Icône Mot-clefpoésie arabe

Khansâ, « Le “Dîwân” »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du Di­van (Re­cueil de poé­sies) d’al-Khansâ 1, poé­tesse bé­douine, qui chanta avec une émo­tion poi­gnante la pré­ma­tu­rée de ses deux (VIe-VIIe siècle apr. J.-C.). La c’était l’enthousiasme des bé­douines. Dans les grandes cir­cons­tances de leur , la , la re­con­nais­sance, l’indignation fai­saient jaillir des pro­fon­deurs de leur des chants tou­jours na­tu­rels, par­fois su­blimes. «Le lec­teur ne doit pas ou­blier qu’au dé­sert toute émo­tion vive se tra­dui­sait par une im­pro­vi­sa­tion ; ce qui se­rait un pé­dan­tisme ri­di­cule dans notre raf­fi­née, était le cri de la chez les peuples pri­mi­tifs», dit le père Vic­tor de Cop­pier 2. Les femmes bé­douines sa­vaient peindre en termes et pit­to­resques un beau aux pieds «fer­rés de vent du Sud et de vent du Nord»; elles s’entendaient à dé­crire une lance à la hampe souple et so­lide, une cotte de mailles aux an­neaux in­flexibles, un casque à la bombe étin­ce­lante; elles ai­maient à van­ter une in­cur­sion heu­reuse, les des vain­queurs, les noms des aïeux et les longues li­gnées des fa­milles re­liées par une pré­cise aux pre­mières hordes des­cen­dues en ; à la du guer­rier qui n’était plus, elles ex­cel­laient à com­po­ser des de mar­thiya» 3). , les hymnes de deuil se muaient le plus sou­vent en hymnes de ; car après avoir pleuré le hé­ros mort, après avoir rap­pelé sa bra­voure, sa li­bé­ra­lité, sa fi­dé­lité au ser­ment, son gé­né­reuse, son mé­pris de la vie, son de tout in­té­rêt et de tout sen­ti­ment à l’austère de­voir, il fal­lait, se­lon les du dé­sert, de­man­der la ran­çon de son . Maintes fois, les ac­cents dou­lou­reux d’une mère, d’une épouse, d’une sœur mirent les aux mains d’une tribu en­tière.

  1. En الخنساء. Par­fois trans­crit al-Ḫansâ’ ou el Kanssa. Icône Haut
  2. p. XVII. Icône Haut
  1. En arabe مرثيّه. Par­fois trans­crit «mer­siye», «mar­siyeh», «mar­siya», «mar­sia» ou «marṯiya». Icône Haut

« La Courtoisie dans la poésie irakienne : un poète de transition, Baššār b. Burd »

dans Jean-Claude Vadet, « L’Esprit courtois en Orient » (éd. G.-P. Maisonneuve et Larose, Paris), p. 159-193

dans Jean-Claude Va­det, «L’Esprit cour­tois en » (éd. G.-P. Mai­son­neuve et La­rose, Pa­ris), p. 159-193

Il s’agit de Ba­char ibn Bourd 1, poète d’expression (VIIIe siècle apr. J.-C.). Il na­quit en , où son père avait été amené comme es­clave. Lui-même était es­clave, mais ayant ob­tenu son af­fran­chis­se­ment de la femme arabe dont il était la pro­priété, il vé­cut tan­tôt à Bas­so­rah, sa ville na­tale, tan­tôt à . Tou­te­fois, quand on lui de­man­dait d’où pro­ve­nait le mé­rite des poé­sies qu’il com­po­sait, il en fai­sait re­mon­ter l’origine à la li­gnée des an­ciens rois de , à la­quelle il se rat­ta­chait. C’était un zo­roas­trien qui ne ca­chait pas sa haine en­vers les et qui re­mer­ciait le de l’avoir privé de la vue «pour ne pas voir ceux que je hais», di­sait-il 2. Car, en ef­fet, Ba­char était aveugle de nais­sance. À cette in­fir­mité, qui avait placé deux mor­ceaux de chair rouge à la place de ses yeux, s’ajoutaient éga­le­ment les lai­deurs d’une va­riole, qu’il avait eue dans sa . Et ce­pen­dant, «la l’[avait doté] d’une pro­di­gieuse in­ven­tion ver­bale, d’une sans faille et d’une qui lui fai­sait pé­né­trer tout ce qu’elle tou­chait ou de­vi­nait», dit M. Ré­gis Bla­chère 3. Avant de ré­ci­ter une , Ba­char frap­pait dans ses mains comme un fou, tous­sait et cra­chait à droite et à gauche; mais dès qu’il avait ou­vert la bouche, il pro­vo­quait l’admiration. Ses séances de poé­sie étaient par­ti­cu­liè­re­ment fré­quen­tées par les , et il lui ar­ri­vait de s’éprendre d’ au seul son d’une ou à la qu’on lui fai­sait d’une beauté. On lui de­manda : «Com­ment peux-tu ai­mer sans même avoir vu?» Il ré­pon­dit : «Sou­vent l’oreille aime avant l’» 4. Et aussi :

«Lais­sez mon cœur à son choix et conten­te­ment!
C’est par le cœur, non par les yeux, que re­garde l’amant.
Dans l’instance d’amour, les yeux ne voient, les oreilles n’entendent que par le cœur
»

  1. En arabe بشار بن برد. Par­fois trans­crit Ba­ch­châr ibn Bourd, Ba­ch­char b. Bord, Ba­char-ben-Berd, Bas­schâr ibn Bord, Basch­schar ibn Burd, Ba­shar ibnu Bourd ou Baššār b. Burd. Icône Haut
  2. Dans , «», p. 68. Icône Haut
  1. «Le Cas Baššâr dans le dé­ve­lop­pe­ment de la ». Icône Haut
  2. Dans «La Poé­sie arabe; éta­blie, tra­duite et pré­sen­tée par » (éd. Phé­bus, coll. Do­maine arabe, Pa­ris), p. 128. Icône Haut

Jamîl, « Élégie »

dans « Journal des savants », 1829, p. 419-420

dans «Jour­nal des », 1829, p. 419-420

Il s’agit de Ja­mîl ibn Ma‘mar 1 (VIIe siècle apr. J.-C.), poète qui de­vint cé­lèbre par la ten­dresse de ses et la constance de son en­vers Bu­thayna 2 au point qu’on le sur­nomma Ja­mîl Bu­thayna 3le Ja­mîl de Bu­thayna»). On ra­conte que la pre­mière fois que Ja­mîl s’attacha à Bu­thayna fut lorsqu’il alla un jour abreu­ver son bé­tail. Il s’endormit, lais­sant ses cha­meaux re­mon­ter la val­lée au bord de la­quelle était ins­tallé le clan de Bu­thayna. Celle-ci, en al­lant pui­ser de l’ avec une voi­sine, passa près des cha­meaux et les chassa. Elle n’était en­core qu’une fillette. Ja­mîl l’insulta; elle lui ré­pon­dit par des raille­ries qu’il trouva agréables. Alors, il com­posa le poème sui­vant : «Ô Bu­thayna, ce sont des in­sultes qui ont dé­clen­ché notre amour dans la val­lée de Bag­hîd. Nous lui avons adressé des pro­pos aux­quels elle ré­pon­dit par des pa­roles sem­blables. C’est vrai, ô Bu­thayna, que chaque ap­pelle une ré­ponse» 4. Il prit, par la suite, l’habitude de lui rendre vi­site en l’absence des hommes du clan et de ba­var­der avec elle, jusqu’au mo­ment où l’on eut vent de l’affaire. Il de­manda sa main, mais on la lui re­fusa. Lorsqu’on la ma­ria, il conti­nua à la ren­con­trer chez elle à l’insu de son mari. On s’en plai­gnit au gou­ver­neur, et ce­lui-ci or­donna qu’au cas où Ja­mîl ren­drait vi­site à Bu­tayna, il se­rait per­mis de ver­ser son . Ja­mîl s’enfuit au Yé­men; mais chaque , il gra­vis­sait les dunes du dé­sert pour res­pi­rer le vent qui ve­nait du pays de Bu­thayna : «Ne vois-tu pas com­bien je suis éperdu et que mon est dé­fait? Un souffle seule­ment de par­fum de Bu­thayna… il faut si peu à mon et même moins que si peu» 5. On dit que Ja­mîl mou­rut en peu de après. Lorsque la de sa fut par­ve­nue à la Mecque, et que Bu­thayna, après avoir in­ter­rogé le por­teur de cette fa­tale nou­velle, ne put plus dou­ter de la perte de son amant, elle ex­prima sa par les vers sui­vants, les seuls qui se soient conser­vés de sa  : «Certes, l’heure où j’oublierai le de Ja­mîl, est une heure que le cours du temps n’a point en­core ame­née; et puisse-t-elle ne ja­mais ar­ri­ver! Ô Ja­mîl, ô fils de Ma‘mar, quand la mort t’aura frappé, que m’importe d’éprouver les tour­ments de la ou de goû­ter ses dou­ceurs!»

  1. En arabe جميل بن معمر. Par­fois trans­crit Ge­mil, Djé­mil, Ǧamīl ou Djamīl. Icône Haut
  2. En arabe بثينة. Par­fois trans­crit Bo­çaïna, Bo­théina, Bo­theï­nah, Bo­taïna, Bo­taï­nah, Buṯayna, Bu­tay­nah, Bo­thayna ou Bou­thayna. On ren­contre aussi la gra­phie Bathna (بثنة) dont Bu­thayna est le di­mi­nu­tif. Icône Haut
  3. En arabe جميل بثينة. Icône Haut
  1. Dans Abû al-Fa­raj, «La Femme arabe dans “Le Livre des chants”», p. 76. Icône Haut
  2. Dans Jean-Claude Va­det, «L’Esprit cour­tois en », p. 365. Icône Haut

Ibn al Fâridh, « Extraits du Divan »

dans « Anthologie arabe, ou Choix de poésies arabes inédites », XIXᵉ siècle

dans « , ou Choix de poé­sies arabes in­édites», XIXe siècle

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle du Di­van (Re­cueil de poé­sies) de ‘Omar ibn al Fâ­ridh 1, poète et arabe, que ses ad­mi­ra­teurs sur­nomment le «sul­tan des deux amours» ou le «sul­tan des amou­reux» en ré­fé­rence à l’ di­vin et à l’amour hu­main. Le , au­quel on ap­plique, par abus, le nom de mys­ti­cisme arabe, a eu peu de ra­cines dans la pé­nin­sule ara­bique et en . Son ap­pa­ri­tion a été même dé­crite comme une ré­ac­tion du asia­tique contre le gé­nie arabe. Il ar­rive que ce mys­ti­cisme s’exprime en arabe : voilà tout. Il est de ten­dance et d’esprit. Parmi les rares ex­cep­tions à cette règle, il faut comp­ter le poète Ibn al Fâ­ridh, né au Caire l’an 1181 et dans la même ville l’an 1235 apr. J.-C. Dans une pré­face pla­cée à la tête de ses poé­sies, ‘Ali, pe­tit-fils de ce poète, rap­porte sur lui des choses éton­nantes, aux­quelles on est peu dis­posé à croire. Il dit qu’Ibn al Fâ­ridh tom­bait quel­que­fois en de si vio­lentes convul­sions, que la sueur sor­tait abon­dam­ment de tout son en cou­lant jusqu’à ses pieds, et qu’ensuite, frappé de stu­peur, le fixe, il n’entendait ni ne voyait ceux qui lui par­laient : l’usage de ses sens était com­plè­te­ment sus­pendu. Il gi­sait ren­versé sur le dos, en­ve­loppé comme un mort dans son drap. Il res­tait plu­sieurs jours dans cette po­si­tion, et pen­dant ce , il ne pre­nait au­cune nour­ri­ture, ne pro­fé­rait au­cune et ne fai­sait au­cun mou­ve­ment. Lorsque, sorti de cet étrange état, il pou­vait de nou­veau conver­ser avec ses amis, il leur ex­pli­quait que, tan­dis qu’ils le voyaient hors de lui-même et comme privé de la , il s’entretenait avec et en re­ce­vait les plus grandes poé­tiques.

  1. En arabe عمر بن الفارض. Par­fois trans­crit Omar ben al Fa­redh, ‘Umar ibnu’l-Fáriḍ, Omar iben Phe­red, Omar-ebn-el-Fa­rid ou Omer ibn-el-Fá­ridh. Icône Haut

Hallâj, « Recueil du “Dîwân” • Hymnes et Prières • Sentences prophétiques et philosophiques »

éd. du Cerf, coll. Patrimoines-Islam, Paris

éd. du Cerf, coll. Pa­tri­moines-, Pa­ris

Il s’agit du Di­van (Re­cueil de poé­sies) et autres œuvres de Hu­sayn ibn Man­sûr, et poète d’expression , plus connu sous le sur­nom de  1car­deur de co­ton»). «Ce so­bri­quet de “car­deur”, donné à Hal­lâj parce qu’il li­sait dans les cœurs, y dis­cri­mi­nant, comme le peigne à car­der, la d’avec la faus­seté, peut fort bien lui avoir été donné tant en du réel mé­tier de son père, que par al­lu­sion au sien propre», ex­plique Louis Mas­si­gnon 2. Pour avoir ré­vélé son union in­time avec , et pour avoir dit de­vant tout le , sous l’empire de l’extase : «Je suis la sou­ve­raine Vé­rité» («Anâ al-Haqq» 3), c’est-à-dire «Je suis Dieu que j’aime, et Dieu que j’aime est » 4, Hal­lâj fut sup­pli­cié en 922 apr. J.-C. On ra­conte qu’à la veille de son sup­plice, dans sa cel­lule, il ne cessa de ré­pé­ter : «illu­sion, illu­sion», jusqu’à ce que la plus grande par­tie de la fût pas­sée. Alors, il se tut un long mo­ment. Puis, il s’écria : «vé­rité, vé­rité» 5. Lorsqu’ils l’amenèrent pour le cru­ci­fier, et qu’il aper­çut le gi­bet et les clous, il rit au point que ses yeux en pleu­rèrent. Puis, il se tourna vers la foule et y re­con­nut son ami Shi­blî : «As-tu avec toi ton de prière? — Oui. — Étends-le-moi» 6. Shi­blî éten­dit son ta­pis. Alors, Hal­lâj ré­cita, entre autres, ce ver­set du  : «Toute goû­tera la … car qu’est-ce que la ici-bas si­non la jouis­sance pré­caire de va­ni­tés?» 7 Et après avoir achevé cette prière, il dit un poème de son cru :

«Tuez-moi, ô mes fi­dèles, car c’est dans mon meurtre qu’est ma vie.
Ma mise à mort ré­side dans ma vie, et ma vie dans ma mise à mort
»

  1. En arabe حلاج. Par­fois trans­crit Hal­ladsch, Ḥal­lâdj, Ha­ladž, Hal­lage, Hal­lac ou Ḥallāǧ. Icône Haut
  2. «La Pas­sion de Hu­sayn ibn Man­sûr Hal­lâj. Tome I», p. 142. Icône Haut
  3. En arabe «اناالحق». Par­fois trans­crit «Ana al­hakk», «Ana’l Hagg» ou «En el-Hak». Icône Haut
  4. «Re­cueil du “Dîwân”», p. 129. Icône Haut
  1. Dans Louis Mas­si­gnon, «La Pas­sion de Hu­sayn ibn Man­sûr Hal­lâj. Tome I», p. 620. Icône Haut
  2. Dans id. p. 649. Icône Haut
  3. III, 185. Icône Haut

Hallâj, « Le Livre “Tâwasîn” • Le Jardin de la connaissance »

éd. Albouraq, Beyrouth

éd. Al­bou­raq, Bey­routh

Il s’agit du «Livre du Tâ et du Sîn» («Ki­tâb al-Tâ-wa-Sîn» 1) et autres œuvres de Hu­sayn ibn Man­sûr, et poète d’expression , plus connu sous le sur­nom de  2car­deur de co­ton»). «Ce so­bri­quet de “car­deur”, donné à Hal­lâj parce qu’il li­sait dans les cœurs, y dis­cri­mi­nant, comme le peigne à car­der, la d’avec la faus­seté, peut fort bien lui avoir été donné tant en du réel mé­tier de son père, que par al­lu­sion au sien propre», ex­plique Louis Mas­si­gnon 3. Pour avoir ré­vélé son union in­time avec , et pour avoir dit de­vant tout le , sous l’empire de l’extase : «Je suis la sou­ve­raine Vé­rité» («Anâ al-Haqq» 4), c’est-à-dire «Je suis Dieu que j’aime, et Dieu que j’aime est » 5, Hal­lâj fut sup­pli­cié en 922 apr. J.-C. On ra­conte qu’à la veille de son sup­plice, dans sa cel­lule, il ne cessa de ré­pé­ter : «illu­sion, illu­sion», jusqu’à ce que la plus grande par­tie de la fût pas­sée. Alors, il se tut un long mo­ment. Puis, il s’écria : «vé­rité, vé­rité» 6. Lorsqu’ils l’amenèrent pour le cru­ci­fier, et qu’il aper­çut le gi­bet et les clous, il rit au point que ses yeux en pleu­rèrent. Puis, il se tourna vers la foule et y re­con­nut son ami Shi­blî : «As-tu avec toi ton de prière? — Oui. — Étends-le-moi» 7. Shi­blî éten­dit son ta­pis. Alors, Hal­lâj ré­cita, entre autres, ce ver­set du  : «Toute goû­tera la … car qu’est-ce que la ici-bas si­non la jouis­sance pré­caire de va­ni­tés?» 8 Et après avoir achevé cette prière, il dit un poème de son cru :

«Tuez-moi, ô mes fi­dèles, car c’est dans mon meurtre qu’est ma vie.
Ma mise à mort ré­side dans ma vie, et ma vie dans ma mise à mort
»

  1. En arabe «كتاب الطاوسين». Par suite d’une faute, «كتاب الطواسين», trans­crit «Ki­tâb al Tawâ­sîn» ou «Ki­taab at-Ta­waa­seen». Icône Haut
  2. En arabe حلاج. Par­fois trans­crit Hal­ladsch, Ḥal­lâdj, Ha­ladž, Hal­lage, Hal­lac ou Ḥallāǧ. Icône Haut
  3. «La Pas­sion de Hu­sayn ibn Man­sûr Hal­lâj. Tome I», p. 142. Icône Haut
  4. En arabe «اناالحق». Par­fois trans­crit «Ana al­hakk», «Ana’l Hagg» ou «En el-Hak». Icône Haut
  1. «Re­cueil du “Dîwân”», p. 129. Icône Haut
  2. Dans Louis Mas­si­gnon, «La Pas­sion de Hu­sayn ibn Man­sûr Hal­lâj. Tome I», p. 620. Icône Haut
  3. Dans id. p. 649. Icône Haut
  4. III, 185. Icône Haut

« Abou ṭ-Ṭayyib al-Motanabbî, un poète arabe du Xᵉ siècle : essai d’histoire littéraire »

éd. Librairie d’Amérique et d’Orient A. Maisonneuve, Paris

éd. Li­brai­rie d’ et d’ A. Mai­son­neuve, Pa­ris

Il s’agit d’Abou’ltayyib 1, sur­nommé  2, or­gueilleux poète de Cour, rendu cé­lèbre en ser­vant dif­fé­rents princes arabes, en chan­tant leurs hauts faits et leurs bien­faits, en se brouillant avec eux, en se ven­geant par des sa­tires des louanges qu’il leur avait don­nées au­pa­ra­vant. Ses poèmes ont quel­que­fois de la beauté dans leur ; mais, plus sou­vent en­core, ils ne brillent que par ce sin­gu­lier mé­lange d’insolence et de po­li­tesse, de bas­sesse et d’ qui dis­tingue les cour­ti­sans; cet art de plaire aux grands en se mo­quant d’eux. Si l’on en croit ses ri­vaux, ce poète était le fils d’un simple por­teur d’ dans la ville de Koufa (en ), quoiqu’il se van­tât beau­coup de sa . Dès sa , il fut tour­menté par une am­bi­tion in­com­men­su­rable, ré­con­for­tée par les de sa , qui était payée très chè­re­ment par les princes aux­quels il s’attachait. Bien­tôt, la tête lui tourna, et il crut pou­voir pas­ser à un aussi juste titre pour pro­phète en vers, que Ma­ho­met l’avait été en prose; cela lui va­lut le sur­nom de Mo­té­nabbi («ce­lui qui se pré­tend pro­phète»). Mais, en­fin, quand il se vit dans l’impossibilité de réa­li­ser cet ; quand le et les oc­ca­sions le dé­trom­pèrent en le rap­pe­lant à une si brève, si or­di­naire, si fa­ta­le­ment hu­maine; quand il son­gea que des pans en­tiers de son am­bi­tieuse res­te­raient à ja­mais en­se­ve­lis dans l’ombre, ce fut un dé­bor­de­ment d’une amer­tume sans pa­reille. «De là, cet -propre qui, au lieu de re­cher­cher à bien faire pour ga­gner l’estime d’ et de­ve­nir , se trans­forme en égoïsme hai­neux et mal­veillant à l’égard des autres [ou en] quand ils ont échoué», dit M. Jo­seph Da­her 3. Té­moin les vers sui­vants où il dit aux hommes tout le mé­pris et toute la haine qu’ils lui ins­pirent : «Je les pe­tites gens de ce siècle, car le plus docte d’entre eux est un cré­tin, le plus éner­gique un lâche, le plus noble un chien, le plus clair­voyant un aveugle, le plus vi­gi­lant un loir, et le plus cou­ra­geux un singe».

  1. En أبو الطيب. Par­fois trans­crit Abou’l Tayib, Abou ṭ-Ṭayyib, Aboul Thaïeb ou Abū al-Ṭaiyib. Icône Haut
  2. En arabe المتنبي. Par­fois trans­crit Mo­ta­nabbî, Mo­ta­nabby, Mo­té­nabby, Mo­te­nabi, Mo­te­nebbi, Mou­ta­nabbi, Mou­ta­nabi, Mu­ta­nabi ou Mu­ta­nabbī. Icône Haut
  1. «Es­sai sur le chez le poète arabe al-Mu­ta­nabbī», p. 54. Icône Haut

« Les “Mou’allaqât”, ou un peu de l’âme des Arabes avant l’islam »

éd. Seghers, coll. PS, Paris

éd. Se­ghers, coll. PS, Pa­ris

Il s’agit des «Mu‘allaqât» 1, poé­sies ad­mi­rables où se peint avec beau­coup de charme la avant Ma­ho­met (VIe siècle apr. J.-C.). On ra­conte qu’à la foire de ‘Ukaz’, ren­dez-vous com­mer­cial et lit­té­raire près de la Mecque, les des di­verses tri­bus ré­ci­taient pu­bli­que­ment leurs vers, et qu’au plus digne d’entre eux était ré­ser­vée la ré­com­pense de voir sa com­po­si­tion ins­crite en lettres d’ et sus­pen­due avec des clous d’or aux portes vé­né­rées de la Ka‘ba. De là vient que les sept poé­sies les plus en vogue avant l’ sont ap­pe­lées «Muḏah­ha­bât» 2Les Do­rées») ou plus sou­vent «Mu‘allaqât» («Les Sus­pen­dues»). Les Arabes du dé­sert ex­cel­laient sur­tout dans la . La s’était tou­jours conser­vée plus pure et plus cor­recte sous leurs tentes; sou­vent une mère in­fli­geait une cor­rec­tion dou­lou­reuse à son en­fant cou­pable de quelque faute de . Les poètes, en par­ti­cu­lier, gar­daient le dé­pôt du choisi et des ma­nières dis­tin­guées. Ce lan­gage et ces ma­nières pré­sen­taient chez eux le même ca­rac­tère d’inaltérable , tan­dis que par­tout dans les ils s’étaient vi­ciés : «Une poé­sie d’une ex­trême , une langue qui sur­passe en dé­li­ca­tesse les idiomes les plus culti­vés… voilà ce qu’on trouve au dé­sert, cent ans avant Ma­ho­met, et cela chez des poètes de pro­fes­sion, à demi nus et af­fa­més», dit Er­nest Re­nan 3. «Des ca­rac­tères tels que ceux de T’arafa et d’Imru’ al-Qays, fan­fa­rons de dé­bauche et de bel es­prit, unis­sant les mœurs d’un bri­gand à la ga­lan­te­rie de l’ du , à un com­plet, sont certes un phé­no­mène unique dans l’.»

  1. En arabe «معلقات». Par­fois trans­crit «Mua­lakát», «Mual­lakát», «Mou’allakât», «Moual­la­kats», «Moua­la­qat», «Mou’allaqât», «Moal­la­kât» ou «Moàl­la­cât». Icône Haut
  2. En arabe «مذهبات». Par­fois trans­crit «Moud­hah­ha­bat», «Mou­dah­ha­bat», «Mud­hah­habāt», «Mod­hah­ha­bat» ou «Mo­dah­ha­bat». Icône Haut
  1. «Le Dé­sert et le Sou­dan», p. 314. Icône Haut