Il s’agit du « Livre du Tâ et du Sîn » (« Kitâb al-Tâ-wa-Sîn »1) et autres œuvres de Husayn ibn Mansûr, mystique et poète persan d’expression arabe, plus connu sous le surnom de Hallâj2 (« cardeur de coton »). « Ce sobriquet de “cardeur”, donné à Hallâj parce qu’il lisait dans les cœurs, y discriminant, comme le peigne à carder, la vérité d’avec la fausseté, peut fort bien lui avoir été donné tant en souvenir du réel métier de son père, que par allusion au sien propre », explique Louis Massignon3. Pour avoir révélé son union intime avec Dieu, et pour avoir dit devant tout le monde, sous l’empire de l’extase : « Je suis la souveraine Vérité » (« Anâ al-Haqq »4), c’est-à-dire « Je suis Dieu que j’aime, et Dieu que j’aime est moi »5, Hallâj fut supplicié en 922 apr. J.-C. On raconte qu’à la veille de son supplice, dans sa cellule, il ne cessa de répéter : « illusion, illusion », jusqu’à ce que la plus grande partie de la nuit fût passée. Alors, il se tut un long moment. Puis, il s’écria : « vérité, vérité »6. Lorsqu’ils l’amenèrent pour le crucifier, et qu’il aperçut le gibet et les clous, il rit au point que ses yeux en pleurèrent. Puis, il se tourna vers la foule et y reconnut son ami Shiblî : « As-tu avec toi ton tapis de prière ? — Oui. — Étends-le-moi »7. Shiblî étendit son tapis. Alors, Hallâj récita, entre autres, ce verset du Coran : « Toute âme goûtera la mort… car qu’est-ce que la vie ici-bas sinon la jouissance précaire de vanités ? »8 Et après avoir achevé cette prière, il dit un poème de son cru :
« Tuez-moi, ô mes fidèles, car c’est dans mon meurtre qu’est ma vie.
Ma mise à mort réside dans ma vie, et ma vie dans ma mise à mort »
- En arabe « كتاب الطاوسين ». Par suite d’une faute, « كتاب الطواسين », transcrit « Kitâb al Tawâsîn » ou « Kitaab at-Tawaaseen ».
- En arabe حلاج. Parfois transcrit Halladsch, Ḥallâdj, Haladž, Hallage, Hallac ou Ḥallāǧ.
- « La Passion de Husayn ibn Mansûr Hallâj. Tome I », p. 142.
- En arabe « اناالحق ». Parfois transcrit « Ana alhakk », « Ana’l Hagg » ou « En el-Hak ».