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Sénèque le philosophe, « Lettres à Lucilius. Tome IV. Livres XIV-XVIII »

éd. Les Belles Lettres, coll. des universités de France, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. des uni­ver­si­tés de , Pa­ris

Il s’agit des «Lettres (mo­rales) à Lu­ci­lius» 1Ad Lu­ci­lium epis­tulæ (mo­rales)») de  2, dou­blé d’un psy­cho­logue, dont les œuvres as­sez dé­cou­sues, mais riches en re­marques in­es­ti­mables, sont «un tré­sor de et de bonne » 3. Il na­quit à Cor­doue vers 4 av. J.-C. Il en­tra, par le conseil de son père, dans la du bar­reau, et ses dé­buts eurent tant d’éclat que le prince Ca­li­gula, qui avait des pré­ten­tions à l’, ja­loux du bruit de sa re­nom­mée, parla de le faire mou­rir. Sé­nèque ne dut son qu’à sa chan­ce­lante, mi­née par les veilles stu­dieuses à la lueur de la lampe. On rap­porta à Ca­li­gula que ce jeune phti­sique avait à peine le souffle, que ce se­rait tuer un mou­rant. Et Ca­li­gula se ren­dit à ces rai­sons et se contenta d’adresser à son ri­val des cri­tiques quel­que­fois fon­dées, mais tou­jours mal­veillantes, ap­pe­lant son «du sable sans chaux» («arena sine calce»), et ses dis­cours ora­toires — «de pures ti­rades théâ­trales». Dès lors, Sé­nèque ne pensa qu’à se faire ou­blier; il s’adonna tout en­tier à la phi­lo­so­phie et n’eut d’autres fré­quen­ta­tions que des stoï­ciens. Ce­pen­dant, son père, crai­gnant qu’il ne se fer­mât l’accès aux hon­neurs, l’exhorta à re­ve­nir à la car­rière pu­blique et à ne pas bou­der les com­pro­mis­sions. En 49 apr. J.-C., Sé­nèque se vit confier par Agrip­pine l’ de Né­ron. On sait ce que fut Né­ron. Sé­nèque ne pou­vait pas rai­son­na­ble­ment es­pé­rer de faire un re­com­man­dable de ce sale gar­ne­ment, de ce triste élève, « élevé, va­ni­teux, in­so­lent, sen­suel, hy­po­crite, pa­res­seux» 4. Né­ron, en re­vanche, fit de notre au­teur un «ami» forcé, un col­la­bo­ra­teur mal­gré lui, le char­geant de ré­di­ger ses al­lo­cu­tions au sé­nat, dont celle où il re­pré­sen­tait le meurtre de sa mère Agrip­pine comme un in­es­péré pour . Toutes les belles le­çons, tous les bons of­fices de Sé­nèque en tant que mi­nistre de Né­ron n’aboutirent qu’à re­tar­der de quelques an­nées l’éclosion des pires . Alors, il cher­cha à échap­per à ses hautes, mais désho­no­rantes fonc­tions. Il de­manda de par­tir à la cam­pagne, en re­non­çant à ses biens qui, dit-il, l’exposaient à l’envie gé­né­rale. Mal­gré les re­fus de Né­ron, qui se ren­dait compte que la re­traite de son mi­nistre se­rait in­ter­pré­tée comme un désa­veu de la im­pé­riale, Sé­nèque ne re­cula pas. «En , sa lui fai­sait ha­bi­ter une autre ré­gion de l’univers; il n’avait [plus] rien de com­mun avec vous» («At illum in aliis mundi fi­ni­bus sua vir­tus col­lo­ca­vit, ni­hil vo­bis­cum com­mune ha­ben­tem») 5. Il se re­tira du et des af­faires du monde avec sa femme, Pau­line, et il pré­texta quelque ma­la­die pour ne point sor­tir de chez lui.

  1. Au­tre­fois tra­duit «Cent Vingt-quatre Épîtres, ou Di­vers Dis­cours phi­lo­so­phiques à Lu­ci­lius» ou «Épîtres». Icône Haut
  2. En la­tin Lu­cius Annæus Se­neca. Icône Haut
  3. le comte , «Œuvres com­plètes. Tome V. Les Soi­rées de Saint-Pé­ters­bourg (suite et fin)». Icône Haut
  1. Waltz, « de Sé­nèque» (éd. Per­rin, Pa­ris), p. 160. Icône Haut
  2. «De la constance du », ch. XV, sect. 2. Icône Haut

Sénèque le philosophe, « Lettres à Lucilius. Tome III. Livres VIII-XIII »

éd. Les Belles Lettres, coll. des universités de France, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. des uni­ver­si­tés de , Pa­ris

Il s’agit des «Lettres (mo­rales) à Lu­ci­lius» 1Ad Lu­ci­lium epis­tulæ (mo­rales)») de  2, dou­blé d’un psy­cho­logue, dont les œuvres as­sez dé­cou­sues, mais riches en re­marques in­es­ti­mables, sont «un tré­sor de et de bonne » 3. Il na­quit à Cor­doue vers 4 av. J.-C. Il en­tra, par le conseil de son père, dans la du bar­reau, et ses dé­buts eurent tant d’éclat que le prince Ca­li­gula, qui avait des pré­ten­tions à l’, ja­loux du bruit de sa re­nom­mée, parla de le faire mou­rir. Sé­nèque ne dut son qu’à sa chan­ce­lante, mi­née par les veilles stu­dieuses à la lueur de la lampe. On rap­porta à Ca­li­gula que ce jeune phti­sique avait à peine le souffle, que ce se­rait tuer un mou­rant. Et Ca­li­gula se ren­dit à ces rai­sons et se contenta d’adresser à son ri­val des cri­tiques quel­que­fois fon­dées, mais tou­jours mal­veillantes, ap­pe­lant son «du sable sans chaux» («arena sine calce»), et ses dis­cours ora­toires — «de pures ti­rades théâ­trales». Dès lors, Sé­nèque ne pensa qu’à se faire ou­blier; il s’adonna tout en­tier à la phi­lo­so­phie et n’eut d’autres fré­quen­ta­tions que des stoï­ciens. Ce­pen­dant, son père, crai­gnant qu’il ne se fer­mât l’accès aux hon­neurs, l’exhorta à re­ve­nir à la car­rière pu­blique et à ne pas bou­der les com­pro­mis­sions. En 49 apr. J.-C., Sé­nèque se vit confier par Agrip­pine l’ de Né­ron. On sait ce que fut Né­ron. Sé­nèque ne pou­vait pas rai­son­na­ble­ment es­pé­rer de faire un re­com­man­dable de ce sale gar­ne­ment, de ce triste élève, « élevé, va­ni­teux, in­so­lent, sen­suel, hy­po­crite, pa­res­seux» 4. Né­ron, en re­vanche, fit de notre au­teur un «ami» forcé, un col­la­bo­ra­teur mal­gré lui, le char­geant de ré­di­ger ses al­lo­cu­tions au sé­nat, dont celle où il re­pré­sen­tait le meurtre de sa mère Agrip­pine comme un in­es­péré pour . Toutes les belles le­çons, tous les bons of­fices de Sé­nèque en tant que mi­nistre de Né­ron n’aboutirent qu’à re­tar­der de quelques an­nées l’éclosion des pires . Alors, il cher­cha à échap­per à ses hautes, mais désho­no­rantes fonc­tions. Il de­manda de par­tir à la cam­pagne, en re­non­çant à ses biens qui, dit-il, l’exposaient à l’envie gé­né­rale. Mal­gré les re­fus de Né­ron, qui se ren­dait compte que la re­traite de son mi­nistre se­rait in­ter­pré­tée comme un désa­veu de la im­pé­riale, Sé­nèque ne re­cula pas. «En , sa lui fai­sait ha­bi­ter une autre ré­gion de l’univers; il n’avait [plus] rien de com­mun avec vous» («At illum in aliis mundi fi­ni­bus sua vir­tus col­lo­ca­vit, ni­hil vo­bis­cum com­mune ha­ben­tem») 5. Il se re­tira du et des af­faires du monde avec sa femme, Pau­line, et il pré­texta quelque ma­la­die pour ne point sor­tir de chez lui.

  1. Au­tre­fois tra­duit «Cent Vingt-quatre Épîtres, ou Di­vers Dis­cours phi­lo­so­phiques à Lu­ci­lius» ou «Épîtres». Icône Haut
  2. En la­tin Lu­cius Annæus Se­neca. Icône Haut
  3. le comte , «Œuvres com­plètes. Tome V. Les Soi­rées de Saint-Pé­ters­bourg (suite et fin)». Icône Haut
  1. Waltz, « de Sé­nèque» (éd. Per­rin, Pa­ris), p. 160. Icône Haut
  2. «De la constance du », ch. XV, sect. 2. Icône Haut

Sénèque le philosophe, « Lettres à Lucilius. Tome II. Livres V-VII »

éd. Les Belles Lettres, coll. des universités de France, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. des uni­ver­si­tés de , Pa­ris

Il s’agit des «Lettres (mo­rales) à Lu­ci­lius» 1Ad Lu­ci­lium epis­tulæ (mo­rales)») de  2, dou­blé d’un psy­cho­logue, dont les œuvres as­sez dé­cou­sues, mais riches en re­marques in­es­ti­mables, sont «un tré­sor de et de bonne » 3. Il na­quit à Cor­doue vers 4 av. J.-C. Il en­tra, par le conseil de son père, dans la du bar­reau, et ses dé­buts eurent tant d’éclat que le prince Ca­li­gula, qui avait des pré­ten­tions à l’, ja­loux du bruit de sa re­nom­mée, parla de le faire mou­rir. Sé­nèque ne dut son qu’à sa chan­ce­lante, mi­née par les veilles stu­dieuses à la lueur de la lampe. On rap­porta à Ca­li­gula que ce jeune phti­sique avait à peine le souffle, que ce se­rait tuer un mou­rant. Et Ca­li­gula se ren­dit à ces rai­sons et se contenta d’adresser à son ri­val des cri­tiques quel­que­fois fon­dées, mais tou­jours mal­veillantes, ap­pe­lant son «du sable sans chaux» («arena sine calce»), et ses dis­cours ora­toires — «de pures ti­rades théâ­trales». Dès lors, Sé­nèque ne pensa qu’à se faire ou­blier; il s’adonna tout en­tier à la phi­lo­so­phie et n’eut d’autres fré­quen­ta­tions que des stoï­ciens. Ce­pen­dant, son père, crai­gnant qu’il ne se fer­mât l’accès aux hon­neurs, l’exhorta à re­ve­nir à la car­rière pu­blique et à ne pas bou­der les com­pro­mis­sions. En 49 apr. J.-C., Sé­nèque se vit confier par Agrip­pine l’ de Né­ron. On sait ce que fut Né­ron. Sé­nèque ne pou­vait pas rai­son­na­ble­ment es­pé­rer de faire un re­com­man­dable de ce sale gar­ne­ment, de ce triste élève, « élevé, va­ni­teux, in­so­lent, sen­suel, hy­po­crite, pa­res­seux» 4. Né­ron, en re­vanche, fit de notre au­teur un «ami» forcé, un col­la­bo­ra­teur mal­gré lui, le char­geant de ré­di­ger ses al­lo­cu­tions au sé­nat, dont celle où il re­pré­sen­tait le meurtre de sa mère Agrip­pine comme un in­es­péré pour . Toutes les belles le­çons, tous les bons of­fices de Sé­nèque en tant que mi­nistre de Né­ron n’aboutirent qu’à re­tar­der de quelques an­nées l’éclosion des pires . Alors, il cher­cha à échap­per à ses hautes, mais désho­no­rantes fonc­tions. Il de­manda de par­tir à la cam­pagne, en re­non­çant à ses biens qui, dit-il, l’exposaient à l’envie gé­né­rale. Mal­gré les re­fus de Né­ron, qui se ren­dait compte que la re­traite de son mi­nistre se­rait in­ter­pré­tée comme un désa­veu de la im­pé­riale, Sé­nèque ne re­cula pas. «En , sa lui fai­sait ha­bi­ter une autre ré­gion de l’univers; il n’avait [plus] rien de com­mun avec vous» («At illum in aliis mundi fi­ni­bus sua vir­tus col­lo­ca­vit, ni­hil vo­bis­cum com­mune ha­ben­tem») 5. Il se re­tira du et des af­faires du monde avec sa femme, Pau­line, et il pré­texta quelque ma­la­die pour ne point sor­tir de chez lui.

  1. Au­tre­fois tra­duit «Cent Vingt-quatre Épîtres, ou Di­vers Dis­cours phi­lo­so­phiques à Lu­ci­lius» ou «Épîtres». Icône Haut
  2. En la­tin Lu­cius Annæus Se­neca. Icône Haut
  3. le comte , «Œuvres com­plètes. Tome V. Les Soi­rées de Saint-Pé­ters­bourg (suite et fin)». Icône Haut
  1. Waltz, « de Sé­nèque» (éd. Per­rin, Pa­ris), p. 160. Icône Haut
  2. «De la constance du », ch. XV, sect. 2. Icône Haut

Sénèque le philosophe, « Lettres à Lucilius. Tome I. Livres I-IV »

éd. Les Belles Lettres, coll. des universités de France, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. des uni­ver­si­tés de , Pa­ris

Il s’agit des «Lettres (mo­rales) à Lu­ci­lius» 1Ad Lu­ci­lium epis­tulæ (mo­rales)») de  2, dou­blé d’un psy­cho­logue, dont les œuvres as­sez dé­cou­sues, mais riches en re­marques in­es­ti­mables, sont «un tré­sor de et de bonne » 3. Il na­quit à Cor­doue vers 4 av. J.-C. Il en­tra, par le conseil de son père, dans la du bar­reau, et ses dé­buts eurent tant d’éclat que le prince Ca­li­gula, qui avait des pré­ten­tions à l’, ja­loux du bruit de sa re­nom­mée, parla de le faire mou­rir. Sé­nèque ne dut son qu’à sa chan­ce­lante, mi­née par les veilles stu­dieuses à la lueur de la lampe. On rap­porta à Ca­li­gula que ce jeune phti­sique avait à peine le souffle, que ce se­rait tuer un mou­rant. Et Ca­li­gula se ren­dit à ces rai­sons et se contenta d’adresser à son ri­val des cri­tiques quel­que­fois fon­dées, mais tou­jours mal­veillantes, ap­pe­lant son «du sable sans chaux» («arena sine calce»), et ses dis­cours ora­toires — «de pures ti­rades théâ­trales». Dès lors, Sé­nèque ne pensa qu’à se faire ou­blier; il s’adonna tout en­tier à la phi­lo­so­phie et n’eut d’autres fré­quen­ta­tions que des stoï­ciens. Ce­pen­dant, son père, crai­gnant qu’il ne se fer­mât l’accès aux hon­neurs, l’exhorta à re­ve­nir à la car­rière pu­blique et à ne pas bou­der les com­pro­mis­sions. En 49 apr. J.-C., Sé­nèque se vit confier par Agrip­pine l’ de Né­ron. On sait ce que fut Né­ron. Sé­nèque ne pou­vait pas rai­son­na­ble­ment es­pé­rer de faire un re­com­man­dable de ce sale gar­ne­ment, de ce triste élève, « élevé, va­ni­teux, in­so­lent, sen­suel, hy­po­crite, pa­res­seux» 4. Né­ron, en re­vanche, fit de notre au­teur un «ami» forcé, un col­la­bo­ra­teur mal­gré lui, le char­geant de ré­di­ger ses al­lo­cu­tions au sé­nat, dont celle où il re­pré­sen­tait le meurtre de sa mère Agrip­pine comme un in­es­péré pour . Toutes les belles le­çons, tous les bons of­fices de Sé­nèque en tant que mi­nistre de Né­ron n’aboutirent qu’à re­tar­der de quelques an­nées l’éclosion des pires . Alors, il cher­cha à échap­per à ses hautes, mais désho­no­rantes fonc­tions. Il de­manda de par­tir à la cam­pagne, en re­non­çant à ses biens qui, dit-il, l’exposaient à l’envie gé­né­rale. Mal­gré les re­fus de Né­ron, qui se ren­dait compte que la re­traite de son mi­nistre se­rait in­ter­pré­tée comme un désa­veu de la im­pé­riale, Sé­nèque ne re­cula pas. «En , sa lui fai­sait ha­bi­ter une autre ré­gion de l’univers; il n’avait [plus] rien de com­mun avec vous» («At illum in aliis mundi fi­ni­bus sua vir­tus col­lo­ca­vit, ni­hil vo­bis­cum com­mune ha­ben­tem») 5. Il se re­tira du et des af­faires du monde avec sa femme, Pau­line, et il pré­texta quelque ma­la­die pour ne point sor­tir de chez lui.

  1. Au­tre­fois tra­duit «Cent Vingt-quatre Épîtres, ou Di­vers Dis­cours phi­lo­so­phiques à Lu­ci­lius» ou «Épîtres». Icône Haut
  2. En la­tin Lu­cius Annæus Se­neca. Icône Haut
  3. le comte , «Œuvres com­plètes. Tome V. Les Soi­rées de Saint-Pé­ters­bourg (suite et fin)». Icône Haut
  1. Waltz, « de Sé­nèque» (éd. Per­rin, Pa­ris), p. 160. Icône Haut
  2. «De la constance du », ch. XV, sect. 2. Icône Haut

« Petites Sagas islandaises »

éd. Les Belles Lettres, coll. Vérité des mythes-Sources, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. des mythes-, Pa­ris

Il s’agit du «Dit de Gun­narr meur­trier de Þið­randi» («Gun­nars þáttr Þið­ran­da­bana») et autres sa­gas is­lan­daises. Du­rant le siècle et demi de leur ré­dac­tion, entre les an­nées 1200 et 1350 apr. J.-C., les sa­gas s’imposent par leur in­ten­sité dra­ma­tique, par leur ra­massé et presque bourru, par leur réa­lisme dur, tem­péré d’ et d’exemples de , comme la lec­ture fa­vo­rite des hommes du Nord et comme le fleu­ron de l’art nar­ra­tif eu­ro­péen. Le mot «» vient du verbe «segja» («dire», «ra­con­ter»), qu’on re­trouve dans toutes les langues du Nord : da­nois, «sige»; , «säga»; , «sa­gen»; néer­lan­dais, «zeg­gen»; , «say». On au­rait tort ce­pen­dant d’attribuer à la en­tière la pa­ter­nité de ce genre qui, à une ou deux ex­cep­tions près, est ty­pi­que­ment et ex­clu­si­ve­ment . Il faut avouer que l’ est peu connue, en de­hors de quelques spé­cia­listes. Il n’est donc pas éton­nant que le vul­gaire re­garde les ha­bi­tants de cette île loin­taine presque avec dé­dain. Il les consi­dère comme des demi- ha­billés de peaux de bêtes. Et puis, lorsqu’on vient lui dire que ces mi­sé­rables sau­vages nous ont donné l’ensemble des sa­gas et tout ce que nous li­sons de plus an­cien sur les ci­vi­li­sa­tions nor­diques, à telle en­seigne que la vieille de ces ci­vi­li­sa­tions est sur­nom­mée «le vieil is­lan­dais», cela lui pa­raît un . Mais es­sayons de ré­ta­blir la vé­rité! En 874 apr. J.-C. les Nor­vé­giens prirent pied en Is­lande, où ils ne tar­dèrent pas à éta­blir une aris­to­cra­tique. Quel était le nombre des pre­miers co­lons? C’est ce que rien n’indique. On sait seule­ment que, parmi ceux qui y construi­sirent leur de­meure, on comp­tait une ma­jo­rité de fa­milles nobles fuyant le des­pote Ha­rald Ier 1, trop lasses de sa ou trop fières pour l’accepter : «Vers la fin de la de Ke­till», dit une saga 2, «s’éleva la puis­sance du roi Ha­rald à la Belle Che­ve­lure, si bien qu’aucun [sei­gneur], non plus qu’aucun autre d’importance, ne pros­pé­rait dans le pays si le roi ne dis­po­sait à lui seul de [toutes les] pré­ro­ga­tives… Lorsque Ke­till ap­prit que le roi Ha­rald lui des­ti­nait le même lot qu’aux autres puis­sants hommes, [il dit à ses proches] : “J’ai des in­for­ma­tions vé­ri­diques sur la haine que nous voue le roi Ha­rald…; j’ai l’impression que l’on nous donne à choi­sir entre deux choses : fuir le pays ou être tués cha­cun chez ». Tous ceux qui ne vou­laient pas cour­ber la tête sous le sceptre du roi, s’en al­laient à tra­vers les flots cher­cher une heu­reuse « de glace» où il n’y avait en­core ni au­to­rité ni mo­narque; où chaque chef de pou­vait ré­gner en dans sa de­meure, sans avoir du roi : «Il y avait là de bonnes terres, et il n’y avait pas be­soin d’argent pour les ache­ter…; on y pre­nait du et d’autres pois­sons à lon­gueur d’année», ajoute la même saga. Les émi­gra­tions de­vinrent en peu de si fré­quentes et si nom­breuses, que Ha­rald Ier, crai­gnant de voir la Nor­vège se dé­peu­pler, im­posa un tri­but à tous ceux qui la quit­te­raient et par­fois s’empara de leurs biens.

  1. On ren­contre aussi les gra­phies Ha­ral­dur et Ha­raldr. Icône Haut
  1. «Saga des gens du Val-au-Sau­mon». Icône Haut

« Les Années de formation [ou : un véritable stoïcien, Attale] »

dans Pierre Grimal, « Sénèque, ou la Conscience de l’Empire » (éd. Fayard, Paris), p. 247-262

dans Gri­mal, «Sé­nèque, ou la de l’Empire» (éd. Fayard, Pa­ris), p. 247-262

Il s’agit d’Attale le phi­lo­sophe 1 (ou At­tale le stoï­cien 2) dont Sé­nèque parle tou­jours avec im­mense . Il était, nous dit Sé­nèque le père 3, un « de grande , et entre les que nous avons vus de notre âge, le plus sub­til et le mieux-di­sant». Ce pré­di­ca­teur d’origine grecque laissa une im­pres­sion pro­fonde et un du­rable chez le jeune Sé­nèque, qui sui­vit ses le­çons à et qui ci­tera pieu­se­ment des bribes de son dans ses œuvres de , et tout par­ti­cu­liè­re­ment dans ses «Lettres à Lu­ci­lius», comme si les belles d’Attale gra­vées dans son cœur d’adolescent lui re­ve­naient plus vi­vaces et plus pré­gnantes que ja­mais. Voici com­ment il en parle : «Je me rap­pelle ce que nous di­sait le maître At­tale au où nous as­sié­gions son école — pre­miers à nous y rendre, der­niers à en sor­tir — l’attirant même du­rant ses pro­me­nades en quelque dis­cus­sion… “Il faut que [vous] soyez exempts de tout be­soin, si vous vou­lez dé­fier Ju­pi­ter, qui n’a be­soin de rien”» 4. At­tale fai­sait l’éloge, à tous ceux qui vou­laient l’entendre, de la pu­reté des mœurs, de la fru­ga­lité, de l’indépendance in­té­rieure, de la fer­meté in­vin­cible, du dé­dain des choses su­per­flues. Il s’évertuait à prou­ver que tout ce qui dé­passe les bornes du be­soin est un far­deau in­utile et ac­ca­blant pour ce­lui qui le porte. Ses élèves sor­taient de son école plus mo­destes, plus tem­pé­rants, plus amis de la conti­nence qu’ils ne l’étaient en y en­trant. Il leur ra­con­tait vo­lon­tiers com­ment, un jour de fête, il avait vu pas­ser tout ce qu’il y avait de «» à Rome : des vais­selles ci­se­lées dans l’ et l’argent, des ten­tures sur­pas­sant le prix de ces mé­taux, des étoffes ap­por­tées des les plus re­cu­lées, une double file d’, mâles et fe­melles, dans tous les at­traits de leur pa­rure; bref, toutes les ma­gni­fi­cences dont s’était ac­ca­paré l’Empire le plus puis­sant qui vou­lait, pour ainsi dire, pas­ser en re­vue sa gran­deur. «[À quoi sert] cette pompe triom­phale de l’or?», s’était dit At­tale 5. «Est-ce pour ap­prendre [la cu­pi­dité et] l’ que nous sommes ve­nus de toutes parts ici? Mais, ma … mon mé­pris des ri­chesses tient non pas à leur in­uti­lité seule­ment, mais à leur fu­ti­lité! As-tu vu», avait-il pensé, «comme il a suffi de peu d’heures pour qu’un dé­filé ce­pen­dant bien lent, bien com­passé, ache­vât de s’écouler? Et nous rem­pli­rions notre en­tière de ce qui n’a pu rem­plir une jour­née?… Tourne-toi bien plu­tôt vers la vraie . Ap­prends à te conten­ter de peu! Écrie-toi avec toute la fierté d’une grande  : “Ayons seule­ment de l’, de la [bouillie]; par là, ri­va­li­sons de fé­li­cité avec Ju­pi­ter même”!» At­tale avait aussi l’habitude de faire cette com­pa­rai­son ima­gée, qui frap­pait éner­gi­que­ment l’esprit de ceux qui l’écoutaient : «Tu as bien vu un chien guet­tant, gueule ou­verte, les bouts de pain ou de que lui lance son maître? Tout ce qu’il at­trape est tout de suite avalé tel quel; et il de­meure béant, dans l’espérance du mor­ceau qui va ve­nir. La même chose nous ad­vient. Nous at­ten­dons… tout ce que la for­tune nous jette, nous l’engloutissons aus­si­tôt sans le sa­vou­rer, sur le qui-vive, l’esprit an­xieu­se­ment tendu vers la conquête d’une autre proie. Au , cela ne sau­rait ad­ve­nir : il est ras­sa­sié» 6.

  1. En At­ta­lus phi­lo­so­phus. Icône Haut
  2. En la­tin At­ta­lus stoi­cus. Icône Haut
  3. «Les et Sua­soires», ch. II, sect. 12. Icône Haut
  1. «Lettres à Lu­ci­lius», lettre CVIII, sect. 3, lettre CX, sect. 20. Icône Haut
  2. «Lettres à Lu­ci­lius», lettre CX, sect. 15-18. Icône Haut
  3. «Lettres à Lu­ci­lius», lettre LXXII, sect. 8. Icône Haut

Chateaubriand, « Voyages en Amérique et en Italie. Tome II »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du «Voyage en » et autres œuvres de , au­teur et , père du chré­tien. Le , le grand mal de Cha­teau­briand fut d’être né entre deux siècles, «comme au confluent de deux fleuves» 1, et de voir les ca­rac­tères op­po­sés de ces deux siècles se ren­con­trer dans ses opi­nions. Sorti des en­trailles de l’ancienne , de l’ancienne , il se plaça contre la , dès qu’il la vit dans ses pre­mières vio­lences, et il resta roya­liste, sou­vent contre son ins­tinct. Car au fond de lui-même, il était de la race, de la de Na­po­léon Bo­na­parte. Même fougue, même éclat, même mo­derne. Si les Bour­bons avaient mieux ap­pré­cié Cha­teau­briand, il est pos­sible qu’il eût été moins vul­né­rable au de l’Empereur de­venu res­plen­dis­sant comme un «large ». Le pa­ral­lèle qu’il fait dans ses «Mé­moires d’outre-tombe» entre l’Empire et la mo­nar­chie bour­bo­nienne, pour cruel qu’il soit, est l’expression sin­cère de la concep­tion de l’auteur, tel­le­ment plus vraie que celle du po­li­tique : «Re­tom­ber de Bo­na­parte et de l’Empire à ce qui les a sui­vis, c’est tom­ber de la dans le néant; du som­met d’une mon­tagne dans un gouffre. Tout n’est-il pas ter­miné avec Na­po­léon?… Com­ment nom­mer Louis XVIII en place de l’Empereur? Je rou­gis en [y] pen­sant». Triste jusqu’au déses­poir, sans amis et sans es­pé­rance, il était ob­sédé par un passé à ja­mais éva­noui et tombé dans le néant. «Je n’ai plus qu’à m’asseoir sur des ruines et à mé­pri­ser cette », écri­vait-il 2 en son­geant qu’il était lui-même une ruine en­core plus chan­ce­lante. Au­cune ne ve­nait le conso­ler ex­cepté la chré­tienne, à la­quelle il était re­venu avec et avec vé­hé­mence. Sa mère et sa sœur avaient eu la plus grande part à cette conver­sion : «Ma mère, après avoir été je­tée à soixante-douze ans dans des ca­chots où elle vit pé­rir une par­tie de ses , ex­pira en­fin sur un gra­bat, où ses mal­heurs l’avaient re­lé­guée. Le sou­ve­nir de mes éga­re­ments [le de mon “Es­sai sur les ”] ré­pan­dit sur ses der­niers jours une grande amer­tume; elle char­gea, en mou­rant, une de mes sœurs de me rap­pe­ler à cette re­li­gion dans la­quelle j’avais été élevé. Ma sœur me manda le der­nier vœu de ma mère. Quand la lettre me par­vint au-delà des mers, ma sœur elle-même n’existait plus; elle était morte aussi des suites de son . Ces deux sor­ties du tom­beau, cette qui ser­vait d’interprète à la mort, m’ont frappé; je suis de­venu chré­tien»

  1. «Mé­moires d’outre-tombe», liv. XLIII, ch. VIII. Icône Haut
  1. «Études his­to­riques». Icône Haut

Novalis, « [Œuvres philosophiques. Tome III.] Art et Utopie : les derniers “Fragments” (1799-1800) »

éd. Rue d’Ulm-Presses de l’École normale supérieure, coll. Æsthetica, Paris

éd. Rue d’Ulm-Presses de l’École nor­male su­pé­rieure, coll. Æs­the­tica, Pa­ris

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle des «Frag­ments» («Frag­mente») de , ro­man­tique , an­cêtre loin­tain du (XVIIIe siècle). Le comte de Pla­ten écrit dans ses «Jour­naux» 1 : «On est pour les ro­man­tiques al­le­mands, [mais] , j’aime les An­ciens. On m’a lu un jour une de No­va­lis, dont je n’ai pas com­pris une seule syl­labe». Il est vrai que l’œuvre de No­va­lis est l’une des plus énig­ma­tiques, l’une des moins com­pré­hen­sibles de la ; elle est, d’un bout à l’autre, un code se­cret, un chiffre dont la clef s’appelle So­phie von Kühn, dite So­phie de Kühn. C’est au cours d’une tour­née ad­mi­nis­tra­tive, en 1795, que No­va­lis ren­con­tra, au châ­teau de Grü­nin­gen 2, cette toute jeune fille, un peu femme déjà, en qui de­vait s’incarner son ; elle n’avait pas en­core treize prin­temps. Il tomba aus­si­tôt sous son charme et bien­tôt il se fiança avec elle. Entre ce jeune rê­veur et cette «fleur bleue» («blaue Blume») qui s’ouvrait à la , sui­vant le mot de No­va­lis, na­quit une idylle aussi in­so­lite que brève. So­phie mou­rait à peine deux ans plus tard, en 1797, après de cruelles souf­frances cau­sées par une tu­meur. Sa fra­gile et an­gé­lique , sur la­quelle la et sur­tout l’ombre so­len­nelle de la avaient ré­pandu une pré­coce ma­tu­rité, laissa à No­va­lis un im­pé­ris­sable et fu­nèbre. «Le soir s’est fait au­tour de moi», dit-il trois jours plus tard 3, «pen­dant que je re­gar­dais se le­ver l’aurore de ma vie.» Si en­suite son étude fa­vo­rite de­vint la , c’est qu’elle s’appelait au fond comme sa bien-ai­mée : So­phie. Si en­suite il se dé­clara fer­vem­ment chré­tien, c’est que, dans le dé­chaî­ne­ment des mal­heurs de So­phie, il crut re­con­naître ceux de Jé­sus. Elle était, pour lui, l’être cé­leste qui était venu réa­li­ser un idéal jusque-là va­gue­ment pres­senti et rêvé, et main­te­nant contem­plé dans sa  :

«Des­cen­dons», dit-il 4, «vers la tendre Fian­cée,
Vers notre Bien-Aimé Jé­sus!
Ve­nez, l’ombre du soir s’est éployée
Douce aux amants par le abat­tus…
»

  1. En date du 10 avril 1817. Icône Haut
  2. Par­fois trans­crit Gru­ningue. Icône Haut
  1. Dans Henri Lich­ten­ber­ger, «No­va­lis», p. 55. Icône Haut
  2. «Les Dis­ciples à Saïs • à la », p. 90. Icône Haut

Chateaubriand, « Voyages en Amérique et en Italie. Tome I »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du «Voyage en » et autres œuvres de , au­teur et , père du chré­tien. Le , le grand mal de Cha­teau­briand fut d’être né entre deux siècles, «comme au confluent de deux fleuves» 1, et de voir les ca­rac­tères op­po­sés de ces deux siècles se ren­con­trer dans ses opi­nions. Sorti des en­trailles de l’ancienne , de l’ancienne , il se plaça contre la , dès qu’il la vit dans ses pre­mières vio­lences, et il resta roya­liste, sou­vent contre son ins­tinct. Car au fond de lui-même, il était de la race, de la de Na­po­léon Bo­na­parte. Même fougue, même éclat, même mo­derne. Si les Bour­bons avaient mieux ap­pré­cié Cha­teau­briand, il est pos­sible qu’il eût été moins vul­né­rable au de l’Empereur de­venu res­plen­dis­sant comme un «large ». Le pa­ral­lèle qu’il fait dans ses «Mé­moires d’outre-tombe» entre l’Empire et la mo­nar­chie bour­bo­nienne, pour cruel qu’il soit, est l’expression sin­cère de la concep­tion de l’auteur, tel­le­ment plus vraie que celle du po­li­tique : «Re­tom­ber de Bo­na­parte et de l’Empire à ce qui les a sui­vis, c’est tom­ber de la dans le néant; du som­met d’une mon­tagne dans un gouffre. Tout n’est-il pas ter­miné avec Na­po­léon?… Com­ment nom­mer Louis XVIII en place de l’Empereur? Je rou­gis en [y] pen­sant». Triste jusqu’au déses­poir, sans amis et sans es­pé­rance, il était ob­sédé par un passé à ja­mais éva­noui et tombé dans le néant. «Je n’ai plus qu’à m’asseoir sur des ruines et à mé­pri­ser cette », écri­vait-il 2 en son­geant qu’il était lui-même une ruine en­core plus chan­ce­lante. Au­cune ne ve­nait le conso­ler ex­cepté la chré­tienne, à la­quelle il était re­venu avec et avec vé­hé­mence. Sa mère et sa sœur avaient eu la plus grande part à cette conver­sion : «Ma mère, après avoir été je­tée à soixante-douze ans dans des ca­chots où elle vit pé­rir une par­tie de ses , ex­pira en­fin sur un gra­bat, où ses mal­heurs l’avaient re­lé­guée. Le sou­ve­nir de mes éga­re­ments [le de mon “Es­sai sur les ”] ré­pan­dit sur ses der­niers jours une grande amer­tume; elle char­gea, en mou­rant, une de mes sœurs de me rap­pe­ler à cette re­li­gion dans la­quelle j’avais été élevé. Ma sœur me manda le der­nier vœu de ma mère. Quand la lettre me par­vint au-delà des mers, ma sœur elle-même n’existait plus; elle était morte aussi des suites de son . Ces deux sor­ties du tom­beau, cette qui ser­vait d’interprète à la mort, m’ont frappé; je suis de­venu chré­tien»

  1. «Mé­moires d’outre-tombe», liv. XLIII, ch. VIII. Icône Haut
  1. «Études his­to­riques». Icône Haut

Novalis, « [Œuvres philosophiques. Tome II.] Semences »

éd. Allia, Paris

éd. Al­lia, Pa­ris

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle des «Frag­ments» («Frag­mente») de , ro­man­tique , an­cêtre loin­tain du (XVIIIe siècle). Le comte de Pla­ten écrit dans ses «Jour­naux» 1 : «On est pour les ro­man­tiques al­le­mands, [mais] , j’aime les An­ciens. On m’a lu un jour une de No­va­lis, dont je n’ai pas com­pris une seule syl­labe». Il est vrai que l’œuvre de No­va­lis est l’une des plus énig­ma­tiques, l’une des moins com­pré­hen­sibles de la ; elle est, d’un bout à l’autre, un code se­cret, un chiffre dont la clef s’appelle So­phie von Kühn, dite So­phie de Kühn. C’est au cours d’une tour­née ad­mi­nis­tra­tive, en 1795, que No­va­lis ren­con­tra, au châ­teau de Grü­nin­gen 2, cette toute jeune fille, un peu femme déjà, en qui de­vait s’incarner son ; elle n’avait pas en­core treize prin­temps. Il tomba aus­si­tôt sous son charme et bien­tôt il se fiança avec elle. Entre ce jeune rê­veur et cette «fleur bleue» («blaue Blume») qui s’ouvrait à la , sui­vant le mot de No­va­lis, na­quit une idylle aussi in­so­lite que brève. So­phie mou­rait à peine deux ans plus tard, en 1797, après de cruelles souf­frances cau­sées par une tu­meur. Sa fra­gile et an­gé­lique , sur la­quelle la et sur­tout l’ombre so­len­nelle de la avaient ré­pandu une pré­coce ma­tu­rité, laissa à No­va­lis un im­pé­ris­sable et fu­nèbre. «Le soir s’est fait au­tour de moi», dit-il trois jours plus tard 3, «pen­dant que je re­gar­dais se le­ver l’aurore de ma vie.» Si en­suite son étude fa­vo­rite de­vint la , c’est qu’elle s’appelait au fond comme sa bien-ai­mée : So­phie. Si en­suite il se dé­clara fer­vem­ment chré­tien, c’est que, dans le dé­chaî­ne­ment des mal­heurs de So­phie, il crut re­con­naître ceux de Jé­sus. Elle était, pour lui, l’être cé­leste qui était venu réa­li­ser un idéal jusque-là va­gue­ment pres­senti et rêvé, et main­te­nant contem­plé dans sa  :

«Des­cen­dons», dit-il 4, «vers la tendre Fian­cée,
Vers notre Bien-Aimé Jé­sus!
Ve­nez, l’ombre du soir s’est éployée
Douce aux amants par le abat­tus…
»

  1. En date du 10 avril 1817. Icône Haut
  2. Par­fois trans­crit Gru­ningue. Icône Haut
  1. Dans Henri Lich­ten­ber­ger, «No­va­lis», p. 55. Icône Haut
  2. «Les Dis­ciples à Saïs • à la », p. 90. Icône Haut

Novalis, « [Œuvres philosophiques. Tome I.] Le Brouillon général : matériaux pour une encyclopédistique (1798-1799) »

éd. Allia, Paris

éd. Al­lia, Pa­ris

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle des «Frag­ments» («Frag­mente») de , ro­man­tique , an­cêtre loin­tain du (XVIIIe siècle). Le comte de Pla­ten écrit dans ses «Jour­naux» 1 : «On est pour les ro­man­tiques al­le­mands, [mais] , j’aime les An­ciens. On m’a lu un jour une de No­va­lis, dont je n’ai pas com­pris une seule syl­labe». Il est vrai que l’œuvre de No­va­lis est l’une des plus énig­ma­tiques, l’une des moins com­pré­hen­sibles de la ; elle est, d’un bout à l’autre, un code se­cret, un chiffre dont la clef s’appelle So­phie von Kühn, dite So­phie de Kühn. C’est au cours d’une tour­née ad­mi­nis­tra­tive, en 1795, que No­va­lis ren­con­tra, au châ­teau de Grü­nin­gen 2, cette toute jeune fille, un peu femme déjà, en qui de­vait s’incarner son ; elle n’avait pas en­core treize prin­temps. Il tomba aus­si­tôt sous son charme et bien­tôt il se fiança avec elle. Entre ce jeune rê­veur et cette «fleur bleue» («blaue Blume») qui s’ouvrait à la , sui­vant le mot de No­va­lis, na­quit une idylle aussi in­so­lite que brève. So­phie mou­rait à peine deux ans plus tard, en 1797, après de cruelles souf­frances cau­sées par une tu­meur. Sa fra­gile et an­gé­lique , sur la­quelle la et sur­tout l’ombre so­len­nelle de la avaient ré­pandu une pré­coce ma­tu­rité, laissa à No­va­lis un im­pé­ris­sable et fu­nèbre. «Le soir s’est fait au­tour de moi», dit-il trois jours plus tard 3, «pen­dant que je re­gar­dais se le­ver l’aurore de ma vie.» Si en­suite son étude fa­vo­rite de­vint la , c’est qu’elle s’appelait au fond comme sa bien-ai­mée : So­phie. Si en­suite il se dé­clara fer­vem­ment chré­tien, c’est que, dans le dé­chaî­ne­ment des mal­heurs de So­phie, il crut re­con­naître ceux de Jé­sus. Elle était, pour lui, l’être cé­leste qui était venu réa­li­ser un idéal jusque-là va­gue­ment pres­senti et rêvé, et main­te­nant contem­plé dans sa  :

«Des­cen­dons», dit-il 4, «vers la tendre Fian­cée,
Vers notre Bien-Aimé Jé­sus!
Ve­nez, l’ombre du soir s’est éployée
Douce aux amants par le abat­tus…
»

  1. En date du 10 avril 1817. Icône Haut
  2. Par­fois trans­crit Gru­ningue. Icône Haut
  1. Dans Henri Lich­ten­ber­ger, «No­va­lis», p. 55. Icône Haut
  2. «Les Dis­ciples à Saïs • à la », p. 90. Icône Haut

Novalis, « Henri d’Ofterdingen, “Heinrich von Ofterdingen” »

éd. Aubier, coll. bilingue, Paris

éd. Au­bier, coll. bi­lingue, Pa­ris

Il s’agit d’«Henri d’Ofterdingen» («Hein­rich von Of­ter­din­gen») de , ro­man­tique , an­cêtre loin­tain du (XVIIIe siècle). Le comte de Pla­ten écrit dans ses «Jour­naux» 1 : «On est pour les ro­man­tiques al­le­mands, [mais] , j’aime les An­ciens. On m’a lu un jour une de No­va­lis, dont je n’ai pas com­pris une seule syl­labe». Il est vrai que l’œuvre de No­va­lis est l’une des plus énig­ma­tiques, l’une des moins com­pré­hen­sibles de la ; elle est, d’un bout à l’autre, un code se­cret, un chiffre dont la clef s’appelle So­phie von Kühn, dite So­phie de Kühn. C’est au cours d’une tour­née ad­mi­nis­tra­tive, en 1795, que No­va­lis ren­con­tra, au châ­teau de Grü­nin­gen 2, cette toute jeune fille, un peu femme déjà, en qui de­vait s’incarner son ; elle n’avait pas en­core treize prin­temps. Il tomba aus­si­tôt sous son charme et bien­tôt il se fiança avec elle. Entre ce jeune rê­veur et cette «fleur bleue» («blaue Blume») qui s’ouvrait à la , sui­vant le mot de No­va­lis, na­quit une idylle aussi in­so­lite que brève. So­phie mou­rait à peine deux ans plus tard, en 1797, après de cruelles souf­frances cau­sées par une tu­meur. Sa fra­gile et an­gé­lique , sur la­quelle la et sur­tout l’ombre so­len­nelle de la avaient ré­pandu une pré­coce ma­tu­rité, laissa à No­va­lis un im­pé­ris­sable et fu­nèbre. «Le soir s’est fait au­tour de moi», dit-il trois jours plus tard 3, «pen­dant que je re­gar­dais se le­ver l’aurore de ma vie.» Si en­suite son étude fa­vo­rite de­vint la , c’est qu’elle s’appelait au fond comme sa bien-ai­mée : So­phie. Si en­suite il se dé­clara fer­vem­ment chré­tien, c’est que, dans le dé­chaî­ne­ment des mal­heurs de So­phie, il crut re­con­naître ceux de Jé­sus. Elle était, pour lui, l’être cé­leste qui était venu réa­li­ser un idéal jusque-là va­gue­ment pres­senti et rêvé, et main­te­nant contem­plé dans sa  :

«Des­cen­dons», dit-il 4, «vers la tendre Fian­cée,
Vers notre Bien-Aimé Jé­sus!
Ve­nez, l’ombre du soir s’est éployée
Douce aux amants par le abat­tus…
»

  1. En date du 10 avril 1817. Icône Haut
  2. Par­fois trans­crit Gru­ningue. Icône Haut
  1. Dans Henri Lich­ten­ber­ger, «No­va­lis», p. 55. Icône Haut
  2. «Les Dis­ciples à Saïs • à la », p. 90. Icône Haut

Novalis, « Les Disciples à Saïs • Hymnes à la nuit • Journal intime »

éd. Fata Morgana, Saint-Clément

éd. Fata Mor­gana, Saint-Clé­ment

Il s’agit des «Dis­ciples à Saïs» («Die Lehr­linge zu Sais») et autres œuvres de , ro­man­tique , an­cêtre loin­tain du (XVIIIe siècle). Le comte de Pla­ten écrit dans ses «Jour­naux» 1 : «On est pour les ro­man­tiques al­le­mands, [mais] , j’aime les An­ciens. On m’a lu un jour une de No­va­lis, dont je n’ai pas com­pris une seule syl­labe». Il est vrai que l’œuvre de No­va­lis est l’une des plus énig­ma­tiques, l’une des moins com­pré­hen­sibles de la ; elle est, d’un bout à l’autre, un code se­cret, un chiffre dont la clef s’appelle So­phie von Kühn, dite So­phie de Kühn. C’est au cours d’une tour­née ad­mi­nis­tra­tive, en 1795, que No­va­lis ren­con­tra, au châ­teau de Grü­nin­gen 2, cette toute jeune fille, un peu femme déjà, en qui de­vait s’incarner son ; elle n’avait pas en­core treize prin­temps. Il tomba aus­si­tôt sous son charme et bien­tôt il se fiança avec elle. Entre ce jeune rê­veur et cette «fleur bleue» («blaue Blume») qui s’ouvrait à la , sui­vant le mot de No­va­lis, na­quit une idylle aussi in­so­lite que brève. So­phie mou­rait à peine deux ans plus tard, en 1797, après de cruelles souf­frances cau­sées par une tu­meur. Sa fra­gile et an­gé­lique , sur la­quelle la et sur­tout l’ombre so­len­nelle de la avaient ré­pandu une pré­coce ma­tu­rité, laissa à No­va­lis un im­pé­ris­sable et fu­nèbre. «Le soir s’est fait au­tour de moi», dit-il trois jours plus tard 3, «pen­dant que je re­gar­dais se le­ver l’aurore de ma vie.» Si en­suite son étude fa­vo­rite de­vint la , c’est qu’elle s’appelait au fond comme sa bien-ai­mée : So­phie. Si en­suite il se dé­clara fer­vem­ment chré­tien, c’est que, dans le dé­chaî­ne­ment des mal­heurs de So­phie, il crut re­con­naître ceux de Jé­sus. Elle était, pour lui, l’être cé­leste qui était venu réa­li­ser un idéal jusque-là va­gue­ment pres­senti et rêvé, et main­te­nant contem­plé dans sa  :

«Des­cen­dons», dit-il 4, «vers la tendre Fian­cée,
Vers notre Bien-Aimé Jé­sus!
Ve­nez, l’ombre du soir s’est éployée
Douce aux amants par le abat­tus…
»

  1. En date du 10 avril 1817. Icône Haut
  2. Par­fois trans­crit Gru­ningue. Icône Haut
  1. Dans Henri Lich­ten­ber­ger, «No­va­lis», p. 55. Icône Haut
  2. «Les Dis­ciples à Saïs • à la », p. 90. Icône Haut