Wang Wei, « Les Saisons bleues »

éd. Phébus, coll. Libretto, Paris

éd. Phé­bus, coll. Li­bretto, Pa­ris

Il s’agit de  1, ar­tiste (VIIIe siècle apr. J.-C.), aussi illustre en qu’en et . La de son père le li­vra de bonne heure et tout en­tier à l’ ma­ter­nelle, qui im­prima sur son une vé­ri­table em­preinte boud­dhique : c’est en elle qu’il faut voir la source de cet de la , de ce goût de la , de ce dé­ta­che­ment du , de cette «pu­reté dé­ta­chée» («qing yi» 2) qui pé­nètrent le ca­rac­tère de Wang Wei et forment l’essence même de ses com­po­si­tions. On peut sup­po­ser que c’est aussi sa mère qui le guida dans le choix de son sur­nom : Mo-jie 3. En ef­fet, ces deux idéo­grammes, joints à ce­lui de son pré­nom Wei, forment le nom chi­nois du saint Vi­ma­la­kîrti. Sa du­rant, Wang Wei ob­serva un ri­gou­reux et s’abstint de viandes. Dans sa chambre dé­pouillée, hor­mis un ser­vice à thé, un luth et un lit de cordes, on ne voyait qu’une table basse sur la­quelle étaient ran­gées les écri­tures boud­dhiques. On n’a pas de dou­ter qu’il avait une bonne connais­sance de ces écri­tures; mais une froide im­pres­sion d’immobilisme émane de ses poèmes qui, étant par­faits et sans dé­faut, cher­chant et at­tei­gnant leurs ef­fets, sont par là moins hu­mains, moins vi­vants. Une autre ex­pli­ca­tion de cet im­mo­bi­lisme, c’est l’influence de la pein­ture et la mu­sique. Le grand let­tré Su Dongpo écri­vait : «Lorsque je goûte la poé­sie de Mo-jie, je trouve des pein­tures dans ses poèmes; lorsque je contemple la pein­ture de Mo-jie, je trouve des poèmes dans sa pein­ture» 4. Un autre qua­li­fiait sa poé­sie de «pein­ture so­nore» («you sheng hua» 5). On rap­porte, comme preuve de son sa­voir dans ces deux dif­fé­rents , l’anecdote sui­vante : «[Se trou­vant] un jour chez une per­sonne qui pos­sé­dait un re­pré­sen­tant des en train de jouer d’un ins­tru­ment, Wang Wei re­garda le ta­bleau et dit : “C’est la pre­mière me­sure du troi­sième re­frain de la de la robe d’arc-en- 6”. Les cu­rieux firent ve­nir des mu­si­ciens pour jouer cette pièce. Leur pose ins­tru­men­tale confirma l’affirmation de Wang Wei»

  1. En chi­nois 王維. Au­tre­fois trans­crit Uang Uei, Wang Wey, Ouang-oey, Ouang Oueï ou Ouan-ouey. Icône Haut
  2. En chi­nois 清逸. Au­tre­fois trans­crit «ts’ing yi». Icône Haut
  3. En chi­nois 摩詰. Par­fois trans­crit Mouo Kie, Mo-k’i ou Moji. Icône Haut
  1. Dans Che Bing Chiu, «Wang Wei, le “Wang­chuan ji” (“Re­cueil du Val de la Jante”) : un poète en sa vil­lé­gia­ture». Icône Haut
  2. En chi­nois 有聲畫. Par­fois trans­crit «yeou-cheng-houa». Icône Haut
  3. En chi­nois 霓裳羽衣曲. Nom d’une mé­lo­die ve­nue d’ cen­trale et en­trée en sous les Tang, pé­riode où les échanges cultu­rels avec l’Ouest étaient très riches. Icône Haut

« Odes choisies du “Chi King” »

dans « Description géographique, historique, chronologique, politique de l’Empire de la Chine. Tome II » (XVIIIᵉ siècle), p. 369-380

dans « géo­gra­phique, his­to­rique, chro­no­lo­gique, de l’Empire de la . Tome II» (XVIIIe siècle), p. 369-380

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle du «Shi Jing» 1, ou «Le Livre des vers». Le ca­rac­tère «shi» si­gni­fie «vers, pièce de vers, poème», parce qu’en ef­fet tout ce livre ne contient que des , com­po­sées entre le XIe et le VIe siècle av. J.-C. On y voit dé­crites les plus an­ciennes cou­tumes des , leurs aux an­cêtres, au , aux autres pou­voirs, leurs rites mil­lé­naires par­ti­ci­pant au des sai­sons. Confu­cius fai­sait grand cas de ces odes et as­su­rait que la doc­trine en était très pure et très sainte : «As-tu tra­vaillé la pre­mière et la se­conde par­tie du “Shi Jing”?», dit-il 2. «Qui vou­drait faire son mé­tier d’ sans tra­vailler la pre­mière et la se­conde par­tie du “Shi Jing” res­tera comme planté le nez contre un mur.» Et en­core : «Mes , pour­quoi au­cun de vous n’étudie-t-il le “Shi Jing”? Le “Shi Jing” per­met de sti­mu­ler, per­met d’observer, per­met de com­mu­nier, per­met de pro­tes­ter. En , il vous ai­dera à ser­vir votre père; dans le , il vous ai­dera à ser­vir votre sou­ve­rain. Et vous y ap­pren­drez les de beau­coup d’, bêtes, et » 3. En même , le phi­lo­sophe pre­nait le parti de dé­cou­vrir dans ces odes une in­ten­tion , un but po­li­tique que per­sonne n’eût soup­çon­nés : «Une seule phrase peut ré­su­mer les trois cents odes du “Shi Jing”, et c’est “pen­ser » 4. Les com­men­ta­teurs chi­nois ont suivi cette d’ du grand ; ils l’ont même lar­ge­ment dé­pas­sée. Ils ont ri­va­lisé d’ingéniosité et en­vi­ronné le «Shi Jing» d’un amas d’exégèse qui a fini par en obs­cur­cir le sens pri­mi­tif.

  1. En chi­nois «詩經». Par­fois trans­crit «Cheu King», «Che’-king», «She King», «Shih Ching», «Schi-king», «Shi King», «Xi Kim», «Chi-kin» ou «Chi King». Icône Haut
  2. «Les En­tre­tiens de Confu­cius; tra­duit du chi­nois par Pierre Ry­ck­mans», XVII, 10. Icône Haut
  1. id. XVII, 9. Icône Haut
  2. id. II, 2. Icône Haut

Lindgren, « Mio, mon Mio »

éd. Le Livre de poche jeunesse, Paris

éd. Le Livre de poche , Pa­ris

Il s’agit de «Mio, mon Mio» («Mio, min Mio») de Mme , la grande dame de la lit­té­ra­ture pour , la créa­trice de la ga­mine la plus ef­fron­tée sor­tie de l’ sué­doise : Fifi Brin­da­cier. Au­cun au­teur n’a été tra­duit en au­tant de langues que Mme Lind­gren. On ra­conte que M. Bo­ris Pan­kine 1, am­bas­sa­deur d’ à Stock­holm, confia un jour à l’écrivaine que presque tous les foyers so­vié­tiques comp­taient deux  : son «Karls­son sur le toit» et la ; ce à quoi elle ré­pli­qua : «Comme c’est étrange! J’ignorais to­ta­le­ment que la Bible était si po­pu­laire!» 2 C’est en 1940 ou 1941 que Fifi Brin­da­cier vit le jour comme per­son­nage de , au mo­ment où l’ fai­sait main basse sur l’, sem­blable à «un monstre éfique qui, à in­ter­valles ré­gu­liers, sort de son trou pour se pré­ci­pi­ter sur une vic­time» 3. Le cou­lait, les gens re­ve­naient mu­ti­lés, tout n’était que mal­heur et déses­poir. Et mal­gré les mille rai­sons d’être dé­cou­ra­gée face à l’avenir de notre , Mme Lind­gren ne pou­vait s’empêcher d’éprouver un cer­tain op­ti­misme quand elle voyait les per­sonnes de de­main : les en­fants, les ga­mins. Ils étaient «joyeux, sin­cères et sûrs d’eux, et ce, comme au­cune gé­né­ra­tion pré­cé­dente ne l’a été» 4. Mme Lind­gren com­prit, alors, que l’avenir du dor­mait dans les chambres des en­fants. C’est là que tout se jouait pour que les hommes et les de de­main de­viennent des sains et bien­veillants, qui voient le monde tel qu’il est, qui en connaissent la beauté. Le de Mme Lind­gren tient à cette . L’ qu’elle porte aux faibles et aux op­pri­més lui vaut éga­le­ment le des pe­tits et des grands. Beau­coup de ses ré­cits ont pour cadre des bour­gades res­sem­blant à sa bour­gade na­tale. Mais il ne s’agit là que du cadre. Car l’essence de ses ré­cits ré­side dans l’imagination dé­bor­dante de l’enfant so­li­taire — ce ter­ri­toire in­té­rieur où nul ne peut plus être tra­qué, où la seule est pos­sible. «Je veux écrire pour des lec­teurs qui savent créer des mi­racles. Les en­fants savent créer des mi­racles en li­sant», dit-elle 5. De même que toute , dans n’importe quel genre, dé­passe les li­mites de ce genre et de­vient quelque chose d’incomparable; de même, les ou­vrages de Mme Lind­gren dé­passent les li­mites étroites de la . Ce sont des le­çons de li­berté pour tous les âges et tous les siècles : «: Li­berté! Car sans li­berté, la fleur du poème fa­nera où qu’elle pousse» 6.

  1. En Борис Дмитриевич Панкин. Icône Haut
  2. Dans «Dos­sier : As­trid Lind­gren». Icône Haut
  3. Dans Jens An­der­sen, «As­trid Lind­gren». Icône Haut
  1. id. Icône Haut
  2. Dans «Dos­sier : As­trid Lind­gren». Icône Haut
  3. Dans Jens An­der­sen, «As­trid Lind­gren». Icône Haut

Bai Juyi, « Un Homme sans affaire : poèmes »

éd. Moundarren, Millemont

éd. Moun­dar­ren, Mil­le­mont

Il s’agit de  1, le poète le plus ta­len­tueux de la , avec Li Po (IXe siècle apr. J.-C.). Au contraire de son pays, où sa po­pu­la­rité dé­crut au fil des siècles, le et le , sans grâce à leur lec­to­rat fé­mi­nin, le tinrent tou­jours pour un mo­dèle su­prême et al­lèrent jusqu’à en faire une sorte de tu­té­laire. Déjà de son vi­vant, sa «Chan­son des re­grets éter­nels» («Chang hen ge» 2) et sa «Bal­lade du luth»Pi pa xing» 3) jouis­saient d’un pres­tige in­com­pa­rable au­près des  : «Veuves et vierges ont sou­vent, à la bouche, un poème de … À ma vue, les chan­teuses me dé­si­gnent du doigt, en se di­sant entre elles : voici le maître de la “Chan­son des re­grets éter­nels”», dit-il dans une lettre 4. «Le trait prin­ci­pal… de Bai Juyi, qui fait son mé­rite prin­ci­pal en tant que poète», dit un  5, «c’est l’extrême sim­pli­cité de son élo­cu­tion, le na­tu­rel de toute son œuvre». Bai Juyi re­non­çait au trop sa­vant, trop , trop dense que ses pré­dé­ces­seurs po­lis­saient et ci­se­laient de­puis des siècles jusqu’à être sou­vent un peu obs­curs. On pré­tend qu’il li­sait ses vers à une vieille dame illet­trée et ne ces­sait de les chan­ger jusqu’à ce que cette der­nière lui fît en­tendre qu’elle avait tout com­pris. On com­pare son simple, abon­dant, ré­gu­lier à l’ d’une fon­taine qui coule et jour sur la pe­tite place du vil­lage, et où tout le s’abreuve :

«Dan­seuse tar­tare! Dan­seuse tar­tare!
L’ ré­pond au son des cordes,
Les mains ré­pondent au tam­bour.
La pré­lude, elle s’élance, manches hautes.
Pal­pi­tante comme la neige, fré­mis­sante comme le ro­seau,
À droite et à gauche, in­las­sable, elle pi­vote,
Mille et mille tours se pour­suivent sans trêve.
Rien de ce monde ne pour­rait l’égaler :
Voi­ture, moins ra­pide; tour­billon, moins pri­me­sau­tier.
La fi­nie, à plu­sieurs re­prises elle sa­lue et re­mer­cie
Le sou­ve­rain qui sou­rit lé­gè­re­ment
»

  1. En 白居易. Au­tre­fois trans­crit Pé-kiu-y, Po Kiu-i, Po Kiu-yi, Po Tchu-yi, Pai Chui, Bo Ju yi, Po Chü-i ou Po Chu yi. Icône Haut
  2. En chi­nois «長恨歌». Au­tre­fois trans­crit «Tch’ang-hen-ko» ou «Ch’ang-hen ko». Icône Haut
  3. En chi­nois «琵琶行». Au­tre­fois trans­crit «P’i-pa-hing», «Pi pa sing» ou «Pï-pá hsing». Icône Haut
  1. Dans Lo Ta-kang, «La Double du poète Po Kiu-yi», p. 135. Icône Haut
  2. M. Georges Mar­gou­liès. Icône Haut

Tchouang-tseu, « L’Œuvre complète »

éd. Gallimard-UNESCO, coll. UNESCO d’œuvres représentatives-Connaissance de l’Orient, Paris

éd. Gal­li­mard-UNESCO, coll. UNESCO d’œuvres re­pré­sen­ta­tives-Connais­sance de l’, Pa­ris

Il s’agit de «L’Œuvre com­plète» de Tchouang-tseu 1, pen­seur ïste, un des plus grands maîtres de la prose chi­noise (IVe siècle av. J.-C.). Laissé pour compte du­rant des siècles, il exer­cera une tar­dive, mais sans cesse crois­sante, tant sur les que sur les , et en l’an 742 apr. J.-C. l’Empereur pro­mul­guera un édit pour ca­no­ni­ser son «Œuvre com­plète», dé­sor­mais un clas­sique, qui se verra at­tri­buer le titre post­hume de «Clas­sique au­then­tique de la splen­deur mé­ri­dio­nale» («Nan­hua zhen­jing» 2). En Tchouang-tseu, nous ren­con­trons un phi­lo­sophe ori­gi­nal dont le de poète, plein d’images har­dies, d’artifices lit­té­raires, pos­sède un at­trait in­connu aux autres pen­seurs de la . Son «Œuvre com­plète» prend l’aspect d’allégories ; de pen­sées non seule­ment ré­flé­chies et dé­mon­trées, mais res­sen­ties et pé­né­trant tout son être. Sa , c’est le quié­tisme na­tu­ra­liste. «Na­tu­ra­liste», car se­lon Tchouang-tseu, tout est bien à l’état na­tu­rel; tout dé­gé­nère entre les mains de l’. «Quié­tisme», car pour re­trou­ver en la splen­deur ori­gi­nelle de la , il faut une tran­quillité comme celle de l’ inerte; un calme comme ce­lui du  : «Si la tran­quillité de l’eau per­met de re­flé­ter les choses, que ne peut celle de l’esprit? Qu’il est tran­quille, l’esprit du saint! Il est le mi­roir de l’univers et de tous les êtres» 3. L’acte su­prême est de ne point in­ter­ve­nir, et la su­prême est de ne rien dire : «La nasse sert à prendre le pois­son; quand le pois­son est pris, ou­bliez la nasse. Le piège sert à cap­tu­rer le lièvre; quand le lièvre est pris, ou­bliez le piège. La pa­role sert à ex­pri­mer l’idée; quand l’idée est sai­sie, ou­bliez la pa­role. [Où] pour­rais-je ren­con­trer quelqu’un qui ou­blie la pa­role, et dia­lo­guer avec lui?» 4 La pa­role n’est pas sûre, car c’est d’elle que pro­viennent toutes les dis­tinc­tions éta­blies ar­ti­fi­ciel­le­ment par l’homme. , l’univers est in­dis­tinct, in­for­mel, et soi-même est aussi l’autre : «Ja­dis, Tchouang-tseu rêva qu’il était un pa­pillon vol­ti­geant et sa­tis­fait de son sort et igno­rant qu’il était Tchouang-tseu lui-même; brus­que­ment, il s’éveilla et s’aperçut avec éton­ne­ment qu’il était Tchouang-tseu. Il ne sut plus si c’était Tchouang-tseu rê­vant qu’il était un pa­pillon, ou un pa­pillon rê­vant qu’il était Tchouang-tseu»

  1. En chi­nois 莊子. Par­fois trans­crit Tchouang-tsée, Tchoang-tseu, Tchoang-tzeu, Tchouang-tsze, Tchuang-tze, Chwang-tsze, Chuang-tze, Choang-tzu, Zhuang Si, Zhouangzi ou Zhuangzi. Éga­le­ment connu sous le nom de Tchouang Tcheou (莊周). Par­fois trans­crit Tchuang-tcheou, Chuang Chou, Zhouang Zhou ou Zhuang Zhou. Icône Haut
  2. En chi­nois «南華真經». Par­fois trans­crit «Nan-houa tcheng-king», «Nan-hoà-cienn ching», «Nan hwa chin king», «Nan-hoa-tchenn king», «Nan-houa tchen-tsing» ou «Nan-hua chen ching». Éga­le­ment connu sous le titre abrégé de «南華經» («Nan­hua­jing»). Icône Haut
  1. p. 111. Icône Haut
  2. p. 221. Icône Haut

Hugo, « Napoléon le Petit »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de «Na­po­léon le Pe­tit» et autres œuvres de (XIXe siècle). Il faut re­con­naître que Hugo est non seule­ment le pre­mier en rang des de fran­çaise, de­puis que cette langue a été fixée; mais le seul qui ait un vrai­ment à ce titre d’écrivain dans sa pleine ac­cep­tion. Toutes les ca­té­go­ries de l’ lit­té­raire se trouvent en lui dé­jouées. La qui vou­drait dé­mê­ler cette ti­ta­nique, stu­pé­fiante, te­nant quelque chose de la di­vi­nité, est en pré­sence du pro­blème le plus in­so­luble. Fut-il poète, ro­man­cier ou pen­seur? Fut-il spi­ri­tua­liste ou réa­liste? Il fut tout cela et plus en­core. Nou­veau Qui­chotte, cet est allé por­ter ses pas sur tous les che­mins de l’esprit, mon­ter sur toutes les bar­ri­cades qu’il ren­con­trait, sou­tien des faibles et pour­fen­deur des ty­rans, son­neur de clai­rons et amant de la vio­lette; si bien qu’aucune des fa­milles qui se par­tagent l’espèce hu­maine au et au mo­ral ne peut se l’attribuer en­tiè­re­ment. Tan­tôt égal à la , com­paré à la mon­tagne, rap­pro­ché du , as­si­milé à l’ouragan, tan­tôt phi­lo­sophe, re­dres­seur des abus du siècle, pro­fes­seur d’histoire et guide , tan­tôt chargé d’apitoyer le sur la femme, de le mettre à ge­noux de­vant le vieillard pour le vé­né­rer et de­vant l’enfant pour le conso­ler, il fut je ne sais quel suc­cé­dané de la . Avec sa , c’est un monde cy­clo­péen d’idées et d’impressions qui est parti, un conti­nent de gra­nit qui s’est dé­ta­ché et a roulé avec fra­cas au fond des abîmes. «Qui pour­rait dire : “J’aime ceci ou cela dans Hugo”?», dit Édouard Dru­mont 1. «Comme l’océan, comme la mon­tagne, comme la fo­rêt, ce éveille l’idée de l’. Ce qu’on aime dans l’océan, ce n’est point une vague, ce sont des vagues in­ces­sam­ment re­nou­ve­lées; ce qu’on aime dans la fo­rêt, ce n’est point un arbre ou une feuille, ce sont ces mil­liers d’ et ces mil­liers de feuilles qui confondent leur ver­dure et leur bruit.»

  1. «Vic­tor Hugo de­vant l’opinion», p. 104. Icône Haut

« Les Chants et les Traditions populaires des Annamites »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit d’une de la du . Long­temps dé­dai­gnée par les let­trés, parce qu’elle ne me­nait pas aux car­rières man­da­ri­nales, cette lit­té­ra­ture avait tou­jours été culti­vée par l’effort du . Ainsi donc, à côté de la lit­té­ra­ture of­fi­cielle, qui chan­tait en vers les hommes et les choses de la , il exis­tait une lit­té­ra­ture po­pu­laire, en grande par­tie orale, qui ex­pri­mait sous une forme tan­tôt naïve et simple, tan­tôt nar­quoise et vo­lon­tiers hu­mo­ris­tique, l’ po­pu­laire du Viêt-nam. «Tan­dis que les let­trés s’enfermaient dans leur tour d’ivoire et se plai­saient à com­po­ser des vers qui, ici, res­semblent bien aux vers la­tins, ou à com­men­ter les vieux clas­siques, le peuple tra­vaillait à for­mer la et à pro­duire cette riche lit­té­ra­ture po­pu­laire com­po­sée de dic­tons, de , de , de dis­tiques, de phrases, et ex­pres­sions plus ou moins as­so­nan­cées por­tant des al­lu­sions aux faits du passé ou aux cou­tumes lo­cales, et sur­tout de , de ces belles et douces chan­sons qui s’élèvent les nuits d’été du fond des paillotes ou de l’immensité des ri­zières et des étangs et semblent se ré­per­cu­ter dans l’ jusqu’à la cime fris­son­nante des bam­bous. Elles sont, ces chan­sons, d’un charme , d’une sua­vité pro­fonde. Qui­conque a en­tendu une fois chan­ter par des re­pi­queuses de du delta ton­ki­nois ou des sam­pa­nières de la ri­vière de Huê des chan­sons comme celle-ci :

Mon­tagne, ô mon­tagne, pour­quoi êtes-vous si haute?
Vous ca­chez le et vous me ca­chez le vi­sage de mon bien-aimé!

n’oubliera ja­mais cet ac­cent d’indéfinissable la­mar­ti­nienne qui ré­vèle le fonds de de la race, en même qu’il montre l’excellence de la langue ca­pable d’exprimer de tels », dit très bien Phạm Quỳnh

Lindgren, « Ronya, fille de brigand »

éd. Hachette jeunesse, Paris

éd. Ha­chette , Pa­ris

Il s’agit de «Ro­nya, fille de bri­gand» («Ronja Rö­var­dot­ter») de Mme , la grande dame de la lit­té­ra­ture pour , la créa­trice de la ga­mine la plus ef­fron­tée sor­tie de l’ sué­doise : Fifi Brin­da­cier. Au­cun au­teur n’a été tra­duit en au­tant de langues que Mme Lind­gren. On ra­conte que M. Bo­ris Pan­kine 1, am­bas­sa­deur d’ à Stock­holm, confia un jour à l’écrivaine que presque tous les foyers so­vié­tiques comp­taient deux  : son «Karls­son sur le toit» et la ; ce à quoi elle ré­pli­qua : «Comme c’est étrange! J’ignorais to­ta­le­ment que la Bible était si po­pu­laire!» 2 C’est en 1940 ou 1941 que Fifi Brin­da­cier vit le jour comme per­son­nage de , au mo­ment où l’ fai­sait main basse sur l’, sem­blable à «un monstre éfique qui, à in­ter­valles ré­gu­liers, sort de son trou pour se pré­ci­pi­ter sur une vic­time» 3. Le cou­lait, les gens re­ve­naient mu­ti­lés, tout n’était que mal­heur et déses­poir. Et mal­gré les mille rai­sons d’être dé­cou­ra­gée face à l’avenir de notre , Mme Lind­gren ne pou­vait s’empêcher d’éprouver un cer­tain op­ti­misme quand elle voyait les per­sonnes de de­main : les en­fants, les ga­mins. Ils étaient «joyeux, sin­cères et sûrs d’eux, et ce, comme au­cune gé­né­ra­tion pré­cé­dente ne l’a été» 4. Mme Lind­gren com­prit, alors, que l’avenir du dor­mait dans les chambres des en­fants. C’est là que tout se jouait pour que les hommes et les de de­main de­viennent des sains et bien­veillants, qui voient le monde tel qu’il est, qui en connaissent la beauté. Le de Mme Lind­gren tient à cette . L’ qu’elle porte aux faibles et aux op­pri­més lui vaut éga­le­ment le des pe­tits et des grands. Beau­coup de ses ré­cits ont pour cadre des bour­gades res­sem­blant à sa bour­gade na­tale. Mais il ne s’agit là que du cadre. Car l’essence de ses ré­cits ré­side dans l’imagination dé­bor­dante de l’enfant so­li­taire — ce ter­ri­toire in­té­rieur où nul ne peut plus être tra­qué, où la seule est pos­sible. «Je veux écrire pour des lec­teurs qui savent créer des mi­racles. Les en­fants savent créer des mi­racles en li­sant», dit-elle 5. De même que toute , dans n’importe quel genre, dé­passe les li­mites de ce genre et de­vient quelque chose d’incomparable; de même, les ou­vrages de Mme Lind­gren dé­passent les li­mites étroites de la . Ce sont des le­çons de li­berté pour tous les âges et tous les siècles : «: Li­berté! Car sans li­berté, la fleur du poème fa­nera où qu’elle pousse» 6.

  1. En Борис Дмитриевич Панкин. Icône Haut
  2. Dans «Dos­sier : As­trid Lind­gren». Icône Haut
  3. Dans Jens An­der­sen, «As­trid Lind­gren». Icône Haut
  1. id. Icône Haut
  2. Dans «Dos­sier : As­trid Lind­gren». Icône Haut
  3. Dans Jens An­der­sen, «As­trid Lind­gren». Icône Haut

Lindgren, « Rasmus et le Vagabond »

éd. Nathan, coll. Poche Nathan, Paris

éd. Na­than, coll. Poche Na­than, Pa­ris

Il s’agit de «Ras­mus et le Va­ga­bond» («Ras­mus på luf­fen») de Mme , la grande dame de la lit­té­ra­ture pour , la créa­trice de la ga­mine la plus ef­fron­tée sor­tie de l’ sué­doise : Fifi Brin­da­cier. Au­cun au­teur n’a été tra­duit en au­tant de langues que Mme Lind­gren. On ra­conte que M. Bo­ris Pan­kine 1, am­bas­sa­deur d’ à Stock­holm, confia un jour à l’écrivaine que presque tous les foyers so­vié­tiques comp­taient deux  : son «Karls­son sur le toit» et la ; ce à quoi elle ré­pli­qua : «Comme c’est étrange! J’ignorais to­ta­le­ment que la Bible était si po­pu­laire!» 2 C’est en 1940 ou 1941 que Fifi Brin­da­cier vit le jour comme per­son­nage de , au mo­ment où l’ fai­sait main basse sur l’, sem­blable à «un monstre éfique qui, à in­ter­valles ré­gu­liers, sort de son trou pour se pré­ci­pi­ter sur une vic­time» 3. Le cou­lait, les gens re­ve­naient mu­ti­lés, tout n’était que mal­heur et déses­poir. Et mal­gré les mille rai­sons d’être dé­cou­ra­gée face à l’avenir de notre , Mme Lind­gren ne pou­vait s’empêcher d’éprouver un cer­tain op­ti­misme quand elle voyait les per­sonnes de de­main : les en­fants, les ga­mins. Ils étaient «joyeux, sin­cères et sûrs d’eux, et ce, comme au­cune gé­né­ra­tion pré­cé­dente ne l’a été» 4. Mme Lind­gren com­prit, alors, que l’avenir du dor­mait dans les chambres des en­fants. C’est là que tout se jouait pour que les hommes et les de de­main de­viennent des sains et bien­veillants, qui voient le monde tel qu’il est, qui en connaissent la beauté. Le de Mme Lind­gren tient à cette . L’ qu’elle porte aux faibles et aux op­pri­més lui vaut éga­le­ment le des pe­tits et des grands. Beau­coup de ses ré­cits ont pour cadre des bour­gades res­sem­blant à sa bour­gade na­tale. Mais il ne s’agit là que du cadre. Car l’essence de ses ré­cits ré­side dans l’imagination dé­bor­dante de l’enfant so­li­taire — ce ter­ri­toire in­té­rieur où nul ne peut plus être tra­qué, où la seule est pos­sible. «Je veux écrire pour des lec­teurs qui savent créer des mi­racles. Les en­fants savent créer des mi­racles en li­sant», dit-elle 5. De même que toute , dans n’importe quel genre, dé­passe les li­mites de ce genre et de­vient quelque chose d’incomparable; de même, les ou­vrages de Mme Lind­gren dé­passent les li­mites étroites de la lit­té­ra­ture pour la . Ce sont des le­çons de li­berté pour tous les âges et tous les siècles : «: Li­berté! Car sans li­berté, la fleur du poème fa­nera où qu’elle pousse» 6.

  1. En Борис Дмитриевич Панкин. Icône Haut
  2. Dans «Dos­sier : As­trid Lind­gren». Icône Haut
  3. Dans Jens An­der­sen, «As­trid Lind­gren». Icône Haut
  1. id. Icône Haut
  2. Dans «Dos­sier : As­trid Lind­gren». Icône Haut
  3. Dans Jens An­der­sen, «As­trid Lind­gren». Icône Haut

Mencius, « Œuvres »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de Men­cius 1 (ou Meng-tseu 2), qui fleu­ris­sait en à la même époque qu’Aris­tote en . On ra­conte que sa mère ha­bi­tait près d’un ci­me­tière. Le pe­tit Men­cius al­lait au mi­lieu des et imi­tait par amu­se­ment les cé­ré­mo­nies et les la­men­ta­tions qui s’y fai­saient. «Ce n’est pas un en­droit où de­meu­rer avec mon fils» 3, se dit sa mère qui s’en fut lo­ger près d’un mar­ché. Son fils imita par jeu les mar­chands qui criaient et ven­daient leurs mar­chan­dises. «Ce n’est pas un lieu où ha­bi­ter avec mon fils», se dit en­core sa mère qui dé­mé­na­gea de nou­veau et alla de­meu­rer près d’une école. Son fils imita dès lors les éco­liers qui ap­pre­naient à dis­po­ser les tables et les vases de bois pour les of­frandes, à sa­luer, à té­moi­gner du , à se pré­sen­ter et à se re­ti­rer avec po­li­tesse. «Voici l’endroit qui convient à mon fils!», se dit-elle. Tou­te­fois, le goût de Men­cius pour les études ne pa­raît pas avoir été aussi pro­noncé que chez Confu­cius. Un jour qu’il était ren­tré après avoir aban­donné l’école, il trouva sa mère oc­cu­pée à tis­ser. Elle lui de­manda : «Où en es-tu dans tes études?» L’enfant ré­pon­dit : «Comme ci, comme ça». Elle tran­cha d’un coup de cou­teau le tissu. Ef­frayé, Men­cius lui de­manda la de son geste. Elle ré­pli­qua : «Si tu aban­donnes tes études, tu ne pour­ras échap­per au ser­vage et tu ne dis­po­se­ras pas des moyens d’écarter les pires mal­heurs. En quoi se­rait-ce dif­fé­rent de ce in­ter­rompu?… Ne man­que­rions-nous pas sans cesse de nour­ri­ture?»

  1. Au­tre­fois trans­crit Mem­cius ou Man­cius. «Il est resté peu de traces de cet usage sin­gu­lier, que les pre­miers avaient in­tro­duit, en écri­vant en sur l’ et la lit­té­ra­ture des , d’ajouter des ter­mi­nai­sons la­tines aux des et des hommes cé­lèbres, pour in­di­quer les rap­ports gram­ma­ti­caux qui liaient ces noms aux autres par­ties des phrases… Deux noms seuls ont conservé la forme eu­ro­péenne qu’on leur avait don­née d’abord, ce sont ceux de… et Men­cius», dit Abel Ré­mu­sat. Icône Haut
  2. En chi­nois 孟子. Par­fois trans­crit Mong-tsée, Mong Tseû, Mem Tsu, Meng-tzu, Meng Tzeu, Meng-tse, Meng-tsze ou Mengzi. Icône Haut
  1. Liu Xiang, «列女傳» (« des illustres»), in­édit en . Icône Haut

« L’Hyménée dans le rêve : contes et légendes du Viêt-nam »

éd. Sudestasie, Paris

éd. Su­des­ta­sie, Pa­ris

Il s’agit d’une de la du . Long­temps dé­dai­gnée par les let­trés, parce qu’elle ne me­nait pas aux car­rières man­da­ri­nales, cette lit­té­ra­ture avait tou­jours été culti­vée par l’effort du . Ainsi donc, à côté de la lit­té­ra­ture of­fi­cielle, qui chan­tait en vers les hommes et les choses de la , il exis­tait une lit­té­ra­ture po­pu­laire, en grande par­tie orale, qui ex­pri­mait sous une forme tan­tôt naïve et simple, tan­tôt nar­quoise et vo­lon­tiers hu­mo­ris­tique, l’ po­pu­laire du Viêt-nam. «Tan­dis que les let­trés s’enfermaient dans leur tour d’ivoire et se plai­saient à com­po­ser des vers qui, ici, res­semblent bien aux vers la­tins, ou à com­men­ter les vieux clas­siques, le peuple tra­vaillait à for­mer la et à pro­duire cette riche lit­té­ra­ture po­pu­laire com­po­sée de dic­tons, de , de , de dis­tiques, de phrases, et ex­pres­sions plus ou moins as­so­nan­cées por­tant des al­lu­sions aux faits du passé ou aux cou­tumes lo­cales, et sur­tout de , de ces belles et douces chan­sons qui s’élèvent les nuits d’été du fond des paillotes ou de l’immensité des ri­zières et des étangs et semblent se ré­per­cu­ter dans l’ jusqu’à la cime fris­son­nante des bam­bous. Elles sont, ces chan­sons, d’un charme , d’une sua­vité pro­fonde. Qui­conque a en­tendu une fois chan­ter par des re­pi­queuses de du delta ton­ki­nois ou des sam­pa­nières de la ri­vière de Huê des chan­sons comme celle-ci :

Mon­tagne, ô mon­tagne, pour­quoi êtes-vous si haute?
Vous ca­chez le et vous me ca­chez le vi­sage de mon bien-aimé!

n’oubliera ja­mais cet ac­cent d’indéfinissable la­mar­ti­nienne qui ré­vèle le fonds de de la race, en même qu’il montre l’excellence de la langue ca­pable d’exprimer de tels », dit très bien Phạm Quỳnh

« Les Entretiens de Confucius »

éd. Gallimard, coll. Connaissance de l’Orient, Paris

éd. Gal­li­mard, coll. Connais­sance de l’, Pa­ris

Il s’agit des «Dia­logues» ou « de » 1Lu­nyu» 2), la d’angle de la chi­noise, l’œuvre la plus si­gni­fi­ca­tive pour la connais­sance de Confu­cius (VIe-Ve siècle av. J.-C.). Com­pa­rée sous le rap­port mo­ral, et même , la doc­trine de Confu­cius se rap­proche de celle qui fut, presque à la même époque, en­sei­gnée par So­crate. Ja­mais, peut-être, l’esprit hu­main ne fut plus di­gne­ment re­pré­senté que par ces deux . En voici les prin­ci­pales rai­sons. La pre­mière est que Confu­cius et So­crate ont re­cueilli ce qu’il y a de meilleur dans la des An­ciens. La se­conde est qu’ils ont ajouté à cette mo­rale la sim­pli­cité, la clarté et l’évidence, qui doivent ré­gner par­tout et se faire sen­tir aux les plus gros­siers. En­fin, c’est parce que Confu­cius et So­crate poussent en avant leur , mais ne la poussent pas trop loin; leur leur fai­sant tou­jours connaître jusqu’où il faut al­ler et où il faut s’arrêter. En quoi ils ont un avan­tage consi­dé­rable non seule­ment sur un grand nombre d’Anciens, qui ont de tels su­jets, mais aussi sur la plu­part des Mo­dernes, qui ont tant de rai­son­ne­ments faux ou re­cher­chés, tant de traits d’esprit dé­pla­cés, tant de sub­ti­li­tés épou­van­tables. «La voie… n’est pas sui­vie, je le sais», dit ailleurs Confu­cius 3. «Les hommes in­tel­li­gents et éclai­rés vont au-delà, et les igno­rants res­tent en deçà.» «Le grand sa­vant Kô­jirô Yo­shi­kawa consi­dé­rait les “En­tre­tiens de Confu­cius” comme le plus beau livre du . J’ignore s’il mé­rite vrai­ment ce titre… mais il est cer­tain que, dans toute l’, nul écrit n’a exercé plus du­rable sur une plus grande par­tie de l’», dit très bien M. Pierre Ry­ck­mans 4. C’est dans ces «En­tre­tiens» que Confu­cius s’est ma­ni­festé comme le plus grand maître et le plus grand phi­lo­sophe du monde orien­tal. On y voit son ar­dent de l’humanité; sa mo­rale in­fi­ni­ment , mais en même pui­sée dans les plus pures du bon sens; son souci per­ma­nent de re­don­ner à la hu­maine ce pre­mier lustre, cette pre­mière beauté qu’elle avait re­çue du , et qui avait été obs­cur­cie par les té­nèbres de l’ignorance et par la conta­gion du . «Le Maître dit : “Ce n’est pas un mal­heur d’être mé­connu des hommes, mais c’est un mal­heur de les mé­con­naître”.» Où trou­ver une maxime plus belle, une in­dif­fé­rence plus grande à l’égard de la gloire et des gran­deurs? On ne doit pas être sur­pris si les eu­ro­péens, qui les pre­miers firent connaître «le vé­néré maître K’ong» ou K’ong-fou-tseu 5 sous le nom la­ti­nisé de Confu­cius, conçurent pour sa pen­sée un en­thou­siasme égal à ce­lui des .

  1. Par­fois tra­duit «Le Livre de la de Confu­cius», «Mor­ceaux de contro­verse de Confu­cius», «Le Livre des », «Dis­cus­sions et Al­lo­cu­tions», «Conver­sa­tions ou Ana­lectes de Confu­cius», «Dis­cours» ou «Les En­tre­tiens phi­lo­so­phiques». Icône Haut
  2. En chi­nois «論語». Au­tre­fois trans­crit «Lén-yù», «Luen yu», «Louen yu», «Loung yu», «Liun iu», «Loun-yu» ou «Lún-iù». Icône Haut
  3. «L’Invariable Mi­lieu». Icône Haut
  1. p. 7. Icône Haut
  2. En chi­nois 孔夫子. Par­fois trans­crit Cong fou tsëe, K’ong fou-tse, K’oung fou tseu, Khoung-fou-dze, Kung--dsü, Kung fu-tzu ou Kong­fuzi. Icône Haut

Homère, « Odyssée »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de «L’Odyssée» 1 d’ 2. «Le chantre des ex­ploits hé­roïques, l’interprète des , le se­cond dont s’éclairait la , la lu­mière des muses, la tou­jours jeune du en­tier, Ho­mère, il est là, étran­ger, sous le sable de ce ri­vage», dit une épi­gramme fu­né­raire 3. On sait qu’Alexandre de Ma­cé­doine por­tait tou­jours avec lui une co­pie des chants d’Homère, et qu’il consa­crait à la garde de ce tré­sor une cas­sette pré­cieuse, en­ri­chie d’ et de pier­re­ries, trou­vée parmi les ef­fets du roi Da­rius. Alexandre mou­rut; l’immense Em­pire qu’il avait ras­sem­blé pour un ins­tant tomba en ruines; mais par­tout où avaient volé les se­mences de la grecque, les chants d’Homère avaient fait le voyage mys­té­rieux. Par­tout, sur les bords de la Mé­di­ter­ra­née, on par­lait , on écri­vait avec les lettres grecques, et nulle part da­van­tage que dans cette ville à l’embouchure du Nil, qui por­tait le nom de son fon­da­teur : Alexan­drie. «C’est là que se fai­saient les pré­cieuses co­pies des chants, là que s’écrivaient ces , dont la plu­part ont péri six ou sept siècles plus tard avec la fa­meuse bi­blio­thèque d’Alexandrie, que fit brû­ler le ca­life Omar, ce bien­fai­teur des éco­liers», dit Frie­drich Spiel­ha­gen 4. Les Ro­mains re­cueillirent, au­tant qu’il était pos­sible à un guer­rier et igno­rant, l’héritage du grec. Et c’était Ho­mère qu’on met­tait entre les mains du jeune comme élé­ment de son , et dont il conti­nuait plus tard l’étude dans les hautes écoles d’Athènes. Si Es­chyle dit que ses tra­gé­dies ne sont que «les re­liefs des grands fes­tins d’Homère» 5, on peut le dire avec en­core plus de des Ro­mains, qui s’invitent chez Ho­mère et re­viennent avec quelque croûte à gru­ger, un mor­ceau de car­ti­lage des mets qu’on a ser­vis.

  1. En grec «Ὀδύσσεια». Icône Haut
  2. En grec Ὅμηρος. Icône Haut
  3. En grec «Ἡρώων κάρυκ’ ἀρετᾶς, μακάρων δὲ προφήταν, Ἑλλάνων βιοτᾷ δεύτερον ἀέλιον, Μουσῶν φέγγος Ὅμηρον, ἀγήραντον στόμα κόσμου παντός, ἁλιρροθία, ξεῖνε, κέκευθε κόνις». An­ti­pa­ter de Si­don dans «An­tho­lo­gie grecque, d’après le ma­nus­crit pa­la­tin». Icône Haut
  1. «Ho­mère», p. 513. Icône Haut
  2. En grec «τεμάχη τῶν Ὁμήρου μεγάλων δείπνων». Athé­née, «Ban­quet des sa­vants». Icône Haut