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« La Colonne trajane au musée de Saint-Germain »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de la co­lonne tra­jane. De tous les fo­rums ro­mains, ce­lui de l’Empereur Tra­jan était le plus beau, le plus ré­gu­lier, avec sa place en­tou­rée de ta­vernes à l’usage des mar­chands, ses de toute es­pèce, sa ba­si­lique, son , ses deux , l’une pour les col­lec­tions grecques et l’autre pour les la­tines, et tant d’autres somp­tuo­si­tés. L’ de ceux qui voyaient pour la pre­mière fois cet en­semble unique de construc­tions en était vi­ve­ment frap­pée, comme en té­moigne Am­mien Mar­cel­lin : «construc­tions gi­gan­tesques» («gi­gan­teos contex­tus»), dit-il, «qui dé­fient la » («nec re­latu ef­fa­biles»), «et que les mor­tels ne cher­che­ront plus à re­pro­duire» («nec rur­sus mor­ta­li­bus ad­pe­ten­dos»). Qu’est de­ve­nue cette si pro­di­gieuse ma­gni­fi­cence? Il n’en reste aujourd’hui que la co­lonne qui se trou­vait au mi­lieu et qui est bien conser­vée. L’idée de ce mo­nu­ment est gran­diose. D’un pié­des­tal sur le­quel on peut lire : «Le sé­nat et le (ont consa­cré cette co­lonne) à l’Empereur, fils du di­vin Nerva, Tra­jan… père de la pa­trie, pour mar­quer de quelle hau­teur était la mon­tagne et la place qu’on a dé­blayées pour y construire de si grands » s’élance une de ces co­lonnes creuses que l’on ap­pe­lait «co­lumna co­chleata», à cause de l’escalier tour­nant en co­li­ma­çon («co­chlea») creusé dans le marbre et condui­sant au som­met, là où re­po­sait la sta­tue de l’Empereur Tra­jan. Mais le mé­rite prin­ci­pal de ce mo­nu­ment est ailleurs : il est dans les qui, en forme de spi­rale, le dé­corent de haut en bas. Tous les ex­ploits que Tra­jan a faits pen­dant son règne, entre autres les vic­toires qu’il a rem­por­tées sur les Daces (en ), fi­gurent sur ces bas-re­liefs his­to­riques ser­pen­tant au­tour de la co­lonne comme les pages im­mor­telles d’un rou­leau ma­nus­crit («vo­lu­men»). La suite conti­nue qu’ils forment, monte vers l’Empereur vic­to­rieux et vient se pros­ter­ner à ses pieds. L’effet est ma­jes­tueux. L’ensemble est d’une puis­sance, d’une éner­gie in­con­tes­tables. «On y voit des , des , des en­seignes, des marches, des camps, des ma­chines, des ha­rangues aux , des sa­cri­fices, des , des vic­toires, des tro­phées… Tout est ex­primé avec , comme on peut l’observer dans l’intrépidité de ces daces qui se jettent, ar­mées de torches, sur les pri­son­niers ro­mains; et… le déses­poir de leurs ma­ris qui, pour ne pas tom­ber dans l’, brûlent leur ville et s’empoisonnent», dit très bien Fran­cesco Mi­li­zia

Milizia, « De l’art de voir dans les beaux-arts »

XVIIIᵉ siècle

XVIIIe siècle

Il s’agit de «De l’art de voir dans les beaux-» 1Dell’arte di ve­dere nelle belle arti») de , théo­ri­cien de l’, par­ti­san de la sim­pli­cité an­tique (XVIIIe siècle). Pour ce théo­ri­cien , la beauté de l’architecture naît dans le né­ces­saire et l’utile. La pro­fu­sion des or­ne­ments et le manque de dans leur choix, tout ce qui est exa­géré et qui n’est pas com­mandé par la né­ces­sité ou l’utilité, ne fait que des­ser­vir une construc­tion déjà conçue, «à peu près comme la pa­rure ne sert qu’à en­lai­dir et faire re­mar­quer une laide femme» 2. Le grand , c’est ce­lui qui n’exprime que les grandes et utiles par­ties d’un su­jet; prin­cipe clair, d’une im­por­tance ca­pi­tale, et fré­quem­ment né­gligé non seule­ment dans l’art de l’architecture, mais en­core dans ce­lui de la et la . De même que les mau­vais lé­gis­la­teurs com­pliquent l’échafaudage lé­gis­la­tif «pour que nous n’entendions ja­mais rien aux » 3; de même, les mau­vais com­pliquent «une grande cou­pole de cou­poles plus pe­tites, de cou­po­lettes, de cou­po­li­nettes» («una cu­pola con cu­po­lino, con cu­po­lette, con cu­po­lucce») pour que nous n’entendions ja­mais rien aux plans de leurs construc­tions ex­tra­va­gantes. Ordre, sim­pli­cité, , tels sont les cri­tères qui dé­ter­minent la beauté pour Mi­li­zia. Aussi blâme-t-il tout édi­fice qui a quelque chose de dé­rai­son­nable et de lour­de­ment raf­finé, «aussi éloi­gné de la lé­gè­reté go­thique que de la ma­jesté et de l’élégance grecque» («ugual­mente lon­tana dalla svel­tezza go­tica e dalla maes­tosa ele­ganza greca»); tan­dis qu’un édi­fice qui cor­res­pond exac­te­ment à son but et à sa vo­ca­tion, même lorsqu’il est dé­pourvu d’ornementations et des­tiné aux usages les plus vils et les plus re­pous­sants, peut être beau, comme l’est la «Cloaca maxima», le Grand égout bâti par Tar­quin l’Ancien. Dans ses trai­tés, Mi­li­zia pro­pose pour mo­dèles les de la , ex­horte à étu­dier ce qui reste de ceux de l’ et s’élève contre Mi­chel-Ange et les ar­chi­tectes de la qui, se­lon lui, n’ont étu­dié les An­ciens que de se­conde main et ont ainsi in­tro­duit des élé­ments de , que leurs écoles ont consa­crés sous forme de , de ca­price, de fo­lie : «Voilà pour­quoi [ces] écoles sont si de », dit Mi­li­zia; et pour­quoi, en al­lant du Grand égout à la cou­pole de Saint-, on va «du meilleur au plus mau­vais»

  1. Par­fois tra­duit «De l’art de voir en , , et ar­chi­tec­ture» ou «Ré­flexions sur la sculp­ture, la pein­ture, la gra­vure et l’architecture». Icône Haut
  2. «De l’art de voir dans les beaux-arts», p. 88. Icône Haut
  1. id. p. 26. Icône Haut

« La Légende de Bent el Khass »

éd. A. Jourdan, Alger

éd. A. Jour­dan, Al­ger

Il s’agit de Hind Bint al-Khuss 1 (ou Hind, fille de Khuss). La condi­tion des , chez les tri­bus arabes avant l’, n’était nul­le­ment ce qu’elle fut plus tard, quand la de ha­rem eut tout à fait abaissé les mœurs. L’ an­cienne eut quatre ; ces quatre sages furent des femmes. Hind est la plus illustre, bien qu’on ne sache pas pré­ci­ser le siècle où elle vi­vait, ni la contrée d’où elle était ori­gi­naire. Les traits re­la­tifs à cette sur­douée forment une es­pèce de lé­gende po­pu­laire où sont cé­lé­brées sa pers­pi­ca­cité, la fi­nesse de ses re­par­ties, la ra­pi­dité et la sû­reté de son à pro­pos des choses et des hommes. «Sa vue por­tait jusqu’aux li­mites de l’; et d’un seul , elle em­bras­sait une scène dans ses plus minces dé­tails», ex­plique Ju­dith Gau­tier 2. On rap­porte qu’un jour, Hind était as­sise au mi­lieu d’un groupe de jeunes ; elle jouait avec un pi­geon do­mes­tique per­ché sur son poing. Tout à coup, une troupe de pi­geons passa, très haut dans le . Elle leva les yeux et dit : «Oh, si seule­ment ces pi­geons et la moi­tié de leur nombre étaient ajou­tés à notre pi­geon, cela suf­fi­rait [à faire 100]» 3. On vit ces , cher­chant de l’, des­cendre près d’une mare; on les compta et on trouva qu’ils étaient 66. , 66 + 66/2 + 1 = 100, le nombre qu’elle avait dit, ni plus ni moins; un seul re­gard lui avait suffi pour conce­voir cette énigme. Son es­prit n’était pas moins prompt que son coup d’, et elle ré­pon­dait sans hé­si­ter à toutes les ques­tions qu’on pou­vait lui po­ser. Son père lui de­manda une fois : «Les nuits sont-elles plus nom­breuses que les jours? — Les jours sont plus nom­breux que les nuits. — Et pour­quoi? — Parce que les nuits de [pleine] lune sont sem­blables à des jours» 4. On cite en­core d’elle d’autres re­par­ties éton­nantes : «Quel est l’ le meilleur? — Le plus vi­sité, comme les [meilleures] col­lines d’un pays sont les plus fou­lées aux pieds. — Qui est-il? — C’est ce­lui à qui on de­mande et qui ne de­mande pas, qui donne l’ et ne la re­çoit pas, qui ré­ta­blit la et à qui on ne l’impose pas. — Quel est le pire des hommes? — L’imberbe ba­vard qui tient un pe­tit fouet et qui dit : “Re­te­nez- loin de l’esclave des Be­nou un tel, car je le tue­rai ou il me tuera”» 5. Il sem­ble­rait qu’elle n’ait pas voulu contrac­ter de et qu’elle ait cher­ché les plai­sirs en de­hors d’une union lé­gi­time. Sur­prise avec un es­clave noir, elle donna pour ex­cuse cette ré­ponse en prose ri­mée, qui est de­ve­nue un dic­ton : «[C’est à cause] de la proxi­mité de l’oreiller et de la lon­gueur de l’obscurité» («ḳurb al-wi­sâd wa-ṭûl al-siwâd» 6).

  1. En هند بنت الخس. Au­tre­fois trans­crit Bint el Khouss, Bent el Khoss ou Bent el Khass. Icône Haut
  2. «Fleurs d’Orient», p. 796. Icône Haut
  3. p. 32. Icône Haut
  1. p. 19. Icône Haut
  2. p. 30. Icône Haut
  3. En arabe «قرب الوساد وطول السواد». Icône Haut

« Le Livre de la récompense des bienfaits secrets »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du «Livre de la ré­com­pense des bien­faits se­crets» («Yin zhi wen» 1), pe­tit édi­fiant, que les at­tri­buent à une de leurs di­vi­ni­tés nom­mée Wen­chang­di­jun 2. On n’y trouve au­cune ré­fé­rence réelle à la doc­trine du ïsme, mais un cer­tain nombre d’injonctions mo­rales et de ayant pour but d’enseigner au lec­teur ce qu’il doit faire pour at­teindre à la et ce qu’il doit évi­ter pour ne pas de­ve­nir cri­mi­nel. Le nom de l’auteur est in­connu. Le offre les plus grandes ana­lo­gies avec ce­lui du «Livre des ré­com­penses et des peines». «Aide le mal­heu­reux [comme on] se­court le pois­son aban­donné sur un che­min sec. Dé­livre ce­lui qui est en pé­ril [comme on] dé­livre l’oiseau pris dans un la­cet à mailles ser­rées. Aie pi­tié de l’orphelin; sois com­pa­tis­sant pour la veuve; ho­nore les vieillards; aie pi­tié des ; ap­porte des ha­bits et de la nour­ri­ture pour ceux qui, sur les routes, ont faim et » 3. Voilà quelques-unes des de cet opus­cule, où l’ du se fait sou­vent sen­tir. Non seule­ment le nom du y est pro­noncé une fois («pros­terne-toi de­vant Boud­dha et prie dans les sa­crés» 4), mais on y re­con­naît plu­sieurs em­prunts évi­dents à la doc­trine du ré­for­ma­teur in­dien. C’est ainsi que l’auteur du «Livre» in­siste sur la , l’assistance au pro­chain, l’interdiction de faire su­bir au­cun mau­vais trai­te­ment à tout ce qui a dans la . Ce sont ces mêmes rai­sons qui l’ont porté à re­com­man­der non seule­ment d’aimer nos sem­blables, mais d’aimer les créa­tures ani­mées, les pois­sons, les in­sectes, les vers de — en un mot, tout ce qui res­pire, qui se meut ou qui croît : «En mar­chant, re­garde tou­jours s’il n’y a point, sous tes pas, des in­sectes et des four­mis, que par mé­garde tu pour­rais écra­ser» 5. Toutes ces créa­tures, mal­gré leur dif­fé­rence de gran­deur ou de forme, ont quelque chose en com­mun, qui est l’ de la vie, et que l’ ne peut contra­rier sans de­ve­nir mé­chant.

  1. En «陰騭文». Au­tre­fois trans­crit «In tchy̆ wen», «Yin-tchi-wen», «Yin chih wen» ou «Yin-chih-wăn». Icône Haut
  2. En chi­nois 文昌帝君. Au­tre­fois trans­crit Wen Tch­hang Ti Kiun, Wen-tchang Ti-kiun, Wen-chang Ti-kyüin, Wen Chang Ti Kun, Wen-chang-ti-chün, Wan-chang Te-cheun ou Wăn-chang Te-keun. Icône Haut
  3. p. 4. Icône Haut
  1. id. Icône Haut
  2. p. 5. Icône Haut

Rivarol, « De l’homme, de ses facultés intellectuelles et de ses idées premières et fondamentales »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de «De l’, de ses fa­cul­tés in­tel­lec­tuelles et de ses idées pre­mières et fon­da­men­tales» 1 d’Antoine Ri­va­roli, dit de Ri­va­rol, im­pro­vi­sa­teur , un des plus éblouis­sants de la fin du XVIIIe siècle. «Il y a parmi les gens du cer­taines per­sonnes qui doivent tout [leur] à leur ré­pu­ta­tion de gens d’esprit, et toute leur ré­pu­ta­tion à leur pa­resse». En pla­çant ces mots en tête du «Pe­tit Al­ma­nach de nos grands hommes», Ri­va­rol pen­sait-il à lui-même? Pro­ba­ble­ment. Il était pa­res­seux et il le sa­vait; mais c’était le de la conver­sa­tion en cette fin de siècle où la conver­sa­tion était le su­prême plai­sir et la su­prême gloire, et il était chaque jour tra­versé d’ ful­gu­rantes. On rap­porte qu’il no­tait ses «Pen­sées di­verses» sur de pe­tites feuilles vo­lantes, sur des mor­ceaux de pa­pier, qu’il ran­geait en­suite dans des sacs po­sés sur sa table de . Avec ces sacs, qu’il ren­ver­sait pé­rio­di­que­ment, tel un cher­cheur d’ comp­tant ses pé­pites, il vi­sait au pre­mier rang dans les lettres et il était bien ca­pable d’y at­teindre; mais il fré­quen­tait trop une dis­si­pée, mon­daine, une so­ciété qui ne vou­lait qu’être amu­sée; et en quelques heures de conver­sa­tion, il gas­pillait avec éclat la de dix . «On n’avait qu’à le tou­cher sur un point, qu’à lui don­ner la note, et le cla­vier ré­pon­dait à l’instant par toute une so­nate», ex­plique un  2. Ces com­modes, qu’il rem­por­tait chaque soir en cau­sant sur n’importe quel su­jet, et qui n’avaient be­soin, pour être re­nou­ve­lés, que des im­pro­vi­sa­tions de son es­prit lé­gè­re­ment oc­cupé, lui ont ravi ses plus belles an­nées. «Sans cesse ar­ra­ché à lui-même, il a sa­cri­fié tan­tôt à la fri­vo­lité, tan­tôt à la fi­dé­lité, tan­tôt à la né­ces­sité, les heures sa­crées de l’. Il a per­pé­tuel­le­ment man­qué les oc­ca­sions de de­ve­nir un grand homme», ex­plique un autre cri­tique 3.

  1. Éga­le­ment connu sous les titres de «Dis­cours pré­li­mi­naire du “Nou­veau Dic­tion­naire de la fran­çaise”» et de «Dis­cours sur l’homme in­tel­lec­tuel et mo­ral». Icône Haut
  2. Sainte-Beuve. Icône Haut
  1. Adolphe de Les­cure. Icône Haut

« Un Opuscule de Khwāja ‘Abdallāh Anṣārī concernant les bienséances des soufis »

dans « Bulletin de l’Institut français d’archéologie orientale », vol. 59, p. 203-239

dans «Bul­le­tin de l’Institut d’ orien­tale», vol. 59, p. 203-239

Il s’agit de l’«Abrégé concer­nant les bien­séances des et de ceux qui che­minent dans la voie de » («Mo­kh­ta­sar fî âdâb al-sû­fiyya wa-l-sâ­li­kîn li-ta­rîq al-Haqq» 1) de  2, mu­sul­man né en l’an 1006 apr. J.-C. dans la ville de Hé­rat, dans l’actuel ; sur­nommé pour cette Ha­rawî 3l’ de Hé­rat»). Peu connu en , n’ayant laissé chez les Arabes que le d’un po­lé­miste vi­ru­lent qui «pas­sait à l’injure dès qu’il consta­tait la moindre di­ver­gence de avec son in­ter­lo­cu­teur» (se­lon Ibn Ra­jab Bagh­dâdî 4), An­sârî n’a pas cessé pour­tant de rayon­ner sur les peuples de per­sane, pour les­quels il re­pré­sente l’un des plus an­ciens de leur prose. Pour le sur­tout qui sa et sa fi­nesse, en même que son tem­pé­ra­ment bouillant et al­tier, il de­meure un pro­tec­teur et un in­ter­ces­seur. Sa tombe à Hé­rat reste l’objet de , et les nap­pe­rons de soie rêche que l’on aime y of­frir aux hôtes , portent, en­ca­drés d’une mos­quée sty­li­sée, ses «Cris du cœur»; ce­lui-ci par exemple : «Mon Dieu! Tu es dans les sou­pirs des hommes gé­né­reux, et pré­sent dans les cœurs de ceux qui se sou­viennent. On dit que tu es près, et tu es bien plus que cela; on dit que tu es loin, et tu es plus proche que l’! Je ne sais si tu es dans l’âme, ou si l’âme même c’est toi. À vrai dire, tu n’es ni ceci ni cela. À l’âme il faut la , et cette vie c’est toi» 5. En­fant pro­dige qui ma­niait le et l’ avec une égale ai­sance, en une prose ryth­mée, An­sârî vi­vait dans un siècle ex­trê­me­ment agité, où s’écroulait l’Empire ghaz­né­vide et nais­sait l’Empire seld­jou­kide; où s’entrechoquaient les idées, sou­vent avec . Il s’engagea à fond dans les po­lé­miques de son temps, tout en étu­diant les re­li­gieuses. Une ren­contre bou­le­ver­sante avec Kha­ra­qânî, un vieux soufi illet­tré qui lira dans les lettres de son cœur, ré­veillera en lui une sans faille qui mo­ti­vera ses tra­vaux, qui four­nira la trame de son spi­ri­tuel et qui sou­tien­dra son dans toutes les me­nées par ses . De­venu aveugle sur la fin de sa vie, il dic­tera ses ou­vrages les plus im­po­sants à des dis­ciples jeunes et fer­vents au cours de pro­me­nades au mi­lieu de tu­lipes.

  1. En arabe «مختصرفى آداب الصوفية و السالكين الطريق الحق». Par­fois trans­crit «Mo­kh­taṣar fī ādāb aṣ-ṣū­fiyya wa-s-sā­likīn li-ṭarīq al-Ḥaqq». Icône Haut
  2. En per­san خواجه عبدالله انصاری. Au­tre­fois trans­crit Khawâdjâ ‘Abd Al­lâh An­sârî, Khwâja Ab­dal­lah An­çâri ou Kha­jeh Ab­dol­lah An­sari. Icône Haut
  3. En arabe هروي. Par­fois trans­crit He­ravī ou He­rawi. Icône Haut
  1. Dans «Khwādja ‘Ab­dullāh Anṣārī : mys­tique han­ba­lite», p. 130. Icône Haut
  2.  108. Icône Haut

« Khwādja ‘Abdullāh Anṣārī (1006-1089 apr. J.-C.) : mystique hanbalite »

éd. Imprimerie catholique, coll. Recherches publiées sous la direction de l’Institut de lettres orientales de Beyrouth, Beyrouth

éd. Im­pri­me­rie ca­tho­lique, coll. Re­cherches pu­bliées sous la di­rec­tion de l’Institut de lettres orien­tales de Bey­routh, Bey­routh

Il s’agit du Di­van (Re­cueil de poé­sies) et autres œuvres de  1, mu­sul­man né en l’an 1006 apr. J.-C. dans la ville de Hé­rat, dans l’actuel ; sur­nommé pour cette Ha­rawî 2l’ de Hé­rat»). Peu connu en , n’ayant laissé chez les Arabes que le d’un po­lé­miste vi­ru­lent qui «pas­sait à l’injure dès qu’il consta­tait la moindre di­ver­gence de avec son in­ter­lo­cu­teur» (se­lon Ibn Ra­jab Bagh­dâdî 3), An­sârî n’a pas cessé pour­tant de rayon­ner sur les peuples de per­sane, pour les­quels il re­pré­sente l’un des plus an­ciens de leur prose. Pour le sur­tout qui sa et sa fi­nesse, en même que son tem­pé­ra­ment bouillant et al­tier, il de­meure un pro­tec­teur et un in­ter­ces­seur. Sa tombe à Hé­rat reste l’objet de , et les nap­pe­rons de soie rêche que l’on aime y of­frir aux hôtes , portent, en­ca­drés d’une mos­quée sty­li­sée, ses «Cris du cœur»; ce­lui-ci par exemple : «Mon ! Tu es dans les sou­pirs des hommes gé­né­reux, et pré­sent dans les cœurs de ceux qui se sou­viennent. On dit que tu es près, et tu es bien plus que cela; on dit que tu es loin, et tu es plus proche que l’! Je ne sais si tu es dans l’âme, ou si l’âme même c’est toi. À vrai dire, tu n’es ni ceci ni cela. À l’âme il faut la , et cette vie c’est toi» 4. En­fant pro­dige qui ma­niait le et l’ avec une égale ai­sance, en une prose ryth­mée, An­sârî vi­vait dans un siècle ex­trê­me­ment agité, où s’écroulait l’Empire ghaz­né­vide et nais­sait l’Empire seld­jou­kide; où s’entrechoquaient les idées, sou­vent avec . Il s’engagea à fond dans les po­lé­miques de son temps, tout en étu­diant les re­li­gieuses. Une ren­contre bou­le­ver­sante avec Kha­ra­qânî, un vieux soufi illet­tré qui lira dans les lettres de son cœur, ré­veillera en lui une sans faille qui mo­ti­vera ses tra­vaux, qui four­nira la trame de son spi­ri­tuel et qui sou­tien­dra son dans toutes les me­nées par ses . De­venu aveugle sur la fin de sa vie, il dic­tera ses ou­vrages les plus im­po­sants à des dis­ciples jeunes et fer­vents au cours de pro­me­nades au mi­lieu de tu­lipes.

  1. En per­san خواجه عبدالله انصاری. Au­tre­fois trans­crit Khawâdjâ ‘Abd Al­lâh An­sârî, Khwâja Ab­dal­lah An­çâri ou Kha­jeh Ab­dol­lah An­sari. Icône Haut
  2. En arabe هروي. Par­fois trans­crit He­ravī ou He­rawi. Icône Haut
  1. Dans «Khwādja ‘Ab­dullāh Anṣārī : mys­tique han­ba­lite», p. 130. Icône Haut
  2.  108. Icône Haut

Ansârî, « Chemin de Dieu : trois traités spirituels »

éd. Sindbad, coll. La Bibliothèque de l’islam, Paris

éd. Sind­bad, coll. La Bi­blio­thèque de l’, Pa­ris

Il s’agit des «Cent ter­rains» («Sad may­dân» 1), des «Étapes des iti­né­rants vers » («Ma­nâ­zil al-sâ’irîn» 2) et autres œuvres de  3, mu­sul­man né en l’an 1006 apr. J.-C. dans la ville de Hé­rat, dans l’actuel ; sur­nommé pour cette Ha­rawî 4l’ de Hé­rat»). Peu connu en , n’ayant laissé chez les Arabes que le d’un po­lé­miste vi­ru­lent qui «pas­sait à l’injure dès qu’il consta­tait la moindre di­ver­gence de avec son in­ter­lo­cu­teur» (se­lon Ibn Ra­jab Bagh­dâdî 5), An­sârî n’a pas cessé pour­tant de rayon­ner sur les peuples de per­sane, pour les­quels il re­pré­sente l’un des plus an­ciens de leur prose. Pour le sur­tout qui sa et sa fi­nesse, en même que son tem­pé­ra­ment bouillant et al­tier, il de­meure un pro­tec­teur et un in­ter­ces­seur. Sa tombe à Hé­rat reste l’objet de , et les nap­pe­rons de soie rêche que l’on aime y of­frir aux hôtes , portent, en­ca­drés d’une mos­quée sty­li­sée, ses «Cris du cœur»; ce­lui-ci par exemple : «Mon Dieu! Tu es dans les sou­pirs des hommes gé­né­reux, et pré­sent dans les cœurs de ceux qui se sou­viennent. On dit que tu es près, et tu es bien plus que cela; on dit que tu es loin, et tu es plus proche que l’! Je ne sais si tu es dans l’âme, ou si l’âme même c’est toi. À vrai dire, tu n’es ni ceci ni cela. À l’âme il faut la , et cette vie c’est toi» 6. En­fant pro­dige qui ma­niait le et l’ avec une égale ai­sance, en une prose ryth­mée, An­sârî vi­vait dans un siècle ex­trê­me­ment agité, où s’écroulait l’Empire ghaz­né­vide et nais­sait l’Empire seld­jou­kide; où s’entrechoquaient les idées, sou­vent avec . Il s’engagea à fond dans les po­lé­miques de son temps, tout en étu­diant les re­li­gieuses. Une ren­contre bou­le­ver­sante avec Kha­ra­qânî, un vieux soufi illet­tré qui lira dans les lettres de son cœur, ré­veillera en lui une sans faille qui mo­ti­vera ses tra­vaux, qui four­nira la trame de son spi­ri­tuel et qui sou­tien­dra son dans toutes les me­nées par ses . De­venu aveugle sur la fin de sa vie, il dic­tera ses ou­vrages les plus im­po­sants à des dis­ciples jeunes et fer­vents au cours de pro­me­nades au mi­lieu de tu­lipes.

  1. En per­san «صد میدان». Par­fois trans­crit «Ṣad maidān». Icône Haut
  2. En arabe «منازل السائرين». Par­fois trans­crit «Ma­nâ­ze­los­sâé­rin» ou «Ma­nâ­zel ussâ’erîn». Icône Haut
  3. En per­san خواجه عبدالله انصاری. Au­tre­fois trans­crit Khawâdjâ ‘Abd Al­lâh An­sârî, Khwâja Ab­dal­lah An­çâri ou Kha­jeh Ab­dol­lah An­sari. Icône Haut
  1. En arabe هروي. Par­fois trans­crit He­ravī ou He­rawi. Icône Haut
  2. Dans «Khwādja ‘Ab­dullāh Anṣārī : mys­tique han­ba­lite», p. 130. Icône Haut
  3.  108. Icône Haut

Ansârî, « Cris du cœur, “Munâjât” »

éd. du Cerf, coll. Patrimoines-Islam, Paris

éd. du Cerf, coll. Pa­tri­moines-, Pa­ris

Il s’agit des «Cris du cœur» («Mo­nâ­jât» 1, lit­té­ra­le­ment «Orai­sons im­pro­vi­sées») de  2, mu­sul­man né en l’an 1006 apr. J.-C. dans la ville de Hé­rat, dans l’actuel ; sur­nommé pour cette Ha­rawî 3l’ de Hé­rat»). Peu connu en , n’ayant laissé chez les Arabes que le d’un po­lé­miste vi­ru­lent qui «pas­sait à l’injure dès qu’il consta­tait la moindre di­ver­gence de avec son in­ter­lo­cu­teur» (se­lon Ibn Ra­jab Bagh­dâdî 4), An­sârî n’a pas cessé pour­tant de rayon­ner sur les peuples de per­sane, pour les­quels il re­pré­sente l’un des plus an­ciens de leur prose. Pour le sur­tout qui sa et sa fi­nesse, en même que son tem­pé­ra­ment bouillant et al­tier, il de­meure un pro­tec­teur et un in­ter­ces­seur. Sa tombe à Hé­rat reste l’objet de , et les nap­pe­rons de soie rêche que l’on aime y of­frir aux hôtes , portent, en­ca­drés d’une mos­quée sty­li­sée, ses «Cris du cœur»; ce­lui-ci par exemple : «Mon ! Tu es dans les sou­pirs des hommes gé­né­reux, et pré­sent dans les cœurs de ceux qui se sou­viennent. On dit que tu es près, et tu es bien plus que cela; on dit que tu es loin, et tu es plus proche que l’! Je ne sais si tu es dans l’âme, ou si l’âme même c’est toi. À vrai dire, tu n’es ni ceci ni cela. À l’âme il faut la , et cette vie c’est toi» 5. En­fant pro­dige qui ma­niait le et l’ avec une égale ai­sance, en une prose ryth­mée, An­sârî vi­vait dans un siècle ex­trê­me­ment agité, où s’écroulait l’Empire ghaz­né­vide et nais­sait l’Empire seld­jou­kide; où s’entrechoquaient les idées, sou­vent avec . Il s’engagea à fond dans les po­lé­miques de son temps, tout en étu­diant les re­li­gieuses. Une ren­contre bou­le­ver­sante avec Kha­ra­qânî, un vieux soufi illet­tré qui lira dans les lettres de son cœur, ré­veillera en lui une sans faille qui mo­ti­vera ses tra­vaux, qui four­nira la trame de son spi­ri­tuel et qui sou­tien­dra son dans toutes les me­nées par ses . De­venu aveugle sur la fin de sa vie, il dic­tera ses ou­vrages les plus im­po­sants à des dis­ciples jeunes et fer­vents au cours de pro­me­nades au mi­lieu de tu­lipes.

  1. En per­san «مناجات». Au­tre­fois trans­crit «Mo­nâd­jât», «Munād­jāt» ou «Mu­nâ­jât». Icône Haut
  2. En per­san خواجه عبدالله انصاری. Au­tre­fois trans­crit Khawâdjâ ‘Abd Al­lâh An­sârî, Khwâja Ab­dal­lah An­çâri ou Kha­jeh Ab­dol­lah An­sari. Icône Haut
  3. En arabe هروي. Par­fois trans­crit He­ravī ou He­rawi. Icône Haut
  1. Dans «Khwādja ‘Ab­dullāh Anṣārī : mys­tique han­ba­lite», p. 130. Icône Haut
  2.  108. Icône Haut

le père de Beaurecueil, « Un Chrétien en Afghanistan. Nous avons partagé le pain et le sel • Prêtre des non-chrétiens »

éd. du Cerf, coll. Foi vivante, Paris

éd. du Cerf, coll. vi­vante, Pa­ris

Il s’agit d’«Un Chré­tien en » du père , re­li­gieux , grand connais­seur de l’Afghanistan. En en­trant dans l’Ordre de saint Do­mi­nique en 1935 et en en­ten­dant pour la pre­mière fois le père Chenu lui par­ler de l’, où il par­tit en 1946, com­ment le père de Beau­re­cueil au­rait-il pu sup­po­ser que sa pa­trie spi­ri­tuelle, sa pro­mise se­rait beau­coup plus loin, dans les de l’ Cen­trale? l’y condui­sit pas à pas et presque sans qu’il s’en aper­çût. La «ren­contre» for­tuite d’un du XIe siècle apr. J.-C., An­sârî, fut dé­ci­sive. Le père de Beau­re­cueil n’y vit au dé­but qu’un bon su­jet d’étude à pour­suivre au couvent du Caire. Il en­tre­prit d’éditer ri­gou­reu­se­ment, à par­tir de tous les exis­tants, les textes ori­gi­naux d’Ansârî, en et en , ce mys­tique ayant écrit dans les deux langues. Il en ap­prit même les plus beaux pas­sages par cœur pour nour­rir ses ; ce­lui-ci par exemple : «Com­ment au­rais-je su que la est mère de la , et que sous une dé­cep­tion se cachent mille ?» 1, qu’il rap­pro­chait du psaume bi­blique : «Ceux qui sèment dans les larmes, mois­sonnent avec des cris de joie» 2. Ses tra­vaux ma­gis­traux lui va­lurent d’être in­vité à Ka­boul pour un sé­mi­naire sur An­sârî, en 1962. On lui sug­géra de res­ter, ce qu’il fit une bonne ving­taine d’années. La ville de Ka­boul, ren­dez-vous de tant d’ethnies, in­vi­tées à se re­con­naître, à vivre en­semble, avec évi­dem­ment tous les heurts pos­sibles, le fas­cina : «Ka­boul, ma fian­cée, mon épouse, dont je porte la bague, don­née il y a bien long­temps par un pe­tit bon­homme épi­lep­tique que j’avais fait soi­gner!… Quel d’ entre nous! Avec bien­tôt vingt ans de fi­dé­lité», écrit-il dans un hymne consa­cré à cette ville

  1. «Cris du cœur, “Mu­nâ­jât”», nº 28. Icône Haut
  1. «Livre des psaumes», CXXVI, 5. Icône Haut

« Vie de Jacques, comte de Vintimille, conseiller au Parlement de Bourgogne, littérateur et savant du XVIᵉ siècle »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de Jacques, comte de Vin­ti­mille, qui ne fut point comte, mais sa­vant et hel­lé­niste, et qu’on fe­rait mieux d’appeler du nom dont il si­gnait lui-même ses  : Jacques des Comtes de Vin­ti­mille 1 (XVIe-XVIIe siècle). Il na­quit dans l’île de Rhodes, en . Son père, Alexandre des Comtes de Vin­ti­mille, , s’étant fixé dans cette île, avait épousé une très noble et riche dame, des­cen­dante du des Pa­léo­logues, der­niers de , de la­quelle il avait eu plu­sieurs . Il croyait avoir ainsi éta­bli et as­suré son . «Mais lui mon­tra bien quelque après — comme il fait à tous — qu’il ne faut point prendre pied ès choses tem­po­relles, ni se fon­der ès biens [ter­restres] et fa­veurs de ce », com­mente Jacques 2. Car, en l’an 1522, les Turcs com­men­cèrent une fu­rieuse contre la chré­tienté, sous la conduite du sul­tan So­li­man; de sorte que l’île de Rhodes fut at­ta­quée par les Turcs; les biens et pillés; Alexandre en­cer­clé et griè­ve­ment blessé. Un che­va­lier chré­tien, George de Vau­zelles, , par­vint à le dé­ga­ger de la mê­lée, mais trop tard. Alexandre lui re­mit son épée et mou­rut dans ses bras, en mur­mu­rant : «Prends mon épée, je t’en conjure, je ne veux pas qu’un ou qu’un autre que toi la pos­sède» 3. Après la chute de Rhodes, la veuve du­dit Alexandre sor­tit dé­nuée de tout bien et fut contrainte de prendre la sans trou­ver de lieu où s’arrêter; et quand, mi­sé­rable, elle ne vou­lut plus ou ne put plus pour­voir à la nour­ri­ture de Jacques, son der­nier-né, le che­va­lier de Vau­zelles, par un mou­ve­ment de toute re­li­gieuse, dé­cida de prendre soin de l’enfant. Il l’emmena avec lui en et l’éleva comme son propre fils, en lui don­nant une conforme à sa haute nais­sance dans les écoles de Lyon, de Pa­ris et de Tou­louse. L’enfant pro­fita si heu­reu­se­ment, qu’il de­vint une des fortes têtes de son temps. Il tra­dui­sit de en fran­çais Xé­no­phon, Hé­ro­dien et Ly­sias. Son mé­rite re­connu lui ou­vrit l’entrée à la Cour de Fran­çois Ier et celle de son suc­ces­seur Henri II. «Voilà comme Dieu nous donne la et nous sauve des dan­gers, comme il lui plaît; et contre toute es­pé­rance nous mène et conduit en lieux où l’on n’a ja­mais pensé», com­mente Jacques

  1. On ren­contre aussi la gra­phie Vin­te­mille. Icône Haut
  2. «Dis­cours de l’estoc et des Comtes de Vin­ti­mille», p. 29. Icône Haut
  1. En «Sume en­sem, pre­cor, ipse meum : ne Turca, nec ul­lus quam tu ha­beat». Icône Haut

Nezâmî, « Layla et Majnûn »

éd. Fayard, Paris

éd. Fayard, Pa­ris

Il s’agit d’une ver­sion per­sane du « et Laylâ» 1, lé­gende de l’ im­pos­sible et par­fait, ou par­fait parce qu’impossible, et qui ne s’accomplit que dans la . Ré­pan­due en par les , cette lé­gende y conserve une cé­lé­brité égale à celle dont jouissent chez nous les amours de Ro­méo et Ju­liette, avec les­quelles elle pré­sente plus d’un trait de res­sem­blance. «Il n’est pas si in­dif­fé­rent, pour­tant, de pen­ser que l’amour, bien avant de trou­ver le che­min de notre , avait chanté si loin de nous, là-bas, sous le de l’, en son dé­sert, avec ses mots», ex­plique M. . Ma­j­nûn et Laylâ vi­vaient un peu après Ma­ho­met. La no­made des Arabes de ce -là, si propre à ali­men­ter l’amour, ainsi que la proxi­mité des camps, ag­glu­ti­nés dans les lieux de halte et au­tour des puits, de­vaient don­ner na­tu­rel­le­ment aux jeunes hommes et aux jeunes de tri­bus dif­fé­rentes l’occasion de se voir et faire naître les les plus vives. Mais, en même temps, la né­ces­sité de chan­ger fré­quem­ment de place, pour al­ler cher­cher au loin d’abondants pâ­tu­rages, de­vait contra­rier non moins sou­vent les amours nais­santes : «Déjà deux jeunes cœurs lan­guis­saient l’un pour l’autre; déjà leurs sou­pirs, aussi brû­lants que l’air en­flammé du dé­sert, al­laient se confondre, lorsqu’un chef donne l’ordre de le­ver les tentes; la jeune fille, ti­mide, s’éloigne len­te­ment en dé­vo­rant ses larmes, et son amant, resté seul en proie à sa , vient gé­mir sur les traces de l’habitation de sa bien-ai­mée; ou c’est l’ des qui s’oppose à leur al­liance, en les li­vrant au plus sombre déses­poir» 2. Tel fut le sort qu’éprouvèrent en Ara­bie Ma­j­nûn et Laylâ, mais aussi Ja­mîl et Bu­thayna, Ku­thayyir et ‘Azza, etc.

  1. Par­fois tra­duit «Mec­nun et Leylâ», «Me­gnoun et Leï­leh», «Ma­gnoun et Leïla», «Med­j­noun et Leïlé», «Med­jnūn et Leylā», «Mad­j­noûn et Leylî», «Mad­j­noune et Leily», «Mad­sch­nun et Leila», «Med­sch­nun et Leila», «Med­sch­noun et Leila», «Ma­j­noon et Leili», «Med­gnoun et Lei­leh», «Me­j­noûn et Laïla», «Mad­j­non et Lalé», «Ma­j­noune et Leyla», «Maǧnūn et Laylā», «Ma­j­noun et Laili», «Mu­j­noon et Laili» ou «May­nun et Layla». Icône Haut
  1. , «Pré­face au “Med­j­noun et Leïlâ” de Djâmî». Icône Haut

« Le Roman des sept sages de Rome »

éd. Honoré Champion, coll. Champion Classiques-Moyen Âge, Paris

éd. Ho­noré Cham­pion, coll. Cham­pion Clas­siques-, Pa­ris

Il s’agit des ver­sions fran­çaises K et C des «Pa­ra­boles de Sen­da­bar sur les ruses des » («Mi­shle Sen­da­bar» 1), ou mieux «Pa­ra­boles de Sin­de­bad», d’origine in­dienne, dont il existe des imi­ta­tions dans la plu­part des langues orien­tales, et qui, sous le titre de «L’ des sept de » («His­to­ria sep­tem sa­pien­tum Romæ»), ont ob­tenu un très vif en oc­ci­den­tale, où les trou­vères en ont fait «Le des sept sages». Le ren­sei­gne­ment le plus an­cien et le plus utile que nous ayons sur ces contes, nous est donné par l’historien Mas­soudi (Xe siècle apr. J.-C.). Dans un cha­pitre in­ti­tulé «Gé­né­ra­li­tés sur l’histoire de l’Inde, ses , et l’origine de ses royaumes», cet his­to­rien at­tri­bue le «Livre des sept vi­zirs, du maître, du jeune et de la femme du roi» à un in­dien, contem­po­rain du roi Harṣa Vard­hana (VIIe siècle apr. J.-C.), et qu’il nomme Sin­de­bad 2. Ainsi donc, c’est en Inde que l’ hu­maine, fé­conde et exu­bé­rante comme la val­lée du Gange, a en­fanté ces contes; c’est de l’Inde qu’ils ont pris leur en­vol en se ré­pan­dant aux ex­tré­mi­tés du pour nous amu­ser et ins­truire. Et si nous fai­sons l’effort de re­mon­ter de siècle en siècle, de en langue — du fran­çais au , du la­tin à l’, de l’hébreu à l’, de l’arabe au pehlvi, du pehlvi au — nous ar­ri­vons à Sen­da­bar ou Sen­da­bad ou Sin­de­bad ou Sind­bad, qu’il ne faut pas confondre du reste avec le ma­rin du même nom dans les «Mille et une Nuits». Tous ces pa­raissent cor­rom­pus. En tout cas, en l’absence du texte ori­gi­nal sans­crit, je m’en ré­fère à la ver­sion hé­braïque. En voici l’intrigue : Une reine de­vient amou­reuse de son beau-fils, qui re­jette les vaines avances de cette femme. Elle en est ir­ri­tée et l’accuse d’avoir voulu la sé­duire, un peu comme Phèdre a ac­cusé Hip­po­lyte, ou comme la femme de Pu­ti­phar a ac­cusé Jo­seph. Le roi condamne son fils; mais, du­rant une se­maine, le de­meure sus­pendu. Chaque jour, l’un des sept sages voués à l’ du jeune prince fait au mo­narque un ré­cit qui a pour but de lui ins­pi­rer quelque dé­fiance à l’égard des femmes; et la reine y ré­pond, chaque jour, par un ré­cit qui doit pro­duire l’effet contraire. En­fin, le prince dé­montre son in­no­cence, et la reine est condam­née; mais le jeune homme de­mande et ob­tient la grâce de la cou­pable.

  1. En hé­breu «משלי סנדבאר». Au­tre­fois trans­crit «Mi­schle San­da­bar» ou «Mi­shle Sen­de­bar». Icône Haut
  1. En arabe سندباد. Icône Haut