine. Pour­tant, les pé­rils et les dan­gers que ren­con­traient ces voya­geurs, en s’aventurant par-delà l’Himalaya, au­raient pu dé­cou­ra­ger même les plus vaillants. Ceux qui pas­saient par terre de­vaient tra­ver­ser des dé­serts épou­van­tables où la route à suivre était mar­quée par les os­se­ments des bêtes et des gens qui y avaient trouvé la mort ; ceux qui, à l’inverse, choi­sis­saient la voie de mer ha­sar­daient leur vie sur de lourdes jonques qui som­braient corps et bien au pre­mier gros temps. L’un d’eux6 dé­clare en pré­am­bule de sa « Re­la­tion sur les moines émi­nents qui al­lèrent cher­cher la Loi dans les contrées de l’Ouest » : « Consi­dé­rons de­puis les temps an­ciens ceux qui [par­tis de Chine] ont été à l’étranger en fai­sant peu de cas de la vie et en se sa­cri­fiant pour la Loi… Tous comp­taient re­ve­nir, [et] ce­pen­dant, la voie triom­phante était se­mée de dif­fi­cul­tés ; les lieux saints étaient éloi­gnés et vastes. Pour des di­zaines qui ver­dirent et fleu­rirent, et pour plu­sieurs qui en­tre­prirent, il y en eut à peine un qui noua ses fruits et donna des ré­sul­tats vé­ri­tables, et il y en eut peu qui ache­vèrent leur œuvre. La vraie cause en fut les im­men­si­tés des dé­serts pier­reux du pays de l’éléphant [c’est-à-dire l’Inde] et l’éclat du so­leil qui crache son ar­deur ; ou les masses d’eau des vagues sou­le­vées par le pois­son gi­gan­tesque ».

« les lieux saints étaient éloi­gnés et vastes »

Voici un pas­sage qui don­nera une idée du style de la « Bio­gra­phie de Xuan­zang » : « Le pre­mier aïeul du roi était le fils aîné du roi Aśoka et ré­si­dait dans le royaume de Takṣaśilâ. En ayant été exilé, il alla au Nord des mon­tagnes nei­geuses, où il me­nait une vie no­made, cher­chant pour ses trou­peaux de l’eau et des pâ­tu­rages. Étant ar­rivé dans ce pays, il y éta­blit sa ré­si­dence. Comme il n’avait point d’héritier mâle, il alla un jour prier dans le temple du dieu Vaiś­ra­vaṇa. Tout à coup, le haut du front (de la sta­tue) du dieu s’ouvrit, et il en sor­tit un gar­çon ; de plus, sur le ter­rain qui fai­sait face au temple, il vit naître su­bi­te­ment un par­fum d’une dou­ceur ex­tra­or­di­naire, ayant la forme d’une ma­melle. Il le re­cueillit et en nour­rit l’enfant qui de­vint bien­tôt grand et fort »7.

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Consultez cette bibliographie succincte en langue française

  • Dai­saku Ikeda, « Le Boud­dhisme en Chine » (éd. du Ro­cher, Mo­naco)
  • Paul Lévy, « Les Pè­le­rins chi­nois en Inde » dans « Pré­sence du boud­dhisme » (éd. Gal­li­mard, coll. Bi­blio­thèque illus­trée des his­toires, Pa­ris), p. 279-368
  • Louis Re­nou, « L’Inde clas­sique : ma­nuel des études in­diennes. Tome II » (éd. Payot, coll. Bi­blio­thèque scien­ti­fique, Pa­ris).
  1. Au­tre­fois tra­duit « His­toire de la vie de Hiouen-thsang », « His­toire du Maître de la Loi des Trois Cor­beilles du couvent de la Grande Bien­fai­sance », « La Vie de Maître San­zang du mo­nas­tère de la Grande Bien­veillance », « Bio­gra­phie du Maître Tri­piṭaka du temple de la Grande Com­pas­sion » ou « Bio­gra­phie du Maître de la Loi des Trois Cor­beilles du mo­nas­tère de la Grande Com­pas­sion ». Haut
  2. En chi­nois « 大慈恩寺三藏法師傳 ». Au­tre­fois trans­crit « Ta-ts’e-’en-sse-san-thsang-fa-sse-tch’ouen », « Ta-ts’eu-ngen-sseu san-tsang fa-che tchouan », « Ta-tz’u-en-szu san-tsang fa-shih chuan » ou « Ta-tz’u-en-ssu san-tsang fa-shih chuan ». Éga­le­ment connu sous le titre al­longé de « 大唐大慈恩寺三藏法師傳 » (« Da Tang da ci en si san zang fa shi zhuan »), c’est-à-dire « Bio­gra­phie du Maître des Trois Cor­beilles de la Loi ré­si­dant au mo­nas­tère de la Grande Bien­veillance à l’époque des grands Tang ». Haut
  3. En chi­nois 慧立. Par­fois trans­crit Hoeï-li, Houei-li, Kwui Li ou Hwui-li. Haut
  4. En chi­nois 彥悰. Par­fois trans­crit Yen-thsang, Yen-thsong, Yen-ts’ong ou Yen Ts’ung. Haut
  1. Dans Lévy, « Les Pè­le­rins chi­nois en Inde ». Haut
  2. Yi­jing. Haut
  3. p. 279. Haut