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« Étude sur Nicolas de Grouchy (Nicolaus Gruchius Rothomagensis) »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de Ni­co­las de Grou­chy 1, hu­ma­niste d’expression la­tine, qui en­sei­gna Aris­tote en et au Por­tu­gal, et dont Mon­taigne re­çut pen­dant quelque des le­çons pri­vées. Dans un vieux rè­gle­ment pour le col­lège de Bor­deaux, im­primé en 1583 et in­ti­tulé «Schola Aqui­ta­nica», on lit que «[parmi] les qu’on ex­plique dans la classe de », il ne faut pas en ex­pli­quer «d’autres que ceux d’, à l’exception… des “Præ­cep­tiones dia­lec­ticæ” (“Pré­ceptes de ”) par Ni­co­las de Grou­chy, si on trouve bon de com­men­cer le cours par cet ou­vrage» 2. Et la «Schola Aqui­ta­nica» de pré­ci­ser : «De toutes les courtes in­tro­duc­tions à ce que les An­ciens ont ap­pelé “l’Instrument de la ” [“l’Organon”], c’est la plus belle et la plus sa­vante qui ait paru, de notre temps, à l’usage des jeunes gens qui se plaisent à l’étude de la phi­lo­so­phie». Voici ce qu’on sait de ce Grou­chy ainsi vanté, le seul au­to­risé à ini­tier les jeunes gens à la d’Aristote : Né au­tour de 1510, il fit ses études à Rouen, sa ville na­tale, et à Pa­ris, où il se lia avec un sa­vant d’origine por­tu­gaise, An­dré de Gou­véa, qui le fit ve­nir au col­lège de Bor­deaux. Ce col­lège était «très flo­ris­sant pour lors et le meilleur de France», dit Mon­taigne 3. Grou­chy y fut chargé par Gou­véa du cours de dia­lec­tique et oc­cupa cette chaire pen­dant treize ans. En 1547, sur les ins­tances du roi de Por­tu­gal, Gou­véa ren­tra dans son pays afin d’y fon­der un col­lège sur le mo­dèle de ce­lui de Bor­deaux; il amena avec lui l’élite du pro­fes­so­ral, à qui il donna de bons gages. Grou­chy l’y sui­vit, mais n’y resta pas très long­temps. Fa­ti­gué des luttes qu’il avait à sou­te­nir, en tant que pro­tes­tant, contre l’intolérance des por­tu­gais, et en tant qu’étranger, contre leur ja­lou­sie, il re­tourna en France et vé­cut vingt-deux ans dans un état voi­sin de l’indigence, en s’adonnant à la pu­bli­ca­tion de ses tra­duc­tions la­tines d’Aristote. La di­rec­tion d’un col­lège à La Ro­chelle lui fut, en­fin, pro­po­sée par Jeanne III d’Albret, reine de Na­varre, qui lui écri­vit «qu’il n’est pas dé­fendu d’espérer de pou­voir po­lir un rude [comme le mien] quand il est ma­nié par telles mains que sont les vôtres» 4. Et la reine de Na­varre d’ajouter : «Le pays est fort sain pour gens de votre âge, et vous y pour­rez dou­ce­ment vivre, exer­çant la vo­ca­tion en la­quelle vous ap­pelle». Notre pro­fes­seur s’empressa d’accepter cette fonc­tion et il était sur le point d’en prendre pos­ses­sion quand une ma­ligne, contrac­tée dans son voyage en plein hi­ver sur le che­min de La Ro­chelle, l’emporta en peu de jours.

  1. On ren­contre aussi les gra­phies Ni­co­las de la Grouche et Ni­co­las Grou­chi. À ne pas confondre avec Ni­co­las de Grou­chy, sieur de La Court, qui vé­cut un siècle plus tard, et dont nous n’avons qu’un seul ou­vrage «bien peu fait pour don­ner à la pos­té­rité une haute idée de son ta­lent et de son bon sens» (p. 159), c’est «La Béa­ti­tude, ou les Imi­tables [!] Amours de Theoys et de Ca­rite». Icône Haut
  2. «“Schola Aqui­ta­nica”, Pro­gramme d’études du Col­lège de Guyenne au XVIe siècle, pu­blié pour la pre­mière fois par Élie Vi­net en 1583». Icône Haut
  1. «», liv. I, ch. XXV. Icône Haut
  2. Dans Hip­po­lyte Au­bert de la Rüe, «Lettres de Jeanne d’Albret», p. 399. Icône Haut

Pissarev, « Notre Science universitaire : récit »

éd. Actes Sud, coll. Un Endroit où aller, Arles

éd. Actes Sud, coll. Un En­droit où al­ler, Arles

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle de «Notre Science uni­ver­si­taire» («Na­cha ou­ni­ver­si­tets­kaïa naouka» 1) de Dmi­tri Iva­no­vitch Pis­sa­rev 2. «Crime et Châ­ti­ment» de Dos­toïevski, avant d’être l’une des œuvres les plus pro­fondes de cri­mi­nelle, au­tour des­quelles la hu­maine vient tour­ner sans cesse, a été un contre «l’égoïsme ra­tion­nel», un mou­ve­ment dé­fendu en dans les an­nées 1860 par le jour­nal «Rouss­koïé slovo» 3La ») de Pis­sa­rev. Dos­toïevski a vu le dan­ger; il a mis tout en œuvre pour dé­tour­ner d’un tel égoïsme en dé­cri­vant les tour­ments de l’ qui le suivent. Les faits lui don­nèrent . Pis­sa­rev se noya lors d’une bai­gnade — je veux dire noya dé­li­bé­ré­ment — à vingt-sept ans, seul, mé­lan­co­lique, dé­tra­qué par le ver­tige d’une crois­sance in­tel­lec­tuelle trop ra­pide. Mais re­pre­nons dans l’ordre! Issu d’une noble rui­née, Pis­sa­rev fai­sait en­core ses études à l’Université de Saint-Pé­ters­bourg, quand il dé­buta comme pu­bli­ciste lit­té­raire, chargé de ré­di­ger la ru­brique des comptes ren­dus bi­blio­gra­phiques dans la re­vue «Rass­vet» 4L’Aube»), qui por­tait le sous-titre «Re­vue des , des et des lettres pour jeunes adultes». Cette col­la­bo­ra­tion l’entraîna de force hors des murs cal­feu­trés des am­phi­théâtres, «à l’air libre», comme il le dit lui-même 5, et «ce pas­sage forcé me don­nait un plai­sir cou­pable, que je ne pus dis­si­mu­ler ni à -même ni aux autres…». La ques­tion de l’ de la femme étant en ce -là à l’ordre du jour dans «Rass­vet», Pis­sa­rev en vint tout na­tu­rel­le­ment au pro­blème plus large de la de la per­sonne hu­maine. Riche d’idées, il s’attendait à créer des mi­racles dans le do­maine de la pen­sée : «Ayant jeté à bas dans mon es­prit toutes sortes de Kaz­beks 6 et de monts Blancs, je m’apparaissais à moi-même comme une es­pèce de Ti­tan, de Pro­mé­thée qui s’était em­paré du ». Il mit ses idées, dès 1861, dans des ar­ticles re­mar­quables par leur har­diesse et leur bouillon­ne­ment in­tel­lec­tuel, qu’il pu­blia cette fois dans «Rouss­koïé slovo». Ce jour­nal n’était plus la ver­tueuse «Re­vue pour jeunes filles adultes» où il avait fait ses pre­miers , mais était, au contraire, rem­pli d’agitation phi­lo­so­phique et . Pis­sa­rev en de­vint, en quelques jours, le prin­ci­pal col­la­bo­ra­teur et membre de la ré­dac­tion; et quand, un an plus tard, guetté par la cen­sure, ce jour­nal fut pro­vi­soi­re­ment sus­pendu, Pis­sa­rev jeta sur le pa­pier un ap­pel fié­vreux de au «ren­ver­se­ment de la dy­nas­tie des Ro­ma­nov et de la bu­reau­cra­tie pé­ters­bour­geoise» et au «chan­ge­ment de ré­gime po­li­tique»; le len­de­main, il était ar­rêté et in­car­céré.

  1. En russe «Наша университетская наука». Par­fois trans­crit «Na­cha ou­ni­ver­si­tets­kaya naouka», «Na­sha uni­ver­si­tets­kaya nauka» ou «Naša uni­ver­si­tets­kaja nauka». Icône Haut
  2. En russe Дмитрий Иванович Писарев. Par­fois trans­crit Dmi­trij Iwa­no­witsch Pis­sa­rew, Dmi­try Iva­no­vich Pi­sa­rev, Dmi­triy Iva­no­vich Pi­sa­rev, Di­mi­tri Iva­no­vich Pi­sa­rev, Dmi­trii Iva­no­vich Pi­sa­rev ou Dmi­trij Iva­no­vič Pi­sa­rev. Icône Haut
  3. En russe «Русское слово». Par­fois trans­crit «Rouss­koé slovo», «Russ­koïé slovo» ou «Russ­koe slovo». Icône Haut
  1. En russe «Рассвет». Icône Haut
  2. «Notre Science uni­ver­si­taire», p. 132 & 135. Icône Haut
  3. Un des som­mets les plus é de la chaîne du . Icône Haut

Pissarev, « Essais critiques »

éd. du Progrès, Moscou

éd. du Pro­grès, Mos­cou

Il s’agit des «Réa­listes» («Rea­listy» 1) et autres ar­ticles de Dmi­tri Iva­no­vitch Pis­sa­rev 2. «Crime et Châ­ti­ment» de Dos­toïevski, avant d’être l’une des œuvres les plus pro­fondes de cri­mi­nelle, au­tour des­quelles la hu­maine vient tour­ner sans cesse, a été un contre «l’égoïsme ra­tion­nel», un mou­ve­ment dé­fendu en dans les an­nées 1860 par le jour­nal «Rouss­koïé slovo» 3La ») de Pis­sa­rev. Dos­toïevski a vu le dan­ger; il a mis tout en œuvre pour dé­tour­ner d’un tel égoïsme en dé­cri­vant les tour­ments de l’ qui le suivent. Les faits lui don­nèrent . Pis­sa­rev se noya lors d’une bai­gnade — je veux dire noya dé­li­bé­ré­ment — à vingt-sept ans, seul, mé­lan­co­lique, dé­tra­qué par le ver­tige d’une crois­sance in­tel­lec­tuelle trop ra­pide. Mais re­pre­nons dans l’ordre! Issu d’une noble rui­née, Pis­sa­rev fai­sait en­core ses études à l’Université de Saint-Pé­ters­bourg, quand il dé­buta comme pu­bli­ciste lit­té­raire, chargé de ré­di­ger la ru­brique des comptes ren­dus bi­blio­gra­phiques dans la re­vue «Rass­vet» 4L’Aube»), qui por­tait le sous-titre «Re­vue des , des et des lettres pour jeunes adultes». Cette col­la­bo­ra­tion l’entraîna de force hors des murs cal­feu­trés des am­phi­théâtres, «à l’air libre», comme il le dit lui-même 5, et «ce pas­sage forcé me don­nait un plai­sir cou­pable, que je ne pus dis­si­mu­ler ni à -même ni aux autres…». La ques­tion de l’ de la femme étant en ce -là à l’ordre du jour dans «Rass­vet», Pis­sa­rev en vint tout na­tu­rel­le­ment au pro­blème plus large de la de la per­sonne hu­maine. Riche d’idées, il s’attendait à créer des mi­racles dans le do­maine de la pen­sée : «Ayant jeté à bas dans mon es­prit toutes sortes de Kaz­beks 6 et de monts Blancs, je m’apparaissais à moi-même comme une es­pèce de Ti­tan, de Pro­mé­thée qui s’était em­paré du ». Il mit ses idées, dès 1861, dans des ar­ticles re­mar­quables par leur har­diesse et leur bouillon­ne­ment in­tel­lec­tuel, qu’il pu­blia cette fois dans «Rouss­koïé slovo». Ce jour­nal n’était plus la ver­tueuse «Re­vue pour jeunes filles adultes» où il avait fait ses pre­miers , mais était, au contraire, rem­pli d’agitation phi­lo­so­phique et . Pis­sa­rev en de­vint, en quelques jours, le prin­ci­pal col­la­bo­ra­teur et membre de la ré­dac­tion; et quand, un an plus tard, guetté par la cen­sure, ce jour­nal fut pro­vi­soi­re­ment sus­pendu, Pis­sa­rev jeta sur le pa­pier un ap­pel fié­vreux de au «ren­ver­se­ment de la dy­nas­tie des Ro­ma­nov et de la bu­reau­cra­tie pé­ters­bour­geoise» et au «chan­ge­ment de ré­gime po­li­tique»; le len­de­main, il était ar­rêté et in­car­céré.

  1. En russe «Реалисты». Éga­le­ment connu sous le titre d’«Une Ques­tion non ré­so­lue» («Нерешенный вопрос»). Par­fois tra­duit «Une Ques­tion à ré­soudre». Icône Haut
  2. En russe Дмитрий Иванович Писарев. Par­fois trans­crit Dmi­trij Iwa­no­witsch Pis­sa­rew, Dmi­try Iva­no­vich Pi­sa­rev, Dmi­triy Iva­no­vich Pi­sa­rev, Di­mi­tri Iva­no­vich Pi­sa­rev, Dmi­trii Iva­no­vich Pi­sa­rev ou Dmi­trij Iva­no­vič Pi­sa­rev. Icône Haut
  3. En russe «Русское слово». Par­fois trans­crit «Rouss­koé slovo», «Russ­koïé slovo» ou «Russ­koe slovo». Icône Haut
  1. En russe «Рассвет». Icône Haut
  2. «Notre Science uni­ver­si­taire», p. 132 & 135. Icône Haut
  3. Un des som­mets les plus é de la chaîne du . Icône Haut

Pissarev, « Choix d’articles philosophiques et politiques »

éd. en Langues étrangères, Moscou

éd. en Langues étran­gères, Mos­cou

Il s’agit de «La du XIXe siècle» («Skho­las­tika XIX veka» 1) et autres ar­ticles de Dmi­tri Iva­no­vitch Pis­sa­rev 2. «Crime et Châ­ti­ment» de Dos­toïevski, avant d’être l’une des œuvres les plus pro­fondes de cri­mi­nelle, au­tour des­quelles la hu­maine vient tour­ner sans cesse, a été un contre «l’égoïsme ra­tion­nel», un mou­ve­ment dé­fendu en dans les an­nées 1860 par le jour­nal «Rouss­koïé slovo» 3La ») de Pis­sa­rev. Dos­toïevski a vu le dan­ger; il a mis tout en œuvre pour dé­tour­ner d’un tel égoïsme en dé­cri­vant les tour­ments de l’ qui le suivent. Les faits lui don­nèrent . Pis­sa­rev se noya lors d’une bai­gnade — je veux dire noya dé­li­bé­ré­ment — à vingt-sept ans, seul, mé­lan­co­lique, dé­tra­qué par le ver­tige d’une crois­sance in­tel­lec­tuelle trop ra­pide. Mais re­pre­nons dans l’ordre! Issu d’une noble rui­née, Pis­sa­rev fai­sait en­core ses études à l’Université de Saint-Pé­ters­bourg, quand il dé­buta comme pu­bli­ciste lit­té­raire, chargé de ré­di­ger la ru­brique des comptes ren­dus bi­blio­gra­phiques dans la re­vue «Rass­vet» 4L’Aube»), qui por­tait le sous-titre «Re­vue des , des et des lettres pour jeunes adultes». Cette col­la­bo­ra­tion l’entraîna de force hors des murs cal­feu­trés des am­phi­théâtres, «à l’air libre», comme il le dit lui-même 5, et «ce pas­sage forcé me don­nait un plai­sir cou­pable, que je ne pus dis­si­mu­ler ni à -même ni aux autres…». La ques­tion de l’ de la femme étant en ce -là à l’ordre du jour dans «Rass­vet», Pis­sa­rev en vint tout na­tu­rel­le­ment au pro­blème plus large de la de la per­sonne hu­maine. Riche d’idées, il s’attendait à créer des mi­racles dans le do­maine de la pen­sée : «Ayant jeté à bas dans mon es­prit toutes sortes de Kaz­beks 6 et de monts Blancs, je m’apparaissais à moi-même comme une es­pèce de Ti­tan, de Pro­mé­thée qui s’était em­paré du ». Il mit ses idées, dès 1861, dans des ar­ticles re­mar­quables par leur har­diesse et leur bouillon­ne­ment in­tel­lec­tuel, qu’il pu­blia cette fois dans «Rouss­koïé slovo». Ce jour­nal n’était plus la ver­tueuse «Re­vue pour jeunes filles adultes» où il avait fait ses pre­miers , mais était, au contraire, rem­pli d’agitation phi­lo­so­phique et . Pis­sa­rev en de­vint, en quelques jours, le prin­ci­pal col­la­bo­ra­teur et membre de la ré­dac­tion; et quand, un an plus tard, guetté par la cen­sure, ce jour­nal fut pro­vi­soi­re­ment sus­pendu, Pis­sa­rev jeta sur le pa­pier un ap­pel fié­vreux de au «ren­ver­se­ment de la dy­nas­tie des Ro­ma­nov et de la bu­reau­cra­tie pé­ters­bour­geoise» et au «chan­ge­ment de ré­gime po­li­tique»; le len­de­main, il était ar­rêté et in­car­céré.

  1. En russe «Схоластика XIX века». Par­fois trans­crit «Scho­las­tika XIX veka» ou «Sho­las­tika XIX veka». Icône Haut
  2. En russe Дмитрий Иванович Писарев. Par­fois trans­crit Dmi­trij Iwa­no­witsch Pis­sa­rew, Dmi­try Iva­no­vich Pi­sa­rev, Dmi­triy Iva­no­vich Pi­sa­rev, Di­mi­tri Iva­no­vich Pi­sa­rev, Dmi­trii Iva­no­vich Pi­sa­rev ou Dmi­trij Iva­no­vič Pi­sa­rev. Icône Haut
  3. En russe «Русское слово». Par­fois trans­crit «Rouss­koé slovo», «Russ­koïé slovo» ou «Russ­koe slovo». Icône Haut
  1. En russe «Рассвет». Icône Haut
  2. «Notre Science uni­ver­si­taire», p. 132 & 135. Icône Haut
  3. Un des som­mets les plus é de la chaîne du . Icône Haut

Pompignan, « Œuvres. Tome II »

XVIIIᵉ siècle

XVIIIe siècle

Il s’agit des «» et autres œuvres de Jean-Jacques Le Franc, mar­quis de Pom­pi­gnan, poète et ma­gis­trat , tra­duc­teur de l’, du , du , de l’ et de l’, traîné dans la boue par Vol­taire et par les (XVIIIe siècle). «Nous avons pris l’habitude de por­ter sur le XVIIIe siècle un som­maire et sans ap­pel», dit un his­to­rien 1. «Vol­taire, Di­de­rot, d’Alembert donnent à cette pé­riode in­tel­lec­tuelle sa si­gni­fi­ca­tion do­mi­nante. L’effort de ces puis­sants fut si violent; l’appui ta­cite… qu’ils ren­con­trèrent chez leurs contem­po­rains fut si bien concerté; la pro­tec­tion dont les cou­vrirent les po­ten­tats aida si bien leur pro­pa­gande… qu’à eux seuls les En­cy­clo­pé­distes pa­raissent ex­pri­mer les ten­dances mo­rales de [tout] leur siècle». Mais à côté de cette uni­for­mité dans les ten­dances se dis­tinguent des fi­gures di­ver­gentes, comme celle de Pom­pi­gnan : éclai­rées, mais fa­rou­che­ment chré­tiennes; pro­tec­trices des in­té­rêts po­pu­laires, mais ri­gou­reu­se­ment dé­vouées au Roi de ; des fi­gures moyennes qui, sans re­nier les nou­veaux ac­quis de l’esprit hu­main, de­meu­raient res­pec­tueuses en­vers les vieux sym­boles, et qui re­fu­saient de croire que, pour al­lu­mer le flam­beau de la , on de­vait éteindre ce­lui de la chré­tienté. Ces fi­gures moyennes, dit Pom­pi­gnan, par­lant donc de lui-même 2, «qui [ont peut-être réussi] mé­dio­cre­ment dans [leur] genre, n’ont pas du moins à se re­pro­cher d’avoir in­sulté les mœurs, ni la . Quoi qu’en disent les plai­sants du siècle, il vaut mieux en­core en­nuyer un peu son pro­chain, que de lui gâ­ter le cœur ou l’esprit.» Telle était la po­si­tion de Pom­pi­gnan lorsqu’arriva le 10 mars 1760, le jour de sa ré­cep­tion à l’ au fau­teuil de Mau­per­tuis. Porté à l’apogée de sa gloire, il crut un mo­ment au et eut l’audace d’ouvrir son dis­cours de ré­cep­tion par des at­taques im­per­son­nelles contre les des , qu’il ac­cusa de por­ter l’empreinte «d’une lit­té­ra­ture dé­pra­vée, d’une cor­rom­pue et d’une phi­lo­so­phie al­tière, qui sape éga­le­ment le trône et l’autel». At­ta­quer ainsi en pleine séance les livres des gens de lettres dont il de­ve­nait le col­lègue, était une er­reur ou à tout le moins une in­con­ve­nance, que Pom­pi­gnan paya au cen­tuple. Une pluie d’, de li­belles, de quo­li­bets, de fa­cé­ties et, mal­heu­reu­se­ment, d’accusations men­son­gères s’abattit sur lui de la part des En­cy­clo­pé­distes. «Il ne faut pas seule­ment le rendre ri­di­cule», écri­vait Vol­taire à d’Alembert dans une lettre 3, «il faut qu’il soit odieux. Met­tons-le hors d’état de nuire…» Le si­gnal était donné. Vol­taire, tou­jours adroit à ma­nier l’arme de la ma­lice, épuisa, en prose et en vers, tous les moyens de aux dé­pens de Pom­pi­gnan et de ses «Poé­sies sa­crées». Pas un jour ne se passa sans qu’un trait acéré ne vînt s’ajouter à ceux de la veille

  1. Émile Vaïsse-Ci­biel. Icône Haut
  2. «Dis­cours pré­li­mi­naire aux “Poé­sies sa­crées”» dans «Œuvres. Tome I». Icône Haut
  1. «Cor­res­pon­dance. Tome VI. 1760-1762», p. 622. Icône Haut

Pompignan, « Œuvres. Tome I »

XVIIIᵉ siècle

XVIIIe siècle

Il s’agit des «Poé­sies sa­crées» et autres œuvres de Jean-Jacques Le Franc, mar­quis de Pom­pi­gnan, poète et ma­gis­trat , tra­duc­teur de l’, du , du , de l’ et de l’, traîné dans la boue par Vol­taire et par les (XVIIIe siècle). «Nous avons pris l’habitude de por­ter sur le XVIIIe siècle un som­maire et sans ap­pel», dit un his­to­rien 1. «Vol­taire, Di­de­rot, d’Alembert donnent à cette pé­riode in­tel­lec­tuelle sa si­gni­fi­ca­tion do­mi­nante. L’effort de ces puis­sants fut si violent; l’appui ta­cite… qu’ils ren­con­trèrent chez leurs contem­po­rains fut si bien concerté; la pro­tec­tion dont les cou­vrirent les po­ten­tats aida si bien leur pro­pa­gande… qu’à eux seuls les En­cy­clo­pé­distes pa­raissent ex­pri­mer les ten­dances mo­rales de [tout] leur siècle». Mais à côté de cette uni­for­mité dans les ten­dances se dis­tinguent des fi­gures di­ver­gentes, comme celle de Pom­pi­gnan : éclai­rées, mais fa­rou­che­ment chré­tiennes; pro­tec­trices des in­té­rêts po­pu­laires, mais ri­gou­reu­se­ment dé­vouées au Roi de ; des fi­gures moyennes qui, sans re­nier les nou­veaux ac­quis de l’esprit hu­main, de­meu­raient res­pec­tueuses en­vers les vieux sym­boles, et qui re­fu­saient de croire que, pour al­lu­mer le flam­beau de la , on de­vait éteindre ce­lui de la chré­tienté. Ces fi­gures moyennes, dit Pom­pi­gnan, par­lant donc de lui-même 2, «qui [ont peut-être réussi] mé­dio­cre­ment dans [leur] genre, n’ont pas du moins à se re­pro­cher d’avoir in­sulté les mœurs, ni la . Quoi qu’en disent les plai­sants du siècle, il vaut mieux en­core en­nuyer un peu son pro­chain, que de lui gâ­ter le cœur ou l’esprit.» Telle était la po­si­tion de Pom­pi­gnan lorsqu’arriva le 10 mars 1760, le jour de sa ré­cep­tion à l’ au fau­teuil de Mau­per­tuis. Porté à l’apogée de sa gloire, il crut un mo­ment au et eut l’audace d’ouvrir son dis­cours de ré­cep­tion par des at­taques im­per­son­nelles contre les des , qu’il ac­cusa de por­ter l’empreinte «d’une lit­té­ra­ture dé­pra­vée, d’une cor­rom­pue et d’une phi­lo­so­phie al­tière, qui sape éga­le­ment le trône et l’autel». At­ta­quer ainsi en pleine séance les livres des gens de lettres dont il de­ve­nait le col­lègue, était une er­reur ou à tout le moins une in­con­ve­nance, que Pom­pi­gnan paya au cen­tuple. Une pluie d’, de li­belles, de quo­li­bets, de fa­cé­ties et, mal­heu­reu­se­ment, d’accusations men­son­gères s’abattit sur lui de la part des En­cy­clo­pé­distes. «Il ne faut pas seule­ment le rendre ri­di­cule», écri­vait Vol­taire à d’Alembert dans une lettre 3, «il faut qu’il soit odieux. Met­tons-le hors d’état de nuire…» Le si­gnal était donné. Vol­taire, tou­jours adroit à ma­nier l’arme de la ma­lice, épuisa, en prose et en vers, tous les moyens de aux dé­pens de Pom­pi­gnan et de ses «Poé­sies sa­crées». Pas un jour ne se passa sans qu’un trait acéré ne vînt s’ajouter à ceux de la veille

  1. Émile Vaïsse-Ci­biel. Icône Haut
  2. «Dis­cours pré­li­mi­naire aux “Poé­sies sa­crées”» dans «Œuvres. Tome I». Icône Haut
  1. «Cor­res­pon­dance. Tome VI. 1760-1762», p. 622. Icône Haut

Mizubayashi, « Petit Éloge de l’errance »

éd. Gallimard, coll. Folio 2€, Paris

éd. Gal­li­mard, coll. Fo­lio 2€, Pa­ris

Il s’agit du «Pe­tit Éloge de l’» de M. , un d’expression fran­çaise (XXIe siècle). À l’âge de dix-huit ans, ra­conte M. Mi­zu­baya­shi, les in­times de M. Ari­masa Mori pro­vo­quèrent chez lui «un bou­le­ver­se­ment, un séisme in­té­rieur d’une force in­éga­lée» 1 et l’èrent d’une fa­çon dé­ci­sive vers le et la qui en est in­dis­so­ciable. M. Mori avait été le pre­mier qui avait vu, dans cette et cette culture, une re­traite pro­vi­soire où chaque Ja­po­nais pou­vait pui­ser des forces nou­velles pour faire ad­ve­nir un jour un État meilleur; le pre­mier qui avait fait le vœu so­len­nel de re­faire sa , de re­com­men­cer de zéro, en s’appropriant en­tiè­re­ment cette fran­çaise qui n’était pas la sienne, mais qu’il vé­né­rait. Dans «Ba­bi­ron no na­gare no ho­tori nite» 2, sous-ti­tré en fran­çais «Sur les fleuves de Ba­by­lone», M. Mori avait écrit : «Je dois avan­cer dans l’effort d’appropriation hum­ble­ment, pe­tit à pe­tit, même si j’ai à peine le ni­veau d’un pe­tit éco­lier ou d’un ga­min d’école ma­ter­nelle. Que les pa­roles pro­duites dans et à tra­vers la langue fran­çaise fi­nissent par de­ve­nir équi­va­lentes à la chose, tel est pour l’objectif à at­teindre. C’est seule­ment à ce mo­ment-là que le fond des choses se ré­vé­lera sous un nou­veau jour, s’incarnera dans une vie; un nou­veau poin­dra. Si je réus­sis à éprou­ver, un tant soit peu, ce sen­ti­ment-là, c’est ga­gné! Pour le reste, je dois ap­prendre comme un en­fant». Ainsi donc, de­vant l’exigence de la langue fran­çaise, qui lui ap­pa­rais­sait comme un moyen d’atteindre «le fond des choses», M. Mori avait ac­cepté — acte in­ouï pour un in­tel­lec­tuel formé au et en­sei­gnant à la pres­ti­gieuse Uni­ver­sité de Tô­kyô — de tout ré­ap­prendre et de se re­con­naître dans la si­dé­rante d’«un pe­tit éco­lier». M. Mi­zu­baya­shi fut frappé comme par la foudre par ce texte. À peine avait-il lu le pas­sage dont j’ai ex­trait les lignes pré­cé­dentes, qu’il crut y en­tendre un ap­pel à naître à «une nou­velle vie» par l’apprentissage du fran­çais; à pen­ser au­tre­ment son rap­port à l’autre, au monde; à s’arracher à sa langue na­tale, aux codes du confor­misme, de la sou­mis­sion, du im­posé qu’elle vé­hi­cu­lait; à goû­ter au plai­sir de la  : «Le texte de Mori me de­man­dait, de­puis la hau­teur in­soup­çon­née d’un dis­cours phi­lo­so­phique et sur un ton aus­tère dé­fiant toute at­ti­tude vel­léi­taire, si j’étais prêt à me lan­cer dans une telle aven­ture…; à m’offrir le luxe ou le risque d’une deuxième nais­sance, d’une se­conde vie im­pure, hy­bride, sans plus longue, plus aléa­toire, plus ex­po­sée à des ébran­le­ments im­pré­vi­sibles, plus obs­ti­né­ment ques­tion­neuse que la pre­mière — [au­to­suf­fi­sante], peu­plée de cer­ti­tudes, ten­dan­ciel­le­ment re­pliée sur elle-même et, par cela même, par­fois in­fa­tuée d’elle-même. Ma ré­ponse fut, sans une se­conde d’hésitation, oui!»

  1. «Une Langue ve­nue d’ailleurs», p. 28. Icône Haut
  1. En ja­po­nais «バビロンの流れのほとりにて», in­édit en fran­çais. Icône Haut

Mizubayashi, « Croisements »

dans « Critique », vol. 42, nº 474, p. 1141-1146

dans «», vol. 42, nº 474, p. 1141-1146

Il s’agit de «Croi­se­ments» de M. , un d’expression fran­çaise (XXIe siècle). À l’âge de dix-huit ans, ra­conte M. Mi­zu­baya­shi, les in­times de M. Ari­masa Mori pro­vo­quèrent chez lui «un bou­le­ver­se­ment, un séisme in­té­rieur d’une force in­éga­lée» 1 et l’èrent d’une fa­çon dé­ci­sive vers le et la qui en est in­dis­so­ciable. M. Mori avait été le pre­mier qui avait vu, dans cette et cette culture, une re­traite pro­vi­soire où chaque Ja­po­nais pou­vait pui­ser des forces nou­velles pour faire ad­ve­nir un jour un État meilleur; le pre­mier qui avait fait le vœu so­len­nel de re­faire sa , de re­com­men­cer de zéro, en s’appropriant en­tiè­re­ment cette fran­çaise qui n’était pas la sienne, mais qu’il vé­né­rait. Dans «Ba­bi­ron no na­gare no ho­tori nite» 2, sous-ti­tré en fran­çais «Sur les fleuves de Ba­by­lone», M. Mori avait écrit : «Je dois avan­cer dans l’effort d’appropriation hum­ble­ment, pe­tit à pe­tit, même si j’ai à peine le ni­veau d’un pe­tit éco­lier ou d’un ga­min d’école ma­ter­nelle. Que les pa­roles pro­duites dans et à tra­vers la langue fran­çaise fi­nissent par de­ve­nir équi­va­lentes à la chose, tel est pour l’objectif à at­teindre. C’est seule­ment à ce mo­ment-là que le fond des choses se ré­vé­lera sous un nou­veau jour, s’incarnera dans une vie; un nou­veau poin­dra. Si je réus­sis à éprou­ver, un tant soit peu, ce sen­ti­ment-là, c’est ga­gné! Pour le reste, je dois ap­prendre comme un en­fant». Ainsi donc, de­vant l’exigence de la langue fran­çaise, qui lui ap­pa­rais­sait comme un moyen d’atteindre «le fond des choses», M. Mori avait ac­cepté — acte in­ouï pour un in­tel­lec­tuel formé au et en­sei­gnant à la pres­ti­gieuse Uni­ver­sité de Tô­kyô — de tout ré­ap­prendre et de se re­con­naître dans la si­dé­rante d’«un pe­tit éco­lier». M. Mi­zu­baya­shi fut frappé comme par la foudre par ce texte. À peine avait-il lu le pas­sage dont j’ai ex­trait les lignes pré­cé­dentes, qu’il crut y en­tendre un ap­pel à naître à «une nou­velle vie» par l’apprentissage du fran­çais; à pen­ser au­tre­ment son rap­port à l’autre, au monde; à s’arracher à sa langue na­tale, aux codes du confor­misme, de la sou­mis­sion, du im­posé qu’elle vé­hi­cu­lait; à goû­ter au plai­sir de la  : «Le texte de Mori me de­man­dait, de­puis la hau­teur in­soup­çon­née d’un dis­cours phi­lo­so­phique et sur un ton aus­tère dé­fiant toute at­ti­tude vel­léi­taire, si j’étais prêt à me lan­cer dans une telle aven­ture…; à m’offrir le luxe ou le risque d’une deuxième nais­sance, d’une se­conde vie im­pure, hy­bride, sans plus longue, plus aléa­toire, plus ex­po­sée à des ébran­le­ments im­pré­vi­sibles, plus obs­ti­né­ment ques­tion­neuse que la pre­mière — [au­to­suf­fi­sante], peu­plée de cer­ti­tudes, ten­dan­ciel­le­ment re­pliée sur elle-même et, par cela même, par­fois in­fa­tuée d’elle-même. Ma ré­ponse fut, sans une se­conde d’hésitation, oui!»

  1. «Une Langue ve­nue d’ailleurs», p. 28. Icône Haut
  1. En ja­po­nais «バビロンの流れのほとりにて», in­édit en fran­çais. Icône Haut

Mizubayashi, « Autour du bain : de l’intimité familiale à la sociabilité, [ou] Lettre à un ami français »

dans « Critique », vol. 39, nº 428-429, p. 5-15

dans «», vol. 39, nº 428-429, p. 5-15

Il s’agit d’«Au­tour du bain» de M. , un d’expression fran­çaise (XXIe siècle). À l’âge de dix-huit ans, ra­conte M. Mi­zu­baya­shi, les in­times de M. Ari­masa Mori pro­vo­quèrent chez lui «un bou­le­ver­se­ment, un séisme in­té­rieur d’une force in­éga­lée» 1 et l’èrent d’une fa­çon dé­ci­sive vers le et la qui en est in­dis­so­ciable. M. Mori avait été le pre­mier qui avait vu, dans cette et cette culture, une re­traite pro­vi­soire où chaque Ja­po­nais pou­vait pui­ser des forces nou­velles pour faire ad­ve­nir un jour un État meilleur; le pre­mier qui avait fait le vœu so­len­nel de re­faire sa , de re­com­men­cer de zéro, en s’appropriant en­tiè­re­ment cette fran­çaise qui n’était pas la sienne, mais qu’il vé­né­rait. Dans «Ba­bi­ron no na­gare no ho­tori nite» 2, sous-ti­tré en fran­çais «Sur les fleuves de Ba­by­lone», M. Mori avait écrit : «Je dois avan­cer dans l’effort d’appropriation hum­ble­ment, pe­tit à pe­tit, même si j’ai à peine le ni­veau d’un pe­tit éco­lier ou d’un ga­min d’école ma­ter­nelle. Que les pa­roles pro­duites dans et à tra­vers la langue fran­çaise fi­nissent par de­ve­nir équi­va­lentes à la chose, tel est pour l’objectif à at­teindre. C’est seule­ment à ce mo­ment-là que le fond des choses se ré­vé­lera sous un nou­veau jour, s’incarnera dans une vie; un nou­veau poin­dra. Si je réus­sis à éprou­ver, un tant soit peu, ce sen­ti­ment-là, c’est ga­gné! Pour le reste, je dois ap­prendre comme un en­fant». Ainsi donc, de­vant l’exigence de la langue fran­çaise, qui lui ap­pa­rais­sait comme un moyen d’atteindre «le fond des choses», M. Mori avait ac­cepté — acte in­ouï pour un in­tel­lec­tuel formé au et en­sei­gnant à la pres­ti­gieuse Uni­ver­sité de Tô­kyô — de tout ré­ap­prendre et de se re­con­naître dans la si­dé­rante d’«un pe­tit éco­lier». M. Mi­zu­baya­shi fut frappé comme par la foudre par ce texte. À peine avait-il lu le pas­sage dont j’ai ex­trait les lignes pré­cé­dentes, qu’il crut y en­tendre un ap­pel à naître à «une nou­velle vie» par l’apprentissage du fran­çais; à pen­ser au­tre­ment son rap­port à l’autre, au monde; à s’arracher à sa langue na­tale, aux codes du confor­misme, de la sou­mis­sion, du im­posé qu’elle vé­hi­cu­lait; à goû­ter au plai­sir de la  : «Le texte de Mori me de­man­dait, de­puis la hau­teur in­soup­çon­née d’un dis­cours phi­lo­so­phique et sur un ton aus­tère dé­fiant toute at­ti­tude vel­léi­taire, si j’étais prêt à me lan­cer dans une telle aven­ture…; à m’offrir le luxe ou le risque d’une deuxième nais­sance, d’une se­conde vie im­pure, hy­bride, sans plus longue, plus aléa­toire, plus ex­po­sée à des ébran­le­ments im­pré­vi­sibles, plus obs­ti­né­ment ques­tion­neuse que la pre­mière — [au­to­suf­fi­sante], peu­plée de cer­ti­tudes, ten­dan­ciel­le­ment re­pliée sur elle-même et, par cela même, par­fois in­fa­tuée d’elle-même. Ma ré­ponse fut, sans une se­conde d’hésitation, oui!»

  1. «Une Langue ve­nue d’ailleurs», p. 28. Icône Haut
  1. En ja­po­nais «バビロンの流れのほとりにて», in­édit en fran­çais. Icône Haut

Mizubayashi, « Une Langue venue d’ailleurs »

éd. Gallimard, coll. L’Un et l’Autre, Paris

éd. Gal­li­mard, coll. L’Un et l’Autre, Pa­ris

Il s’agit d’«Une ve­nue d’ailleurs» de M. , un d’expression fran­çaise (XXIe siècle). À l’âge de dix-huit ans, ra­conte M. Mi­zu­baya­shi, les in­times de M. Ari­masa Mori pro­vo­quèrent chez lui «un bou­le­ver­se­ment, un séisme in­té­rieur d’une force in­éga­lée» 1 et l’èrent d’une fa­çon dé­ci­sive vers le et la qui en est in­dis­so­ciable. M. Mori avait été le pre­mier qui avait vu, dans cette langue et cette culture, une re­traite pro­vi­soire où chaque Ja­po­nais pou­vait pui­ser des forces nou­velles pour faire ad­ve­nir un jour un État meilleur; le pre­mier qui avait fait le vœu so­len­nel de re­faire sa , de re­com­men­cer de zéro, en s’appropriant en­tiè­re­ment cette fran­çaise qui n’était pas la sienne, mais qu’il vé­né­rait. Dans «Ba­bi­ron no na­gare no ho­tori nite» 2, sous-ti­tré en fran­çais «Sur les fleuves de Ba­by­lone», M. Mori avait écrit : «Je dois avan­cer dans l’effort d’appropriation hum­ble­ment, pe­tit à pe­tit, même si j’ai à peine le ni­veau d’un pe­tit éco­lier ou d’un ga­min d’école ma­ter­nelle. Que les pa­roles pro­duites dans et à tra­vers la langue fran­çaise fi­nissent par de­ve­nir équi­va­lentes à la chose, tel est pour l’objectif à at­teindre. C’est seule­ment à ce mo­ment-là que le fond des choses se ré­vé­lera sous un nou­veau jour, s’incarnera dans une vie; un nou­veau poin­dra. Si je réus­sis à éprou­ver, un tant soit peu, ce sen­ti­ment-là, c’est ga­gné! Pour le reste, je dois ap­prendre comme un en­fant». Ainsi donc, de­vant l’exigence de la langue fran­çaise, qui lui ap­pa­rais­sait comme un moyen d’atteindre «le fond des choses», M. Mori avait ac­cepté — acte in­ouï pour un in­tel­lec­tuel formé au et en­sei­gnant à la pres­ti­gieuse Uni­ver­sité de Tô­kyô — de tout ré­ap­prendre et de se re­con­naître dans la si­dé­rante d’«un pe­tit éco­lier». M. Mi­zu­baya­shi fut frappé comme par la foudre par ce texte. À peine avait-il lu le pas­sage dont j’ai ex­trait les lignes pré­cé­dentes, qu’il crut y en­tendre un ap­pel à naître à «une nou­velle vie» par l’apprentissage du fran­çais; à pen­ser au­tre­ment son rap­port à l’autre, au monde; à s’arracher à sa langue na­tale, aux codes du confor­misme, de la sou­mis­sion, du im­posé qu’elle vé­hi­cu­lait; à goû­ter au plai­sir de la  : «Le texte de Mori me de­man­dait, de­puis la hau­teur in­soup­çon­née d’un dis­cours phi­lo­so­phique et sur un ton aus­tère dé­fiant toute at­ti­tude vel­léi­taire, si j’étais prêt à me lan­cer dans une telle aven­ture…; à m’offrir le luxe ou le risque d’une deuxième nais­sance, d’une se­conde vie im­pure, hy­bride, sans plus longue, plus aléa­toire, plus ex­po­sée à des ébran­le­ments im­pré­vi­sibles, plus obs­ti­né­ment ques­tion­neuse que la pre­mière — [au­to­suf­fi­sante], peu­plée de cer­ti­tudes, ten­dan­ciel­le­ment re­pliée sur elle-même et, par cela même, par­fois in­fa­tuée d’elle-même. Ma ré­ponse fut, sans une se­conde d’hésitation, oui!»

  1. «Une Langue ve­nue d’ailleurs», p. 28. Icône Haut
  1. En ja­po­nais «バビロンの流れのほとりにて», in­édit en fran­çais. Icône Haut

Mizubayashi, « Un Amour de “Mille-ans” : roman »

éd. Gallimard, Paris

éd. Gal­li­mard, Pa­ris

Il s’agit d’«Un de “Mille-ans”» de M. , un d’expression fran­çaise (XXIe siècle). À l’âge de dix-huit ans, ra­conte M. Mi­zu­baya­shi, les in­times de M. Ari­masa Mori pro­vo­quèrent chez lui «un bou­le­ver­se­ment, un séisme in­té­rieur d’une force in­éga­lée» 1 et l’èrent d’une fa­çon dé­ci­sive vers le et la qui en est in­dis­so­ciable. M. Mori avait été le pre­mier qui avait vu, dans cette et cette culture, une re­traite pro­vi­soire où chaque Ja­po­nais pou­vait pui­ser des forces nou­velles pour faire ad­ve­nir un jour un État meilleur; le pre­mier qui avait fait le vœu so­len­nel de re­faire sa , de re­com­men­cer de zéro, en s’appropriant en­tiè­re­ment cette fran­çaise qui n’était pas la sienne, mais qu’il vé­né­rait. Dans «Ba­bi­ron no na­gare no ho­tori nite» 2, sous-ti­tré en fran­çais «Sur les fleuves de Ba­by­lone», M. Mori avait écrit : «Je dois avan­cer dans l’effort d’appropriation hum­ble­ment, pe­tit à pe­tit, même si j’ai à peine le ni­veau d’un pe­tit éco­lier ou d’un ga­min d’école ma­ter­nelle. Que les pa­roles pro­duites dans et à tra­vers la langue fran­çaise fi­nissent par de­ve­nir équi­va­lentes à la chose, tel est pour l’objectif à at­teindre. C’est seule­ment à ce mo­ment-là que le fond des choses se ré­vé­lera sous un nou­veau jour, s’incarnera dans une vie; un nou­veau poin­dra. Si je réus­sis à éprou­ver, un tant soit peu, ce sen­ti­ment-là, c’est ga­gné! Pour le reste, je dois ap­prendre comme un en­fant». Ainsi donc, de­vant l’exigence de la langue fran­çaise, qui lui ap­pa­rais­sait comme un moyen d’atteindre «le fond des choses», M. Mori avait ac­cepté — acte in­ouï pour un in­tel­lec­tuel formé au et en­sei­gnant à la pres­ti­gieuse Uni­ver­sité de Tô­kyô — de tout ré­ap­prendre et de se re­con­naître dans la si­dé­rante d’«un pe­tit éco­lier». M. Mi­zu­baya­shi fut frappé comme par la foudre par ce texte. À peine avait-il lu le pas­sage dont j’ai ex­trait les lignes pré­cé­dentes, qu’il crut y en­tendre un ap­pel à naître à «une nou­velle vie» par l’apprentissage du fran­çais; à pen­ser au­tre­ment son rap­port à l’autre, au monde; à s’arracher à sa langue na­tale, aux codes du confor­misme, de la sou­mis­sion, du im­posé qu’elle vé­hi­cu­lait; à goû­ter au plai­sir de la  : «Le texte de Mori me de­man­dait, de­puis la hau­teur in­soup­çon­née d’un dis­cours phi­lo­so­phique et sur un ton aus­tère dé­fiant toute at­ti­tude vel­léi­taire, si j’étais prêt à me lan­cer dans une telle aven­ture…; à m’offrir le luxe ou le risque d’une deuxième nais­sance, d’une se­conde vie im­pure, hy­bride, sans plus longue, plus aléa­toire, plus ex­po­sée à des ébran­le­ments im­pré­vi­sibles, plus obs­ti­né­ment ques­tion­neuse que la pre­mière — [au­to­suf­fi­sante], peu­plée de cer­ti­tudes, ten­dan­ciel­le­ment re­pliée sur elle-même et, par cela même, par­fois in­fa­tuée d’elle-même. Ma ré­ponse fut, sans une se­conde d’hésitation, oui!»

  1. «Une Langue ve­nue d’ailleurs», p. 28. Icône Haut
  1. En ja­po­nais «バビロンの流れのほとりにて», in­édit en fran­çais. Icône Haut

Mizubayashi, « L’Île du bonheur entre le français et le japonais »

dans « L’Atelier du roman », nº 71, p. 186-196

dans «L’Atelier du », nº 71, p. 186-196

Il s’agit de «L’Île du entre le et le » de M. , un Ja­po­nais d’expression fran­çaise (XXIe siècle). À l’âge de dix-huit ans, ra­conte M. Mi­zu­baya­shi, les in­times de M. Ari­masa Mori pro­vo­quèrent chez lui «un bou­le­ver­se­ment, un séisme in­té­rieur d’une force in­éga­lée» 1 et l’èrent d’une fa­çon dé­ci­sive vers le fran­çais et la qui en est in­dis­so­ciable. M. Mori avait été le pre­mier qui avait vu, dans cette et cette culture, une re­traite pro­vi­soire où chaque Ja­po­nais pou­vait pui­ser des forces nou­velles pour faire ad­ve­nir un jour un État meilleur; le pre­mier qui avait fait le vœu so­len­nel de re­faire sa , de re­com­men­cer de zéro, en s’appropriant en­tiè­re­ment cette fran­çaise qui n’était pas la sienne, mais qu’il vé­né­rait. Dans «Ba­bi­ron no na­gare no ho­tori nite» 2, sous-ti­tré en fran­çais «Sur les fleuves de Ba­by­lone», M. Mori avait écrit : «Je dois avan­cer dans l’effort d’appropriation hum­ble­ment, pe­tit à pe­tit, même si j’ai à peine le ni­veau d’un pe­tit éco­lier ou d’un ga­min d’école ma­ter­nelle. Que les pa­roles pro­duites dans et à tra­vers la langue fran­çaise fi­nissent par de­ve­nir équi­va­lentes à la chose, tel est pour l’objectif à at­teindre. C’est seule­ment à ce mo­ment-là que le fond des choses se ré­vé­lera sous un nou­veau jour, s’incarnera dans une vie; un nou­veau poin­dra. Si je réus­sis à éprou­ver, un tant soit peu, ce sen­ti­ment-là, c’est ga­gné! Pour le reste, je dois ap­prendre comme un en­fant». Ainsi donc, de­vant l’exigence de la langue fran­çaise, qui lui ap­pa­rais­sait comme un moyen d’atteindre «le fond des choses», M. Mori avait ac­cepté — acte in­ouï pour un in­tel­lec­tuel formé au et en­sei­gnant à la pres­ti­gieuse Uni­ver­sité de Tô­kyô — de tout ré­ap­prendre et de se re­con­naître dans la si­dé­rante d’«un pe­tit éco­lier». M. Mi­zu­baya­shi fut frappé comme par la foudre par ce texte. À peine avait-il lu le pas­sage dont j’ai ex­trait les lignes pré­cé­dentes, qu’il crut y en­tendre un ap­pel à naître à «une nou­velle vie» par l’apprentissage du fran­çais; à pen­ser au­tre­ment son rap­port à l’autre, au monde; à s’arracher à sa langue na­tale, aux codes du confor­misme, de la sou­mis­sion, du im­posé qu’elle vé­hi­cu­lait; à goû­ter au plai­sir de la  : «Le texte de Mori me de­man­dait, de­puis la hau­teur in­soup­çon­née d’un dis­cours phi­lo­so­phique et sur un ton aus­tère dé­fiant toute at­ti­tude vel­léi­taire, si j’étais prêt à me lan­cer dans une telle aven­ture…; à m’offrir le luxe ou le risque d’une deuxième nais­sance, d’une se­conde vie im­pure, hy­bride, sans plus longue, plus aléa­toire, plus ex­po­sée à des ébran­le­ments im­pré­vi­sibles, plus obs­ti­né­ment ques­tion­neuse que la pre­mière — [au­to­suf­fi­sante], peu­plée de cer­ti­tudes, ten­dan­ciel­le­ment re­pliée sur elle-même et, par cela même, par­fois in­fa­tuée d’elle-même. Ma ré­ponse fut, sans une se­conde d’hésitation, oui!»

  1. «Une Langue ve­nue d’ailleurs», p. 28. Icône Haut
  1. En ja­po­nais «バビロンの流れのほとりにて», in­édit en fran­çais. Icône Haut

Mizubayashi, « Mélodie : chronique d’une passion »

éd. Gallimard, coll. L’Un et l’Autre, Paris

éd. Gal­li­mard, coll. L’Un et l’Autre, Pa­ris

Il s’agit de «Mé­lo­die : chro­nique d’une pas­sion» de M. , un d’expression fran­çaise (XXIe siècle). À l’âge de dix-huit ans, ra­conte M. Mi­zu­baya­shi, les in­times de M. Ari­masa Mori pro­vo­quèrent chez lui «un bou­le­ver­se­ment, un séisme in­té­rieur d’une force in­éga­lée» 1 et l’èrent d’une fa­çon dé­ci­sive vers le et la qui en est in­dis­so­ciable. M. Mori avait été le pre­mier qui avait vu, dans cette et cette culture, une re­traite pro­vi­soire où chaque Ja­po­nais pou­vait pui­ser des forces nou­velles pour faire ad­ve­nir un jour un État meilleur; le pre­mier qui avait fait le vœu so­len­nel de re­faire sa , de re­com­men­cer de zéro, en s’appropriant en­tiè­re­ment cette fran­çaise qui n’était pas la sienne, mais qu’il vé­né­rait. Dans «Ba­bi­ron no na­gare no ho­tori nite» 2, sous-ti­tré en fran­çais «Sur les fleuves de Ba­by­lone», M. Mori avait écrit : «Je dois avan­cer dans l’effort d’appropriation hum­ble­ment, pe­tit à pe­tit, même si j’ai à peine le ni­veau d’un pe­tit éco­lier ou d’un ga­min d’école ma­ter­nelle. Que les pa­roles pro­duites dans et à tra­vers la langue fran­çaise fi­nissent par de­ve­nir équi­va­lentes à la chose, tel est pour l’objectif à at­teindre. C’est seule­ment à ce mo­ment-là que le fond des choses se ré­vé­lera sous un nou­veau jour, s’incarnera dans une vie; un nou­veau poin­dra. Si je réus­sis à éprou­ver, un tant soit peu, ce sen­ti­ment-là, c’est ga­gné! Pour le reste, je dois ap­prendre comme un en­fant». Ainsi donc, de­vant l’exigence de la langue fran­çaise, qui lui ap­pa­rais­sait comme un moyen d’atteindre «le fond des choses», M. Mori avait ac­cepté — acte in­ouï pour un in­tel­lec­tuel formé au et en­sei­gnant à la pres­ti­gieuse Uni­ver­sité de Tô­kyô — de tout ré­ap­prendre et de se re­con­naître dans la si­dé­rante d’«un pe­tit éco­lier». M. Mi­zu­baya­shi fut frappé comme par la foudre par ce texte. À peine avait-il lu le pas­sage dont j’ai ex­trait les lignes pré­cé­dentes, qu’il crut y en­tendre un ap­pel à naître à «une nou­velle vie» par l’apprentissage du fran­çais; à pen­ser au­tre­ment son rap­port à l’autre, au monde; à s’arracher à sa langue na­tale, aux codes du confor­misme, de la sou­mis­sion, du im­posé qu’elle vé­hi­cu­lait; à goû­ter au plai­sir de la  : «Le texte de Mori me de­man­dait, de­puis la hau­teur in­soup­çon­née d’un dis­cours phi­lo­so­phique et sur un ton aus­tère dé­fiant toute at­ti­tude vel­léi­taire, si j’étais prêt à me lan­cer dans une telle aven­ture…; à m’offrir le luxe ou le risque d’une deuxième nais­sance, d’une se­conde vie im­pure, hy­bride, sans plus longue, plus aléa­toire, plus ex­po­sée à des ébran­le­ments im­pré­vi­sibles, plus obs­ti­né­ment ques­tion­neuse que la pre­mière — [au­to­suf­fi­sante], peu­plée de cer­ti­tudes, ten­dan­ciel­le­ment re­pliée sur elle-même et, par cela même, par­fois in­fa­tuée d’elle-même. Ma ré­ponse fut, sans une se­conde d’hésitation, oui!»

  1. «Une Langue ve­nue d’ailleurs», p. 28. Icône Haut
  1. En ja­po­nais «バビロンの流れのほとりにて», in­édit en fran­çais. Icône Haut