Joubert, « Correspondance générale (1774-1824). Tome I. Les Temps révolutionnaires »

éd. William Blake & Co., Bordeaux

éd. William Blake & Co., Bor­deaux

Il s’agit de , un des plus grands sty­listes (XVIIIe-XIXe siècle). Cet sin­gu­lier ne pu­blia rien de son vi­vant, tant il te­nait peu à la gloire, et ne fit rien d’autre, lit­té­ra­le­ment par­lant, pen­dant toute sa , que de tra­vailler à ses «Pen­sées», écri­vant, ra­tu­rant, ajou­tant, re­tran­chant et n’en fi­nis­sant ja­mais. À sa en 1824, il lais­sait der­rière lui deux cent cinq car­nets, com­plé­tés par soixante liasses de pa­piers où se mê­laient, dans une grande confu­sion, des notes, des bribes d’, des brouillons de lettres. Ce n’est que bien des an­nées plus tard que Jean-Bap­tiste-Mi­chel Du­chesne, ne­veu de Jou­bert, en fit un mince re­cueil, qu’il re­mit à l’illustre Cha­teau­briand, le­quel se char­gea de le pré­fa­cer et d’y mettre un peu d’ordre. Du­chesne fit donc seul le choix de cette pre­mière édi­tion des «Pen­sées», écar­tant celles qui étaient dif­fi­ci­le­ment dé­chif­frables, re­tou­chant celles qui lui sem­blaient trop longues ou trop courtes. Bien qu’ami des lettres, il n’avait pas un es­prit as­sez exercé pour que ce choix fût sa­tis­fai­sant, et il est dom­mage que sur la re­com­man­da­tion du nom de Cha­teau­briand on se soit ha­bi­tué, pen­dant long­temps, à ju­ger Jou­bert sur une édi­tion qui, étant in­com­plète et fau­tive, ne le montre pas dans toute sa splen­deur lit­té­raire et phi­lo­so­phique. Mais qui est donc Jou­bert? Quel est cet in­connu, cet , cet in­édit qui s’était fait de la une cer­taine idée qui l’empêchait de rien ache­ver? Voici com­ment Sainte-Beuve ré­pond à cette ques­tion : «Ce fut un de ces heu­reux qui passent leur vie à pen­ser; à conver­ser avec leurs amis; à son­ger dans la ; à mé­di­ter quelque grand ou­vrage qu’ils n’accompliront ja­mais, et qui ne nous ar­rive qu’en frag­ments». Sur l’un de ses car­nets, Jou­bert écri­vait 1 : «Je suis comme Mon­taigne im­propre au dis­cours continu». On peut y lire un aveu d’impuissance; on peut y lire aussi la marque d’une chez cet homme qui se di­sait avare «de [son] encre» 2, et qui ne vou­lait «[se] don­ner la peine d’exprimer, avec soin, que des choses dignes d’être écrites sur de la soie ou sur l’airain» 3. Pen­sant pour la seule vo­lupté de pen­ser, pen­sant pa­tiem­ment, il at­ten­dait, pour cou­cher un mot, que la goutte d’encre qui de­vait tom­ber de sa plume se chan­geât en «goutte de lu­mière» 4, «tour­menté» qu’il était «par la mau­dite am­bi­tion de mettre tou­jours tout un livre dans une page, toute une page dans une phrase et cette phrase dans un mot» 5.

  1. «Car­nets. Tome II», p. 240. Icône Haut
  2. «Cor­res­pon­dance. Tome I», p. 101. Icône Haut
  3. id. Icône Haut
  1. «Car­nets. Tome I», p. 662. Icône Haut
  2. «Car­nets. Tome II», p. 485. Icône Haut

Joubert, « Carnets. Tome II »

éd. Gallimard, Paris

éd. Gal­li­mard, Pa­ris

Il s’agit de , un des plus grands sty­listes (XVIIIe-XIXe siècle). Cet sin­gu­lier ne pu­blia rien de son vi­vant, tant il te­nait peu à la gloire, et ne fit rien d’autre, lit­té­ra­le­ment par­lant, pen­dant toute sa , que de tra­vailler à ses «Pen­sées», écri­vant, ra­tu­rant, ajou­tant, re­tran­chant et n’en fi­nis­sant ja­mais. À sa en 1824, il lais­sait der­rière lui deux cent cinq car­nets, com­plé­tés par soixante liasses de pa­piers où se mê­laient, dans une grande confu­sion, des notes, des bribes d’, des brouillons de lettres. Ce n’est que bien des an­nées plus tard que Jean-Bap­tiste-Mi­chel Du­chesne, ne­veu de Jou­bert, en fit un mince re­cueil, qu’il re­mit à l’illustre Cha­teau­briand, le­quel se char­gea de le pré­fa­cer et d’y mettre un peu d’ordre. Du­chesne fit donc seul le choix de cette pre­mière édi­tion des «Pen­sées», écar­tant celles qui étaient dif­fi­ci­le­ment dé­chif­frables, re­tou­chant celles qui lui sem­blaient trop longues ou trop courtes. Bien qu’ami des lettres, il n’avait pas un es­prit as­sez exercé pour que ce choix fût sa­tis­fai­sant, et il est dom­mage que sur la re­com­man­da­tion du nom de Cha­teau­briand on se soit ha­bi­tué, pen­dant long­temps, à ju­ger Jou­bert sur une édi­tion qui, étant in­com­plète et fau­tive, ne le montre pas dans toute sa splen­deur lit­té­raire et phi­lo­so­phique. Mais qui est donc Jou­bert? Quel est cet in­connu, cet , cet in­édit qui s’était fait de la une cer­taine idée qui l’empêchait de rien ache­ver? Voici com­ment Sainte-Beuve ré­pond à cette ques­tion : «Ce fut un de ces heu­reux qui passent leur vie à pen­ser; à conver­ser avec leurs amis; à son­ger dans la ; à mé­di­ter quelque grand ou­vrage qu’ils n’accompliront ja­mais, et qui ne nous ar­rive qu’en frag­ments». Sur l’un de ses car­nets, Jou­bert écri­vait 1 : «Je suis comme Mon­taigne im­propre au dis­cours continu». On peut y lire un aveu d’impuissance; on peut y lire aussi la marque d’une chez cet homme qui se di­sait avare «de [son] encre» 2, et qui ne vou­lait «[se] don­ner la peine d’exprimer, avec soin, que des choses dignes d’être écrites sur de la soie ou sur l’airain» 3. Pen­sant pour la seule vo­lupté de pen­ser, pen­sant pa­tiem­ment, il at­ten­dait, pour cou­cher un mot, que la goutte d’encre qui de­vait tom­ber de sa plume se chan­geât en «goutte de lu­mière» 4, «tour­menté» qu’il était «par la mau­dite am­bi­tion de mettre tou­jours tout un livre dans une page, toute une page dans une phrase et cette phrase dans un mot» 5.

  1. «Car­nets. Tome II», p. 240. Icône Haut
  2. «Cor­res­pon­dance. Tome I», p. 101. Icône Haut
  3. id. Icône Haut
  1. «Car­nets. Tome I», p. 662. Icône Haut
  2. «Car­nets. Tome II», p. 485. Icône Haut

Joubert, « Carnets. Tome I »

éd. Gallimard, Paris

éd. Gal­li­mard, Pa­ris

Il s’agit de , un des plus grands sty­listes (XVIIIe-XIXe siècle). Cet sin­gu­lier ne pu­blia rien de son vi­vant, tant il te­nait peu à la gloire, et ne fit rien d’autre, lit­té­ra­le­ment par­lant, pen­dant toute sa , que de tra­vailler à ses «Pen­sées», écri­vant, ra­tu­rant, ajou­tant, re­tran­chant et n’en fi­nis­sant ja­mais. À sa en 1824, il lais­sait der­rière lui deux cent cinq car­nets, com­plé­tés par soixante liasses de pa­piers où se mê­laient, dans une grande confu­sion, des notes, des bribes d’, des brouillons de lettres. Ce n’est que bien des an­nées plus tard que Jean-Bap­tiste-Mi­chel Du­chesne, ne­veu de Jou­bert, en fit un mince re­cueil, qu’il re­mit à l’illustre Cha­teau­briand, le­quel se char­gea de le pré­fa­cer et d’y mettre un peu d’ordre. Du­chesne fit donc seul le choix de cette pre­mière édi­tion des «Pen­sées», écar­tant celles qui étaient dif­fi­ci­le­ment dé­chif­frables, re­tou­chant celles qui lui sem­blaient trop longues ou trop courtes. Bien qu’ami des lettres, il n’avait pas un es­prit as­sez exercé pour que ce choix fût sa­tis­fai­sant, et il est dom­mage que sur la re­com­man­da­tion du nom de Cha­teau­briand on se soit ha­bi­tué, pen­dant long­temps, à ju­ger Jou­bert sur une édi­tion qui, étant in­com­plète et fau­tive, ne le montre pas dans toute sa splen­deur lit­té­raire et phi­lo­so­phique. Mais qui est donc Jou­bert? Quel est cet in­connu, cet , cet in­édit qui s’était fait de la une cer­taine idée qui l’empêchait de rien ache­ver? Voici com­ment Sainte-Beuve ré­pond à cette ques­tion : «Ce fut un de ces heu­reux qui passent leur vie à pen­ser; à conver­ser avec leurs amis; à son­ger dans la ; à mé­di­ter quelque grand ou­vrage qu’ils n’accompliront ja­mais, et qui ne nous ar­rive qu’en frag­ments». Sur l’un de ses car­nets, Jou­bert écri­vait 1 : «Je suis comme Mon­taigne im­propre au dis­cours continu». On peut y lire un aveu d’impuissance; on peut y lire aussi la marque d’une chez cet homme qui se di­sait avare «de [son] encre» 2, et qui ne vou­lait «[se] don­ner la peine d’exprimer, avec soin, que des choses dignes d’être écrites sur de la soie ou sur l’airain» 3. Pen­sant pour la seule vo­lupté de pen­ser, pen­sant pa­tiem­ment, il at­ten­dait, pour cou­cher un mot, que la goutte d’encre qui de­vait tom­ber de sa plume se chan­geât en «goutte de lu­mière» 4, «tour­menté» qu’il était «par la mau­dite am­bi­tion de mettre tou­jours tout un livre dans une page, toute une page dans une phrase et cette phrase dans un mot» 5.

  1. «Car­nets. Tome II», p. 240. Icône Haut
  2. «Cor­res­pon­dance. Tome I», p. 101. Icône Haut
  3. id. Icône Haut
  1. «Car­nets. Tome I», p. 662. Icône Haut
  2. «Car­nets. Tome II», p. 485. Icône Haut

Joubert, « Essais (1779-1821) »

éd. A. G. Nizet, Paris

éd. A. G. Ni­zet, Pa­ris

Il s’agit de , un des plus grands sty­listes (XVIIIe-XIXe siècle). Cet sin­gu­lier ne pu­blia rien de son vi­vant, tant il te­nait peu à la gloire, et ne fit rien d’autre, lit­té­ra­le­ment par­lant, pen­dant toute sa , que de tra­vailler à ses «Pen­sées», écri­vant, ra­tu­rant, ajou­tant, re­tran­chant et n’en fi­nis­sant ja­mais. À sa en 1824, il lais­sait der­rière lui deux cent cinq car­nets, com­plé­tés par soixante liasses de pa­piers où se mê­laient, dans une grande confu­sion, des notes, des bribes d’, des brouillons de lettres. Ce n’est que bien des an­nées plus tard que Jean-Bap­tiste-Mi­chel Du­chesne, ne­veu de Jou­bert, en fit un mince re­cueil, qu’il re­mit à l’illustre Cha­teau­briand, le­quel se char­gea de le pré­fa­cer et d’y mettre un peu d’ordre. Du­chesne fit donc seul le choix de cette pre­mière édi­tion des «Pen­sées», écar­tant celles qui étaient dif­fi­ci­le­ment dé­chif­frables, re­tou­chant celles qui lui sem­blaient trop longues ou trop courtes. Bien qu’ami des lettres, il n’avait pas un es­prit as­sez exercé pour que ce choix fût sa­tis­fai­sant, et il est dom­mage que sur la re­com­man­da­tion du nom de Cha­teau­briand on se soit ha­bi­tué, pen­dant long­temps, à ju­ger Jou­bert sur une édi­tion qui, étant in­com­plète et fau­tive, ne le montre pas dans toute sa splen­deur lit­té­raire et phi­lo­so­phique. Mais qui est donc Jou­bert? Quel est cet in­connu, cet , cet in­édit qui s’était fait de la une cer­taine idée qui l’empêchait de rien ache­ver? Voici com­ment Sainte-Beuve ré­pond à cette ques­tion : «Ce fut un de ces heu­reux qui passent leur vie à pen­ser; à conver­ser avec leurs amis; à son­ger dans la ; à mé­di­ter quelque grand ou­vrage qu’ils n’accompliront ja­mais, et qui ne nous ar­rive qu’en frag­ments». Sur l’un de ses car­nets, Jou­bert écri­vait 1 : «Je suis comme Mon­taigne im­propre au dis­cours continu». On peut y lire un aveu d’impuissance; on peut y lire aussi la marque d’une chez cet homme qui se di­sait avare «de [son] encre» 2, et qui ne vou­lait «[se] don­ner la peine d’exprimer, avec soin, que des choses dignes d’être écrites sur de la soie ou sur l’airain» 3. Pen­sant pour la seule vo­lupté de pen­ser, pen­sant pa­tiem­ment, il at­ten­dait, pour cou­cher un mot, que la goutte d’encre qui de­vait tom­ber de sa plume se chan­geât en «goutte de lu­mière» 4, «tour­menté» qu’il était «par la mau­dite am­bi­tion de mettre tou­jours tout un livre dans une page, toute une page dans une phrase et cette phrase dans un mot» 5.

  1. «Car­nets. Tome II», p. 240. Icône Haut
  2. «Cor­res­pon­dance. Tome I», p. 101. Icône Haut
  3. id. Icône Haut
  1. «Car­nets. Tome I», p. 662. Icône Haut
  2. «Car­nets. Tome II», p. 485. Icône Haut

Manilius, « Astronomicon. Tome II »

XVIIIᵉ siècle

XVIIIe siècle

Il s’agit de , au­teur (Ier siècle av. J.-C.-Ier siècle apr. J.-C.), au­tant poète qu’astronome ou as­tro­logue, et dont l’œuvre dé­crit le comme une im­mense ma­chine dont est la su­prême et le grand hor­lo­ger. La de Ma­ni­lius pa­raît avoir été celle d’un sa­vant en­thou­siaste, mais re­tiré, parce qu’aucune source an­tique ne nous parle de lui. Quin­tillien, qui men­tionne un grand nombre d’, ne dit rien sur notre sa­vant, qui leur est pour­tant su­pé­rieur. On a pré­tendu, d’après quelques tour­nures in­so­lites qu’on ne trouve pas ai­sé­ment chez des au­teurs du même siècle, qu’il était un étran­ger. Ce­pen­dant faut-il s’étonner que, trai­tant un su­jet neuf et in­ha­bi­tuel, il ait em­ployé des formes éga­le­ment in­ha­bi­tuelles? Ma­ni­lius le sen­tait lui-même et il s’en ex­cuse dès les pre­mières lignes de son poème : «Je se­rai», dit-il, «le pre­mier des Ro­mains qui fe­rai en­tendre sur l’Hélicon ces nou­veaux concerts». Il vi­vait, en tout cas, sous le règne d’Auguste, parce qu’il s’adresse à cet Em­pe­reur comme à un per­son­nage contem­po­rain. Et puis, dans un pas­sage du livre I 1, il fait al­lu­sion à la dé­faite de Va­rus 2 comme à un évé­ne­ment tout ré­cent. , elle sur­vint en 9 apr. J.-C. Ma­ni­lius a laissé à la pos­té­rité un unique poème in­ti­tulé «As­tro­no­miques» («As­tro­no­mi­con» 3) et qui est in­té­res­sant à plus d’un titre. Il touche, à vrai dire, bien plus à l’ qu’à l’, parce que, des cinq qu’il contient, le pre­mier seule­ment se rap­porte à la sphé­ri­cité de la , à la di­vi­sion du , aux ; les quatre autres sont pu­re­ment as­tro­lo­giques et sont une sorte de com­plet de l’horoscope.

  1. v. 898-901. Icône Haut
  2. À Teu­to­bourg, en Ger­ma­nie. Icône Haut
  1. Cal­qué sur le «As­tro­no­mi­kôn» («Ἀστρονομικῶν»). Icône Haut

Manilius, « Astronomicon. Tome I »

XVIIIᵉ siècle

XVIIIe siècle

Il s’agit de , au­teur (Ier siècle av. J.-C.-Ier siècle apr. J.-C.), au­tant poète qu’astronome ou as­tro­logue, et dont l’œuvre dé­crit le comme une im­mense ma­chine dont est la su­prême et le grand hor­lo­ger. La de Ma­ni­lius pa­raît avoir été celle d’un sa­vant en­thou­siaste, mais re­tiré, parce qu’aucune source an­tique ne nous parle de lui. Quin­tillien, qui men­tionne un grand nombre d’, ne dit rien sur notre sa­vant, qui leur est pour­tant su­pé­rieur. On a pré­tendu, d’après quelques tour­nures in­so­lites qu’on ne trouve pas ai­sé­ment chez des au­teurs du même siècle, qu’il était un étran­ger. Ce­pen­dant faut-il s’étonner que, trai­tant un su­jet neuf et in­ha­bi­tuel, il ait em­ployé des formes éga­le­ment in­ha­bi­tuelles? Ma­ni­lius le sen­tait lui-même et il s’en ex­cuse dès les pre­mières lignes de son poème : «Je se­rai», dit-il, «le pre­mier des Ro­mains qui fe­rai en­tendre sur l’Hélicon ces nou­veaux concerts». Il vi­vait, en tout cas, sous le règne d’Auguste, parce qu’il s’adresse à cet Em­pe­reur comme à un per­son­nage contem­po­rain. Et puis, dans un pas­sage du livre I 1, il fait al­lu­sion à la dé­faite de Va­rus 2 comme à un évé­ne­ment tout ré­cent. , elle sur­vint en 9 apr. J.-C. Ma­ni­lius a laissé à la pos­té­rité un unique poème in­ti­tulé «As­tro­no­miques» («As­tro­no­mi­con» 3) et qui est in­té­res­sant à plus d’un titre. Il touche, à vrai dire, bien plus à l’ qu’à l’, parce que, des cinq qu’il contient, le pre­mier seule­ment se rap­porte à la sphé­ri­cité de la , à la di­vi­sion du , aux ; les quatre autres sont pu­re­ment as­tro­lo­giques et sont une sorte de com­plet de l’horoscope.

  1. v. 898-901. Icône Haut
  2. À Teu­to­bourg, en Ger­ma­nie. Icône Haut
  1. Cal­qué sur le «As­tro­no­mi­kôn» («Ἀστρονομικῶν»). Icône Haut

« Choses dont parle Teika lorsqu’il parle d’amour : une lecture de la “Compétition poétique solitaire en cent tours de l’honorable Teika” »

dans « Ebisu », nº 25, p. 91-151

dans «Ebisu», nº 25, p. 91-151

Il s’agit de l’aristocrate  1 (XIIe-XIIIe siècle), non seule­ment poète très fé­cond, en­censé ou blâmé par ses contem­po­rains pour son ori­gi­na­lité; mais aussi aux du­quel on s’en rap­por­tait constam­ment, théo­ri­cien, édi­teur d’œuvres an­ciennes, com­pi­la­teur d’anthologies, au­teur d’un jour­nal tenu tout au long de sa dès sa dix-neu­vième an­née — le «Mei­getsu-ki» («Jour­nal de la lune claire»). Fils du poète Fu­ji­wara no Shun­zei 2, hé­ri­tier im­por­tant d’une li­gnée d’érudits, Teika ser­vit plu­sieurs , et no­tam­ment Go-Toba Tennô, le­quel le ré­com­pensa de son at­ta­che­ment en le met­tant au nombre des com­pi­la­teurs du «Nou­veau Re­cueil de poé­sies de ja­dis et na­guère» («Shin­ko­kin wa­ka­shû»). À cette époque, il avait déjà la ré­pu­ta­tion d’un poète très doué, mais pra­ti­quant un dé­con­cer­tant : «J’ai été quel­que­fois re­connu et quel­que­fois cri­ti­qué», re­con­naît-il lui-même 3, «mais, de­puis le dé­but, j’ai man­qué de goût pour [les règles] et n’ai ap­pris qu’à pro­duire des choses que les autres n’acceptaient pas. L’ de mon re­gretté père se li­mi­tait à : “La [règle] de la ne se cherche pas dans un vaste sa­voir ou en­core en re­mon­tant à un loin­tain passé : elle jaillit de notre propre cœur, et c’est par -même qu’on la com­prend”». En l’an 1209, le shô­gun Sa­ne­tomo, âgé de dix-sept ans, de­manda à Teika de cor­ri­ger quelques poèmes qu’il lui avait en­voyés. Teika fit ac­com­pa­gner la cor­rec­tion d’un pé­da­go­gique, «Poèmes ex­cel­lents de notre » («Kin­dai shûka» 4), le pre­mier d’une sé­rie de trai­tés qui al­laient im­po­ser ses poé­tiques pour des dé­cen­nies au moins. On y ap­prend que la vraie poé­sie, c’est celle qui, tout en ne quit­tant pas les li­mites de la , s’affranchit des che­mins bat­tus : «Le style ex­cellent en poé­sie», dit-il 5, «c’est le style de poème qui, ayant trans­cendé les dif­fé­rents élé­ments du su­jet, n’insiste sur au­cun; qui, bien que ne sem­blant ap­par­te­nir à au­cun des dix styles en par­ti­cu­lier, nous fasse l’effet de les conte­nir tous». In­fa­ti­gable en dé­pit d’une sans cesse chan­ce­lante, Teika se mon­tra, par ailleurs, un très grand phi­lo­logue. Les meilleures édi­tions conser­vées, et quel­que­fois les plus an­ciennes, des clas­siques de la sont des co­pies de sa main 6. Pour­tant, à tort ou à rai­son, ce qui a le plus contri­bué à le rendre illustre, c’est une pe­tite connue sous le nom de «De cent poètes un poème», que tout Ja­po­nais sait par cœur pour avoir joué, dès sa tendre en­fance, avec le jeu de qui en est ins­piré.

  1. En ja­po­nais 藤原定家. Par­fois trans­crit Fou­ji­wara no Sa­daïé. Icône Haut
  2. En ja­po­nais 藤原俊成. Par­fois trans­crit To­shi­nari. Icône Haut
  3. «Fu­ji­wara no Teika (1162-1241) et la No­tion d’excellence en poé­sie», p. 70. Icône Haut
  1. En ja­po­nais «近代秀歌». Icône Haut
  2. «Fu­ji­wara no Teika (1162-1241) et la No­tion d’excellence en poé­sie», p. 249. Icône Haut
  3. C’est le cas en par­ti­cu­lier du «Dit du genji», de l’«Ise mo­no­ga­tari», du «Ko­kin-shû», dont il col­li­gea les di­vers , et qu’il com­menta en pro­fon­deur. Icône Haut

« Fujiwara no Teika (1162-1241) et la Notion d’excellence en poésie »

éd. Collège de France-Institut des hautes études japonaises, coll. Bibliothèque de l’Institut des hautes études japonaises, Paris

éd. Col­lège de -Ins­ti­tut des hautes études ja­po­naises, coll. Bi­blio­thèque de l’Institut des hautes études ja­po­naises, Pa­ris

Il s’agit de l’aristocrate  1 (XIIe-XIIIe siècle), non seule­ment poète très fé­cond, en­censé ou blâmé par ses contem­po­rains pour son ori­gi­na­lité; mais aussi aux du­quel on s’en rap­por­tait constam­ment, théo­ri­cien, édi­teur d’œuvres an­ciennes, com­pi­la­teur d’anthologies, au­teur d’un jour­nal tenu tout au long de sa dès sa dix-neu­vième an­née — le «Mei­getsu-ki» («Jour­nal de la lune claire»). Fils du poète Fu­ji­wara no Shun­zei 2, hé­ri­tier im­por­tant d’une li­gnée d’érudits, Teika ser­vit plu­sieurs , et no­tam­ment Go-Toba Tennô, le­quel le ré­com­pensa de son at­ta­che­ment en le met­tant au nombre des com­pi­la­teurs du «Nou­veau Re­cueil de poé­sies de ja­dis et na­guère» («Shin­ko­kin wa­ka­shû»). À cette époque, il avait déjà la ré­pu­ta­tion d’un poète très doué, mais pra­ti­quant un dé­con­cer­tant : «J’ai été quel­que­fois re­connu et quel­que­fois cri­ti­qué», re­con­naît-il lui-même 3, «mais, de­puis le dé­but, j’ai man­qué de goût pour [les règles] et n’ai ap­pris qu’à pro­duire des choses que les autres n’acceptaient pas. L’ de mon re­gretté père se li­mi­tait à : “La [règle] de la ne se cherche pas dans un vaste sa­voir ou en­core en re­mon­tant à un loin­tain passé : elle jaillit de notre propre cœur, et c’est par -même qu’on la com­prend”». En l’an 1209, le shô­gun Sa­ne­tomo, âgé de dix-sept ans, de­manda à Teika de cor­ri­ger quelques poèmes qu’il lui avait en­voyés. Teika fit ac­com­pa­gner la cor­rec­tion d’un pé­da­go­gique, «Poèmes ex­cel­lents de notre » («Kin­dai shûka» 4), le pre­mier d’une sé­rie de trai­tés qui al­laient im­po­ser ses poé­tiques pour des dé­cen­nies au moins. On y ap­prend que la vraie poé­sie, c’est celle qui, tout en ne quit­tant pas les li­mites de la , s’affranchit des che­mins bat­tus : «Le style ex­cellent en poé­sie», dit-il 5, «c’est le style de poème qui, ayant trans­cendé les dif­fé­rents élé­ments du su­jet, n’insiste sur au­cun; qui, bien que ne sem­blant ap­par­te­nir à au­cun des dix styles en par­ti­cu­lier, nous fasse l’effet de les conte­nir tous». In­fa­ti­gable en dé­pit d’une sans cesse chan­ce­lante, Teika se mon­tra, par ailleurs, un très grand phi­lo­logue. Les meilleures édi­tions conser­vées, et quel­que­fois les plus an­ciennes, des clas­siques de la sont des co­pies de sa main 6. Pour­tant, à tort ou à rai­son, ce qui a le plus contri­bué à le rendre illustre, c’est une pe­tite connue sous le nom de «De cent poètes un poème», que tout Ja­po­nais sait par cœur pour avoir joué, dès sa tendre en­fance, avec le jeu de qui en est ins­piré.

  1. En ja­po­nais 藤原定家. Par­fois trans­crit Fou­ji­wara no Sa­daïé. Icône Haut
  2. En ja­po­nais 藤原俊成. Par­fois trans­crit To­shi­nari. Icône Haut
  3. «Fu­ji­wara no Teika (1162-1241) et la No­tion d’excellence en poé­sie», p. 70. Icône Haut
  1. En ja­po­nais «近代秀歌». Icône Haut
  2. «Fu­ji­wara no Teika (1162-1241) et la No­tion d’excellence en poé­sie», p. 249. Icône Haut
  3. C’est le cas en par­ti­cu­lier du «Dit du genji», de l’«Ise mo­no­ga­tari», du «Ko­kin-shû», dont il col­li­gea les di­vers , et qu’il com­menta en pro­fon­deur. Icône Haut

Kyôka, « La Ronde nocturne de l’agent de police, “Yakô junsa” »

dans « Anthologie de nouvelles japonaises contemporaines. Tome II » (éd. Gallimard, coll. Du monde entier, Paris)

dans « de contem­po­raines. Tome II» (éd. Gal­li­mard, coll. Du en­tier, Pa­ris)

Il s’agit de «La Ronde noc­turne de l’agent de po­lice» («Yakô junsa» 1) et autres œuvres d’ 2, écri­vain (XIXe-XXe siècle) qui créa, aussi bien dans ses fan­tas­tiques que dans ses nou­velles proches du poème en prose, un monde fait d’êtres sur­na­tu­rels, de in­quié­tants et de sen­suelles, un monde sans en par­tie ins­piré de sa mère ar­tiste, qu’il per­dit à l’âge de neuf ans. Fan­tasque, ca­pri­cieux, Kyôka vi­vait en­touré de ses peurs et su­per­sti­tions; il crai­gnait les chiens et les éclairs et en­le­vait les lu­nettes quand il pas­sait de­vant un , pour que rien ne brouillât son contact avec le di­vin. Il idéa­lisa le monde des gei­shas, au point d’en prendre une pour femme, en ajour­nant son jusqu’au dé­cès de son maître Ozaki Kôyô qui désap­prou­vait cette union. De l’, il ré­vé­rait les des­seins étranges et dé­ca­dents d’Aubrey Beard­sley; du — les vieilles es­tampes et scènes de nô. Hé­las! les œuvres les plus fortes et les plus vraies de Kyôka res­tent pour l’heure in­édites en . Tel est le cas de «Ni­hon­ba­shi» 3, l’ d’un jeune à la de sa sœur qui lui avait payé ses études en de­ve­nant gei­sha; ou bien «L’Ermite du mont Kôya» («Kôya hi­jiri» 4), les confes­sions d’un moine sou­mis à la par une ma­gi­cienne vo­lup­tueuse, une sorte de Circé, qui avait le pou­voir de mé­ta­mor­pho­ser les hommes en bêtes. Même au Ja­pon, mal­gré la po­pu­la­rité de ses œuvres, adap­tées très tôt au et au ci­néma, Kyôka s’éteignit dans une re­la­tive in­dif­fé­rence, laissé de côté par ses contem­po­rains. Sa pré­di­lec­tion pour le , ses étranges types fé­mi­nins qui rap­pe­laient sou­vent, par leur beauté té­né­breuse et trou­blante, les «belles dames sans merci» du oc­ci­den­tal, ne cor­res­pon­daient plus aux goûts du  : «Quand je songe à Izumi Kyôka», dit un  5, «ce qui ne cesse de me sur­prendre, c’est cet en­thou­siasme et cette in­flexible [obs­ti­na­tion] à vou­loir pré­ser­ver un tel uni­vers fan­tas­tique et plein de , dans un Ja­pon où, de­puis [l’ère] Meiji, le cou­rant prin­ci­pal était le réa­lisme… Ozaki Kôyô, ce maître pour qui Kyôka avait tant de , reste, me semble-t-il, en der­nier lieu, un au­teur réa­liste. En par exemple, même au XIXe siècle où le réa­lisme était le cou­rant lit­té­raire prin­ci­pal, [il] exis­tait un cer­tain nombre de fan­tas­tiques — Ner­val, parmi d’autres… Dans la contem­po­raine, Kyôka fait de cas unique et isolé».

  1. En ja­po­nais «夜行巡査». Icône Haut
  2. En ja­po­nais 泉鏡花. Icône Haut
  3. En ja­po­nais «日本橋». Icône Haut
  1. En ja­po­nais «高野聖». Par­fois tra­duit «Le Saint du mont Kôya». Icône Haut
  2. Iku­shima Ryûi­chi dans Fran­çois La­chaud, «“L’Ermite du mont Kôya”, une lec­ture d’Izumi Kyôka», p. 71-72. Icône Haut

Kyôka, « Les Noix glacées, “Kurumi” »

dans « [Nouvelles japonaises]. Tome I. Les Noix, la Mouche, le Citron (1910-1926) » (éd. Ph. Picquier, Arles), p. 15-22

dans «[]. Tome I. Les Noix, la Mouche, le Ci­tron (1910-1926)» (éd. Ph. Pic­quier, Arles), p. 15-22

Il s’agit des «Noix gla­cées» («Ku­rumi» 1) et autres œuvres d’ 2, écri­vain (XIXe-XXe siècle) qui créa, aussi bien dans ses fan­tas­tiques que dans ses nou­velles proches du poème en prose, un fait d’êtres sur­na­tu­rels, de in­quié­tants et de sen­suelles, un monde sans en par­tie ins­piré de sa mère ar­tiste, qu’il per­dit à l’âge de neuf ans. Fan­tasque, ca­pri­cieux, Kyôka vi­vait en­touré de ses peurs et su­per­sti­tions; il crai­gnait les chiens et les éclairs et en­le­vait les lu­nettes quand il pas­sait de­vant un , pour que rien ne brouillât son contact avec le di­vin. Il idéa­lisa le monde des gei­shas, au point d’en prendre une pour femme, en ajour­nant son jusqu’au dé­cès de son maître Ozaki Kôyô qui désap­prou­vait cette union. De l’, il ré­vé­rait les des­seins étranges et dé­ca­dents d’Aubrey Beard­sley; du — les vieilles es­tampes et scènes de nô. Hé­las! les œuvres les plus fortes et les plus vraies de Kyôka res­tent pour l’heure in­édites en . Tel est le cas de «Ni­hon­ba­shi» 3, l’ d’un jeune à la de sa sœur qui lui avait payé ses études en de­ve­nant gei­sha; ou bien «L’Ermite du mont Kôya» («Kôya hi­jiri» 4), les confes­sions d’un moine sou­mis à la par une ma­gi­cienne vo­lup­tueuse, une sorte de Circé, qui avait le pou­voir de mé­ta­mor­pho­ser les hommes en bêtes. Même au Ja­pon, mal­gré la po­pu­la­rité de ses œuvres, adap­tées très tôt au et au ci­néma, Kyôka s’éteignit dans une re­la­tive in­dif­fé­rence, laissé de côté par ses contem­po­rains. Sa pré­di­lec­tion pour le , ses étranges types fé­mi­nins qui rap­pe­laient sou­vent, par leur beauté té­né­breuse et trou­blante, les «belles dames sans merci» du oc­ci­den­tal, ne cor­res­pon­daient plus aux goûts du  : «Quand je songe à Izumi Kyôka», dit un  5, «ce qui ne cesse de me sur­prendre, c’est cet en­thou­siasme et cette in­flexible [obs­ti­na­tion] à vou­loir pré­ser­ver un tel uni­vers fan­tas­tique et plein de , dans un Ja­pon où, de­puis [l’ère] Meiji, le cou­rant prin­ci­pal était le réa­lisme… Ozaki Kôyô, ce maître pour qui Kyôka avait tant de , reste, me semble-t-il, en der­nier lieu, un au­teur réa­liste. En par exemple, même au XIXe siècle où le réa­lisme était le cou­rant lit­té­raire prin­ci­pal, [il] exis­tait un cer­tain nombre de fan­tas­tiques — Ner­val, parmi d’autres… Dans la contem­po­raine, Kyôka fait de cas unique et isolé».

  1. En ja­po­nais «胡桃». Icône Haut
  2. En ja­po­nais 泉鏡花. Icône Haut
  3. En ja­po­nais «日本橋». Icône Haut
  1. En ja­po­nais «高野聖». Par­fois tra­duit «Le Saint du mont Kôya». Icône Haut
  2. Iku­shima Ryûi­chi dans Fran­çois La­chaud, «“L’Ermite du mont Kôya”, une lec­ture d’Izumi Kyôka», p. 71-72. Icône Haut

Kyôka, « Une Femme fidèle : récits »

éd. Ph. Picquier, Arles

éd. Ph. Pic­quier, Arles

Il s’agit d’«Une Femme fi­dèle» («Bake ichô» 1) et autres œuvres d’ 2, écri­vain (XIXe-XXe siècle) qui créa, aussi bien dans ses fan­tas­tiques que dans ses nou­velles proches du poème en prose, un fait d’êtres sur­na­tu­rels, de in­quié­tants et de sen­suelles, un monde sans en par­tie ins­piré de sa mère ar­tiste, qu’il per­dit à l’âge de neuf ans. Fan­tasque, ca­pri­cieux, Kyôka vi­vait en­touré de ses peurs et su­per­sti­tions; il crai­gnait les chiens et les éclairs et en­le­vait les lu­nettes quand il pas­sait de­vant un , pour que rien ne brouillât son contact avec le di­vin. Il idéa­lisa le monde des gei­shas, au point d’en prendre une pour femme, en ajour­nant son jusqu’au dé­cès de son maître Ozaki Kôyô qui désap­prou­vait cette union. De l’, il ré­vé­rait les des­seins étranges et dé­ca­dents d’Aubrey Beard­sley; du — les vieilles es­tampes et scènes de nô. Hé­las! les œuvres les plus fortes et les plus vraies de Kyôka res­tent pour l’heure in­édites en . Tel est le cas de «Ni­hon­ba­shi» 3, l’ d’un jeune à la de sa sœur qui lui avait payé ses études en de­ve­nant gei­sha; ou bien «L’Ermite du mont Kôya» («Kôya hi­jiri» 4), les confes­sions d’un moine sou­mis à la par une ma­gi­cienne vo­lup­tueuse, une sorte de Circé, qui avait le pou­voir de mé­ta­mor­pho­ser les hommes en bêtes. Même au Ja­pon, mal­gré la po­pu­la­rité de ses œuvres, adap­tées très tôt au et au ci­néma, Kyôka s’éteignit dans une re­la­tive in­dif­fé­rence, laissé de côté par ses contem­po­rains. Sa pré­di­lec­tion pour le , ses étranges types fé­mi­nins qui rap­pe­laient sou­vent, par leur beauté té­né­breuse et trou­blante, les «belles dames sans merci» du oc­ci­den­tal, ne cor­res­pon­daient plus aux goûts du  : «Quand je songe à Izumi Kyôka», dit un  5, «ce qui ne cesse de me sur­prendre, c’est cet en­thou­siasme et cette in­flexible [obs­ti­na­tion] à vou­loir pré­ser­ver un tel uni­vers fan­tas­tique et plein de , dans un Ja­pon où, de­puis [l’ère] Meiji, le cou­rant prin­ci­pal était le réa­lisme… Ozaki Kôyô, ce maître pour qui Kyôka avait tant de , reste, me semble-t-il, en der­nier lieu, un au­teur réa­liste. En par exemple, même au XIXe siècle où le réa­lisme était le cou­rant lit­té­raire prin­ci­pal, [il] exis­tait un cer­tain nombre de fan­tas­tiques — Ner­val, parmi d’autres… Dans la contem­po­raine, Kyôka fait de cas unique et isolé».

  1. En ja­po­nais «化銀杏». Icône Haut
  2. En ja­po­nais 泉鏡花. Icône Haut
  3. En ja­po­nais «日本橋». Icône Haut
  1. En ja­po­nais «高野聖». Par­fois tra­duit «Le Saint du mont Kôya». Icône Haut
  2. Iku­shima Ryûi­chi dans Fran­çois La­chaud, «“L’Ermite du mont Kôya”, une lec­ture d’Izumi Kyôka», p. 71-72. Icône Haut

Kyôka, « La Femme ailée : récits »

éd. Ph. Picquier, coll. Picquier poche, Arles

éd. Ph. Pic­quier, coll. Pic­quier poche, Arles

Il s’agit de «La Femme ai­lée» («Ke­chô» 1) et autres œuvres d’ 2, écri­vain (XIXe-XXe siècle) qui créa, aussi bien dans ses fan­tas­tiques que dans ses nou­velles proches du poème en prose, un fait d’êtres sur­na­tu­rels, de in­quié­tants et de sen­suelles, un monde sans en par­tie ins­piré de sa mère ar­tiste, qu’il per­dit à l’âge de neuf ans. Fan­tasque, ca­pri­cieux, Kyôka vi­vait en­touré de ses peurs et su­per­sti­tions; il crai­gnait les chiens et les éclairs et en­le­vait les lu­nettes quand il pas­sait de­vant un , pour que rien ne brouillât son contact avec le di­vin. Il idéa­lisa le monde des gei­shas, au point d’en prendre une pour femme, en ajour­nant son jusqu’au dé­cès de son maître Ozaki Kôyô qui désap­prou­vait cette union. De l’, il ré­vé­rait les des­seins étranges et dé­ca­dents d’Aubrey Beard­sley; du — les vieilles es­tampes et scènes de nô. Hé­las! les œuvres les plus fortes et les plus vraies de Kyôka res­tent pour l’heure in­édites en . Tel est le cas de «Ni­hon­ba­shi» 3, l’ d’un jeune à la de sa sœur qui lui avait payé ses études en de­ve­nant gei­sha; ou bien «L’Ermite du mont Kôya» («Kôya hi­jiri» 4), les confes­sions d’un moine sou­mis à la par une ma­gi­cienne vo­lup­tueuse, une sorte de Circé, qui avait le pou­voir de mé­ta­mor­pho­ser les hommes en bêtes. Même au Ja­pon, mal­gré la po­pu­la­rité de ses œuvres, adap­tées très tôt au et au ci­néma, Kyôka s’éteignit dans une re­la­tive in­dif­fé­rence, laissé de côté par ses contem­po­rains. Sa pré­di­lec­tion pour le , ses étranges types fé­mi­nins qui rap­pe­laient sou­vent, par leur beauté té­né­breuse et trou­blante, les «belles dames sans merci» du oc­ci­den­tal, ne cor­res­pon­daient plus aux goûts du  : «Quand je songe à Izumi Kyôka», dit un  5, «ce qui ne cesse de me sur­prendre, c’est cet en­thou­siasme et cette in­flexible [obs­ti­na­tion] à vou­loir pré­ser­ver un tel uni­vers fan­tas­tique et plein de , dans un Ja­pon où, de­puis [l’ère] Meiji, le cou­rant prin­ci­pal était le réa­lisme… Ozaki Kôyô, ce maître pour qui Kyôka avait tant de , reste, me semble-t-il, en der­nier lieu, un au­teur réa­liste. En par exemple, même au XIXe siècle où le réa­lisme était le cou­rant lit­té­raire prin­ci­pal, [il] exis­tait un cer­tain nombre de fan­tas­tiques — Ner­val, parmi d’autres… Dans la contem­po­raine, Kyôka fait de cas unique et isolé».

  1. En ja­po­nais «化鳥». Icône Haut
  2. En ja­po­nais 泉鏡花. Icône Haut
  3. En ja­po­nais «日本橋». Icône Haut
  1. En ja­po­nais «高野聖». Par­fois tra­duit «Le Saint du mont Kôya». Icône Haut
  2. Iku­shima Ryûi­chi dans Fran­çois La­chaud, «“L’Ermite du mont Kôya”, une lec­ture d’Izumi Kyôka», p. 71-72. Icône Haut

Chalcondyle, « L’Histoire de la décadence de l’Empire grec et établissement de celui des Turcs »

XVIᵉ siècle

XVIe siècle

Il s’agit de Lao­nic Chal­con­dyle, Athé­nien du XVe siècle apr. J.-C. qui a ré­digé «L’ de la de l’Empire et éta­blis­se­ment de ce­lui des Turcs», ou lit­té­ra­le­ment «Dé­mons­tra­tions his­to­riques, en dix » («Apo­deixeis his­to­riôn deka» 1). J’adopte la ma­nière com­mune d’orthographier son nom de , qui est de sup­pri­mer une des syl­labes pour évi­ter le re­dou­ble­ment, écri­vant Chal­con­dyle au lieu de Chal­co­con­dyle 2. Quant à son pré­nom de Lao­nic ou Lao­ni­cos 3, quelques-uns pré­fèrent le chan­ger en ce­lui de Ni­co­las, dont il est le ver­lan. Quoi qu’il en soit, «L’Histoire» de Chal­con­dyle parle avec éten­due des guerres des Grecs et autres chré­tiens contre les Turcs; elle com­mence vers l’an 1300 (date de­puis la­quelle les af­faires des Grecs al­lèrent tou­jours de en pis) jusqu’à leur des­truc­tion et ruine fi­nale par Meh­med II, qui prit en l’an 1453. Chassé de sa pa­trie par ces fu­nestes évé­ne­ments, Chal­con­dyle a évo­qué, mieux qu’aucun autre avant lui, les souf­frances de sa na­tale et a ainsi rap­pelé vers l’ l’attention de l’ ou­blieuse et in­dif­fé­rente. La qu’il res­sent d’être é, ne le rend pas in­juste pour au­tant. Il fait preuve d’une grande ob­jec­ti­vité à l’égard des Turcs; il vante leurs qua­li­tés et leur ri­gou­reuse , qu’il op­pose aux dis­cordes et aux vices de ses com­pa­triotes. Par ailleurs, mal­gré l’inaction de l’Europe, il montre une sin­cère es­time pour les qui té­moignent du moins quelque sym­pa­thie à la cause grecque, sur­tout pour la qui, tant de fois, prit l’initiative des croi­sades. Écou­tons-le épui­ser toutes les for­mules d’une vive ad­mi­ra­tion pour le nom  : «Je di­rai… ceci des Fran­çais», dit-il, «que c’est une très noble et fort an­cienne; riche, opu­lente et de grand pou­voir. Et d’autant qu’[en] toutes ces choses ils sur­montent et passent de bien loin tous les autres peuples de l’, aussi… c’est à eux [que], de , l’autorité sou­ve­raine et l’ de l’Empire doit ap­par­te­nir». Et aussi : «On sait as­sez que cette na­tion est fort an­cienne sur toutes [les] autres, et qu’elle s’est da­van­tage ac­quis une très grande et ma­gni­fique gloire pour avoir, tant de fois, vaincu et rem­barré les qui étaient sor­tis de l’, du­rant même que 4 l’Empire ro­main était comme an­nexé et hé­ré­di­taire à [sa] cou­ronne».

  1. En grec «Ἀποδείξεις ἱστοριῶν δέκα». Icône Haut
  2. En grec Χαλκοκονδύλης. Par­fois trans­crit Chal­con­dile, Chal­co­con­dyle, Chal­ko­kon­dyle, Chal­ko­kon­dy­lis, Chal­kon­dy­las, Chal­co­con­dy­las, Chal­co­con­dyles ou Chal­ko­kon­dy­lès. Icône Haut
  1. En grec Λαόνικος. Par­fois trans­crit Lao­nice, Lao­nique, Lao­ni­kos ou Lao­ni­cus. Icône Haut
  2. «Du­rant même que» si­gni­fie «au mo­ment même où, dans le même que». Icône Haut