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su­jet

« Les Minnesingers. Walther von der Vogelweide (1190-1240) »

dans « Bulletin de la Société littéraire de Strasbourg », vol. 2, p. 29-62

dans «Bul­le­tin de la lit­té­raire de Stras­bourg», vol. 2, p. 29-62

Il s’agit de «Sous les tilleuls…» («Un­der der lin­den…» 1), «Hé­las! Comme toutes mes an­nées se sont éva­po­rées» 2Owê! War sint vers­wun­den al­liu mî­niu jâr») et autres chants de Wal­ther von der Vo­gel­weide, dit Wal­ther de la Vo­gel­weide, le pre­mier grand poète de al­le­mande. «Qu’avez-vous fait», de­manda-t-on une fois à Henri Heine 3, «le pre­mier jour de votre ar­ri­vée à Pa­ris? Quelle fut votre pre­mière course?» On s’attendait à l’entendre nom­mer la place de la Concorde ou bien le Pan­théon. «Tout de suite après mon ar­ri­vée», dit Heine, «j’étais allé à la Bi­blio­thèque royale (l’actuelle Bi­blio­thèque na­tio­nale de ) et je m’étais fait mon­trer par le conser­va­teur le ma­nus­crit des “Min­ne­sin­gers”… Et c’est vrai : de­puis des an­nées, je dé­si­rais voir de mes yeux les chères feuilles qui nous ont conservé les poé­sies de Wal­ther de la Vo­gel­weide, le plus grand ly­rique .» À la fin du XIIe siècle, Vienne, ville aux confins de l’aire ger­ma­nique, en de­vint la mé­tro­pole ar­tis­tique. Elle s’ennoblit par les chants des trou­ba­dours cé­lèbres — les min­ne­sin­gers (chantres d’) — dont l’Alsacien Rein­mar de Ha­gue­nau, qui y trans­porta les formes et l’esprit de la fran­çaise. C’est sous sa di­rec­tion que Vo­gel­weide fit son ap­pren­tis­sage de poète. L’élève sur­passa bien­tôt ses contem­po­rains et son maître; et c’est mer­veille de voir à quel point, entre ses mains ha­biles, le vieux haut-al­le­mand s’assouplit et se ra­dou­cit. Ce­pen­dant, mal­gré ses ser­vices et sa , Vo­gel­weide était pauvre, et à la du duc Fré­dé­ric Ier d’Autriche, il resta sans pro­tec­teur. Il dut se ré­soudre à quit­ter Vienne et à me­ner une va­ga­bonde. Cette date marque un tour­nant dans la . Au contact des éco­lâtres iti­né­rants, go­liards, jon­gleurs, Vo­gel­weide éten­dit la forme du «min­ne­lied» («chan­son d’amour») à l’amour de la pa­trie, de la beauté, aux ré­flexions mo­rales, aux plus per­son­nels et plus vil­la­geois aussi, les jeunes pay­sannes rem­pla­çant les châ­te­laines : «De l’Elbe jusqu’au Rhin», dit-il 4, «et de là jusqu’aux de , se ren­contrent bien les meilleures que j’aie … Si j’ai bon et bon pour la beauté, pour la grâce, de par , je ju­re­rais bien que chez nous les simples valent mieux qu’ailleurs les grandes dames». Une des com­po­si­tions les plus gra­cieuses et les plus fraîches de Vo­gel­weide est sa pas­tou­relle «Sous les tilleuls…», où une jeune femme dé­crit, avec pu­deur et sim­pli­cité, les joies qu’elle a éprou­vées dans les bras de son amant, à l’ombre des té­moins.

  1. On ren­contre aussi la gra­phie «Un­ter den lin­den…». Icône Haut
  2. Par­fois tra­duit «Hé­las! Où sont al­lées toutes mes an­nées», «Hé­las! Que sont de­ve­nues toutes mes an­nées», «Ô tris­tesse! Par où s’est-elle dis­per­sée, la gerbe de mes an­nées», «Hé­las! Où sont-ils, mes ans éva­nouis», «Com­ment ont passé mes an­nées», «Mal­heur à ! Com­ment se sont éva­nouies, où se sont en­fuies les an­nées de ma », «Las, où sont-elles en al­lées, toutes mes an­nées?», «Hé­las! Où sont en­glou­ties toutes mes an­nées?» ou «Hé­las! Où donc ont-elles dis­paru, toutes mes an­nées?». Icône Haut
  1. «Sa­tires et », p. 121. Icône Haut
  2. «Les Min­ne­sin­gers. Wal­ther von der Vo­gel­weide», p. 47. Icône Haut

Baïf, « Œuvres complètes. Tome III. Les Jeux »

éd. H. Champion, Paris

éd. H. Cham­pion, Pa­ris

Il s’agit des «Œuvres com­plètes» de  1, poète (XVIe siècle apr. J.-C.). Tan­dis que Du Bel­lay et Ron­sard ont vu maintes fois leurs «Œuvres com­plètes» édi­tées, celles de Baïf ont dû at­tendre le XXIe siècle pour être en­fin réunies (en­core que seuls les pre­miers tomes ont paru à ce jour). Il est vrai que ses vers, où il est tout de même aisé de trou­ver quelques pas­sages ad­mi­rables, sont sou­vent de lec­ture la­bo­rieuse et ré­com­pen­sée. Son est gauche. Son est toute d’emprunt. Il prend à pleines mains dans les de l’«An­tho­lo­gie grecque» et leurs imi­ta­teurs néo-la­tins, à moins qu’il ne pille les pé­trar­quistes et les bem­bistes ita­liens. Vic­time de sa trop grande fa­ci­lité, il laisse pas­ser des in­cor­rec­tions, des so­lé­cismes, des mal­adresses et écrit né­gli­gem­ment, sans tâ­ton­ne­ment comme sans re­touches : «La phrase s’étend, s’étire, abuse des re­jets…; parce qu’il ne sut ja­mais ni se sur­veiller ni se contraindre», dé­clare un  2. «On pour­rait presque dire qu’on a plus de peine à lire ses vers, qu’il n’en eut… à les com­po­ser; car il pa­raît que, de son , on l’accusait déjà de né­gli­gence», disent d’autres 3. Au reste, Baïf se rend compte de sa non­cha­lance, l’avoue et ne veut pas s’en cor­ri­ger : «Le pis que l’on dira, c’est que je suis de ceux qui à se re­po­lir sont un peu pa­res­seux, et que mes rudes vers n’ont [pas] été, sur l’enclume, re­mis as­sez de fois» 4. Feuille­tant ses propres poèmes, il trouve «leur su­jet si bi­zarre et di­vers, qu’en lire trois du long de grand- je n’ose» 5; mais loin d’essayer de cor­ri­ger ces bi­zar­re­ries, il af­fecte une en­tière in­dif­fé­rence et pré­fère re­non­cer aux pre­mières places : «Mon but est de me plaire aux que je chante… Si nul ne s’en contente, il faut que je m’en passe» 6. De plus en plus, il se sent une vo­ca­tion de ré­for­ma­teur. Tra­duc­teur de l’«An­ti­gone» de So­phocle et de «L’Eunuque» de Té­rence, au moins au­tant mu­si­cien que poète, il veut sim­pli­fier l’orthographe en la ré­dui­sant à la pho­né­tique et ap­pli­quer à la fran­çaise le vers mé­trique. Pour as­su­rer le de sa , il fonde une Aca­dé­mie de poé­sie et de , plus d’un demi-siècle avant l’. Son Aca­dé­mie ne réus­sira pas mieux que ses vers et son or­tho­graphe. Néan­moins, on ne peut qu’admirer la per­sé­vé­rance de ce grand ex­pé­ri­men­ta­teur qui, de poé­sie en poé­sie, al­lait mul­ti­pliant les ten­ta­tives; par le foi­son­ne­ment de ses «Œuvres com­plètes», il mé­rite cette épi­taphe qu’un contem­po­rain 7 lui a dres­sée : «Baïf étant la de Poé­sie, il fit — épris de haute — cou­ler par­tout les ondes de Per­messe 8, sui­vant les pas des muses de la … Ores qu’il est … cette belle pour la est ta­rie».

  1. On ren­contre aussi les gra­phies Jean-An­toine de Bayf et Jan-An­toéne de Baïf. Icône Haut
  2. Raoul Mor­çay. Icône Haut
  3. Claude-Sixte Sau­treau de Marsy et Bar­thé­lemy Im­bert. Icône Haut
  4. Le poème «Ma Fran­cine, il est temps de te mon­trer au jour…». Icône Haut
  1. Le poème «, quand je re­vois tout ce que je com­pose…». Icône Haut
  2. Le poème «Mais sans m’en avi­ser se­rais-je mi­sé­rable?…». Icône Haut
  3. Jean Vau­que­lin de La Fres­naye. Icône Haut
  4. Ri­vière ar­ro­sant la de­meure des muses. Icône Haut

Parny, « Œuvres complètes. Tome IV. Mélanges • Opuscules • Lettres • Réponses »

éd. L’Harmattan, coll. Les Introuvables, Paris

éd. L’Harmattan, coll. Les In­trou­vables, Pa­ris

Il s’agit d’Évariste-é, che­va­lier de Parny, poète et créole qui doit la meilleure par­tie de sa re­nom­mée à ses «Élé­gies» éro­tiques et ses « ma­dé­casses» (XVIIIe siècle). Cha­teau­briand les sa­vait par cœur, et il écri­vit à l’ dont les vers fai­saient ses dé­lices pour lui de­man­der la per­mis­sion de le voir : «Parny me ré­pon­dit po­li­ment; je me ren­dis chez lui, rue de Cléry. Je trou­vai un homme as­sez jeune en­core, de très bon ton, grand, maigre, le vi­sage mar­qué de pe­tite vé­role. Il me ren­dit ma vi­site; je le pré­sen­tai à mes sœurs. Il ai­mait peu la et il en fut bien­tôt chassé par la … Je n’ai point connu d’écrivain qui fût plus sem­blable à ses ou­vrages : poète et créole, il ne lui fal­lait que le de l’Inde, une fon­taine, un pal­mier et une femme. Il re­dou­tait le bruit, cher­chait à glis­ser dans la sans être aperçu… et n’était trahi dans son obs­cu­rité que par… sa lyre» 1. Mais le pre­mier trait dis­tinc­tif du «seul poète élé­giaque que la ait en­core pro­duit», comme l’appelait Cha­teau­briand 2, était sa et sa sym­pa­thie. Sen­sible par­tout aux mal­heurs de l’, Parny dé­plo­rait le sort de l’Inde af­fa­mée, ra­va­gée par la po­li­tique de l’Angleterre, et ce­lui des dans les de la France dont la nour­ri­ture était «saine et as­sez abon­dante», mais qui avaient la pioche à la main de­puis quatre heures du ma­tin jusqu’au cou­cher du  : «Non, je ne sau­rais me plaire», écri­vait-il 3 de l’île de , qui était son île na­tale — «non, je ne sau­rais me plaire dans un pays où mes re­gards ne peuvent tom­ber que sur le spec­tacle de la ser­vi­tude, où le bruit des fouets et des chaînes étour­dit mon oreille et re­ten­tit dans mon cœur. Je ne vois que des ty­rans et des , et je ne vois pas mon sem­blable. On troque tous les jours un homme contre un  : il est im­pos­sible que je m’accoutume à une bi­zar­re­rie si ré­vol­tante».

  1. «Mé­moires d’outre-tombe», liv. IV, ch. XII. Icône Haut
  2. «Es­sai his­to­rique sur les », liv. I, part. 1, ch. XXII. Icône Haut
  1. «Tome IV», p. 130. Icône Haut

Parny, « Œuvres complètes. Tome III. Isnel et Asléga • Élégies • Les Tableaux • Chansons madécasses »

éd. L’Harmattan, coll. Les Introuvables, Paris

éd. L’Harmattan, coll. Les In­trou­vables, Pa­ris

Il s’agit d’Évariste-é, che­va­lier de Parny, poète et créole qui doit la meilleure par­tie de sa re­nom­mée à ses «Élé­gies» éro­tiques et ses « ma­dé­casses» (XVIIIe siècle). Cha­teau­briand les sa­vait par cœur, et il écri­vit à l’ dont les vers fai­saient ses dé­lices pour lui de­man­der la per­mis­sion de le voir : «Parny me ré­pon­dit po­li­ment; je me ren­dis chez lui, rue de Cléry. Je trou­vai un homme as­sez jeune en­core, de très bon ton, grand, maigre, le vi­sage mar­qué de pe­tite vé­role. Il me ren­dit ma vi­site; je le pré­sen­tai à mes sœurs. Il ai­mait peu la et il en fut bien­tôt chassé par la … Je n’ai point connu d’écrivain qui fût plus sem­blable à ses ou­vrages : poète et créole, il ne lui fal­lait que le de l’Inde, une fon­taine, un pal­mier et une femme. Il re­dou­tait le bruit, cher­chait à glis­ser dans la sans être aperçu… et n’était trahi dans son obs­cu­rité que par… sa lyre» 1. Mais le pre­mier trait dis­tinc­tif du «seul poète élé­giaque que la ait en­core pro­duit», comme l’appelait Cha­teau­briand 2, était sa et sa sym­pa­thie. Sen­sible par­tout aux mal­heurs de l’, Parny dé­plo­rait le sort de l’Inde af­fa­mée, ra­va­gée par la po­li­tique de l’Angleterre, et ce­lui des dans les de la France dont la nour­ri­ture était «saine et as­sez abon­dante», mais qui avaient la pioche à la main de­puis quatre heures du ma­tin jusqu’au cou­cher du  : «Non, je ne sau­rais me plaire», écri­vait-il 3 de l’île de , qui était son île na­tale — «non, je ne sau­rais me plaire dans un pays où mes re­gards ne peuvent tom­ber que sur le spec­tacle de la ser­vi­tude, où le bruit des fouets et des chaînes étour­dit mon oreille et re­ten­tit dans mon cœur. Je ne vois que des ty­rans et des , et je ne vois pas mon sem­blable. On troque tous les jours un homme contre un  : il est im­pos­sible que je m’accoutume à une bi­zar­re­rie si ré­vol­tante».

  1. «Mé­moires d’outre-tombe», liv. IV, ch. XII. Icône Haut
  2. «Es­sai his­to­rique sur les », liv. I, part. 1, ch. XXII. Icône Haut
  1. «Tome IV», p. 130. Icône Haut

Parny, « Œuvres complètes. Tome II. Les Galanteries de la Bible • Le Paradis perdu • Goddam • Les Rose-Croix »

éd. L’Harmattan, coll. Les Introuvables, Paris

éd. L’Harmattan, coll. Les In­trou­vables, Pa­ris

Il s’agit d’Évariste-é, che­va­lier de Parny, poète et créole qui doit la meilleure par­tie de sa re­nom­mée à ses «Élé­gies» éro­tiques et ses « ma­dé­casses» (XVIIIe siècle). Cha­teau­briand les sa­vait par cœur, et il écri­vit à l’ dont les vers fai­saient ses dé­lices pour lui de­man­der la per­mis­sion de le voir : «Parny me ré­pon­dit po­li­ment; je me ren­dis chez lui, rue de Cléry. Je trou­vai un homme as­sez jeune en­core, de très bon ton, grand, maigre, le vi­sage mar­qué de pe­tite vé­role. Il me ren­dit ma vi­site; je le pré­sen­tai à mes sœurs. Il ai­mait peu la et il en fut bien­tôt chassé par la … Je n’ai point connu d’écrivain qui fût plus sem­blable à ses ou­vrages : poète et créole, il ne lui fal­lait que le de l’Inde, une fon­taine, un pal­mier et une femme. Il re­dou­tait le bruit, cher­chait à glis­ser dans la sans être aperçu… et n’était trahi dans son obs­cu­rité que par… sa lyre» 1. Mais le pre­mier trait dis­tinc­tif du «seul poète élé­giaque que la ait en­core pro­duit», comme l’appelait Cha­teau­briand 2, était sa et sa sym­pa­thie. Sen­sible par­tout aux mal­heurs de l’, Parny dé­plo­rait le sort de l’Inde af­fa­mée, ra­va­gée par la po­li­tique de l’Angleterre, et ce­lui des dans les de la France dont la nour­ri­ture était «saine et as­sez abon­dante», mais qui avaient la pioche à la main de­puis quatre heures du ma­tin jusqu’au cou­cher du  : «Non, je ne sau­rais me plaire», écri­vait-il 3 de l’île de , qui était son île na­tale — «non, je ne sau­rais me plaire dans un pays où mes re­gards ne peuvent tom­ber que sur le spec­tacle de la ser­vi­tude, où le bruit des fouets et des chaînes étour­dit mon oreille et re­ten­tit dans mon cœur. Je ne vois que des ty­rans et des , et je ne vois pas mon sem­blable. On troque tous les jours un homme contre un  : il est im­pos­sible que je m’accoutume à une bi­zar­re­rie si ré­vol­tante».

  1. «Mé­moires d’outre-tombe», liv. IV, ch. XII. Icône Haut
  2. «Es­sai his­to­rique sur les », liv. I, part. 1, ch. XXII. Icône Haut
  1. «Tome IV», p. 130. Icône Haut

Baïf, « Œuvres complètes. Tome II. Les Amours »

éd. H. Champion, Paris

éd. H. Cham­pion, Pa­ris

Il s’agit des «Œuvres com­plètes» de  1, poète (XVIe siècle apr. J.-C.). Tan­dis que Du Bel­lay et Ron­sard ont vu maintes fois leurs «Œuvres com­plètes» édi­tées, celles de Baïf ont dû at­tendre le XXIe siècle pour être en­fin réunies (en­core que seuls les pre­miers tomes ont paru à ce jour). Il est vrai que ses vers, où il est tout de même aisé de trou­ver quelques pas­sages ad­mi­rables, sont sou­vent de lec­ture la­bo­rieuse et ré­com­pen­sée. Son est gauche. Son est toute d’emprunt. Il prend à pleines mains dans les de l’«An­tho­lo­gie grecque» et leurs imi­ta­teurs néo-la­tins, à moins qu’il ne pille les pé­trar­quistes et les bem­bistes ita­liens. Vic­time de sa trop grande fa­ci­lité, il laisse pas­ser des in­cor­rec­tions, des so­lé­cismes, des mal­adresses et écrit né­gli­gem­ment, sans tâ­ton­ne­ment comme sans re­touches : «La phrase s’étend, s’étire, abuse des re­jets…; parce qu’il ne sut ja­mais ni se sur­veiller ni se contraindre», dé­clare un  2. «On pour­rait presque dire qu’on a plus de peine à lire ses vers, qu’il n’en eut… à les com­po­ser; car il pa­raît que, de son , on l’accusait déjà de né­gli­gence», disent d’autres 3. Au reste, Baïf se rend compte de sa non­cha­lance, l’avoue et ne veut pas s’en cor­ri­ger : «Le pis que l’on dira, c’est que je suis de ceux qui à se re­po­lir sont un peu pa­res­seux, et que mes rudes vers n’ont [pas] été, sur l’enclume, re­mis as­sez de fois» 4. Feuille­tant ses propres poèmes, il trouve «leur su­jet si bi­zarre et di­vers, qu’en lire trois du long de grand- je n’ose» 5; mais loin d’essayer de cor­ri­ger ces bi­zar­re­ries, il af­fecte une en­tière in­dif­fé­rence et pré­fère re­non­cer aux pre­mières places : «Mon but est de me plaire aux que je chante… Si nul ne s’en contente, il faut que je m’en passe» 6. De plus en plus, il se sent une vo­ca­tion de ré­for­ma­teur. Tra­duc­teur de l’«An­ti­gone» de So­phocle et de «L’Eunuque» de Té­rence, au moins au­tant mu­si­cien que poète, il veut sim­pli­fier l’orthographe en la ré­dui­sant à la pho­né­tique et ap­pli­quer à la fran­çaise le vers mé­trique. Pour as­su­rer le de sa , il fonde une Aca­dé­mie de poé­sie et de , plus d’un demi-siècle avant l’. Son Aca­dé­mie ne réus­sira pas mieux que ses vers et son or­tho­graphe. Néan­moins, on ne peut qu’admirer la per­sé­vé­rance de ce grand ex­pé­ri­men­ta­teur qui, de poé­sie en poé­sie, al­lait mul­ti­pliant les ten­ta­tives; par le foi­son­ne­ment de ses «Œuvres com­plètes», il mé­rite cette épi­taphe qu’un contem­po­rain 7 lui a dres­sée : «Baïf étant la de Poé­sie, il fit — épris de haute — cou­ler par­tout les ondes de Per­messe 8, sui­vant les pas des muses de la … Ores qu’il est … cette belle pour la est ta­rie».

  1. On ren­contre aussi les gra­phies Jean-An­toine de Bayf et Jan-An­toéne de Baïf. Icône Haut
  2. Raoul Mor­çay. Icône Haut
  3. Claude-Sixte Sau­treau de Marsy et Bar­thé­lemy Im­bert. Icône Haut
  4. Le poème «Ma Fran­cine, il est temps de te mon­trer au jour…». Icône Haut
  1. Le poème «, quand je re­vois tout ce que je com­pose…». Icône Haut
  2. Le poème «Mais sans m’en avi­ser se­rais-je mi­sé­rable?…». Icône Haut
  3. Jean Vau­que­lin de La Fres­naye. Icône Haut
  4. Ri­vière ar­ro­sant la de­meure des muses. Icône Haut

Baïf, « Œuvres complètes. Tome I. Neuf Livres des poèmes »

éd. H. Champion, Paris

éd. H. Cham­pion, Pa­ris

Il s’agit des «Œuvres com­plètes» de  1, poète (XVIe siècle apr. J.-C.). Tan­dis que Du Bel­lay et Ron­sard ont vu maintes fois leurs «Œuvres com­plètes» édi­tées, celles de Baïf ont dû at­tendre le XXIe siècle pour être en­fin réunies (en­core que seuls les pre­miers tomes ont paru à ce jour). Il est vrai que ses vers, où il est tout de même aisé de trou­ver quelques pas­sages ad­mi­rables, sont sou­vent de lec­ture la­bo­rieuse et ré­com­pen­sée. Son est gauche. Son est toute d’emprunt. Il prend à pleines mains dans les de l’«An­tho­lo­gie grecque» et leurs imi­ta­teurs néo-la­tins, à moins qu’il ne pille les pé­trar­quistes et les bem­bistes ita­liens. Vic­time de sa trop grande fa­ci­lité, il laisse pas­ser des in­cor­rec­tions, des so­lé­cismes, des mal­adresses et écrit né­gli­gem­ment, sans tâ­ton­ne­ment comme sans re­touches : «La phrase s’étend, s’étire, abuse des re­jets…; parce qu’il ne sut ja­mais ni se sur­veiller ni se contraindre», dé­clare un  2. «On pour­rait presque dire qu’on a plus de peine à lire ses vers, qu’il n’en eut… à les com­po­ser; car il pa­raît que, de son , on l’accusait déjà de né­gli­gence», disent d’autres 3. Au reste, Baïf se rend compte de sa non­cha­lance, l’avoue et ne veut pas s’en cor­ri­ger : «Le pis que l’on dira, c’est que je suis de ceux qui à se re­po­lir sont un peu pa­res­seux, et que mes rudes vers n’ont [pas] été, sur l’enclume, re­mis as­sez de fois» 4. Feuille­tant ses propres poèmes, il trouve «leur su­jet si bi­zarre et di­vers, qu’en lire trois du long de grand- je n’ose» 5; mais loin d’essayer de cor­ri­ger ces bi­zar­re­ries, il af­fecte une en­tière in­dif­fé­rence et pré­fère re­non­cer aux pre­mières places : «Mon but est de me plaire aux que je chante… Si nul ne s’en contente, il faut que je m’en passe» 6. De plus en plus, il se sent une vo­ca­tion de ré­for­ma­teur. Tra­duc­teur de l’«An­ti­gone» de So­phocle et de «L’Eunuque» de Té­rence, au moins au­tant mu­si­cien que poète, il veut sim­pli­fier l’orthographe en la ré­dui­sant à la pho­né­tique et ap­pli­quer à la fran­çaise le vers mé­trique. Pour as­su­rer le de sa , il fonde une Aca­dé­mie de poé­sie et de , plus d’un demi-siècle avant l’. Son Aca­dé­mie ne réus­sira pas mieux que ses vers et son or­tho­graphe. Néan­moins, on ne peut qu’admirer la per­sé­vé­rance de ce grand ex­pé­ri­men­ta­teur qui, de poé­sie en poé­sie, al­lait mul­ti­pliant les ten­ta­tives; par le foi­son­ne­ment de ses «Œuvres com­plètes», il mé­rite cette épi­taphe qu’un contem­po­rain 7 lui a dres­sée : «Baïf étant la de Poé­sie, il fit — épris de haute — cou­ler par­tout les ondes de Per­messe 8, sui­vant les pas des muses de la … Ores qu’il est … cette belle pour la est ta­rie».

  1. On ren­contre aussi les gra­phies Jean-An­toine de Bayf et Jan-An­toéne de Baïf. Icône Haut
  2. Raoul Mor­çay. Icône Haut
  3. Claude-Sixte Sau­treau de Marsy et Bar­thé­lemy Im­bert. Icône Haut
  4. Le poème «Ma Fran­cine, il est temps de te mon­trer au jour…». Icône Haut
  1. Le poème «, quand je re­vois tout ce que je com­pose…». Icône Haut
  2. Le poème «Mais sans m’en avi­ser se­rais-je mi­sé­rable?…». Icône Haut
  3. Jean Vau­que­lin de La Fres­naye. Icône Haut
  4. Ri­vière ar­ro­sant la de­meure des muses. Icône Haut

« Chants de palefreniers, “Saïbara” »

éd. Publications orientalistes de France, coll. D’étranges pays-Poèmes, Paris

éd. Pu­bli­ca­tions de , coll. D’étranges pays-Poèmes, Pa­ris

Il s’agit des «Sai­bara» 1Chants de pa­le­fre­niers»). Ce genre est men­tionné pour la pre­mière fois dans les «Chro­niques vé­ri­diques des trois ères» («Ni­hon san­dai jit­su­roku» 2), au cha­pitre re­la­tif à l’année 859 apr. J.-C. Il y est dit que la prin­cesse Hi­roi, morte cette an­née-là, était fort cé­lèbre à l’époque de sa pour ses in­ter­pré­ta­tions de «Sai­bara». Jusqu’à nos jours, les phi­lo­logues ja­po­nais ont pro­posé une di­zaine d’explications pos­sibles pour ce terme, noté à l’aide de trois ca­rac­tères dont le sens lit­té­ral est «airs pour en­cou­ra­ger les che­vaux». Se­lon l’ tra­di­tion­nelle 3, il s’agirait de po­pu­laires que les pa­le­fre­niers chan­taient en me­nant à la ca­pi­tale les bêtes de somme. D’autres es­timent que ce nom ne fait que tra­duire l’esprit de la pre­mière chan­son du re­cueil, in­ti­tu­lée pré­ci­sé­ment : «Va, mon cour­sier». En­fin, tout ré­cem­ment, M. Usuda Jin­gorô dé­cou­vrait, dans un do­cu­ment conservé à la bi­blio­thèque de la Mai­son Im­pé­riale, la preuve de l’ d’une mé­lo­die d’origine chi­noise, aujourd’hui per­due, dont le titre «Sai­ba­raku» s’écrivait au moyen des mêmes idéo­grammes. En tout cas, l’on se convain­cra ai­sé­ment, à la simple lec­ture, qu’il s’agit bien de chan­sons po­pu­laires, res­pi­rant l’humeur en­jouée et la naï­veté un peu grasse et bon en­fant de l’ pay­sanne. Cu­rieu­se­ment, ces chan­sons ont connu leur vogue au­tour de l’an 1000 apr. J.-C., c’est-à-dire à l’apogée de cette Cour raf­fi­née qui a fait naître no­tam­ment le «Dit du genji», le chef-d’œuvre in­égalé des lettres ja­po­naises. Les de ce dit chantent des «Sai­bara» en toute oc­ca­sion : lors des of­fi­ciels du , aussi bien qu’en privé; ils les fre­donnent en dé­am­bu­lant par les cou­loirs, et en usent, hommes et , comme d’un convenu pour leurs échanges épis­to­laires. Mieux en­core : quatre cha­pitres de ce dit — «La Branche du pru­nier» (ch. XXXII), «La Ri­vière aux bam­bous» (ch. XLIV), «Les Che­veux noués» (ch. XLVII) et «Le Pa­villon» (ch. L) — em­pruntent leurs titres mêmes à des chan­sons po­pu­laires de ce genre. «L’on pour­rait croire», dit très bien M. , «que tous ces princes et cour­ti­sans, sou­mis per­pé­tuel­le­ment au car­can d’une éti­quette mé­ti­cu­leuse, trou­vaient dans l’allégresse qui anime la presque to­ta­lité de ces chan­sons… un exu­toire aux contraintes d’une ré­glée dans ses moindres dé­tails.»

  1. En ja­po­nais «催馬楽». Icône Haut
  2. En ja­po­nais «日本三代実録». Icône Haut
  1. In­ter­pré­ta­tion énon­cée par Ichijô Ka­neyo­shi. Icône Haut

Parny, « Œuvres complètes. Tome I. La Guerre des dieux • Les Déguisements de Vénus »

éd. L’Harmattan, coll. Les Introuvables, Paris

éd. L’Harmattan, coll. Les In­trou­vables, Pa­ris

Il s’agit d’Évariste-é, che­va­lier de Parny, poète et créole qui doit la meilleure par­tie de sa re­nom­mée à ses «Élé­gies» éro­tiques et ses « ma­dé­casses» (XVIIIe siècle). Cha­teau­briand les sa­vait par cœur, et il écri­vit à l’ dont les vers fai­saient ses dé­lices pour lui de­man­der la per­mis­sion de le voir : «Parny me ré­pon­dit po­li­ment; je me ren­dis chez lui, rue de Cléry. Je trou­vai un homme as­sez jeune en­core, de très bon ton, grand, maigre, le vi­sage mar­qué de pe­tite vé­role. Il me ren­dit ma vi­site; je le pré­sen­tai à mes sœurs. Il ai­mait peu la et il en fut bien­tôt chassé par la … Je n’ai point connu d’écrivain qui fût plus sem­blable à ses ou­vrages : poète et créole, il ne lui fal­lait que le de l’Inde, une fon­taine, un pal­mier et une femme. Il re­dou­tait le bruit, cher­chait à glis­ser dans la sans être aperçu… et n’était trahi dans son obs­cu­rité que par… sa lyre» 1. Mais le pre­mier trait dis­tinc­tif du «seul poète élé­giaque que la ait en­core pro­duit», comme l’appelait Cha­teau­briand 2, était sa et sa sym­pa­thie. Sen­sible par­tout aux mal­heurs de l’, Parny dé­plo­rait le sort de l’Inde af­fa­mée, ra­va­gée par la po­li­tique de l’Angleterre, et ce­lui des dans les de la France dont la nour­ri­ture était «saine et as­sez abon­dante», mais qui avaient la pioche à la main de­puis quatre heures du ma­tin jusqu’au cou­cher du  : «Non, je ne sau­rais me plaire», écri­vait-il 3 de l’île de , qui était son île na­tale — «non, je ne sau­rais me plaire dans un pays où mes re­gards ne peuvent tom­ber que sur le spec­tacle de la ser­vi­tude, où le bruit des fouets et des chaînes étour­dit mon oreille et re­ten­tit dans mon cœur. Je ne vois que des ty­rans et des , et je ne vois pas mon sem­blable. On troque tous les jours un homme contre un  : il est im­pos­sible que je m’accoutume à une bi­zar­re­rie si ré­vol­tante».

  1. «Mé­moires d’outre-tombe», liv. IV, ch. XII. Icône Haut
  2. «Es­sai his­to­rique sur les », liv. I, part. 1, ch. XXII. Icône Haut
  1. «Tome IV», p. 130. Icône Haut