Il s’agit d’une traduction partielle des « Histoires qui sont maintenant du passé » (« Konjaku monogatari »1) également connues sous le titre d’« Histoires du Grand Conseiller d’Uji » (« Uji dainagon monogatari »2). Ce Grand Conseiller d’Uji, dont le nom était Minamoto no Takakuni3 (XIe siècle apr. J.-C.), était un homme qui supportait mal dans sa vieillesse les chaleurs de l’été et qui se retirait chaque année, du cinquième au huitième mois, à Uji, au Sud de Kyôto. Là, dans une tenue négligée, se faisant éventer d’un grand éventail, il faisait appeler à lui les passants, sans se soucier de leur rang, et les priait de raconter des histoires du passé, cependant que lui-même, étendu à l’intérieur, notait leurs paroles dans un gros cahier : « Il y avait des récits de l’Inde, des récits de la Chine, et aussi des récits du Japon. Il en était d’édifiants, il en était de plaisants, il en était de terrifiants, il en était d’émouvants, il en était de répugnants. Quelques-uns étaient sans rime ni raison, d’autres étaient des plus adroits, bref, il en était de toute sorte et de toute espèce », dit le « Supplément aux “Histoires d’Uji” »4. La partie des « Histoires qui sont maintenant du passé » relative au Japon occupe à elle seule, avec ses vingt et un tomes sur trente et un, plus des deux tiers du texte, tandis que les parties consacrées à l’Inde et à la Chine ne comprennent chacune que cinq tomes. Trois tomes sont aujourd’hui manquants5 et deux autres6 ne nous sont parvenus qu’en un état incomplet. Tel quel pourtant, le recueil est encore d’une étonnante richesse, et les mille cinquante-neuf récits qu’il contient font penser à un admirable kaléidoscope qui nous présente à chaque secousse, comme par un coup de magie, des figures inattendues et surprenantes : « Un défilé de personnages appartenant à toutes les catégories de la société anime un monde d’une grande richesse humaine, où les sentiments et les soucis des humbles n’ont pas une dignité moindre que ceux des grands… La variété des récits, badins ou burlesques, instructifs ou édifiants, fantastiques ou touchants, donne la possibilité de s’exprimer à toutes les émotions, des plus nobles aux moins raffinées »7. Tous débutent par la formule « maintenant, c’est du passé » (prononcée « ima wa mukashi » à la japonaise, « konjaku » à la chinoise) qui fut choisie par Takakuni parce qu’elle exprime à merveille l’idée bouddhique selon laquelle le passé existe au même titre et avec la même réalité que le « maintenant ».
influence bouddhique
Takakuni, « Histoires fantastiques du temps jadis »
Il s’agit d’une traduction partielle des « Histoires qui sont maintenant du passé » (« Konjaku monogatari »1) également connues sous le titre d’« Histoires du Grand Conseiller d’Uji » (« Uji dainagon monogatari »2). Ce Grand Conseiller d’Uji, dont le nom était Minamoto no Takakuni3 (XIe siècle apr. J.-C.), était un homme qui supportait mal dans sa vieillesse les chaleurs de l’été et qui se retirait chaque année, du cinquième au huitième mois, à Uji, au Sud de Kyôto. Là, dans une tenue négligée, se faisant éventer d’un grand éventail, il faisait appeler à lui les passants, sans se soucier de leur rang, et les priait de raconter des histoires du passé, cependant que lui-même, étendu à l’intérieur, notait leurs paroles dans un gros cahier : « Il y avait des récits de l’Inde, des récits de la Chine, et aussi des récits du Japon. Il en était d’édifiants, il en était de plaisants, il en était de terrifiants, il en était d’émouvants, il en était de répugnants. Quelques-uns étaient sans rime ni raison, d’autres étaient des plus adroits, bref, il en était de toute sorte et de toute espèce », dit le « Supplément aux “Histoires d’Uji” »4. La partie des « Histoires qui sont maintenant du passé » relative au Japon occupe à elle seule, avec ses vingt et un tomes sur trente et un, plus des deux tiers du texte, tandis que les parties consacrées à l’Inde et à la Chine ne comprennent chacune que cinq tomes. Trois tomes sont aujourd’hui manquants5 et deux autres6 ne nous sont parvenus qu’en un état incomplet. Tel quel pourtant, le recueil est encore d’une étonnante richesse, et les mille cinquante-neuf récits qu’il contient font penser à un admirable kaléidoscope qui nous présente à chaque secousse, comme par un coup de magie, des figures inattendues et surprenantes : « Un défilé de personnages appartenant à toutes les catégories de la société anime un monde d’une grande richesse humaine, où les sentiments et les soucis des humbles n’ont pas une dignité moindre que ceux des grands… La variété des récits, badins ou burlesques, instructifs ou édifiants, fantastiques ou touchants, donne la possibilité de s’exprimer à toutes les émotions, des plus nobles aux moins raffinées »7. Tous débutent par la formule « maintenant, c’est du passé » (prononcée « ima wa mukashi » à la japonaise, « konjaku » à la chinoise) qui fut choisie par Takakuni parce qu’elle exprime à merveille l’idée bouddhique selon laquelle le passé existe au même titre et avec la même réalité que le « maintenant ».
Takakuni, « Histoires qui sont maintenant du passé, “Konjaku-monogatari shû” »
Il s’agit d’une traduction partielle des « Histoires qui sont maintenant du passé » (« Konjaku monogatari »1) également connues sous le titre d’« Histoires du Grand Conseiller d’Uji » (« Uji dainagon monogatari »2). Ce Grand Conseiller d’Uji, dont le nom était Minamoto no Takakuni3 (XIe siècle apr. J.-C.), était un homme qui supportait mal dans sa vieillesse les chaleurs de l’été et qui se retirait chaque année, du cinquième au huitième mois, à Uji, au Sud de Kyôto. Là, dans une tenue négligée, se faisant éventer d’un grand éventail, il faisait appeler à lui les passants, sans se soucier de leur rang, et les priait de raconter des histoires du passé, cependant que lui-même, étendu à l’intérieur, notait leurs paroles dans un gros cahier : « Il y avait des récits de l’Inde, des récits de la Chine, et aussi des récits du Japon. Il en était d’édifiants, il en était de plaisants, il en était de terrifiants, il en était d’émouvants, il en était de répugnants. Quelques-uns étaient sans rime ni raison, d’autres étaient des plus adroits, bref, il en était de toute sorte et de toute espèce », dit le « Supplément aux “Histoires d’Uji” »4. La partie des « Histoires qui sont maintenant du passé » relative au Japon occupe à elle seule, avec ses vingt et un tomes sur trente et un, plus des deux tiers du texte, tandis que les parties consacrées à l’Inde et à la Chine ne comprennent chacune que cinq tomes. Trois tomes sont aujourd’hui manquants5 et deux autres6 ne nous sont parvenus qu’en un état incomplet. Tel quel pourtant, le recueil est encore d’une étonnante richesse, et les mille cinquante-neuf récits qu’il contient font penser à un admirable kaléidoscope qui nous présente à chaque secousse, comme par un coup de magie, des figures inattendues et surprenantes : « Un défilé de personnages appartenant à toutes les catégories de la société anime un monde d’une grande richesse humaine, où les sentiments et les soucis des humbles n’ont pas une dignité moindre que ceux des grands… La variété des récits, badins ou burlesques, instructifs ou édifiants, fantastiques ou touchants, donne la possibilité de s’exprimer à toutes les émotions, des plus nobles aux moins raffinées »7. Tous débutent par la formule « maintenant, c’est du passé » (prononcée « ima wa mukashi » à la japonaise, « konjaku » à la chinoise) qui fut choisie par Takakuni parce qu’elle exprime à merveille l’idée bouddhique selon laquelle le passé existe au même titre et avec la même réalité que le « maintenant ».
Michinaga, « Notes journalières. Tome III »
Il s’agit du « Midô kanpakuki »1 (« Notes journalières », ou littéralement « Notes du grand chancelier de la chapelle ») de Fujiwara no Michinaga2, ministre qui présida à un des moments les plus brillants du Japon ancien (Xe-XIe siècle). « Cet âge-ci, oui, cet âge est vraiment mien quand je puis penser que rien ne vient diminuer la plénitude de la lune »3. L’auteur de ce poème, Michinaga, présenta pendant toute sa vie le spectacle indescriptible d’un homme béni par la fortune. En étalant avec prodigalité son immense fortune dans des dons fastueux aux monastères, il conserva le pouvoir ministériel sous trois Empereurs avant de le transmettre à ses fils. Sans manifester aucun talent particulier, aucun don remarquable, aucun dessein politique neuf ou original, il releva pourtant les rites et la musique à moitié tombés ; il donna à l’époque de Heian ses meilleurs peintres, ses grandes femmes lettrées, quelques bons généraux aussi, et de nombreux prêtres. On le vénéra à l’égal d’un bouddha incarné ; sa splendeur inspira les tout premiers ouvrages d’histoire nationale : l’« Eiga monogatari »4 (« Dit de magnificence ») et l’« Ôkagami »5 (« Grand Miroir »). « C’est autour de [Michinaga] que se développa cette civilisation originale et extrêmement brillante qui a fait la gloire du Xe siècle, mais qui malheureusement a été limitée à une classe particulière, celle des nobles de la Cour, et à une région très restreinte, celle de la capitale et de ses abords immédiats ; l’ensemble du pays, en dehors des monastères provinciaux, restait plongé dans un état semi-barbare et une grande pauvreté ; …le mauvais état des voies de communication, fort peu développées jusqu’à l’époque moderne, empêchait la culture de l’époque d’être plus qu’une culture de Cour », dit Françoise Petit
Michinaga, « Notes journalières. Tome II »
Il s’agit du « Midô kanpakuki »1 (« Notes journalières », ou littéralement « Notes du grand chancelier de la chapelle ») de Fujiwara no Michinaga2, ministre qui présida à un des moments les plus brillants du Japon ancien (Xe-XIe siècle). « Cet âge-ci, oui, cet âge est vraiment mien quand je puis penser que rien ne vient diminuer la plénitude de la lune »3. L’auteur de ce poème, Michinaga, présenta pendant toute sa vie le spectacle indescriptible d’un homme béni par la fortune. En étalant avec prodigalité son immense fortune dans des dons fastueux aux monastères, il conserva le pouvoir ministériel sous trois Empereurs avant de le transmettre à ses fils. Sans manifester aucun talent particulier, aucun don remarquable, aucun dessein politique neuf ou original, il releva pourtant les rites et la musique à moitié tombés ; il donna à l’époque de Heian ses meilleurs peintres, ses grandes femmes lettrées, quelques bons généraux aussi, et de nombreux prêtres. On le vénéra à l’égal d’un bouddha incarné ; sa splendeur inspira les tout premiers ouvrages d’histoire nationale : l’« Eiga monogatari »4 (« Dit de magnificence ») et l’« Ôkagami »5 (« Grand Miroir »). « C’est autour de [Michinaga] que se développa cette civilisation originale et extrêmement brillante qui a fait la gloire du Xe siècle, mais qui malheureusement a été limitée à une classe particulière, celle des nobles de la Cour, et à une région très restreinte, celle de la capitale et de ses abords immédiats ; l’ensemble du pays, en dehors des monastères provinciaux, restait plongé dans un état semi-barbare et une grande pauvreté ; …le mauvais état des voies de communication, fort peu développées jusqu’à l’époque moderne, empêchait la culture de l’époque d’être plus qu’une culture de Cour », dit Françoise Petit
Michinaga, « Notes journalières. Tome I »
Il s’agit du « Midô kanpakuki »1 (« Notes journalières », ou littéralement « Notes du grand chancelier de la chapelle ») de Fujiwara no Michinaga2, ministre qui présida à un des moments les plus brillants du Japon ancien (Xe-XIe siècle). « Cet âge-ci, oui, cet âge est vraiment mien quand je puis penser que rien ne vient diminuer la plénitude de la lune »3. L’auteur de ce poème, Michinaga, présenta pendant toute sa vie le spectacle indescriptible d’un homme béni par la fortune. En étalant avec prodigalité son immense fortune dans des dons fastueux aux monastères, il conserva le pouvoir ministériel sous trois Empereurs avant de le transmettre à ses fils. Sans manifester aucun talent particulier, aucun don remarquable, aucun dessein politique neuf ou original, il releva pourtant les rites et la musique à moitié tombés ; il donna à l’époque de Heian ses meilleurs peintres, ses grandes femmes lettrées, quelques bons généraux aussi, et de nombreux prêtres. On le vénéra à l’égal d’un bouddha incarné ; sa splendeur inspira les tout premiers ouvrages d’histoire nationale : l’« Eiga monogatari »4 (« Dit de magnificence ») et l’« Ôkagami »5 (« Grand Miroir »). « C’est autour de [Michinaga] que se développa cette civilisation originale et extrêmement brillante qui a fait la gloire du Xe siècle, mais qui malheureusement a été limitée à une classe particulière, celle des nobles de la Cour, et à une région très restreinte, celle de la capitale et de ses abords immédiats ; l’ensemble du pays, en dehors des monastères provinciaux, restait plongé dans un état semi-barbare et une grande pauvreté ; …le mauvais état des voies de communication, fort peu développées jusqu’à l’époque moderne, empêchait la culture de l’époque d’être plus qu’une culture de Cour », dit Françoise Petit
Michinaga, « Poèmes »
Il s’agit des poèmes de Fujiwara no Michinaga1, ministre qui présida à un des moments les plus brillants du Japon ancien (Xe-XIe siècle). « Cet âge-ci, oui, cet âge est vraiment mien quand je puis penser que rien ne vient diminuer la plénitude de la lune »2. L’auteur de ce poème, Michinaga, présenta pendant toute sa vie le spectacle indescriptible d’un homme béni par la fortune. En étalant avec prodigalité son immense fortune dans des dons fastueux aux monastères, il conserva le pouvoir ministériel sous trois Empereurs avant de le transmettre à ses fils. Sans manifester aucun talent particulier, aucun don remarquable, aucun dessein politique neuf ou original, il releva pourtant les rites et la musique à moitié tombés ; il donna à l’époque de Heian ses meilleurs peintres, ses grandes femmes lettrées, quelques bons généraux aussi, et de nombreux prêtres. On le vénéra à l’égal d’un bouddha incarné ; sa splendeur inspira les tout premiers ouvrages d’histoire nationale : l’« Eiga monogatari »3 (« Dit de magnificence ») et l’« Ôkagami »4 (« Grand Miroir »). « C’est autour de [Michinaga] que se développa cette civilisation originale et extrêmement brillante qui a fait la gloire du Xe siècle, mais qui malheureusement a été limitée à une classe particulière, celle des nobles de la Cour, et à une région très restreinte, celle de la capitale et de ses abords immédiats ; l’ensemble du pays, en dehors des monastères provinciaux, restait plongé dans un état semi-barbare et une grande pauvreté ; …le mauvais état des voies de communication, fort peu développées jusqu’à l’époque moderne, empêchait la culture de l’époque d’être plus qu’une culture de Cour », dit Françoise Petit
Han Shan, « Merveilleux le chemin de Han shan : poèmes »
Il s’agit de Han Shan1, ermite et poète chinois (VIIe siècle apr. J.-C.). Il avait quitté sa famille pour se retirer sur une falaise, dans un endroit nommé Montagne froide (Han shan), auquel il doit son surnom. Le lieu où il vivait était libre de la poussière et du bruit. Il s’asseyait parmi les nuages blancs. Un vent subtil soufflait à travers les pins solitaires, dont le son lui était agréable. Depuis dix ans, il n’était pas retourné en ville ; il en avait oublié la route qu’il avait jadis empruntée pour venir. Non loin de là, au monastère du Pays clair (Guo qing2), vivait son ami et condisciple, Shi De3, qui travaillait dans la cuisine et mettait les restes de côté pour lui dans un tube de bambou. Han Shan déambulait sous la véranda du monastère, criant de joie, parlant seul, riant seul. On le prenait pour un fou. Parfois, les moines lui couraient après pour l’injurier, pour le chasser. Dans les villages, près des huttes, il badinait avec les enfants qui gardaient les vaches. Pourtant, ses paroles semblaient cohérentes, et si on y réfléchissait bien, on y devinait des idées profondes. En fait, tout ce qu’il disait était profond. Dans ses poésies aussi, il abordait les sujets les plus graves en en donnant une peinture ingénue et simple, et en conservant une parfaite bonhomie, ce qui fait qu’on suit ses vers et qu’on se les assimile rapidement, sans même se rendre compte de leur portée :
« Les gens demandent le chemin de Han shan
Nulle route ne mène à Han shan
L’été, la glace ne fond pas
À peine levé, le soleil se noie dans le brouillard
Comment y parvenir, comme moi,
Si votre cœur n’est pas pareil au mien ?
Si votre cœur, par contre, est pareil au mien
Vous êtes alors en plein milieu »
Wang Wei, « Les Saisons bleues »
Il s’agit de Wang Wei1, artiste chinois (VIIIe siècle apr. J.-C.), aussi illustre en poésie qu’en peinture et en musique. La mort de son père le livra de bonne heure et tout entier à l’influence maternelle, qui imprima sur son génie une véritable empreinte bouddhique : c’est en elle qu’il faut voir la source de cet amour de la nature, de ce goût de la méditation, de ce détachement du monde, de cette « pureté détachée » (« qing yi »2) qui pénètrent le caractère de Wang Wei et forment l’essence même de ses œuvres. On peut supposer que c’est aussi sa mère qui le guida dans le choix de son surnom : Mo Jie3. En effet, ces deux idéogrammes, joints à celui de son prénom Wei, forment le nom chinois du saint Vimalakîrti. Toute sa vie durant, Wang Wei observa un jeûne rigoureux et s’abstint de viandes. Dans sa chambre dépouillée, hormis un service à thé, un luth et un lit de cordes, on ne voyait qu’une table basse sur laquelle étaient rangées les écritures bouddhiques. On n’a pas raison de douter qu’il avait une bonne connaissance de ces écritures ; mais une froide impression d’immobilisme émane de ses poèmes qui, étant parfaits et sans défaut, cherchant et atteignant leurs effets, sont par là moins humains, moins vivants. Une autre explication de cet immobilisme, c’est l’influence de la peinture et de la musique. Su Dongpo disait de Wang Wei que « ses poèmes étaient des tableaux, et ses tableaux — des poèmes ». Un autre critique qualifiait sa poésie de « peinture sonore » (« you sheng hua »4). On rapporte, comme preuve de son savoir dans ces deux différents arts, l’anecdote suivante : « [Se trouvant] un jour chez une personne qui possédait un tableau représentant des musiciens en train de jouer d’un instrument, Wang Wei regarda le tableau et dit : “C’est la première mesure du troisième refrain de la danse des robes arc-en-ciel”. Les curieux firent venir des musiciens pour jouer cette pièce. Leur pose instrumentale confirma l’affirmation de Wang Wei »
« Le Dit des Heiké : le cycle épique des Taïra et des Minamoto »

éd. Publications orientalistes de France, coll. Les Œuvres capitales de la littérature japonaise, Paris
Il s’agit du « Dit des Heiké » (« Heike monogatari »1). Au XIIe siècle apr. J.-C., le Japon fut le théâtre de luttes intestines et de guerres acharnées qui culminèrent avec la bataille d’Ichi-no-Tani2, dans laquelle les Taira, protecteurs du jeune Empereur et maîtres de Kyôto et du Japon de l’Ouest, furent vaincus par les Minamoto, tenants du Japon oriental. L’incidence de ce branle-bas fut sensible dans le domaine littéraire. Alors que l’époque précédente, relativement paisible, avait vu se développer le genre des dits courtois, ce furent les dits guerriers ou « gunki monogatari »3 qui vinrent à éclosion dans ces années troublées. Rédigés d’après des traditions orales, ces dits guerriers furent récités sur les marchés et les places publiques, aux abords des ponts, aux croisements des chemins par des « biwa-hôshi »4 — des aveugles qui portaient l’habit des moines (« hôshi ») et qui jouaient d’un luth à quatre cordes (« biwa »5). Ces aveugles portaient la robe monacale, parce qu’ils étaient sans doute sous la protection des temples et des grandes bonzeries. Du reste, la chronique qu’ils récitaient avait pour but non pas tant de conserver le souvenir des héros, comme l’épopée européenne, mais d’exprimer la vanité des splendeurs terrestres et le néant de la gloire ; et au lieu de chanter « les armes et l’homme », elle rappelait dès la première ligne « l’impermanence de toutes choses ». « [Cette chronique a] pu jouer une fonction rituelle, celle d’apaiser les âmes [de ceux] ayant péri dans les combats. Mais il s’agit aussi de chercher un sens aux événements chaotiques qui ont mis fin à l’ordre ancien », disent des orientalistes
- En japonais 琵琶法師.
- « Né dans le royaume de Perse et ses régions limitrophes, le “biwa” s’est diffusé en Asie orientale le long de la Route de la soie. Perfectionné en Chine, il est parvenu dans l’archipel japonais vers le VIIIe siècle apr. J.-C. », dit M. Hyôdô Hiromi (dans « De l’épopée au Japon », p. 55-56).
Kenkô, « Les Heures oisives, “Tsurezure-gusa” »
Il s’agit du chef-d’œuvre de la littérature d’ermitage du Japon : le « Cahier des heures oisives » (« Tsurezure-gusa »1) du moine Yoshida Kenkô ou Urabe Kenkô2. Ce « Cahier » d’une forme très libre (Kenkô prétend qu’il s’agit de « bagatelles » écrites « au gré de ses heures oisives »3, d’où le titre) constitue un ensemble d’anecdotes curieuses et édifiantes, empruntées tant aux classiques chinois et japonais, qu’au vécu de l’auteur ; d’impressions notées au caprice de la plume ; de réflexions de tout ordre sur l’instabilité de la vie, sur l’homme et la femme, sur la religion et la foi, sur l’amitié et l’amour ; de règles sur le cérémonial et l’étiquette (XIIIe-XIVe siècle). Kenkô ne se rasa la tête qu’à quarante-deux ans, peu après la mort de l’Empereur Go Uda4, auquel il était attaché. Cela peut expliquer certaines anecdotes amoureuses de son œuvre, qu’il serait difficile de concevoir comme étant les paroles d’un religieux. S’il avait été moine dès son enfance, il n’aurait pu écrire d’une manière si vivante sur toutes les contingences de la vie humaine. Le mérite et le charme de Kenkô tiennent à sa profonde culture, à son style simple et naturel, à son goût sûr et délicat, toutes qualités qui le rapprochent de Montaigne. Je le tiens pour le plus grand moraliste, l’esprit le plus harmonieux et le plus complet du Japon. « Ses essais », dit un orientaliste5, « ressemblent à la conversation polie d’un homme du monde et ont cet air de simplicité et cette aisance d’expression qui sont en réalité le fait d’un art consommé. On ne peut, pour commencer l’étude de l’ancienne littérature japonaise, faire de meilleur choix que celui du “Cahier des heures oisives” ». À examiner ce « Cahier » riche de confidences sincères, il semblerait y avoir chez Kenkô deux personnalités : l’homme du monde, adroit et poli, qui même dans la vertu conserva un certain cynisme ; et le bonze qui ne renonça au monde que pour échapper à l’attention de ses contemporains. Ces deux éléments de son caractère se combinent pour former un type de vieux garçon avenant, et qui le devient plus encore lorsqu’on médite à loisir toutes les choses sensibles qu’il a dites, ou toutes celles qu’il a senties sans les dire ouvertement. « Le “Cahier des heures oisives” est un de ces écrits originaux, si rares dans toutes les littératures, qui méritent une étude plus attentive que maints gros ouvrages prétentieux », dit Michel Revon.
« Le Dit de Hôgen • Le Dit de Heiji : le cycle épique des Taïra et des Minamoto »

éd. Publications orientalistes de France, coll. Les Œuvres capitales de la littérature japonaise, Paris
Il s’agit du « Dit de Hôgen » (« Hôgen monogatari »1) et du « Dit de Heiji » (« Heiji monogatari »2). Au XIIe siècle apr. J.-C., le Japon fut le théâtre de luttes intestines et de guerres acharnées qui culminèrent avec la bataille d’Ichi-no-Tani3, dans laquelle les Taira, protecteurs du jeune Empereur et maîtres de Kyôto et du Japon de l’Ouest, furent vaincus par les Minamoto, tenants du Japon oriental. L’incidence de ce branle-bas fut sensible dans le domaine littéraire. Alors que l’époque précédente, relativement paisible, avait vu se développer le genre des dits courtois, ce furent les dits guerriers ou « gunki monogatari »4 qui vinrent à éclosion dans ces années troublées. Rédigés d’après des traditions orales, ces dits guerriers furent récités sur les marchés et les places publiques, aux abords des ponts, aux croisements des chemins par des « biwa-hôshi »5 — des aveugles qui portaient l’habit des moines (« hôshi ») et qui jouaient d’un luth à quatre cordes (« biwa »6). Ces aveugles portaient la robe monacale, parce qu’ils étaient sans doute sous la protection des temples et des grandes bonzeries. Du reste, la chronique qu’ils récitaient avait pour but non pas tant de conserver le souvenir des héros, comme l’épopée européenne, mais d’exprimer la vanité des splendeurs terrestres et le néant de la gloire ; et au lieu de chanter « les armes et l’homme », elle rappelait dès la première ligne « l’impermanence de toutes choses ». « [Cette chronique a] pu jouer une fonction rituelle, celle d’apaiser les âmes [de ceux] ayant péri dans les combats. Mais il s’agit aussi de chercher un sens aux événements chaotiques qui ont mis fin à l’ordre ancien », disent des orientalistes
- En japonais « 保元物語 ». Autrefois transcrit « Hôghenn monogatari ».
- En japonais « 平治物語 ». Autrefois transcrit « Heïdji monogatari ».
- En japonais 一ノ谷の戦い.
- En japonais 軍記物語.
- En japonais 琵琶法師.
- « Né dans le royaume de Perse et ses régions limitrophes, le “biwa” s’est diffusé en Asie orientale le long de la Route de la soie. Perfectionné en Chine, il est parvenu dans l’archipel japonais vers le VIIIe siècle apr. J.-C. », dit M. Hyôdô Hiromi (dans « De l’épopée au Japon », p. 55-56).