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Graffigny, « Correspondance. Tome I. Lettres 1-144 (1716-17 juin 1739) »

éd. Voltaire Foundation-Taylor Institution, Oxford

éd. Vol­taire Foun­da­tion-Tay­lor Ins­ti­tu­tion, Ox­ford

Il s’agit de la «Cor­res­pon­dance» de  1, femme de lettres fran­çaise (XVIIIe siècle), dont le bel es­prit et l’élégance du firent dirent à un  2 «qu’elle fai­sait in­fi­dé­lité à son sexe, en usur­pant les ta­lents du nôtre». Née Fran­çoise d’Happoncourt, elle fut ma­riée — ou pour mieux dire — sa­cri­fiée à Fran­çois Hu­guet de Graf­fi­gny, em­porté, ja­loux et ex­trê­me­ment violent. Dès les pre­mières an­nées de conju­gale, elle se vit ex­po­sée aux mé­pris et aux in­sultes; des , son mari en vint aux coups, et la chose fit tant d’éclat qu’étant par­ve­nue à la po­lice, il y eut ordre d’emprisonner cet homme bru­tal qui, si­tôt re­lâ­ché, fit suivre ses pre­miers ex­cès par quan­tité d’autres. Il lui ar­riva plu­sieurs fois de ter­ras­ser son épouse à coups de pied et de poing, et après une fausse couche qu’elle eut, de lui mettre l’épée nue sur l’estomac. La pauvre femme per­dit tous ses en bas âge et eut beau­coup à souf­frir; la lettre sui­vante le montre as­sez : «Mon cher père», y dit Graf­fi­gny 3, «je suis obli­gée dans l’extrémité où je me trouve de vous sup­plier de ne me point aban­don­ner et de m’envoyer au plus vite cher­cher par M. de Ra­ré­court, car je suis en grand dan­ger et suis toute bri­sée de coups. Je me jette à votre et vous prie que ce soit bien vite». Après avoir pen­dant de longues an­nées donné des preuves d’une pa­tience hé­roïque, elle par­vint à ob­te­nir une sé­pa­ra­tion ju­ri­dique. Li­bé­rée des hor­ribles chaînes qu’elle avait trop long­temps por­tées, elle vint à Pa­ris. Sa vie n’avait été qu’un tissu de mal­heurs et de désa­gré­ments, et ce fut dans ces mal­heurs qu’elle puisa le sen­ti­ment d’une im­mense tris­tesse, d’une de tous les ins­tants qui ca­rac­té­risa son «Lettres d’une Pé­ru­vienne» : «Il ne me reste», y dit-elle 4, «que la triste de [vous] peindre mes dou­leurs… Que j’ai de à [vous les] dire, à leur don­ner toutes les sortes d’existences qu’elles peuvent avoir! Je vou­drais les tra­cer sur le plus dur mé­tal, sur les murs de ma chambre, sur mes ha­bits, sur tout ce qui m’environne, et les ex­pri­mer dans toutes les langues». Mais ce ro­man et un ou deux autres qu’elle écri­vit n’égalèrent ja­mais tout à fait ce­lui de sa vie; et plus en­core que dans les «Lettres d’une Pé­ru­vienne», les lec­teurs trou­ve­ront de l’intérêt dans les mil­liers de lettres qui consti­tuent sa vé­ri­table «Cor­res­pon­dance».

  1. On ren­contre aussi les gra­phies Gra­fi­gny, Gra­fi­gni et Graf­fi­gni. Icône Haut
  2. Étienne-Guillaume Co­lombe. Icône Haut
  1. «Cor­res­pon­dance. Tome I», p. 1. Icône Haut
  2. «Lettres d’une Pé­ru­vienne», p. 155. Icône Haut

Farrokhzad, « La Conquête du jardin : poèmes (1951-1965) »

éd. Lettres persanes, coll. Nouvelle Poésie persane, Paris

éd. Lettres per­sanes, coll. per­sane, Pa­ris

Il s’agit des poèmes de Mme  1, «l’enfante ter­rible» de la , une des écri­vaines les plus dis­cu­tées de l’, morte dans un ac­ci­dent tra­gique à trente-deux ans (XXe siècle). Elle consa­cra tout son être à la poé­sie — l’on peut même dire qu’elle se sa­cri­fia pour elle et pour l’idée qu’elle s’en fai­sait — en ex­pri­mant sans au­cune re­te­nue ses émois fé­mi­nins dans une ira­nienne qui re­fu­sait aux de culti­ver leurs ta­lents et leurs goûts. Elle es­ti­mait qu’un poème ne mé­ri­tait ce nom que lorsqu’on y je­tait la flamme de son cœur et les vi­bra­tions de son . La de Fo­rough laissa ra­re­ment les lec­teurs im­par­tiaux : elle sus­cita une forte at­ti­rance ou une vive aver­sion; une hos­ti­lité exa­gé­rée ou un éloge exalté. Alors que les uns la consi­dé­raient comme une femme dé­pra­vée, dan­ge­reuse dans ses pa­roles et dans la pra­tique de son art; les autres, au contraire, la voyaient en hé­roïne cultu­relle, en re­belle qui, ayant fait l’ de la ruine des conven­tions, était à la de pro­grès éman­ci­pa­teur. «Je vou­lais être “une femme” et “un être hu­main”. Je vou­lais dire que j’avais le de res­pi­rer, de crier… Les autres vou­laient étouf­fer mes cris sur mes lèvres et mon souffle dans ma poi­trine», dit-elle 2. Elle sa­vait qu’en pre­nant une at­ti­tude de défi, elle se fe­rait beau­coup d’, qu’elle s’attirerait des en­nuis et des rup­tures; mais elle croyait qu’il fal­lait en­fin bri­ser les bar­rières et te­nir droit face aux agi­ta­tions des faux dé­vots. C’est ce qu’elle fit pour la pre­mière fois dans un poème in­ti­tulé «Le Pé­ché» («Go­nâh» 3) :

«J’ai pé­ché, pé­ché dans le plai­sir,
Dans des bras chauds et en­flam­més.
J’ai pé­ché, pé­ché dans des bras de fer,
Dans des bras brû­lants et ran­cu­niers.
Dans ce lieu calme, sombre et muet,
J’ai é ses yeux pleins de mys­tère,
Et des sup­pli­ca­tions de ses yeux
Mon cœur, im­pa­tiem­ment, a trem­blé…
»

  1. En فروغ فرخزاد. Par­fois trans­crit Fo­ruq Far­roxzâd, Fo­rugh Far­ro­kh­zod, Fo­rugh Far­ro­khzād , Fu­rugh Far­ru­kha­zad ou Fu­rugh Far­ru­kh­zad. Icône Haut
  2. «La lu­mi­neuse», p. 189-190. Icône Haut
  1. En per­san «گناه». Icône Haut

Farrokhzad, « La Nuit lumineuse : écrits »

éd. Lettres persanes, Arcueil

éd. Lettres per­sanes, Ar­cueil

Il s’agit des lettres et de Mme  1, «l’enfante ter­rible» de la per­sane, une des écri­vaines les plus dis­cu­tées de l’, morte dans un ac­ci­dent tra­gique à trente-deux ans (XXe siècle). Elle consa­cra tout son être à la poé­sie — l’on peut même dire qu’elle se sa­cri­fia pour elle et pour l’idée qu’elle s’en fai­sait — en ex­pri­mant sans au­cune re­te­nue ses émois fé­mi­nins dans une ira­nienne qui re­fu­sait aux de culti­ver leurs ta­lents et leurs goûts. Elle es­ti­mait qu’un poème ne mé­ri­tait ce nom que lorsqu’on y je­tait la flamme de son cœur et les vi­bra­tions de son . La de Fo­rough laissa ra­re­ment les lec­teurs im­par­tiaux : elle sus­cita une forte at­ti­rance ou une vive aver­sion; une hos­ti­lité exa­gé­rée ou un éloge exalté. Alors que les uns la consi­dé­raient comme une femme dé­pra­vée, dan­ge­reuse dans ses pa­roles et dans la pra­tique de son art; les autres, au contraire, la voyaient en hé­roïne cultu­relle, en re­belle qui, ayant fait l’ de la ruine des conven­tions, était à la de pro­grès éman­ci­pa­teur. «Je vou­lais être “une femme” et “un être hu­main”. Je vou­lais dire que j’avais le de res­pi­rer, de crier… Les autres vou­laient étouf­fer mes cris sur mes lèvres et mon souffle dans ma poi­trine», dit-elle 2. Elle sa­vait qu’en pre­nant une at­ti­tude de défi, elle se fe­rait beau­coup d’, qu’elle s’attirerait des en­nuis et des rup­tures; mais elle croyait qu’il fal­lait en­fin bri­ser les bar­rières et te­nir droit face aux agi­ta­tions des faux dé­vots. C’est ce qu’elle fit pour la pre­mière fois dans un poème in­ti­tulé «Le Pé­ché» («Go­nâh» 3) :

«J’ai pé­ché, pé­ché dans le plai­sir,
Dans des bras chauds et en­flam­més.
J’ai pé­ché, pé­ché dans des bras de fer,
Dans des bras brû­lants et ran­cu­niers.
Dans ce lieu calme, sombre et muet,
J’ai é ses yeux pleins de mys­tère,
Et des sup­pli­ca­tions de ses yeux
Mon cœur, im­pa­tiem­ment, a trem­blé…
»

  1. En فروغ فرخزاد. Par­fois trans­crit Fo­ruq Far­roxzâd, Fo­rugh Far­ro­kh­zod, Fo­rugh Far­ro­khzād , Fu­rugh Far­ru­kha­zad ou Fu­rugh Far­ru­kh­zad. Icône Haut
  2. «La lu­mi­neuse», p. 189-190. Icône Haut
  1. En per­san «گناه». Icône Haut

Sei-shônagon, « Les Notes de l’oreiller, “Makura no soshi” »

éd. Stock-Delamain et Boutelleau, coll. Le Cabinet cosmopolite, Paris

éd. Stock-De­la­main et Bou­tel­leau, coll. Le Ca­bi­net cos­mo­po­lite, Pa­ris

Il s’agit des «Notes de l’oreiller» («Ma­kura no sô­shi» 1), la pre­mière ma­ni­fes­ta­tion dans les lettres ja­po­naises d’un genre de lit­té­ra­ture qui connaî­tra une grande vogue par la suite : ce­lui des «zui­hitsu» 2 au fil du pin­ceau»). On n’y trouve ni plan ni — un désordre fan­tai­siste ré­gnant ici en maître, mais un mé­lange d’esquisses sai­sies sur le vif, d’, de choses , de re­marques per­son­nelles. Leur au­teur était une femme «mo­queuse, pro­vo­cante, inexo­rable» 3; une dame de la Cour, dont nous ne connais­sons que le pseu­do­nyme : Sei-shô­na­gon 4. Ce pseu­do­nyme s’explique (comme ce­lui de Mu­ra­saki-shi­kibu) par la com­bi­nai­son d’un nom de avec un titre ho­no­ri­fique — «shô­na­gon» dé­si­gnant un di­gni­taire de la Cour, et «sei» étant la pro­non­cia­tion chi­noise du ca­rac­tère qui forme le pre­mier élé­ment du nom Kiyo­hara, fa­mille à la­quelle elle ap­par­te­nait. En ef­fet, son père n’était autre que le poète Kiyo­hara no Mo­to­suke 5, l’un des cinq let­trés de l’Empereur. Et même si quelques-uns sont d’avis que Mo­to­suke ne fut que le père adop­tif de Sei-shô­na­gon, il n’en reste pas moins cer­tain que le mi­lieu où elle passa sa ne put que fa­vo­ri­ser les pen­chants lit­té­raires qui lui per­mirent, plus tard, de de­ve­nir dame d’ de l’Impératrice Sa­dako. En­trée donc à la Cour en 990 apr. J.-C. Sei-shô­na­gon s’y fit re­mar­quer par une pré­sence d’esprit trop vive pour n’être pas à la fois es­ti­mée, haïe et re­dou­tée. Car (et c’est là peut-être son dé­faut) elle écra­sait les autres du poids de son éru­di­tion qu’elle cher­chait à mon­trer à la moindre oc­ca­sion. On ra­conte que les cour­ti­sans, qui crai­gnaient ses plai­san­te­ries, pâ­lis­saient à sa seule ap­proche. La clair­voyante écrit dans son «Jour­nal» : «Sei-shô­na­gon est une per­sonne qui en im­pose en par ses grands airs. Mais sa pré­ten­tion de tout sa­voir et sa fa­çon de se­mer au­tour d’elle les en ca­rac­tères , à tout bien consi­dé­rer, ne font que mas­quer de nom­breuses la­cunes. Ceux qui de la sorte se plaisent à se mon­trer dif­fé­rents des autres, s’attirent for­cé­ment le mé­pris et fi­nissent tou­jours très » 6. De fait, le mal­heur vint frap­per Sei-shô­na­gon quand, peu d’années après, l’ambitieux Fu­ji­wara no Mi­chi­naga par­vint à faire écar­ter l’Impératrice Sa­dako, à l’ombre de la­quelle fleu­ris­sait notre dame d’honneur.

  1. En «枕草子». Au­tre­fois trans­crit «Ma­koura no ço­chi», «Ma­koura no sôci» ou «Ma­kura no soo­shi». Icône Haut
  2. En ja­po­nais 随筆. Au­tre­fois trans­crit «zouï-hit­sou». Icône Haut
  3. Mi­chel Re­von. Icône Haut
  1. En ja­po­nais 清少納言. Au­tre­fois trans­crit Çei Cho­na­gon, Shei Sho­na­gun ou Seï Sô­na­gon. Icône Haut
  2. En ja­po­nais 清原元輔. Au­tre­fois trans­crit Kiyo­wara-no-Mo­to­suke, Kiyo­wara no Mo­to­çouké ou Kiyo­hara no Mo­to­souké. Icône Haut
  3. «Jour­nal; tra­duit du ja­po­nais par », p. 67. Icône Haut

Ichiyô, « Le Trente et un Décembre, “Ôtsugomori” »

dans « Anthologie de nouvelles japonaises contemporaines. [Tome I] » (éd. Gallimard, coll. Du monde entier, Paris)

dans « de contem­po­raines. [Tome I]» (éd. Gal­li­mard, coll. Du en­tier, Pa­ris)

Il s’agit du «Trente et un Dé­cembre» («Ôt­su­go­mori» 1) de Hi­gu­chi Ichiyô 2, écri­vaine ja­po­naise, tom­bée à vingt-quatre ans comme la feuille au vent d’automne (son sur­nom Ichiyô si­gni­fie «Simple feuille») et qui, mal­gré la briè­veté de sa , fut un des au­teurs les plus in­té­res­sants de sa gé­né­ra­tion, an­non­çant avec éclat le re­tour des sur la scène lit­té­raire de l’Empire du . De son vrai nom Hi­gu­chi Natsu 3 ou Hi­gu­chi Nat­suko 4, elle mon­tra un goût pré­coce pour la lit­té­ra­ture et don­nait déjà mieux que des es­pé­rances, lorsqu’en 1889, la de son père, sui­vie de celle de son frère, mit sa dans une mi­sère ex­trême. De­ve­nue l’unique sou­tien de sa mère et de sa sœur ca­dette, Ichiyô s’essaya, pour ga­gner de quoi vivre, à écrire sous forme de feuille­tons dans la quo­ti­dienne. Son ini­tia­teur à ce genre as­sez nou­veau au fut un ré­dac­teur de l’«Asahi Shim­bun» 5Le Jour­nal du So­leil le­vant»), Na­ka­rai Tô­sui, qui de­vint son amant; mais, tra­hie et aban­don­née par ce der­nier, elle son­gea un mo­ment à re­non­cer à tout. Entre-, pour don­ner aux siens un peu de pain, elle ven­dait des ca­hiers dans les ruelles des uni­ver­si­tés, des ba­lais aux portes du quar­tier famé du Yo­shi­wara. Elle fût morte de faim si, en 1893, les ro­man­tiques du «Bun­ga­ku­kai» 6Le Monde lit­té­raire») ne s’étaient aper­çus de son et ne lui avaient ou­vert les co­lonnes de leur re­vue. Elle y pu­blia, en l’ de quatre ans, une quin­zaine de ré­cits et de ro­mans, avant d’être em­por­tée par la tu­ber­cu­lose. Ces œuvres, qui avaient pour ca­rac­té­ris­tique com­mune de trai­ter de la grande d’être née femme et sen­sible, furent cha­leu­reu­se­ment ac­cueillies, en par­ti­cu­lier par Mori Ôgai : «On se mo­quera peut-être de », dit-il 7, «en di­sant que je suis un ado­ra­teur d’Ichiyô, peu im­porte, je ne crains pas d’attribuer à celle-ci le titre de vrai poète». On peut dire, en ef­fet, qu’Ichiyô était un poète en prose. Ses œuvres ren­voient abon­dam­ment aux grandes an­tho­lo­gies d’autrefois, et quand elle écrit par exemple : «Du­rant l’hiver de ma quin­zième an­née, alors que j’ignorais tout en­core des choses de l’, les vents froids ap­por­tèrent avec eux une . Bien­tôt… on ra­con­tait ici et là que j’étais amou­reuse… Les ru­meurs nous brisent comme les vagues d’une ri­vière… et nous écla­boussent»; elle trans­pose, en y ajou­tant le fré­mis­se­ment d’un cœur fé­mi­nin, af­finé par les épreuves de l’, le poème sui­vant du «Ko­kin-shû» : «À tra­vers le Mi­chi­noku coule la Ri­vière des Ru­meurs; moi, j’ai ac­quis la ré­pu­ta­tion de sé­duc­teur sans même avoir ren­con­tré l’être aimé; voilà qui m’est pé­nible!»

  1. En «大つごもり». Icône Haut
  2. En ja­po­nais 樋口一葉. Par­fois trans­crit Hi­gout­chi It­chiyo. Icône Haut
  3. En ja­po­nais 樋口奈津. Icône Haut
  4. En ja­po­nais 樋口夏子. Icône Haut
  1. En ja­po­nais 朝日新聞. Icône Haut
  2. En ja­po­nais 文學界. Icône Haut
  3. Dans , «Post­face à “La Trei­zième ». Icône Haut

Ichiyô, « Qui est le plus grand ? : roman »

éd. Ph. Picquier, coll. Picquier poche, Arles

éd. Ph. Pic­quier, coll. Pic­quier poche, Arles

Il s’agit de «Qui est le plus grand?» («Ta­ke­ku­rabe» 1) de Hi­gu­chi Ichiyô 2, écri­vaine ja­po­naise, tom­bée à vingt-quatre ans comme la feuille au vent d’automne (son sur­nom Ichiyô si­gni­fie «Simple feuille») et qui, mal­gré la briè­veté de sa , fut un des au­teurs les plus in­té­res­sants de sa gé­né­ra­tion, an­non­çant avec éclat le re­tour des sur la scène lit­té­raire de l’Empire du . De son vrai nom Hi­gu­chi Natsu 3 ou Hi­gu­chi Nat­suko 4, elle mon­tra un goût pré­coce pour la lit­té­ra­ture et don­nait déjà mieux que des es­pé­rances, lorsqu’en 1889, la de son père, sui­vie de celle de son frère, mit sa dans une mi­sère ex­trême. De­ve­nue l’unique sou­tien de sa mère et de sa sœur ca­dette, Ichiyô s’essaya, pour ga­gner de quoi vivre, à écrire sous forme de feuille­tons dans la quo­ti­dienne. Son ini­tia­teur à ce genre as­sez nou­veau au fut un ré­dac­teur de l’«Asahi Shim­bun» 5Le Jour­nal du So­leil le­vant»), Na­ka­rai Tô­sui, qui de­vint son amant; mais, tra­hie et aban­don­née par ce der­nier, elle son­gea un mo­ment à re­non­cer à tout. Entre-, pour don­ner aux siens un peu de pain, elle ven­dait des ca­hiers dans les ruelles des uni­ver­si­tés, des ba­lais aux portes du quar­tier famé du Yo­shi­wara. Elle fût morte de faim si, en 1893, les ro­man­tiques du «Bun­ga­ku­kai» 6Le lit­té­raire») ne s’étaient aper­çus de son et ne lui avaient ou­vert les co­lonnes de leur re­vue. Elle y pu­blia, en l’ de quatre ans, une quin­zaine de ré­cits et de ro­mans, avant d’être em­por­tée par la tu­ber­cu­lose. Ces œuvres, qui avaient pour ca­rac­té­ris­tique com­mune de trai­ter de la grande d’être née femme et sen­sible, furent cha­leu­reu­se­ment ac­cueillies, en par­ti­cu­lier par Mori Ôgai : «On se mo­quera peut-être de », dit-il 7, «en di­sant que je suis un ado­ra­teur d’Ichiyô, peu im­porte, je ne crains pas d’attribuer à celle-ci le titre de vrai poète». On peut dire, en ef­fet, qu’Ichiyô était un poète en prose. Ses œuvres ren­voient abon­dam­ment aux grandes an­tho­lo­gies d’autrefois, et quand elle écrit par exemple : «Du­rant l’hiver de ma quin­zième an­née, alors que j’ignorais tout en­core des choses de l’, les vents froids ap­por­tèrent avec eux une . Bien­tôt… on ra­con­tait ici et là que j’étais amou­reuse… Les ru­meurs nous brisent comme les vagues d’une ri­vière… et nous écla­boussent»; elle trans­pose, en y ajou­tant le fré­mis­se­ment d’un cœur fé­mi­nin, af­finé par les épreuves de l’, le poème sui­vant du «Ko­kin-shû» : «À tra­vers le Mi­chi­noku coule la Ri­vière des Ru­meurs; moi, j’ai ac­quis la ré­pu­ta­tion de sé­duc­teur sans même avoir ren­con­tré l’être aimé; voilà qui m’est pé­nible!»

  1. En «たけくらべ». Icône Haut
  2. En ja­po­nais 樋口一葉. Par­fois trans­crit Hi­gout­chi It­chiyo. Icône Haut
  3. En ja­po­nais 樋口奈津. Icône Haut
  4. En ja­po­nais 樋口夏子. Icône Haut
  1. En ja­po­nais 朝日新聞. Icône Haut
  2. En ja­po­nais 文學界. Icône Haut
  3. Dans , «Post­face à “La Trei­zième ». Icône Haut

Ichiyô, « La Treizième Nuit et Autres Récits »

éd. Les Belles Lettres, coll. Japon, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. , Pa­ris

Il s’agit de «La Trei­zième » («Jû­san Ya» 1) et autres ré­cits de Hi­gu­chi Ichiyô 2, écri­vaine ja­po­naise, tom­bée à vingt-quatre ans comme la feuille au vent d’automne (son sur­nom Ichiyô si­gni­fie «Simple feuille») et qui, mal­gré la briè­veté de sa , fut un des au­teurs les plus in­té­res­sants de sa gé­né­ra­tion, an­non­çant avec éclat le re­tour des sur la scène lit­té­raire de l’Empire du . De son vrai nom Hi­gu­chi Natsu 3 ou Hi­gu­chi Nat­suko 4, elle mon­tra un goût pré­coce pour la lit­té­ra­ture et don­nait déjà mieux que des es­pé­rances, lorsqu’en 1889, la de son père, sui­vie de celle de son frère, mit sa dans une mi­sère ex­trême. De­ve­nue l’unique sou­tien de sa mère et de sa sœur ca­dette, Ichiyô s’essaya, pour ga­gner de quoi vivre, à écrire sous forme de feuille­tons dans la quo­ti­dienne. Son ini­tia­teur à ce genre as­sez nou­veau au Ja­pon fut un ré­dac­teur de l’«Asahi Shim­bun» 5Le Jour­nal du So­leil le­vant»), Na­ka­rai Tô­sui, qui de­vint son amant; mais, tra­hie et aban­don­née par ce der­nier, elle son­gea un mo­ment à re­non­cer à tout. Entre-, pour don­ner aux siens un peu de pain, elle ven­dait des ca­hiers dans les ruelles des uni­ver­si­tés, des ba­lais aux portes du quar­tier famé du Yo­shi­wara. Elle fût morte de faim si, en 1893, les ro­man­tiques du «Bun­ga­ku­kai» 6Le lit­té­raire») ne s’étaient aper­çus de son et ne lui avaient ou­vert les co­lonnes de leur re­vue. Elle y pu­blia, en l’ de quatre ans, une quin­zaine de ré­cits et de ro­mans, avant d’être em­por­tée par la tu­ber­cu­lose. Ces œuvres, qui avaient pour ca­rac­té­ris­tique com­mune de trai­ter de la grande d’être née femme et sen­sible, furent cha­leu­reu­se­ment ac­cueillies, en par­ti­cu­lier par Mori Ôgai : «On se mo­quera peut-être de », dit-il 7, «en di­sant que je suis un ado­ra­teur d’Ichiyô, peu im­porte, je ne crains pas d’attribuer à celle-ci le titre de vrai poète». On peut dire, en ef­fet, qu’Ichiyô était un poète en prose. Ses œuvres ren­voient abon­dam­ment aux grandes an­tho­lo­gies d’autrefois, et quand elle écrit par exemple : «Du­rant l’hiver de ma quin­zième an­née, alors que j’ignorais tout en­core des choses de l’, les vents froids ap­por­tèrent avec eux une . Bien­tôt… on ra­con­tait ici et là que j’étais amou­reuse… Les ru­meurs nous brisent comme les vagues d’une ri­vière… et nous écla­boussent»; elle trans­pose, en y ajou­tant le fré­mis­se­ment d’un cœur fé­mi­nin, af­finé par les épreuves de l’, le poème sui­vant du «Ko­kin-shû» : «À tra­vers le Mi­chi­noku coule la Ri­vière des Ru­meurs; moi, j’ai ac­quis la ré­pu­ta­tion de sé­duc­teur sans même avoir ren­con­tré l’être aimé; voilà qui m’est pé­nible!»

  1. En «十三夜». Icône Haut
  2. En ja­po­nais 樋口一葉. Par­fois trans­crit Hi­gout­chi It­chiyo. Icône Haut
  3. En ja­po­nais 樋口奈津. Icône Haut
  4. En ja­po­nais 樋口夏子. Icône Haut
  1. En ja­po­nais 朝日新聞. Icône Haut
  2. En ja­po­nais 文學界. Icône Haut
  3. Dans , «Post­face à “La Trei­zième Nuit”». Icône Haut

Akiko, « Cheveux emmêlés »

éd. Les Belles Lettres, coll. Japon-Série Fiction, Paris

éd. Les Belles Lettres, coll. -Sé­rie , Pa­ris

Il s’agit de  1, poé­tesse ja­po­naise (XIXe-XXe siècle) dont les poèmes d’ rap­pellent cette verve sen­suelle et au­da­cieuse qui avait ca­rac­té­risé Izumi-shi­kibu. Dans sa « de la poé­tesse », Akiko écri­vit, au su­jet de celle qu’elle consi­dé­rait comme son mo­dèle, des pages très re­mar­quables, non seule­ment parce qu’elles comp­taient parmi les plus belles qui eussent été ja­mais écrites sur le su­jet, mais aussi parce qu’en ces pages, sans peut-être y son­ger, Akiko se dé­cri­vait elle-même : «Poé­tesse de l’amour ve­nue du », dit-elle dans cette bio­gra­phie 2, «toute sa fut consa­crée à l’amour et à la . Écri­vait-elle par amour ou ai­mait-elle pour la poé­sie? Dans son es­prit, ces deux choses n’en étaient qu’une». «Che­veux em­mê­lés» («Mi­da­re­gami» 3), tel sera le titre du pre­mier re­cueil d’Akiko par al­lu­sion au cé­lèbre poème d’Izumi-shikibu. Dans ce re­cueil qu’on peut qua­li­fier de ré­vo­lu­tion­naire, elle se montre en jeune fille fré­mis­sante de fu­gi­tives, d’abandons char­nels, de ca­prices d’un jour, et se confiant à haute. «Être femme; en être fière; à mots vrais, forts, crier au son à l’amour, à la ; chan­ter “sa chair et sa vie”… c’est les “che­veux em­mê­lés” que, tête haute, Yo­sano Akiko s’[avancera] dans la vie et dans la poé­sie» 4. Ce sont cette spon­ta­néité et cette har­diesse qui lui vau­dront le au­près d’un pu­blic à la fois sur­pris et ad­mi­ra­tif.

  1. En 与謝野晶子. Au­tre­fois trans­crit Yo­çano Akiko. Icône Haut
  2. Dans , «Yo­sano Akiko : poète de la pas­sion», p. 71. Icône Haut
  1. En ja­po­nais «みだれ髪». Par­fois tra­duit «Les Che­veux mê­lés» ou «Che­veux en désordre». Icône Haut
  2. , « de la contem­po­raine». Icône Haut

Khansâ, « Le “Dîwân” »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du Di­van (Re­cueil de poé­sies) d’al-Khansâ 1, poé­tesse bé­douine, qui chanta avec une émo­tion poi­gnante la pré­ma­tu­rée de ses deux (VIe-VIIe siècle apr. J.-C.). La c’était l’enthousiasme des bé­douines. Dans les grandes cir­cons­tances de leur , la , la re­con­nais­sance, l’indignation fai­saient jaillir des pro­fon­deurs de leur des chants tou­jours na­tu­rels, par­fois su­blimes. «Le lec­teur ne doit pas ou­blier qu’au dé­sert toute émo­tion vive se tra­dui­sait par une im­pro­vi­sa­tion ; ce qui se­rait un pé­dan­tisme ri­di­cule dans notre raf­fi­née, était le cri de la chez les peuples pri­mi­tifs», dit le père Vic­tor de Cop­pier 2. Les femmes bé­douines sa­vaient peindre en termes et pit­to­resques un beau aux pieds «fer­rés de vent du Sud et de vent du Nord»; elles s’entendaient à dé­crire une lance à la hampe souple et so­lide, une cotte de mailles aux an­neaux in­flexibles, un casque à la bombe étin­ce­lante; elles ai­maient à van­ter une in­cur­sion heu­reuse, les des vain­queurs, les noms des aïeux et les longues li­gnées des fa­milles re­liées par une pré­cise aux pre­mières hordes des­cen­dues en ; à la du guer­rier qui n’était plus, elles ex­cel­laient à com­po­ser des de mar­thiya» 3). , les hymnes de deuil se muaient le plus sou­vent en hymnes de ; car après avoir pleuré le hé­ros mort, après avoir rap­pelé sa bra­voure, sa li­bé­ra­lité, sa fi­dé­lité au ser­ment, son gé­né­reuse, son mé­pris de la vie, son de tout in­té­rêt et de tout sen­ti­ment à l’austère de­voir, il fal­lait, se­lon les du dé­sert, de­man­der la ran­çon de son . Maintes fois, les ac­cents dou­lou­reux d’une mère, d’une épouse, d’une sœur mirent les aux mains d’une tribu en­tière.

  1. En الخنساء. Par­fois trans­crit al-Ḫansâ’ ou el Kanssa. Icône Haut
  2. p. XVII. Icône Haut
  1. En arabe مرثيّه. Par­fois trans­crit «mer­siye», «mar­siyeh», «mar­siya», «mar­sia» ou «marṯiya». Icône Haut

Dourova, « Cavalière du tsar : mémoires »

éd. V. Hamy, Paris

éd. V. Hamy, Pa­ris

Il s’agit des «Mé­moires» («Za­piski» 1) de Na­de­jda An­dreïevna Dou­rova 2, jeune femme qui, dé­gui­sée en , prit part à toutes les cam­pagnes mi­li­taires contre Na­po­léon, re­çut la croix de Saint-Georges de la main du tsar et quitta le ser­vice en 1816 avec le grade de ca­pi­taine de ca­va­le­rie. Dés­œu­vrée dans la se­conde moi­tié de sa , elle trouva dans l’ le moyen de dé­vier le cours de son ex­tra­or­di­naire éner­gie. C’est dans la re­vue d’Alexandre Pou­ch­kine, «Le Contem­po­rain» («So­vré­men­nik» 3), qu’elle pu­blia en 1836 un ex­trait de ses «Mé­moires», avant de les faire sor­tir en livre. Dou­rova n’avait pas en­vie d’apparaître sous son vrai nom et avait pro­posé comme titre «Mé­moires per­son­nels d’une ama­zone russe connue sous le nom d’Alexandrova» («Svoïé­routch­nyïé za­piski rouss­koï ama­zonki iz­vest­noï pod imé­nem Alexan­drova» 4). À quoi Pou­ch­kine avait ré­pondu qu’il va­lait mieux ti­trer «Mé­moires de Dou­rova», parce que c’était simple, franc et noble. Ce livre, écrit dans une ac­tuelle, im­pres­sionna à tel point le cé­lèbre Vis­sa­rion Be­linski qu’il soup­çonna dans un pre­mier quelque mys­ti­fi­ca­tion de la part de Pou­ch­kine 5 : «S’il s’agit d’une mys­ti­fi­ca­tion, avouons qu’elle est me­née de main de maître; s’il s’agit de mé­moires au­then­tiques, alors ils sont d’un in­té­rêt et d’un charme in­ouïs. Et quelle langue, quel on trouve chez cette de­moi­selle-ca­va­lier! Il semble que Pou­ch­kine lui-même lui ait cédé sa plume de pro­sa­teur et qu’elle lui soit re­de­vable de cette fer­meté et cette force vi­riles… de ce ca­rac­tère et cap­ti­vant du ré­cit, tou­jours em­pli, tou­jours pé­né­tré de quelque sens ca­ché».

  1. En russe «Записки». Icône Haut
  2. En russe Надежда Андреевна Дурова. Par­fois trans­crit Na­de­jda An­dreyévna Dou­rova, Na­dezhda An­dreyevna Du­rova, Na­des­chda An­dre­jewna Du­rowa ou Na­dežda An­dreevna Du­rova. Icône Haut
  3. En russe «Современник». Icône Haut
  1. En russe «Своеручные записки русской амазонки известной под именем Александрова». Icône Haut
  2. p. 9-10. Icône Haut

Graffigny, « Lettres d’une Péruvienne »

éd. Voltaire Foundation, coll. Vif, Oxford

éd. Vol­taire Foun­da­tion, coll. Vif, Ox­ford

Il s’agit des «Lettres d’une Pé­ru­vienne» de  1, femme de lettres fran­çaise (XVIIIe siècle), dont le bel es­prit et l’élégance du firent dirent à un  2 «qu’elle fai­sait in­fi­dé­lité à son sexe, en usur­pant les ta­lents du nôtre». Née Fran­çoise d’Happoncourt, elle fut ma­riée — ou pour mieux dire — sa­cri­fiée à Fran­çois Hu­guet de Graf­fi­gny, em­porté, ja­loux et ex­trê­me­ment violent. Dès les pre­mières an­nées de conju­gale, elle se vit ex­po­sée aux mé­pris et aux in­sultes; des , son mari en vint aux coups, et la chose fit tant d’éclat qu’étant par­ve­nue à la po­lice, il y eut ordre d’emprisonner cet homme bru­tal qui, si­tôt re­lâ­ché, fit suivre ses pre­miers ex­cès par quan­tité d’autres. Il lui ar­riva plu­sieurs fois de ter­ras­ser son épouse à coups de pied et de poing, et après une fausse couche qu’elle eut, de lui mettre l’épée nue sur l’estomac. La pauvre femme per­dit tous ses en bas âge et eut beau­coup à souf­frir; la lettre sui­vante le montre as­sez : «Mon cher père», y dit Graf­fi­gny 3, «je suis obli­gée dans l’extrémité où je me trouve de vous sup­plier de ne me point aban­don­ner et de m’envoyer au plus vite cher­cher par M. de Ra­ré­court, car je suis en grand dan­ger et suis toute bri­sée de coups. Je me jette à votre et vous prie que ce soit bien vite». Après avoir pen­dant de longues an­nées donné des preuves d’une pa­tience hé­roïque, elle par­vint à ob­te­nir une sé­pa­ra­tion ju­ri­dique. Li­bé­rée des hor­ribles chaînes qu’elle avait trop long­temps por­tées, elle vint à Pa­ris. Sa vie n’avait été qu’un tissu de mal­heurs et de désa­gré­ments, et ce fut dans ces mal­heurs qu’elle puisa le sen­ti­ment d’une im­mense tris­tesse, d’une de tous les ins­tants qui ca­rac­té­risa son «Lettres d’une Pé­ru­vienne» : «Il ne me reste», y dit-elle 4, «que la triste de [vous] peindre mes dou­leurs… Que j’ai de à [vous les] dire, à leur don­ner toutes les sortes d’existences qu’elles peuvent avoir! Je vou­drais les tra­cer sur le plus dur mé­tal, sur les murs de ma chambre, sur mes ha­bits, sur tout ce qui m’environne, et les ex­pri­mer dans toutes les langues». Mais ce ro­man et un ou deux autres qu’elle écri­vit n’égalèrent ja­mais tout à fait ce­lui de sa vie; et plus en­core que dans les «Lettres d’une Pé­ru­vienne», les lec­teurs trou­ve­ront de l’intérêt dans les mil­liers de lettres qui consti­tuent sa vé­ri­table «Cor­res­pon­dance».

  1. On ren­contre aussi les gra­phies Gra­fi­gny, Gra­fi­gni et Graf­fi­gni. Icône Haut
  2. Étienne-Guillaume Co­lombe. Icône Haut
  1. «Cor­res­pon­dance. Tome I», p. 1. Icône Haut
  2. «Lettres d’une Pé­ru­vienne», p. 155. Icône Haut

Sappho, « La Poésie »

éd. de l’Aire, coll. Le Chant du monde, Vevey

éd. de l’Aire, coll. Le Chant du , Ve­vey

Il s’agit de «La » («Melê» 1) de Sap­pho de Les­bos 2 (VIIe siècle av. J.-C.), la poé­tesse la plus re­nom­mée de toute la par ses vers et par ses amours, et l’une des seules de l’ dont la ait tra­versé les siècles. Stra­bon la consi­dère comme «un pro­dige» et pré­cise : «Je ne sache pas que, dans tout le cours des dont l’ a gardé le , au­cune femme ait pu, même de loin, sous le rap­port du ly­rique, ri­va­li­ser avec elle» 3. J’ajouterais aussi les mots que l’auteur du «Voyage du jeune Ana­char­sis en Grèce» met dans la bouche d’un ci­toyen de My­ti­lène et qui contiennent un ré­sumé élo­quent des hom­mages ren­dus par les Grecs au ta­lent de Sap­pho : «Elle a peint tout ce que la offre de plus riant. Elle l’a peint avec les les mieux as­sor­ties, et ces cou­leurs elle sait au be­soin tel­le­ment les nuan­cer, qu’il en ré­sulte tou­jours un heu­reux mé­lange d’ombres et de … Mais avec quelle force de gé­nie nous en­traîne-t-elle lorsqu’elle dé­crit les charmes, les trans­ports et l’ivresse de l’! Quels ta­bleaux! Quelle ! Do­mi­née, comme la Py­thie, par le qui l’agite, elle jette sur le pa­pier des ex­pres­sions en­flam­mées; ses y tombent comme une grêle de traits, comme une pluie de qui va tout consu­mer». Toutes ces qua­li­tés la firent sur­nom­mer la dixième des muses : «Les muses, dit-on, sont au nombre de neuf. Quelle er­reur! Voici en­core Sap­pho de Les­bos qui fait dix» 4. On ra­conte que Sap­pho épousa, fort jeune, le plus riche ha­bi­tant d’une île voi­sine, mais qu’elle en de­vint veuve aus­si­tôt. Le culte de la poé­sie fut dès ce mo­ment sa plus chère oc­cu­pa­tion. Elle réunit au­tour d’elle plu­sieurs , dont elle fit ses élèves ou ses amantes; car il faut sa­voir que son ar­deur amou­reuse, dont pré­tend qu’elle était «non moindre que le feu de l’Etna» («Ætnæo non mi­nor igne»), s’étendait sur les per­sonnes de son sexe. Il ne nous reste, du grand nombre de ses , , et épi­tha­lames, que quelques pe­tits frag­ments qui se trouvent dis­sé­mi­nés dans les an­ciens scho­liastes, et sur­tout une ode en­tière que Sap­pho fit à la louange d’une de ses maî­tresses.

  1. En «Μέλη». Icône Haut
  2. En grec Σαπφὼ ἡ Λεσϐία. «Mais son nom au­then­tique était Ψάπφω (Psap­phô), au té­moi­gnage de la poé­tesse elle-même et de mon­naies my­ti­lé­niennes. Des mon­naies d’Érésos ont la forme sim­pli­fiée Σαπφώ (Sap­phô) qui est de­ve­nue en grec la forme la plus com­mune et a abouti fi­na­le­ment à Σαφώ (Sa­phô)», dit Aimé Puech. Icône Haut
  1. En grec «ἡ Σαπφώ, θαυμαστόν τι χρῆμα· οὐ γὰρ ἴσμεν ἐν τῷ τοσούτῳ χρόνῳ τῷ μνημονευομένῳ φανεῖσάν τινα γυναῖκα ἐνάμιλλον οὐδὲ κατὰ μικρὸν ἐκείνῃ ποιήσεως χάριν». Icône Haut
  2. Pla­ton dans «An­tho­lo­gie grecque, d’après le ma­nus­crit pa­la­tin». Icône Haut

mère de Fujiwara no Michitsuna, « Mémoires d’une éphémère (954-974) »

éd. Collège de France-Institut des hautes études japonaises, coll. Bibliothèque de l’Institut des hautes études japonaises, Paris

éd. Col­lège de -Ins­ti­tut des hautes études ja­po­naises, coll. Bi­blio­thèque de l’Institut des hautes études ja­po­naises, Pa­ris

Il s’agit du «Jour­nal d’une éphé­mère». Ce genre d’ in­times qui tient tant de place dans la lit­té­ra­ture fé­mi­nine du , je veux dire le «nikki» («jour­nal»), fut inau­guré (chose étrange!) par un , Ki no Tsu­rayuki 1, poète et , qui ve­nait d’exercer, pen­dant cinq ans, les fonc­tions de pré­fet de la pro­vince de Tosa. Dans son «Tosa nikki» 2Jour­nal de Tosa»), ré­digé en 935 apr. J.-C., il ra­con­tait dans une prose ex­quise, en­tre­mê­lée de poé­sies, son voyage de re­tour à la ca­pi­tale. Mais le prin­ci­pal in­té­rêt de son jour­nal était ailleurs : tout le se­cret en était, en ef­fet, dans la pre­mière phrase, où l’auteur fai­sait le choix de l’, qu’on ap­pe­lait com­mu­né­ment «on­nade» 3main de femme»), par op­po­si­tion à l’ chi­noise, qu’on ap­pe­lait com­mu­né­ment «oto­kode» 4main d’homme»). C’est non seule­ment en «on­nade» qu’il écri­vit son jour­nal, mais aussi dans la même que pra­ti­quaient les , dé­mon­trant de la sorte que cette langue par­ve­nait à ex­pri­mer par­fai­te­ment, si­non les concepts abs­traits de l’écriture chi­noise, du moins les mou­ve­ments dé­li­cats du cœur, com­muns à toute l’ : «[D’un pays à l’autre], le certes dif­fère», dit le «Jour­nal de Tosa» 5, «mais puisque pa­reil à coup sûr est le clair de lune, pour­quoi n’en se­rait-il de même du cœur hu­main?» Les dames de la Cour ja­po­naise ne tar­dèrent pas à en­tendre cette le­çon, et cloî­trées comme elles étaient dans leurs chambres, où elles avaient as­sez de loi­sir pour lire et pour son­ger à leurs mal­heurs, elles se mirent à no­ter leurs tristes pen­sées sous forme de jour­nal. La des dont elles étaient suf­fo­quées, et qu’elles ne pou­vaient pas dire à haute , éclata bien­tôt en un d’artifice comme on n’en vit ja­mais de sem­blable dans la lit­té­ra­ture uni­ver­selle. Se sui­virent à quelques an­nées d’intervalle : le «Ka­gerô (no) nikki» 6Jour­nal d’une éphé­mère»); le « nikki» 7Jour­nal de Mu­ra­saki-shi­kibu»); l’« nikki» 8Jour­nal d’Izumi-shikibu»); le «Sa­ra­shina nikki» 9Jour­nal de Sa­ra­shina»); le «Jô­jin-ajari (no) haha no shû» 10Jour­nal de la mère du ré­vé­rend Jô­jin»); en­fin le «Sa­nuki no suke (no) nikki» 11Jour­nal de la dame d’ Sa­nuki»).

  1. En 紀貫之. Au­tre­fois trans­crit Tsou­rayouki. Icône Haut
  2. En ja­po­nais «土佐日記». Au­tre­fois trans­crit «Toça nikki» ou «Tossa nikki». Icône Haut
  3. En ja­po­nais 女手. Par­fois trans­crit «won­nade». Icône Haut
  4. En ja­po­nais 男手. Par­fois trans­crit «wo­to­kode» ou «wo­toko no te». Icône Haut
  5. p. 36-37. Icône Haut
  6. En ja­po­nais «蜻蛉日記». Au­tre­fois trans­crit «Ka­gherô nikki». Icône Haut
  1. En ja­po­nais «紫式部日記». Au­tre­fois trans­crit «Mou­ra­çaki Shi­ki­bou niki» ou «Mou­ra­saki Shi­ki­bou nikki». Icône Haut
  2. En ja­po­nais «和泉式部日記». Au­tre­fois trans­crit «Izoumi-shi­ki­bou nikki». Icône Haut
  3. En ja­po­nais «更級日記». Icône Haut
  4. En ja­po­nais «成尋阿闍梨母集». Icône Haut
  5. En ja­po­nais «讃岐典侍日記», in­édit en . Au­tre­fois trans­crit «Sa­nouki no souké no nikki». Icône Haut