Icône Mot-clefmythologie hindoue

su­jet

Harṣa, « Trois Pièces de théâtre (VIIᵉ siècle apr. J.-C.). “Priya darshika” “Nagananda” “Ratnavali” »

éd. Buchet-Chastel, Paris

éd. Bu­chet-Chas­tel, Pa­ris

Il s’agit de «Rat­nâ­valî» 1Col­lier-de-gemmes»), «Priya­darśikâ» 2Belle-à-voir») et autres du roi -de- (Śî­lâ­di­tya 3), plus cé­lèbre dans l’ et la lit­té­ra­ture de l’Inde sous le nom de Harṣa ou Harṣa Vard­hana 4. La de ce roi — dra­ma­turge, poète, ami na­tu­rel des re­li­gions et des lettres — est, avec celle d’Aśoka, l’une des mieux connues et des plus net­te­ment ées de l’Inde clas­sique. Outre ses mon­naies et , deux té­moi­gnages de pre­mière main nous ren­seignent sur lui. Le cour­ti­san Bâṇa, qui bé­né­fi­cia de ses lar­gesses, a ré­digé sa ro­man­cée sous le titre de «La Geste de Harṣa» («Harṣa­ca­rita» 5) — une vie qui s’arrête, ce­pen­dant, in­opi­né­ment au hui­tième cha­pitre, soit que le bio­graphe l’ait lais­sée in­ache­vée, soit que les siècles en aient fait dis­pa­raître les der­nières pages. À ce té­moi­gnage s’ajoute ce­lui du pè­le­rin , qui passa en Inde plus de douze ans et qui nous a laissé, dans les «Mé­moires» re­la­tifs à son voyage, maints dé­tails sur ce sou­ve­rain qui fut pour lui un hôte et un ami. Le por­trait concor­dant dressé par ces do­cu­ments nous re­pré­sente Harṣa à la tête d’une ar­mée for­mi­dable, qui ne comp­tait pas moins de soixante mille élé­phants et cent mille hommes de ca­va­le­rie; mais loin d’abuser de sa puis­sance, il était au contraire aussi pa­ci­fique qu’il était pieux. «Et par sa , il ré­pan­dit par­tout l’union et la ; il… pra­ti­qua le bien au point d’oublier le som­meil et le man­ger», rap­porte Xuan­zang 6. «Dans les — grandes et pe­tites — des cinq Indes 7, dans les , dans les car­re­fours, au croi­se­ment des che­mins, il fit bâ­tir des mai­sons de se­cours, où l’on dé­po­sait des ali­ments, des breu­vages et des mé­di­ca­ments pour les don­ner en au­mône aux … et aux in­di­gents. Ces dis­tri­bu­tions bien­fai­santes ne ces­saient ja­mais.» Rem­pli de zèle pour la du , Harṣa était en même rem­pli de pour toute . Il convo­quait ré­gu­liè­re­ment une es­pèce de grande as­sem­blée de tous les re­li­gieux ver­sés dans les , pour la­quelle il épui­sait le tré­sor et les ma­ga­sins de l’État. Ce mé­lange d’indulgence et de li­bé­ra­lité royale perce à jour éga­le­ment dans les œuvres lit­té­raires qui lui sont at­tri­buées — trois pièces de et deux poé­sies, et qui achèvent de nous faire connaître un roi dont la vertu rayonna de feux et de splen­deur non seule­ment en Inde, mais à l’étranger.

  1. En «रत्नावली». Au­tre­fois trans­crit «Rat­na­wali». Icône Haut
  2. En sans­crit «प्रियदर्शिका». Au­tre­fois trans­crit «Priya dar­shika» ou «Priya­dar­çikâ». Icône Haut
  3. En sans­crit शीलादित्य. Au­tre­fois trans­crit Çî­lâ­di­tya. Icône Haut
  4. En sans­crit हर्षवर्धन. Au­tre­fois trans­crit Harça, Har­cha ou Har­sha. Icône Haut
  1. En sans­crit «हर्षचरितम्», in­édit en . Au­tre­fois trans­crit «Harṣa­ca­ri­tam», «Har­chat­cha­rita», «Har­sa­cha­rita», «Har­sha­cha­rita» ou «Har­sha­ca­rita». Icône Haut
  2. «Mé­moires sur les contrées oc­ci­den­tales», liv. V, ch. LXI. Icône Haut
  3. Les Chi­nois comp­taient cinq Indes cor­res­pon­dant aux quatre points car­di­naux avec, au mi­lieu, l’Inde cen­trale. Icône Haut

« Harṣa Vardhana, Empereur et poète de l’Inde septentrionale (606-648 apr. J.-C.) : étude sur sa vie et son temps »

éd. J.-B. Istas, Louvain

éd. J.-B. Is­tas, Lou­vain

Il s’agit de l’«Hymne aux huit grands temples sa­crés» 1Aṣṭa mahâ śrî cai­tya sto­tra» 2) et autres poé­sies du roi -de- (Śî­lâ­di­tya 3), plus cé­lèbre dans l’ et la lit­té­ra­ture de l’Inde sous le nom de Harṣa ou Harṣa Vard­hana 4. La de ce roi — dra­ma­turge, poète, ami na­tu­rel des re­li­gions et des lettres — est, avec celle d’Aśoka, l’une des mieux connues et des plus net­te­ment ées de l’Inde clas­sique. Outre ses mon­naies et , deux té­moi­gnages de pre­mière main nous ren­seignent sur lui. Le cour­ti­san Bâṇa, qui bé­né­fi­cia de ses lar­gesses, a ré­digé sa ro­man­cée sous le titre de «La Geste de Harṣa» («Harṣa­ca­rita» 5) — une vie qui s’arrête, ce­pen­dant, in­opi­né­ment au hui­tième cha­pitre, soit que le bio­graphe l’ait lais­sée in­ache­vée, soit que les siècles en aient fait dis­pa­raître les der­nières pages. À ce té­moi­gnage s’ajoute ce­lui du pè­le­rin , qui passa en Inde plus de douze ans et qui nous a laissé, dans les «Mé­moires» re­la­tifs à son voyage, maints dé­tails sur ce sou­ve­rain qui fut pour lui un hôte et un ami. Le por­trait concor­dant dressé par ces do­cu­ments nous re­pré­sente Harṣa à la tête d’une ar­mée for­mi­dable, qui ne comp­tait pas moins de soixante mille élé­phants et cent mille hommes de ca­va­le­rie; mais loin d’abuser de sa puis­sance, il était au contraire aussi pa­ci­fique qu’il était pieux. «Et par sa , il ré­pan­dit par­tout l’union et la ; il… pra­ti­qua le bien au point d’oublier le som­meil et le man­ger», rap­porte Xuan­zang 6. «Dans les — grandes et pe­tites — des cinq Indes 7, dans les , dans les car­re­fours, au croi­se­ment des che­mins, il fit bâ­tir des mai­sons de se­cours, où l’on dé­po­sait des ali­ments, des breu­vages et des mé­di­ca­ments pour les don­ner en au­mône aux … et aux in­di­gents. Ces dis­tri­bu­tions bien­fai­santes ne ces­saient ja­mais.» Rem­pli de zèle pour la du , Harṣa était en même rem­pli de pour toute . Il convo­quait ré­gu­liè­re­ment une es­pèce de grande as­sem­blée de tous les re­li­gieux ver­sés dans les , pour la­quelle il épui­sait le tré­sor et les ma­ga­sins de l’État. Ce mé­lange d’indulgence et de li­bé­ra­lité royale perce à jour éga­le­ment dans les œuvres lit­té­raires qui lui sont at­tri­buées — trois pièces de et deux poé­sies, et qui achèvent de nous faire connaître un roi dont la vertu rayonna de feux et de splen­deur non seule­ment en Inde, mais à l’étranger.

  1. Au­tre­fois tra­duit «Hymne aux huit grands “cai­tyas” vé­né­rables». Icône Haut
  2. En «अष्ट-महा-श्री-चैत्य-स्तोत्र». Au­tre­fois trans­crit «Aṣṭa-mahā-çrī-caitya-stotra», «Aṣṭhaṃahāśricaityastotra» ou «Ashta-maha-sri-chai­tya-sto­tra». Icône Haut
  3. En sans­crit शीलादित्य. Au­tre­fois trans­crit Çî­lâ­di­tya. Icône Haut
  4. En sans­crit हर्षवर्धन. Au­tre­fois trans­crit Harça, Har­cha ou Har­sha. Icône Haut
  1. En sans­crit «हर्षचरितम्», in­édit en . Au­tre­fois trans­crit «Harṣa­ca­ri­tam», «Har­chat­cha­rita», «Har­sa­cha­rita», «Har­sha­cha­rita» ou «Har­sha­ca­rita». Icône Haut
  2. «Mé­moires sur les contrées oc­ci­den­tales», liv. V, ch. LXI. Icône Haut
  3. Les Chi­nois comp­taient cinq Indes cor­res­pon­dant aux quatre points car­di­naux avec, au mi­lieu, l’Inde cen­trale. Icône Haut

Bhartrihari, « Les Stances érotiques, morales et religieuses »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit des «Trois Cen­tu­ries de qua­trains» («Śa­ta­ka­traya» 1) de Bhar­tri­hari 2, l’un des plus grands d’expression sans­crite (VIIe siècle apr. J.-C. sans ). L’oubli et l’indifférence où tombent cer­taines œuvres de l’esprit hu­main est quelque chose de sin­gu­lier. Cet ou­bli est in­juste; mais, à bien des égards, je me l’explique. Ce­pen­dant, ja­mais je ne m’expliquerai l’oubli qui frappe Bhar­tri­hari. Lui qui a été, pour­tant, le pre­mier poète hin­dou à être tra­duit en . Lui dont Iq­bal a dit : «Re­garde ce chan­teur de [mon] pays! Par la grâce de son , la ro­sée se trans­forme en perles. Ce poète à l’œuvre sub­tile qui s’appelle Bhar­tri­hari pos­sède une sem­blable aux nuages de » 3. Ses qua­trains, à la fois ar­dents et se­reins, qui chantent toutes les jouis­sances et qui les trouvent toutes vaines, mé­ditent, plu­sieurs siècles avant Khayyam, sur le néant des choses d’ici-bas, dans un in­tem­po­rel d’une in­con­tes­table élé­va­tion. Ils sont au nombre de trois cents, par­ta­gés en trois par­ties égales : la pre­mière est éro­tique 4, la deuxième —  5, la troi­sième et der­nière traite de l’impermanence, en in­ci­tant à la contem­pla­tive et au re­non­ce­ment au  6. Une lé­gende digne des «Mille et une Nuits» cir­cule à ce pro­pos : Bhar­tri­hari au­rait été roi, as­sis sur le trône d’Ujjayinî (l’actuelle Uj­jain 7). Ayant reçu d’un saint un fruit pré­cieux qui confé­rait l’, il l’offrit à la reine. La reine le donna au conseiller, son adul­tère amant; le conseiller — à une autre femme; de sorte que, pas­sant ainsi de main en main, cette am­broi­sie par­vint à une ser­vante qui fut aper­çue par le roi. Dé­goûté du monde par l’infidélité de son épouse, lais­sant là le pou­voir et les gran­deurs, Bhar­tri­hari s’en alla sans re­gret d’Ujjayinî. Ses qua­trains le montrent vi­vant dé­sor­mais en as­cète, après avoir fixé son sé­jour à Bé­na­rès, sur le bord de la ri­vière des , le Gange (3.87). Il se nour­rit d’aumônes; il ha­bite parmi les hommes sans avoir de rap­ports avec eux (3.95). Vêtu seule­ment d’un pagne qui couvre sa nu­dité, il fuit avec ef­froi la di­ver­sité des ap­pa­rences ma­té­rielles et il crie à haute  : «Shiva! Shiva!» (3.85). «N’accorde au­cune confiance, ô mon cœur, à l’inconstante déesse de la For­tune! C’est une cour­ti­sane vé­nale qui aban­donne ses amants sur un fron­ce­ment de sour­cil… Pre­nons la saie d’ascète et al­lons de porte en porte dans les rues de Bé­na­rès, en at­ten­dant que l’aumône nous tombe dans la main que nous ten­dons en guise d’écuelle», écrit-il (3.66).

  1. En «शतकत्रय». Par­fois trans­crit «Sha­ta­ka­traya». Icône Haut
  2. En sans­crit भर्तृहरि. Par­fois trans­crit Bar­throu­herri, Bhar­thru­hari, Bhar­tri­heri, Bhartṛ­hari ou Bartṛ­hari. Icône Haut
  3. «Le Livre de l’éternité», p. 132. Icône Haut
  4. «Śṛṅgâraśatakam» («शृङ्गारशतकम्»). Par­fois trans­crit «Shrin­gâra Ça­taka» ou «Śhriṅgāraśhataka». Icône Haut
  1. «Nî­tiśa­ta­kam» («नीतिशतकम्»). Par­fois trans­crit «Nîtî Ça­taka» ou «Nītīś­ha­taka». Icône Haut
  2. «Vai­râ­gyaśa­ta­kam» («वैराग्यशतकम्»). Par­fois trans­crit «Vai­râ­gya Ça­taka», «Vai­râ­gya­sha­taka» ou «Vai­ra­gya Sha­ta­kam». Icône Haut
  3. En उज्जैन. Par­fois trans­crit Ugein, Ogein, Ojein, Od­jain, Oud­jayin, Oud­jeïn, Ud­jein, Ou­j­jeïn ou Ou­j­jain. Icône Haut

« Le Veda : premier livre sacré de l’Inde. Tome II »

éd. Gérard et Cie, coll. Marabout université-Trésors spirituels de l’humanité, Verviers

éd. Gé­rard et Cie, coll. Ma­ra­bout uni­ver­sité- spi­ri­tuels de l’, Ver­viers

Il s’agit du «Ṛg­veda» 1, de l’«Athar­va­veda» 2 et autres por­tant le nom de Vé­das (« sa­crées») — nom dé­rivé de la même ra­cine «vid» qui se trouve dans nos mots «idée», «idole». Il est cer­tain que ces sont le plus an­cien mo­nu­ment de la lit­té­ra­ture de l’Inde (IIe mil­lé­naire av. J.-C.). On peut s’en convaincre déjà par leur désuète qui ar­rête à chaque pas in­ter­prètes et tra­duc­teurs; mais ce qui le prouve en­core mieux, c’est qu’on n’y trouve au­cune trace du culte aujourd’hui om­ni­pré­sent de Râma et de Kṛṣṇa. Je ne vou­drais pas, pour au­tant, qu’on se fasse une opi­nion trop exa­gé­rée de leur mé­rite. On a af­faire à des bribes de dé­cou­sues, à des for­mules de dé­con­cer­tantes, sortes de bal­bu­tie­ments du verbe, dont l’originalité fi­nit par aga­cer. «Les , de­puis [Abel] Ber­gaigne sur­tout, ont cessé d’admirer dans les Vé­das les pre­miers hymnes de l’humanité ou de la “race aryenne” en pré­sence [de] la … À par­ler franc, les trois quarts et demi du “Ṛg­veda” sont du ga­li­ma­tias. Les in­dia­nistes le savent et en conviennent vo­lon­tiers entre eux», dit Sa­lo­mon Rei­nach 3. La vé­dique est, en ef­fet, une rhé­to­rique bi­zarre, qui ef­fa­rouche les meilleurs sa­vants par la dis­pa­rité des images et le che­vau­che­ment des sens. Elle se com­pose de mé­ta­phores sa­cer­do­tales, com­pli­quées et obs­cures à des­sein, parce que les vé­diques, qui vi­vaient de l’autel, en­ten­daient s’en ré­ser­ver le mo­no­pole. Sou­vent, ces mé­ta­phores font, comme nous di­rions, d’une deux coups. Deux idées, as­so­ciées quelque part à une troi­sième, sont en­suite as­so­ciées l’une à l’autre, alors qu’elles hurlent de dé­goût de se voir en­semble. Voici un exemple dont l’étrangeté a, du moins, une sa­veur my­tho­lo­gique : Le «soma» («li­queur cé­leste») sort de la nuée. La nuée est une vache. Le «soma» est donc un lait, ou plu­tôt, c’est un beurre qui a des «pieds», qui a des «sa­bots», et qu’Indra trouve dans la vache. Le «soma» est donc un veau qui sort d’un «pis», et ce qui est plus fort, du pis d’un mâle, par suite de la sub­sti­tu­tion du mot «nuée» avec le mot «nuage». De là, cet hymne :

«Voilà le nom se­cret du beurre :
“Langue des ”, “nom­bril de l’immortel”.
Pro­cla­mons le nom du beurre,
Sou­te­nons-le de nos hom­mages en ce !…
Le buffle aux quatre cornes l’a ex­crété.
Il a quatre cornes, trois pieds…
Elles jaillissent de l’océan spi­ri­tuel,
Ces cou­lées de beurre cent fois en­closes,
In­vi­sibles à l’ennemi. Je les consi­dère :
La verge d’ est en leur mi­lieu
», etc.

  1. En «ऋग्वेद». Par­fois trans­crit «Rk Veda», «Rak-véda», «Rag­veda», «Rěg­veda», «Rik-veda», «Rick Veda» ou «Rig-ved». Icône Haut
  2. En sans­crit «अथर्ववेद». Icône Haut
  1. «Or­pheus : gé­né­rale des re­li­gions», p. 77-78. On peut joindre à cette opi­nion celle de Vol­taire : «Les Vé­das sont le plus en­nuyeux fa­tras que j’aie ja­mais lu. Fi­gu­rez-vous la “Lé­gende do­rée”, les “Confor­mi­tés de saint Fran­çois d’Assise”, les “Exer­cices spi­ri­tuels” de saint Ignace et les “Ser­mons” de Me­not joints en­semble, vous n’aurez en­core qu’une idée très im­par­faite des im­per­ti­nences des Vé­das» («Lettres chi­noises, in­diennes et tar­tares», lettre IX). Icône Haut

Vâlmîki, « Le Rāmāyaṇa »

éd. Gallimard, coll. Encyclopédie de la Pléiade, Paris

éd. Gal­li­mard, coll. En­cy­clo­pé­die de la Pléiade, Pa­ris

Il s’agit du «Râmâyaṇa» 1 de Vâl­mîki 2. Le «Râmâyaṇa» res­semble à un de ces grands où toute une se re­con­naît et s’admire avec com­plai­sance, et qui ex­citent la des autres peuples. Toute l’Inde se re­con­naît et s’admire dans cette mo­nu­men­tale «Iliade» de vingt-quatre mille ver­sets, dont l’ s’appelle Vâl­mîki; elle est vue, à bon , comme le chef-d’œuvre de la in­dienne. On n’en sait pas plus sur l’Homère in­dien que sur l’Homère ; on ignore jusqu’au siècle où il a vécu (quelque part au Ier mil­lé­naire av. J.-C.). Dans le cha­pitre I.2, il est ra­conté que c’est Brahmâ lui-même, le créa­teur des mondes, qui a in­cité Vâl­mîki à écrire cette , en pro­met­tant au poète que «tant qu’il y aura sur des et des ri­vières, l’ du “Râmâyaṇa” cir­cu­lera dans les mondes». La pro­messe a été te­nue. Les di­thy­ram­biques de Mi­che­let, les pages en­thou­siastes de La­prade at­testent l’émotion qui sai­sit aujourd’hui en­core les culti­vés en pré­sence de ce chef-d’œuvre : «L’année… où j’ai pu lire le grand poème de l’Inde, le di­vin “Râmâyaṇa”… me res­tera chère et bé­nie… “La d’un seul vers de ce poème suf­fit à la­ver de ses fautes même ce­lui qui en com­met chaque jour” 3… Notre pé­ché per­ma­nent, la lie, le le­vain amer qu’apporte et laisse le , ce grand fleuve de poé­sie l’emporte et nous pu­ri­fie. Qui­conque a sé­ché son cœur, qu’il l’abreuve au “Râmâyaṇa”… Qui­conque a trop fait, trop voulu, qu’il boive à cette coupe pro­fonde un long trait de , de », dit Mi­che­let 4. C’est que, dans tout le cours de cette épo­pée, on se trouve, à chaque pas, aux prises avec un être et une forme pro­vi­soires : , ani­mal, plante, rien de dé­fi­ni­tif, rien d’immuable. De là ce et cette crainte re­li­gieuse de la , qui four­nissent à la poé­sie de Vâl­mîki des dé­tails si tou­chants; de là aussi ces rê­veuses, ces pein­tures de la vie as­cé­tique, en­fin ces dis­ser­ta­tions phi­lo­so­phiques, qui tiennent non moins de place que les com­bats. Celle-ci par exemple : «La ruine l’homme : que peut-il faire pour s’y op­po­ser? Les hommes se ré­jouissent quand le se lève, ils se ré­jouissent quand le jour s’éteint… Ils sont heu­reux de voir com­men­cer une sai­son , comme si c’était un re­nou­veau : mais le re­tour des sai­sons ne fait qu’épuiser la vi­gueur des créa­tures» 5. Quelle gran­deur dans ces ver­sets pleins de !

  1. En «रामायण». «Râmâyaṇa» si­gni­fie «La Marche de Râma». Au­tre­fois tra­duit «La Râ­maïde». Icône Haut
  2. En sans­crit वाल्मीकि. Icône Haut
  3. «Râmâyaṇa», ch. VII.111. Icône Haut
  1. « de l’. Tome I», p. 1-2. Icône Haut
  2. «Râmâyaṇa», ch. II.105. Icône Haut

« Le Veda : premier livre sacré de l’Inde. Tome I »

éd. Gérard et Cie, coll. Marabout université-Trésors spirituels de l’humanité, Verviers

éd. Gé­rard et Cie, coll. Ma­ra­bout uni­ver­sité- spi­ri­tuels de l’, Ver­viers

Il s’agit du «Ṛg­veda» 1, de l’«Athar­va­veda» 2 et autres hin­dous por­tant le nom de Vé­das (« sa­crées») — nom dé­rivé de la même ra­cine «vid» qui se trouve dans nos mots «idée», «idole». Il est cer­tain que ces hymnes sont le plus an­cien mo­nu­ment de la lit­té­ra­ture de l’Inde (IIe mil­lé­naire av. J.-C.). On peut s’en convaincre déjà par leur désuète qui ar­rête à chaque pas in­ter­prètes et tra­duc­teurs; mais ce qui le prouve en­core mieux, c’est qu’on n’y trouve au­cune trace du culte aujourd’hui om­ni­pré­sent de Râma et de Kṛṣṇa. Je ne vou­drais pas, pour au­tant, qu’on se fasse une opi­nion trop exa­gé­rée de leur mé­rite. On a af­faire à des bribes de dé­cou­sues, à des for­mules de dé­con­cer­tantes, sortes de bal­bu­tie­ments du verbe, dont l’originalité fi­nit par aga­cer. «Les , de­puis [Abel] Ber­gaigne sur­tout, ont cessé d’admirer dans les Vé­das les pre­miers hymnes de l’humanité ou de la “race aryenne” en pré­sence [de] la … À par­ler franc, les trois quarts et demi du “Ṛg­veda” sont du ga­li­ma­tias. Les in­dia­nistes le savent et en conviennent vo­lon­tiers entre eux», dit Sa­lo­mon Rei­nach 3. La vé­dique est, en ef­fet, une rhé­to­rique bi­zarre, qui ef­fa­rouche les meilleurs sa­vants par la dis­pa­rité des images et le che­vau­che­ment des sens. Elle se com­pose de mé­ta­phores sa­cer­do­tales, com­pli­quées et obs­cures à des­sein, parce que les vé­diques, qui vi­vaient de l’autel, en­ten­daient s’en ré­ser­ver le mo­no­pole. Sou­vent, ces mé­ta­phores font, comme nous di­rions, d’une deux coups. Deux idées, as­so­ciées quelque part à une troi­sième, sont en­suite as­so­ciées l’une à l’autre, alors qu’elles hurlent de dé­goût de se voir en­semble. Voici un exemple dont l’étrangeté a, du moins, une sa­veur my­tho­lo­gique : Le «soma» («li­queur cé­leste») sort de la nuée. La nuée est une vache. Le «soma» est donc un lait, ou plu­tôt, c’est un beurre qui a des «pieds», qui a des «sa­bots», et qu’Indra trouve dans la vache. Le «soma» est donc un veau qui sort d’un «pis», et ce qui est plus fort, du pis d’un mâle, par suite de la sub­sti­tu­tion du mot «nuée» avec le mot «nuage». De là, cet hymne :

«Voilà le nom se­cret du beurre :
“Langue des ”, “nom­bril de l’immortel”.
Pro­cla­mons le nom du beurre,
Sou­te­nons-le de nos hom­mages en ce !…
Le buffle aux quatre cornes l’a ex­crété.
Il a quatre cornes, trois pieds…
Elles jaillissent de l’océan spi­ri­tuel,
Ces cou­lées de beurre cent fois en­closes,
In­vi­sibles à l’ennemi. Je les consi­dère :
La verge d’ est en leur mi­lieu
», etc.

  1. En «ऋग्वेद». Par­fois trans­crit «Rk Veda», «Rak-véda», «Rag­veda», «Rěg­veda», «Rik-veda», «Rick Veda» ou «Rig-ved». Icône Haut
  2. En sans­crit «अथर्ववेद». Icône Haut
  1. «Or­pheus : gé­né­rale des re­li­gions», p. 77-78. On peut joindre à cette opi­nion celle de Vol­taire : «Les Vé­das sont le plus en­nuyeux fa­tras que j’aie ja­mais lu. Fi­gu­rez-vous la “Lé­gende do­rée”, les “Confor­mi­tés de saint Fran­çois d’Assise”, les “Exer­cices spi­ri­tuels” de saint Ignace et les “Ser­mons” de Me­not joints en­semble, vous n’aurez en­core qu’une idée très im­par­faite des im­per­ti­nences des Vé­das» («Lettres chi­noises, in­diennes et tar­tares», lettre IX). Icône Haut