Icône Mot-clefsoufisme

Maïmonide, « Le Guide des égarés : traité de théologie et de philosophie. Tome II »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du «Guide des éga­rés» 1Da­la­lat al-hayi­rin» 2) de Rabbi Moïse ben Maï­mon 3, dit Maï­mo­nide. C’est l’un des les plus cé­lèbres qu’aient eus les Juifs, les­quels ont cou­tume de dire pour ex­pri­mer leur ad­mi­ra­tion en­vers lui : «De­puis Moïse (le pro­phète) jusqu’à Moïse (le phi­lo­sophe), il n’y a point eu d’autre Moïse» («Mi Mo­shé ad Mo­shé, lo kam ké Mo­shé» 4). Dans les hé­braïques, il est sou­vent dé­si­gné par le nom de Ram­bam 5 com­posé, se­lon l’usage , des lettres ini­tiales R. M. b. M. de son nom en­tier. Dans les livres la­tins, il est sou­vent cité sous les de Moïse le Cor­douan (Moses Cor­du­ben­sis), parce qu’il na­quit à Cor­doue, et de Moïse l’Égyptien (Moses Ægyp­tius), parce que, chassé par les re­li­gieuses des Al­mo­hades, il dut se ré­fu­gier en , où il de­vint pre­mier mé­de­cin du Sul­tan. On au­rait pu ajou­ter à ces noms ce­lui de Moïse le Pro­ven­çal, parce que la Pro­vence donna asile à la plus grande par­tie des Juifs ex­pul­sés du midi de l’; et que c’est à Lu­nel, et non au Caire, que «Le Guide des éga­rés» fut tra­duit de l’ en par Sa­muel ben Yé­huda ibn Ti­bon 6, le­quel en­tama sa tra­duc­tion du vi­vant même de Maï­mo­nide. Dans l’«Épître à Rabbi Sa­muel ibn Ti­bon sur la tra­duc­tion du “Guide des éga­rés”» et l’«Épître à la de Lu­nel», Maï­mo­nide fait de cette com­mu­nauté pro­ven­çale son hé­ri­tière spi­ri­tuelle : «Je suis», dit-il 7, «[un] au­teur en arabe, cette langue dont le dé­cline… [Mais] vous, maîtres et proches, af­fer­mis­sez-vous! For­ti­fiez vos cœurs; car je viens pro­cla­mer ceci : en ces d’affliction, nul n’est plus là pour bran­dir l’étendard de Moïse, ni pour ap­pro­fon­dir les pa­roles des maîtres du Tal­mud… à part vous-mêmes et ceux des ci­tés de vos ré­gions. Vous qui êtes conti­nuel­le­ment ab­sor­bés, comme je le sais, dans l’étude et l’ des textes; vous, dé­po­si­taires de l’intellect et du sa­voir! Sa­chez qu’en maints autres lieux, la Tora a été éga­rée par ses propres fils… Sur la d’ et à tra­vers toute la , un seul en­droit, je veux dire Alep, compte quelques qui mé­ditent la Tora… Pour ce qui est des ci­tés du Magh­reb, dans notre mal­heur, nous avons ap­pris quel dé­cret a été pro­noncé contre les Juifs qui s’y trouvent. Il n’est donc point de nulle part, si ce n’est au­près de vous, , fi­gures de notre .»

  1. Par­fois tra­duit «Guide pour ceux qui sont dans la per­plexité», «Guide des per­plexes», «Guide des che­mins tor­tueux», «Doc­teur de ceux qui chan­cellent», «Guide des in­dé­cis» ou «Guide des dé­voyés». Icône Haut
  2. Par­fois trans­crit «De­la­lat el­haï­rin», «Dalā­lat al-ḥā’irīn», «Da­la­lat al-ha­rin», «Delâletü’l-hairîn» ou «Da­la­la­tul hai­rin». Icône Haut
  3. En hé­breu רבי משה בן מימון. Par­fois trans­crit Moses ben Mei­mun, Mô­sheh ben May­mûn, Moïse ben Mai­moun, Moyses ben Mai­mon, Moyse ben Mai­mon, Moshe ben May­mon, Mosche ben Mai­mon, Moše ben Ma­j­mon ou Mo­ché ben Maï­mon. Icône Haut
  4. En hé­breu «ממשה עד משה לא קם כמשה». Par­fois trans­crit «Mi-Mo­sheh ‘ad Mo­sheh, lo qam ke-Mo­sheh», «Mi­mo­sché ad Mo­sché, lo kam ca Mo­sché», «Me­moshe ad Moshe, lo kam k’Moshe», «Mi-Moshe we-’ad Moshe, lo kom ke-Moshe» ou «Mi-Mošé we-‘ad Mošé, lo qam ke-Mošé». Icône Haut
  1. En hé­breu רמב״ם. Icône Haut
  2. En hé­breu שמואל בן יהודה אבן תיבון. Par­fois trans­crit Sa­muel ben Ju­dah ibn Tib­bon, Sa­muel ben Ye­houda ibn Tib­bon ou Sa­muel ben Je­huda ibn Tib­bon. Icône Haut
  3. «Lettres de Fo­stat • La par l’esprit», p. 45 & 47-48. Icône Haut

Maïmonide, « Le Guide des égarés : traité de théologie et de philosophie. Tome I »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du «Guide des éga­rés» 1Da­la­lat al-hayi­rin» 2) de Rabbi Moïse ben Maï­mon 3, dit Maï­mo­nide. C’est l’un des les plus cé­lèbres qu’aient eus les Juifs, les­quels ont cou­tume de dire pour ex­pri­mer leur ad­mi­ra­tion en­vers lui : «De­puis Moïse (le pro­phète) jusqu’à Moïse (le phi­lo­sophe), il n’y a point eu d’autre Moïse» («Mi Mo­shé ad Mo­shé, lo kam ké Mo­shé» 4). Dans les hé­braïques, il est sou­vent dé­si­gné par le nom de Ram­bam 5 com­posé, se­lon l’usage , des lettres ini­tiales R. M. b. M. de son nom en­tier. Dans les livres la­tins, il est sou­vent cité sous les de Moïse le Cor­douan (Moses Cor­du­ben­sis), parce qu’il na­quit à Cor­doue, et de Moïse l’Égyptien (Moses Ægyp­tius), parce que, chassé par les re­li­gieuses des Al­mo­hades, il dut se ré­fu­gier en , où il de­vint pre­mier mé­de­cin du Sul­tan. On au­rait pu ajou­ter à ces noms ce­lui de Moïse le Pro­ven­çal, parce que la Pro­vence donna asile à la plus grande par­tie des Juifs ex­pul­sés du midi de l’; et que c’est à Lu­nel, et non au Caire, que «Le Guide des éga­rés» fut tra­duit de l’ en par Sa­muel ben Yé­huda ibn Ti­bon 6, le­quel en­tama sa tra­duc­tion du vi­vant même de Maï­mo­nide. Dans l’«Épître à Rabbi Sa­muel ibn Ti­bon sur la tra­duc­tion du “Guide des éga­rés”» et l’«Épître à la de Lu­nel», Maï­mo­nide fait de cette com­mu­nauté pro­ven­çale son hé­ri­tière spi­ri­tuelle : «Je suis», dit-il 7, «[un] au­teur en arabe, cette langue dont le dé­cline… [Mais] vous, maîtres et proches, af­fer­mis­sez-vous! For­ti­fiez vos cœurs; car je viens pro­cla­mer ceci : en ces d’affliction, nul n’est plus là pour bran­dir l’étendard de Moïse, ni pour ap­pro­fon­dir les pa­roles des maîtres du Tal­mud… à part vous-mêmes et ceux des ci­tés de vos ré­gions. Vous qui êtes conti­nuel­le­ment ab­sor­bés, comme je le sais, dans l’étude et l’ des textes; vous, dé­po­si­taires de l’intellect et du sa­voir! Sa­chez qu’en maints autres lieux, la Tora a été éga­rée par ses propres fils… Sur la d’ et à tra­vers toute la , un seul en­droit, je veux dire Alep, compte quelques qui mé­ditent la Tora… Pour ce qui est des ci­tés du Magh­reb, dans notre mal­heur, nous avons ap­pris quel dé­cret a été pro­noncé contre les Juifs qui s’y trouvent. Il n’est donc point de nulle part, si ce n’est au­près de vous, , fi­gures de notre .»

  1. Par­fois tra­duit «Guide pour ceux qui sont dans la per­plexité», «Guide des per­plexes», «Guide des che­mins tor­tueux», «Doc­teur de ceux qui chan­cellent», «Guide des in­dé­cis» ou «Guide des dé­voyés». Icône Haut
  2. Par­fois trans­crit «De­la­lat el­haï­rin», «Dalā­lat al-ḥā’irīn», «Da­la­lat al-ha­rin», «Delâletü’l-hairîn» ou «Da­la­la­tul hai­rin». Icône Haut
  3. En hé­breu רבי משה בן מימון. Par­fois trans­crit Moses ben Mei­mun, Mô­sheh ben May­mûn, Moïse ben Mai­moun, Moyses ben Mai­mon, Moyse ben Mai­mon, Moshe ben May­mon, Mosche ben Mai­mon, Moše ben Ma­j­mon ou Mo­ché ben Maï­mon. Icône Haut
  4. En hé­breu «ממשה עד משה לא קם כמשה». Par­fois trans­crit «Mi-Mo­sheh ‘ad Mo­sheh, lo qam ke-Mo­sheh», «Mi­mo­sché ad Mo­sché, lo kam ca Mo­sché», «Me­moshe ad Moshe, lo kam k’Moshe», «Mi-Moshe we-’ad Moshe, lo kom ke-Moshe» ou «Mi-Mošé we-‘ad Mošé, lo qam ke-Mošé». Icône Haut
  1. En hé­breu רמב״ם. Icône Haut
  2. En hé­breu שמואל בן יהודה אבן תיבון. Par­fois trans­crit Sa­muel ben Ju­dah ibn Tib­bon, Sa­muel ben Ye­houda ibn Tib­bon ou Sa­muel ben Je­huda ibn Tib­bon. Icône Haut
  3. «Lettres de Fo­stat • La par l’esprit», p. 45 & 47-48. Icône Haut

al-Maqdisî, « Les Oiseaux et les Fleurs : allégories morales »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit du «Dé­voi­le­ment des mys­tères au su­jet de la des et des » («Ka­shf al-as­râr ‘an ḥi­kam al-ṭuyûr wa’l-azhâr» 1), al­lé­go­ries orien­tales, qui at­tri­buent aux oi­seaux et aux fleurs un sem­blable à ce­lui des hommes (XIIIe siècle apr. J.-C.). L’auteur, ‘Izz al-Dîn al-Ma­q­disî 2 (‘Izz al-Dîn de ), com­mence par éta­blir qu’il n’y a rien dans la qui ne soit doué de la fa­culté de se faire en­tendre d’une ma­nière in­tel­li­gible. À l’ seul est ré­servé l’usage de la ; mais les autres créa­tures, ou ani­mées ou in­ani­mées, semblent aussi s’exprimer, par leur ma­nière d’être, dans un lan­gage muet. Bien plus, ce lan­gage est «plus élo­quent que la pa­role et plus es­sen­tiel­le­ment vrai» 3. Ainsi, les roses ré­pandent un par­fum pré­cieux qui pé­nètre jusqu’au fond du cœur et qui dit leurs se­crets; les ros­si­gnols, sur les ra­meaux qui les ba­lancent, mo­dulent leurs amours; et les hautes cimes des s’agitent comme pour cé­lé­brer la vi­sion de . Par­tant de cette idée, l’auteur se sup­pose au mi­lieu d’un jar­din gran­diose; là, oc­cupé à étu­dier les dis­cours de tous les êtres que la na­ture offre à ses sens, il s’applique à les in­ter­pré­ter et y dé­cou­vrir des le­çons non seule­ment mo­rales, mais éga­le­ment spi­ri­tuelles et . «Crois», dit-il 4, «que ce­lui qui ne sait pas ti­rer un sens al­lé­go­rique du cri aigre de la porte, du bour­don­ne­ment de la mouche, de l’aboiement du chien, du mou­ve­ment des in­sectes qui s’agitent dans la pous­sière; que ce­lui qui ne sait pas com­prendre ce qu’indiquent la marche de la nue, la lueur du mi­rage, la teinte du brouillard, n’est pas du nombre des gens in­tel­li­gents.» Pour évi­ter de tom­ber dans l’obscurité de la où bien d’autres sont tom­bés, al-Ma­q­disî suit une marche pro­gres­sive. Aussi, ses pre­mières al­lé­go­ries sont-elles plus ter­restres que ses der­nières, où il est ques­tion d’ di­vin : «Le voile du mys­tère, d’abord épais, s’éclaircit peu à peu et se sou­lève même quel­que­fois; en­fin, il tombe en­tiè­re­ment, et le nom de Dieu vient, dans la der­nière , ex­pli­quer toutes les »

  1. En «كشف الأسرار عن حكم الطيور والأزهار». Par­fois trans­crit «Ca­schf asrár an hokm al­thoiour u al azhár», «Ka­shf al-asrār ‘an ḥukm aṭ-ṭuyur wa’l-azhār» ou «Ka­chf al-as­râr ‘an ḥikm aṭ-ṭouyoûr oua l az­hâr». On ren­contre aussi la gra­phie «كشف الأسرار في حكم الطيور والأزهار» («Ka­shf al-as­râr fî ḥi­kam al-ṭuyûr wa’l-azhâr»). Par­fois trans­crit «Ki­chaf ul as­rar fi hukmi-it-thouyour oua al az­har». Icône Haut
  2. En arabe عز الدين المقدسي. Par­fois trans­crit ‘Izz ad-Dîn al-Ma­q­disy, ‘Iz­zaddīn Ma­q­disī, ‘Izz Ed­din el Mo­qad­dasi, Iz­zi­din al-Muqaddasi,’Yzz-Ed-dīni el-Mo­qad­desī, Azz-Ed­din al Mo­ca­deçi, Azed­din al Mo­ca­dassi, ‘Izz Ed­din el Mo­qa­dessi, Azz-Ed­din-el-Mo­ka­dessi ou Azz-Ed­din El­mo­cad­dessi. Icône Haut
  1. p. 4. Icône Haut
  2. p. 97. Icône Haut

Bâbâ Tâhir, « “Le Génie du millénaire” : cent quatrains lyriques »

éd. L’Harmattan, coll. Poètes des cinq continents, Paris

éd. L’Harmattan, coll. des cinq conti­nents, Pa­ris

Il s’agit de  1, poète , dont la sim­pli­cité des et du vo­ca­bu­laire fait le charme de ses qua­trains. On sait peu de choses sur lui; on ignore même le où il vé­cut (entre le Xe et XIIe siècle apr. J.-C. pro­ba­ble­ment). Il était un de ces er­rants, ces fous de qui passent pour en , et que pour cela, tout le ré­vère et res­pecte. Le sur­nom de ‘Uryân 2le Nu») sous le­quel il est dé­si­gné lui vient, disent cer­tains, de ce qu’il se pro­me­nait sans dans les ba­zars et dans les rues; mais il est tout aussi vrai­sem­blable qu’il vi­vait dans le dé­nue­ment ou le re­non­ce­ment, plu­tôt que dans la com­plète nu­dité : «Je suis le bo­hème qu’on ap­pelle “qa­len­der”; je n’ai ni ni lieu, nul point d’attache», dit-il. «Le jour, j’erre au­tour du monde, et la , je m’endors une brique sous la tête… Il n’y a point dans l’univers de pa­pillon aussi étourdi, de fou aussi étrange que . Les ser­pents et les four­mis ont tous une re­traite, mais moi je n’ai pas même — in­for­tuné! — le mur d’une mai­son en ruines» 3. En tout cas, l’on constate que son mys­ti­cisme ne lui épar­gna ni les tour­ments de l’ ni les an­goisses cau­sées par la de la . Il est, d’ailleurs, un des pre­miers der­viches à avoir dé­crit ses trans­ports amou­reux dans la per­sane : «Le col­chique des ne dure qu’une se­maine, ainsi que la vio­lette des bords de la ri­vière; je veux crier, de ville en ville, que la fi­dé­lité des belles aux joues ro­sées ne dure qu’une se­maine… Mon cœur est plein de feu, mes yeux pleins de larmes; ma n’est qu’un vase rem­pli de tris­tesses et d’ennuis. Eh bien! si, après ma mort, tu viens à pas­ser près de ma tombe, ton par­fum me ren­dra la vie»

  1. En per­san باباطاهر. Par­fois trans­crit Bâbâ Tâ­her. Icône Haut
  2. En per­san عریان. Par­fois trans­crit Uriyan, ‘Oriyān ou Oryân. Icône Haut
  1. Tra­duc­tion de , p. 516 & 528. Icône Haut

Junayd, « Enseignement spirituel : traités, lettres, oraisons et sentences »

éd. Actes Sud, coll. Babel, Arles

éd. Actes Sud, coll. Ba­bel, Arles

Il s’agit de Ju­nayd Bagh­dâdî 1, maître soufi de (IXe-Xe siècle apr. J.-C.), qui posa les bases so­lides sur les­quelles al­laient s’élever les grands sys­tèmes de la mu­sul­mane. Bien qu’il en­sei­gnât dans sa mai­son et ne di­ri­geât pas une , ses contem­po­rains lui dé­cer­nèrent le titre de «Sei­gneur de la Tribu spi­ri­tuelle» («Sayyid al-Tâ’ifa» 2). L’un d’eux rap­porte 3 : «Mes yeux n’avaient ja­mais contem­plé quelqu’un comme Ju­nayd Bagh­dâdî : les ve­naient à lui pour son , les le re­cher­chaient pour la pro­fon­deur de ses pen­sées, les se ren­daient au­près de lui pour ses mé­ta­phores, les théo­lo­giens pour sa ; et le ni­veau de son dis­cours était tou­jours plus élevé que le leur, en , et ». Ju­nayd vé­né­rait Bâyazîd Bis­tâmî, l’extravagant par­ti­san de l’union di­vine, dont il tra­dui­sit les «Dits ex­ta­tiques», et au su­jet du­quel il dé­cla­rait : «Bâyazîd avait réa­lisé un pre­mier état spi­ri­tuel dans le­quel “toutes les choses avaient dis­paru pour lui”, et un se­cond état dans le­quel “cette dis­pa­ri­tion avait dis­paru”» 4. Cette phrase dif­fi­cile veut dire : Dans un pre­mier , le soufi, ivre sous l’emprise di­vine, perd son in­di­vi­duelle et dis­pa­raît; mais cette ivresse elle-même doit dis­pa­raître pour que le soufi puisse éva­cuer de son les maux fu­nestes de l’hébétude et de la confu­sion et re­ve­nir à la  : «Il sera [de nou­veau], après n’avoir pas été, là où il avait été… Il sera “un exis­tant qui est”, après avoir été “un exis­tant privé d’être”. Il en est ainsi, parce qu’il sera passé de l’ivresse de l’emprise di­vine à la lu­ci­dité du dé­gri­se­ment» 5. Dit au­tre­ment, la «de l’ivresse, de l’enivrement» («sukr»), «de la dis­pa­ri­tion, de l’anéantissement» («fanâ’») est jouis­sive, car elle li­bère la hu­maine des tra­cas qu’elle connaît d’habitude; mais cette re­cherche, d’après Ju­nayd, ne convient qu’aux dé­bu­tants; elle doit cé­der le pas «à la so­briété, au dé­gri­se­ment» («sahw»), «à la pé­ren­ni­sa­tion, à la per­ma­nence» («baqâ’») pour que ce­lui qui avait dis­paru puisse re­prendre sa place parmi les hommes, dé­sor­mais lu­cide, dé­grisé, mais in­vesti de la pré­sence per­ma­nente de .

  1. En الجنيد البغدادي. Par­fois trans­crit Djo­néid, Djo­naïd, Djou­neïd, Dju­neid, Dju­naid, al-Dju­nayd, Dschu­neid, Dschu­naid, Dschu­neyd, Dscho­naid, Dscho­neid, Cü­neyd, Cü­nayd, Cü­neid, el-Jo­neid, Jo­neyd, Jo­nayd, al-Jo­naid, Ju­neyd, Ju­neid, Ju­naïd, al-Jou­nayd, Jou­neyd, Jou­neïd, Ǵonayd, Ǧu­naid ou al-Ǧu­nayd. Icône Haut
  2. En arabe سيد الطائفة. Au­tre­fois trans­crit Saïyid-i Tâïfa, Saiyidu’ṭ-Ṭāifa ou Sayyid-ut-Taifa. Icône Haut
  3. p. 12-13. Icône Haut
  1. p. 197. Icône Haut
  2. p. 151. Icône Haut

« Kabir : une expérience mystique au-delà des religions »

éd. A. Michel, coll. Spiritualités vivantes, Paris

éd. A. Mi­chel, coll. Spi­ri­tua­li­tés vi­vantes, Pa­ris

Il s’agit de  1, sur­nommé «le tis­se­rand de Bé­na­rès», l’un des les plus po­pu­laires de l’Inde, et l’un des fon­da­teurs de la lit­té­ra­ture , bien qu’il n’ait peut-être ja­mais rien écrit (XVe-XVIe siècle apr. J.-C.). Non seule­ment il a em­ployé le hindi, mais il a in­sisté sur l’avantage de se ser­vir de cette orale, en s’é contre l’emploi du et de toute autre langue sa­vante. Car, comme So­crate, Ka­bîr se mé­fiait de l’, qui était pour lui une lettre morte, un si­mu­lacre, et ne ju­geait vraie que la in­té­rieure de l’ : «Je n’ai ja­mais tou­ché», dit-il 2, «ni encre, ni pa­pier. Ma main ja­mais n’a tenu de plume. La gran­deur des quatre âges, Ka­bîr la fait naître des pa­roles de sa bouche». Sa re­nom­mée re­pose sur les cinq cents cou­plets («do­hâs» 3) et les cent stances («pa­das» 4) trans­crits par ses dis­ciples, et dont des mor­ceaux choi­sis fi­gurent dans le «Gou­rou Granth Sa­hib», le livre saint des . Ils se dis­tinguent par leur va­leur , par leur conci­sion et in­ten­sité, mais aussi et sur­tout par la ren­contre des deux tra­di­tions is­la­mique et hin­doue. Fils illé­gi­time d’une veuve brah­mane, adopté par un tis­se­rand mu­sul­man, Ka­bîr rê­vait d’amalgamer et en une seule et même . Lui-même se di­sait «l’enfant d’Allah et de Râma» et es­ti­mait que les deux tra­di­tions, mal­gré leurs dif­fé­rents, étaient des «pots de la même ar­gile» 5. On ra­conte que lorsqu’il fut sur le point de mou­rir, les hin­douistes dé­cla­rèrent qu’il fal­lait le brû­ler; les — qu’il fal­lait l’enterrer. Il s’éteignit re­cou­vert par son drap. Les deux par­tis, après d’interminables que­relles, fi­nirent par s’approcher du ca­davre et sou­le­vèrent le lin­ceul; mais ils virent qu’il n’y avait que des , et pas de . Les hin­douistes prirent la moi­tié des fleurs, les brû­lèrent et éle­vèrent en cet en­droit un mau­so­lée. Les mu­sul­mans prirent l’autre moi­tié et construi­sirent un sanc­tuaire pour les y mettre. «Il y a donc aujourd’hui à Ma­ghar 6 deux dé­diés à Ka­bîr», dit Mme  7. «Dres­sés l’un à côté de l’autre, ils té­moignent de l’irréductible contra­dic­tion que le même du ré­for­ma­teur de­vait être fi­na­le­ment im­puis­sant à ré­soudre. Tra­gique des­tin de ce pro­phète de l’!»

  1. En hindi कबीर. Au­tre­fois trans­crit Ca­bir. Icône Haut
  2. «Ka­bir : une mys­tique au-delà des re­li­gions», p. 151. Icône Haut
  3. En hindi दोहा. Icône Haut
  4. En hindi पद. Icône Haut
  1. «Ka­bir : une ex­pé­rience mys­tique au-delà des re­li­gions», p. 95 & 11. Icône Haut
  2. En hindi मगहर. Par­fois trans­crit Ma­ga­har. Ville si­tuée dans le dis­trict ac­tuel de Sant Ka­bîr Na­gar. Icône Haut
  3. «Pré­face à “Au ca­ba­ret de l’ : pa­roles de Ka­bîr”», p. 16. Icône Haut

Roûmî, « “Mathnawî” : la quête de l’absolu »

éd. du Rocher, Monaco

éd. du Ro­cher, Mo­naco

Il s’agit du «Math­nawî» 1 de  2, poète d’expression per­sane, qui n’est pas seule­ment l’inspirateur d’une confré­rie, celle des «», mais le di­rec­teur spi­ri­tuel de tout le XIIIe siècle. «Un si grand poète, ai­mable, har­mo­nieux, étin­ce­lant, exalté; un es­prit d’où émanent des par­fums, des , des mu­siques, un peu d’extravagance, et qui, rien que de la ma­nière dont sa strophe prend le dé­part et s’élève au , a déjà trans­porté son lec­teur», dit M. Mau­rice Bar­rès 3. Ré­fu­gié à Ko­nya 4 en Ana­to­lie (Roûm), Djé­lâl-ed-dîn trouva dans cette ville ha­bi­tée de Grecs, de Turcs, d’Arméniens, de Juifs et de Francs un adonné à la , à la , aux danses, et il em­ploya cette poé­sie, cette mu­sique, ces danses pour lui faire connaître . Son ac­tion im­mense en jeta, pour ainsi dire, des ra­cines si pro­fondes dans toutes les âmes que, même jusqu’aujourd’hui, les fruits et les de ses en­sei­gne­ments n’ont rien perdu de leur fraî­cheur ni de leur par­fum; il se sur­vit dans ses dis­ciples et ses suc­ces­seurs qui, de­puis plus de sept siècles, ré­pètent ses plus beaux dé­lires au­tour de son tom­beau en l’appelant «notre Maître» (Maw­lânâ 5). La beauté et l’esprit to­lé­rant de ses œuvres ont sur­pris les oc­ci­den­taux, et tourné la tête aux plus sobres parmi eux. «Tous les cœurs sur les­quels souffle ma brise s’épanouissent comme un jar­din plein de lu­mière», dit-il avec

  1. En «مثنوی». Par­fois trans­crit «Mes­névi», «Mes­newi», «Meth­névi», «Mes­navi», «Mas­navi», «Mas­nawi», «Maṯ­nawī» ou «Math­navi». Icône Haut
  2. En per­san جلال‌الدین رومی. Par­fois trans­crit Jelālu-’d-Dīn er-Rūmī, Jel­la­lud­din Rumi, Je­la­lud­din Rumi, Ja­lal-ud-Din Rumi, Jal­la­lud­din Rumi, Dja­lâl-ud-Dîn Rûmî, Dže­la­lud­din Rumi, Dscha­lal ad-din Rumi, Ca­la­laddīn Rūmī, Ja­lâl ad dîn Roûmî, Ya­lal ad-din Rumí, Ga­lal al-din Rumi, Dja­lâl-od-dîn Rûmî, Ja­lâ­lod­dîn Rûmî, Djé­la­lid­din-Roumi, Ja­lel Id­dine Roumi, Dsche­lâl-ed-dîn Rumi, Ce­la­le­din Rumi, Ce­la­led­din-i Rumi, Je­la­led­din Rumi, Dje­la­let­tine Roumî, Djé­lal­le­din-i-Roumi ou Djel­lal-ed-Dine Roumi. Icône Haut
  3. «Une En­quête aux pays du . Tome II», p. 74. Icône Haut
  1. On ren­contre aussi les gra­phies Co­gni, Cogne, Co­nia, Ko­nia et Ko­nié. C’est l’ancienne Ico­nium. Icône Haut
  2. En per­san مولانا. Par­fois trans­crit Mau­lana, Mow­lânâ, Mev­lana ou Mew­lânâ. Icône Haut

Attar, « Les Sept Cités de l’amour »

éd. A. Michel, coll. Spiritualités vivantes, Paris

éd. A. Mi­chel, coll. Spi­ri­tua­li­tés vi­vantes, Pa­ris

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle du Di­van (Re­cueil de poé­sies) de  1 (XIIe-XIIIe siècle apr. J.-C.). Je consi­dère At­tar comme le meilleur poète de la . Certes, le nombre des Per­sans qui se sont dis­tin­gués dans le genre est si consi­dé­rable, et plu­sieurs d’entre eux ont ac­quis tant de gloire, que cette opi­nion peut pa­raître ha­sar­dée. Sous le rap­port du choix des pen­sées et de la grâce de l’expression, Djé­lâl-ed-dîn Roûmî ne lui est en rien in­fé­rieur; mais de toutes les idées de ce cé­lèbre dis­ciple, je dé­fie­rais d’en trou­ver une qui n’appartienne pas à At­tar. Et Roûmî lui-même confesse cette lourde dette quand il dit : «At­tar a par­couru les sept ci­tés de l’, tan­dis que j’en suis tou­jours au tour­nant d’une ruelle» 2; et en­core : «At­tar fut l’ du mys­ti­cisme, et Sa­naï fut ses yeux; je ne fais que suivre leurs traces» 3. Fé­rid-ed­din exerça d’abord la pro­fes­sion de par­fu­meur, ainsi que l’indique son sur­nom d’Attar («qui fa­brique ou qui vend des par­fums»). Il avait une bou­tique très élé­gante, qui at­ti­rait les re­gards du pu­blic et qui flat­tait aussi bien les yeux que l’odorat. Un jour qu’il était as­sis sur le de­vant de sa bou­tique avec l’apparence d’un im­por­tant, un fou, ou pour mieux dire, un re­li­gieux très avancé dans la  4, vint à sa porte, jeta un sur les mar­chan­dises qui étaient éta­lées, puis poussa un pro­fond sou­pir. At­tar, étonné, le pria de pas­ser son che­min. «Tu as », lui ré­pon­dit l’inconnu, «le voyage de l’éternité est fa­cile pour . Je ne suis pas em­bar­rassé dans ma marche, car je n’ai au que mon froc. Il n’en est mal­heu­reu­se­ment pas ainsi de toi, qui pos­sèdes tant de pré­cieuses mar­chan­dises. Songe donc à te pré­pa­rer à ce voyage.»

  1. En فریدالدین عطار. Par­fois trans­crit Farîdoddîn’Attâr, Fé­ryd-ed­dyn At­thar, Farīd al-Dīn ‘Aṭṭār, Fe­ri­dud­din At­tar, Fa­ri­dud­dine At­tar, Fa­ri­dad­din At­tar ou Fa­rîd-ud-Dîn ‘At­târ. Icône Haut
  2. En per­san

    «هفت شهر عشق راعطار گشت
    ماهنوز اندر خم یک کوچهایم
    ».

    Icône Haut

  1. En per­san

    «عطار روح بود و سنایی دو چشم او
    ما از پی سنایی و عطار آمدیم
    ».

    Icône Haut

  2. Les fous sont re­gar­dés comme des dans la Perse et dans l’Inde, et ran­gés parmi les . Icône Haut

Ibn Thofaïl, « Hayy ben Yaqdhân : roman philosophique »

éd. Imprimerie catholique, coll. Institut d’études orientales de la Faculté des lettres d’Alger, Beyrouth

éd. Im­pri­me­rie ca­tho­lique, coll. Ins­ti­tut d’études orien­tales de la Fa­culté des lettres d’Alger, Bey­routh

Il s’agit du «Hayy ben Ya­qd­hân» 1Le Vi­vant fils du Vi­gi­lant»), connu en sous le titre du «Phi­lo­so­phus au­to­di­dac­tus» («Le Phi­lo­sophe au­to­di­dacte»), du phi­lo­sophe Aboû Bekr Ibn Tho­faïl 2 (XIIe siècle apr. J.-C.). «De tous les de la », dit Er­nest Re­nan en par­lant du «Hayy ben Ya­qd­hân» 3, «c’est peut-être le seul qui puisse nous of­frir plus qu’un in­té­rêt his­to­rique». Cet ou­vrage, cu­rieux à plus d’un égard, offre six cents ans avant Da­niel De­foe un pro­to­type scien­ti­fique, phi­lo­so­phique et du «Ro­bin­son Cru­soé». Il s’ouvre par la sup­po­si­tion d’un en­fant qui naît sans père ni mère, dans une île dé­serte. Cet en­fant, c’est Hayy ben Ya­qd­hân. Il est adopté par une ga­zelle, qui l’allaite. Il gran­dit, ob­serve, ré­flé­chit. Doué d’une su­pé­rieure, non seule­ment il sait in­gé­nieu­se­ment pour­voir à tous ses be­soins, mais il ar­rive bien­tôt à dé­cou­vrir de lui-même, par les seules forces de son , les no­tions les plus éle­vées que la science hu­maine pos­sède sur l’univers. Avec le , il re­con­naît que les êtres qui l’entourent ren­ferment la mul­ti­pli­cité et l’, at­tendu que, s’ils sont mul­tiples du côté de leurs formes, ils sont une même chose quant à l’essence. En­fin, le sys­tème au­quel il abou­tit, le conduit à cher­cher dans l’extase mys­tique l’union in­time avec , qui consti­tue à la fois la plé­ni­tude de la science hu­maine et la fé­li­cité sou­ve­raine et ab­so­lue. «Seul parmi les d’allégories phi­lo­so­phiques, Ibn Tho­faïl a su gar­der la juste me­sure, te­nir la ba­lance égale entre les [dif­fé­rents] genres [lit­té­raires]», dit  4. «[Sa] phrase est courte, alerte, d’une cor­rec­tion ab­so­lue, d’une élé­gance par­faite, d’une lu­mi­neuse clarté… Si donc il fal­lait in­di­quer à des étu­diants un mo­dèle à imi­ter de phi­lo­so­phique , nous dé­si­gne­rions sans hé­si­ter le style d’Ibn Tho­faïl, c’est-à-dire du “Hayy ben Ya­qd­hân”. S’il fal­lait leur choi­sir, en outre, le meilleur ou­vrage arabe à lire pour prendre, au prix d’un mi­ni­mum de temps et de peine, une idée d’ensemble de la mu­sul­mane, et de la science arabe dont elle fait la syn­thèse, nous leur nom­me­rions en­core, sans ba­lan­cer, le “Hayy ben Ya­qd­hân”… Di­sons, en un mot, qu’Ibn Tho­faïl est à tous égards, dans la pléiade des “fa­lâ­cifa” 5… le mo­dèle des vul­ga­ri­sa­teurs.»

  1. En arabe «حي بن يقظان». Par­fois trans­crit «Hay ben Yo­qth­sân», «Hai ebn Yokd­han», «Hay ibn-Iokd­han», «Hây ben Ya­qzân», «Ḥaij ibn Iaqẓân», «Hayy ibn Yag­zan», «Hayi ibn Iak­zan» ou «Ḥayy b. Yaḳẓān». À ne pas confondre avec le traité épo­nyme d’Avicenne, dont Ibn Tho­faïl n’a em­prunté que les de ses . Icône Haut
  2. En arabe أبو بكر بن طفيل. Par­fois trans­crit Ebn To­phail, Aben­to­fail, Ibn al-Tou­faïl, Ibn-To­faïl, Ibn To­feïl, Ibn Ṭufail ou Ibn Ṭufayl. Icône Haut
  3. «Aver­roès et l’Averroïsme», p. 99. Icône Haut
  1. «Ibn Tho­faïl : sa , ses œuvres», p. 93 & 95-96. Icône Haut
  2. Le mot «fa­lâ­cifa», plu­riel de «faï­la­çoûf» (فيلسوف), est une simple trans­crip­tion du mot «phi­lo­so­phos» (φιλόσοφος). Icône Haut

Roûmî, « Roubâ’yât »

éd. Librairie d’Amérique et d’Orient A. Maisonneuve, Paris

éd. Li­brai­rie d’ et d’ A. Mai­son­neuve, Pa­ris

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle des «Qua­trains» («Ru­bayat» 1) de  2, poète d’expression per­sane, qui n’est pas seule­ment l’inspirateur d’une confré­rie, celle des « tour­neurs», mais le di­rec­teur spi­ri­tuel de tout le XIIIe siècle. «Un si grand poète, ai­mable, har­mo­nieux, étin­ce­lant, exalté; un es­prit d’où émanent des par­fums, des , des mu­siques, un peu d’extravagance, et qui, rien que de la ma­nière dont sa strophe prend le dé­part et s’élève au , a déjà trans­porté son lec­teur», dit M. Mau­rice Bar­rès 3. Ré­fu­gié à Ko­nya 4 en Ana­to­lie (Roûm), Djé­lâl-ed-dîn trouva dans cette ville ha­bi­tée de Grecs, de Turcs, d’Arméniens, de Juifs et de Francs un adonné à la , à la , aux danses, et il em­ploya cette poé­sie, cette mu­sique, ces danses pour lui faire connaître . Son ac­tion im­mense en Orient jeta, pour ainsi dire, des ra­cines si pro­fondes dans toutes les âmes que, même jusqu’aujourd’hui, les fruits et les de ses en­sei­gne­ments n’ont rien perdu de leur fraî­cheur ni de leur par­fum; il se sur­vit dans ses dis­ciples et ses suc­ces­seurs qui, de­puis plus de sept siècles, ré­pètent ses plus beaux dé­lires au­tour de son tom­beau en l’appelant «notre Maître» (Maw­lânâ 5). La beauté et l’esprit to­lé­rant de ses œuvres ont sur­pris les oc­ci­den­taux, et tourné la tête aux plus sobres parmi eux. «Tous les cœurs sur les­quels souffle ma brise s’épanouissent comme un jar­din plein de lu­mière», dit-il avec

  1. En «رباعیات». Par­fois trans­crit «Ru­baiat», «Robāïates», «Roubâ’yât», «Ro­baiyat», «Roba’yat», «Rou­bayyat», «Robái­j­ját», «Rou­baïyat» ou «Rubâi’yât». Icône Haut
  2. En per­san جلال‌الدین رومی. Par­fois trans­crit Jelālu-’d-Dīn er-Rūmī, Jel­la­lud­din Rumi, Je­la­lud­din Rumi, Ja­lal-ud-Din Rumi, Jal­la­lud­din Rumi, Dja­lâl-ud-Dîn Rûmî, Dže­la­lud­din Rumi, Dscha­lal ad-din Rumi, Ca­la­laddīn Rūmī, Ja­lâl ad dîn Roûmî, Ya­lal ad-din Rumí, Ga­lal al-din Rumi, Dja­lâl-od-dîn Rûmî, Ja­lâ­lod­dîn Rûmî, Djé­la­lid­din-Roumi, Ja­lel Id­dine Roumi, Dsche­lâl-ed-dîn Rumi, Ce­la­le­din Rumi, Ce­la­led­din-i Rumi, Je­la­led­din Rumi, Dje­la­let­tine Roumî, Djé­lal­le­din-i-Roumi ou Djel­lal-ed-Dine Roumi. Icône Haut
  3. «Une En­quête aux pays du . Tome II», p. 74. Icône Haut
  1. On ren­contre aussi les gra­phies Co­gni, Cogne, Co­nia, Ko­nia et Ko­nié. C’est l’ancienne Ico­nium. Icône Haut
  2. En per­san مولانا. Par­fois trans­crit Mau­lana, Mow­lânâ, Mev­lana ou Mew­lânâ. Icône Haut

Roûmî, « Odes mystiques, “Dîvân-e Shams-e Tabrîzî” »

éd. du Seuil-UNESCO, coll. Points-Sagesses, Paris

éd. du Seuil-UNESCO, coll. Points-Sa­gesses, Pa­ris

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle du «Diwân-e-Shams» 1 de  2, poète d’expression per­sane, qui n’est pas seule­ment l’inspirateur d’une confré­rie, celle des «», mais le di­rec­teur spi­ri­tuel de tout le XIIIe siècle. «Un si grand poète, ai­mable, har­mo­nieux, étin­ce­lant, exalté; un es­prit d’où émanent des par­fums, des , des mu­siques, un peu d’extravagance, et qui, rien que de la ma­nière dont sa strophe prend le dé­part et s’élève au , a déjà trans­porté son lec­teur», dit M. Mau­rice Bar­rès 3. Ré­fu­gié à Ko­nya 4 en Ana­to­lie (Roûm), Djé­lâl-ed-dîn trouva dans cette ville ha­bi­tée de Grecs, de Turcs, d’Arméniens, de Juifs et de Francs un adonné à la , à la , aux danses, et il em­ploya cette poé­sie, cette mu­sique, ces danses pour lui faire connaître . Son ac­tion im­mense en jeta, pour ainsi dire, des ra­cines si pro­fondes dans toutes les âmes que, même jusqu’aujourd’hui, les fruits et les de ses en­sei­gne­ments n’ont rien perdu de leur fraî­cheur ni de leur par­fum; il se sur­vit dans ses dis­ciples et ses suc­ces­seurs qui, de­puis plus de sept siècles, ré­pètent ses plus beaux dé­lires au­tour de son tom­beau en l’appelant «notre Maître» (Maw­lânâ 5). La beauté et l’esprit to­lé­rant de ses œuvres ont sur­pris les oc­ci­den­taux, et tourné la tête aux plus sobres parmi eux. «Tous les cœurs sur les­quels souffle ma brise s’épanouissent comme un jar­din plein de lu­mière», dit-il avec

  1. En «دیوان شمس». Par­fois trans­crit «Di­van-i Shams», «Dî­vân-ı Şems» ou «Di­vân-ê Chams». Éga­le­ment connu sous le titre de «Diwân ka­bir» («دیوان کبیر») et de «Kûl­liyât-e-Shams» («کلیات شمس»). Icône Haut
  2. En per­san جلال‌الدین رومی. Par­fois trans­crit Jelālu-’d-Dīn er-Rūmī, Jel­la­lud­din Rumi, Je­la­lud­din Rumi, Ja­lal-ud-Din Rumi, Jal­la­lud­din Rumi, Dja­lâl-ud-Dîn Rûmî, Dže­la­lud­din Rumi, Dscha­lal ad-din Rumi, Ca­la­laddīn Rūmī, Ja­lâl ad dîn Roûmî, Ya­lal ad-din Rumí, Ga­lal al-din Rumi, Dja­lâl-od-dîn Rûmî, Ja­lâ­lod­dîn Rûmî, Djé­la­lid­din-Roumi, Ja­lel Id­dine Roumi, Dsche­lâl-ed-dîn Rumi, Ce­la­le­din Rumi, Ce­la­led­din-i Rumi, Je­la­led­din Rumi, Dje­la­let­tine Roumî, Djé­lal­le­din-i-Roumi ou Djel­lal-ed-Dine Roumi. Icône Haut
  3. «Une En­quête aux pays du . Tome II», p. 74. Icône Haut
  1. On ren­contre aussi les gra­phies Co­gni, Cogne, Co­nia, Ko­nia et Ko­nié. C’est l’ancienne Ico­nium. Icône Haut
  2. En per­san مولانا. Par­fois trans­crit Mau­lana, Mow­lânâ, Mev­lana ou Mew­lânâ. Icône Haut

Sulṭân Wéled, « La Parole secrète : l’enseignement du maître soufi Roûmî »

éd. Le Rocher, coll. Gnose, Monaco-Paris

éd. Le Ro­cher, coll. , Mo­naco-Pa­ris

Il s’agit de l’«Ib­tidâ-nâ­meh» 1La se­crète», ou lit­té­ra­le­ment «Le Livre du com­men­ce­ment») de Sulṭân Wé­led 2, fils aîné de Djé­lâl-ed-dîn Roûmî et vé­ri­table fon­da­teur de l’ordre des «» (XIII-XIVe siècle apr. J.-C.). On ra­conte 3 que quand Sulṭân Wé­led se ren­dait avec son père à une réunion, la plu­part des té­moins s’imaginaient que les deux étaient . D’ailleurs, au mo­ment de son , Djé­lâl-ed-dîn n’avait que dix-huit ans; et conti­nuel­le­ment Sulṭân Wé­led, dans toutes les séances où il as­sis­tait, s’asseyait à côté de son père. Il était son plus proche et son plus cher confi­dent et il pensa un mo­ment à l’égaler ou même à le sur­pas­ser, mais il fi­nit par se rendre à l’évidence que la , le sa­voir, le ta­lent ne pou­vaient être confé­rés par hé­ré­dité. Voici dans quelles cir­cons­tances il en vint à cette conclu­sion. On ra­conte 4 qu’après avoir ter­miné ses études en , il ar­riva dans la ville d’Alep; il sa­tis­fit tous les dans toutes les ques­tions qu’ils lui po­sèrent, sans que per­sonne pût trou­ver à re­dire dans ses ré­ponses. Re­venu à Ko­nya, en , les gens de mé­rite de la ville se réunirent dans le col­lège de son père. Ce­lui-ci de­manda à son fils, en guise de pré­sent rap­porté du voyage, de trai­ter quelques ques­tions sub­tiles, et Sulṭân Wé­led, ayant pré­paré quelques pen­sées dé­li­cates, les ré­cita d’un bout à l’autre, s’imaginant qu’au plai­sir qu’il au­rait à les en­tendre, son père en res­te­rait bouche bée; car Sulṭân Wé­led se croyait sans égal dans ces su­jets. Mais im­mé­dia­te­ment, son père re­prit exac­te­ment tout ce que Sulṭân Wé­led avait dit, et l’expliqua de telle ma­nière que tous en furent éba­his. Ci­tant ces pen­sées par cœur, il y ajouta tant de preuves et de res­tric­tions nou­velles, qu’on ne pour­rait les énu­mé­rer; il y mêla des dis­cours éso­té­riques et poussa des cris. Sulṭân Wé­led dé­chira ses et tomba à ses pieds. Tous les té­moins, stu­pé­faits, ap­plau­dirent et res­tèrent éton­nés de cette su­pé­rieure de Djé­lâl-ed-dîn. À comp­ter de ce jour et pen­dant soixante-dix ans, Sulṭân Wé­led pé­ren­nisa l’ de son père; il rem­plit le ter­ri­toire de l’ Mi­neure de ses dis­ciples et vul­ga­risa ses pa­roles dans des œuvres plates, hon­nêtes, simples, à la por­tée de tout le .

  1. En «ابتدانامه». Par­fois trans­crit «Ib­tida-name», «Ibtidā’-nāma» ou «Eb­tedā-nāma». Éga­le­ment connu sous le titre de «Va­lad-nâ­meh» («ولدنامه») et de «Math­nawî-e-Va­ladî» («مثنوی ولدی»). Icône Haut
  2. En per­san سلطان ولد. Par­fois trans­crit Sul­tan Ve­led, Solṭān Wa­lad ou Sul­tân Va­lad. Icône Haut
  1. Aflâkî, «Les Saints des der­viches tour­neurs. Tome I», p. 20. Icône Haut
  2. id. «Tome II», p. 64. Icône Haut

Sulṭân Wéled, « Maître et Disciple, “Kitâb al-Ma’ârif” »

éd. Sindbad, coll. La Bibliothèque persane, Paris

éd. Sind­bad, coll. La Bi­blio­thèque per­sane, Pa­ris

Il s’agit du «Ma’ârif» 1Maître et Dis­ciple», ou lit­té­ra­le­ment «Les Connais­sances ») de Sulṭân Wé­led 2, fils aîné de Djé­lâl-ed-dîn Roûmî et vé­ri­table fon­da­teur de l’ordre des « tour­neurs» (XIII-XIVe siècle apr. J.-C.). On ra­conte 3 que quand Sulṭân Wé­led se ren­dait avec son père à une réunion, la plu­part des té­moins s’imaginaient que les deux étaient . D’ailleurs, au mo­ment de son , Djé­lâl-ed-dîn n’avait que dix-huit ans; et conti­nuel­le­ment Sulṭân Wé­led, dans toutes les séances où il as­sis­tait, s’asseyait à côté de son père. Il était son plus proche et son plus cher confi­dent et il pensa un mo­ment à l’égaler ou même à le sur­pas­ser, mais il fi­nit par se rendre à l’évidence que la , le sa­voir, le ta­lent ne pou­vaient être confé­rés par hé­ré­dité. Voici dans quelles cir­cons­tances il en vint à cette conclu­sion. On ra­conte 4 qu’après avoir ter­miné ses études en , il ar­riva dans la ville d’Alep; il sa­tis­fit tous les dans toutes les ques­tions qu’ils lui po­sèrent, sans que per­sonne pût trou­ver à re­dire dans ses ré­ponses. Re­venu à Ko­nya, en Mi­neure, les gens de mé­rite de la ville se réunirent dans le col­lège de son père. Ce­lui-ci de­manda à son fils, en guise de pré­sent rap­porté du voyage, de trai­ter quelques ques­tions sub­tiles, et Sulṭân Wé­led, ayant pré­paré quelques pen­sées dé­li­cates, les ré­cita d’un bout à l’autre, s’imaginant qu’au plai­sir qu’il au­rait à les en­tendre, son père en res­te­rait bouche bée; car Sulṭân Wé­led se croyait sans égal dans ces su­jets. Mais im­mé­dia­te­ment, son père re­prit exac­te­ment tout ce que Sulṭân Wé­led avait dit, et l’expliqua de telle ma­nière que tous en furent éba­his. Ci­tant ces pen­sées par cœur, il y ajouta tant de preuves et de res­tric­tions nou­velles, qu’on ne pour­rait les énu­mé­rer; il y mêla des dis­cours éso­té­riques et poussa des cris. Sulṭân Wé­led dé­chira ses et tomba à ses pieds. Tous les té­moins, stu­pé­faits, ap­plau­dirent et res­tèrent éton­nés de cette su­pé­rieure de Djé­lâl-ed-dîn. À comp­ter de ce jour et pen­dant soixante-dix ans, Sulṭân Wé­led pé­ren­nisa l’ de son père; il rem­plit le ter­ri­toire de l’ de ses dis­ciples et vul­ga­risa ses pa­roles dans des œuvres plates, hon­nêtes, simples, à la por­tée de tout le .

  1. En «معارف». Par­fois trans­crit «Ma‘āref». Icône Haut
  2. En per­san سلطان ولد. Par­fois trans­crit Sul­tan Ve­led, Solṭān Wa­lad ou Sul­tân Va­lad. Icône Haut
  1. Aflâkî, «Les Saints des der­viches tour­neurs. Tome I», p. 20. Icône Haut
  2. id. «Tome II», p. 64. Icône Haut