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« Paraboles de Sendabar sur les ruses des femmes »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit de la ver­sion hé­braïque des «Pa­ra­boles de Sen­da­bar sur les ruses des » («Mi­shle Sen­da­bar» 1), ou mieux «Pa­ra­boles de Sin­de­bad», d’origine in­dienne, dont il existe des imi­ta­tions dans la plu­part des langues orien­tales, et qui, sous le titre de «L’ des sept de » («His­to­ria sep­tem sa­pien­tum Romæ»), ont ob­tenu un très vif en oc­ci­den­tale, où les trou­vères en ont fait «Le des sept sages». Le ren­sei­gne­ment le plus an­cien et le plus utile que nous ayons sur ces contes, nous est donné par l’historien Mas­soudi (Xe siècle apr. J.-C.). Dans un cha­pitre in­ti­tulé «Gé­né­ra­li­tés sur l’histoire de l’Inde, ses , et l’origine de ses royaumes», cet his­to­rien at­tri­bue le «Livre des sept vi­zirs, du maître, du jeune et de la femme du roi» à un in­dien, contem­po­rain du roi Harṣa Vard­hana (VIIe siècle apr. J.-C.), et qu’il nomme Sin­de­bad 2. Ainsi donc, c’est en Inde que l’ hu­maine, fé­conde et exu­bé­rante comme la val­lée du Gange, a en­fanté ces contes; c’est de l’Inde qu’ils ont pris leur en­vol en se ré­pan­dant aux ex­tré­mi­tés du pour nous amu­ser et ins­truire. Et si nous fai­sons l’effort de re­mon­ter de siècle en siècle, de en langue — du fran­çais au , du la­tin à l’, de l’hébreu à l’, de l’arabe au pehlvi, du pehlvi au — nous ar­ri­vons à Sen­da­bar ou Sen­da­bad ou Sin­de­bad ou Sind­bad, qu’il ne faut pas confondre du reste avec le ma­rin du même nom dans les «Mille et une Nuits». Tous ces pa­raissent cor­rom­pus. En tout cas, en l’absence du texte ori­gi­nal sans­crit, je m’en ré­fère à la ver­sion hé­braïque. En voici l’intrigue : Une reine de­vient amou­reuse de son beau-fils, qui re­jette les vaines avances de cette femme. Elle en est ir­ri­tée et l’accuse d’avoir voulu la sé­duire, un peu comme Phèdre a ac­cusé Hip­po­lyte, ou comme la femme de Pu­ti­phar a ac­cusé Jo­seph. Le roi condamne son fils; mais, du­rant une se­maine, le de­meure sus­pendu. Chaque jour, l’un des sept sages voués à l’ du jeune prince fait au mo­narque un ré­cit qui a pour but de lui ins­pi­rer quelque dé­fiance à l’égard des femmes; et la reine y ré­pond, chaque jour, par un ré­cit qui doit pro­duire l’effet contraire. En­fin, le prince dé­montre son in­no­cence, et la reine est condam­née; mais le jeune homme de­mande et ob­tient la grâce de la cou­pable.

  1. En hé­breu «משלי סנדבאר». Au­tre­fois trans­crit «Mi­schle San­da­bar» ou «Mi­shle Sen­de­bar». Icône Haut
  1. En arabe سندباد. Icône Haut

« Chansons jaillies de l’âme du peuple [vietnamien] »

dans « Plaintes de la femme d’un guerrier » (éd. Sudestasie, Paris), p. 93-113

dans «Plaintes de la femme d’un guer­rier» (éd. Su­des­ta­sie, Pa­ris), p. 93-113

Il s’agit d’une de la du . Long­temps dé­dai­gnée par les let­trés, parce qu’elle ne me­nait pas aux car­rières man­da­ri­nales, cette lit­té­ra­ture avait tou­jours été culti­vée par l’effort du . Ainsi donc, à côté de la lit­té­ra­ture of­fi­cielle, qui chan­tait en vers les hommes et les choses de la , il exis­tait une lit­té­ra­ture po­pu­laire, en grande par­tie orale, qui ex­pri­mait sous une forme tan­tôt naïve et simple, tan­tôt nar­quoise et vo­lon­tiers hu­mo­ris­tique, l’ po­pu­laire du Viêt-nam. «Tan­dis que les let­trés s’enfermaient dans leur tour d’ivoire et se plai­saient à com­po­ser des vers qui, ici, res­semblent bien aux vers la­tins, ou à com­men­ter les vieux clas­siques, le peuple tra­vaillait à for­mer la et à pro­duire cette riche lit­té­ra­ture po­pu­laire com­po­sée de dic­tons, de , de , de dis­tiques, de phrases, et ex­pres­sions plus ou moins as­so­nan­cées por­tant des al­lu­sions aux faits du passé ou aux cou­tumes lo­cales, et sur­tout de , de ces belles et douces chan­sons qui s’élèvent les nuits d’été du fond des paillotes ou de l’immensité des ri­zières et des étangs et semblent se ré­per­cu­ter dans l’ jusqu’à la cime fris­son­nante des bam­bous. Elles sont, ces chan­sons, d’un charme , d’une sua­vité pro­fonde. Qui­conque a en­tendu une fois chan­ter par des re­pi­queuses de du delta ton­ki­nois ou des sam­pa­nières de la ri­vière de Huê des chan­sons comme celle-ci :

Mon­tagne, ô mon­tagne, pour­quoi êtes-vous si haute?
Vous ca­chez le et vous me ca­chez le vi­sage de mon bien-aimé!

n’oubliera ja­mais cet ac­cent d’indéfinissable la­mar­ti­nienne qui ré­vèle le fonds de de la race, en même qu’il montre l’excellence de la langue ca­pable d’exprimer de tels », dit très bien Phạm Quỳnh

Galland, « Journal, [pendant] la période parisienne. Tome I (1708-1709) »

éd. Peeters, coll. Association pour la promotion de l’histoire et de l’archéologie orientales-Mémoires, Louvain

éd. Pee­ters, coll. As­so­cia­tion pour la pro­mo­tion de l’ et de l’ orien­tales-Mé­moires, Lou­vain

Il s’agit du «Jour­nal» d’, orien­ta­liste et nu­mis­mate (XVIIe-XVIIIe siècle), à qui l’on doit une des œuvres qui mo­di­fièrent le plus l’ lit­té­raire, si­non pro­fon­dé­ment, du moins dans la , je veux dire les «Mille et une Nuits». Toute sa , Gal­land vé­cut seul, presque sans autres amis que ses — les seuls qui ne le dé­çurent ja­mais. Sa­vant de pre­mier ordre, il s’attachait à étu­dier les langues orien­tales et les mé­dailles an­tiques, propres à je­ter quelque lu­mière — si in­fime fût-elle — sur les an­nales du passé. Voya­geur, il cher­chait les traits né­gli­gés par ses de­van­ciers. Sou­vent heu­reux dans ses re­cherches, simple et la­bo­rieux, il était, ce­pen­dant, d’une cer­taine hu­meur dans la lec­ture de ses contem­po­rains, qu’il ne pou­vait souf­frir d’y voir im­pri­mées des er­reurs sans prendre la plume pour les cor­ri­ger. «J’y trou­vai», écrit-il au su­jet d’un livre 1, «des ex­pli­ca­tions si fort hors du bon sens, que je fus contraint de ces­ser la lec­ture pour la re­prendre le ma­tin, de crainte que je n’en puisse dor­mir. Mais je fus plus d’une heure et de­mie à m’endormir, non­obs­tant les ef­forts que je pus faire pour chas­ser de mon es­prit ces ex­tra­va­gances, dont l’auteur, qui ne s’était pas nommé, se fai­sait néan­moins as­sez connaître». Ses res­tèrent tou­jours, pour le nombre et l’importance, au-des­sous de son éru­di­tion. Un jour, il eut une dis­cus­sion très vive à l’Académie des ; dans une de ses ré­pliques, on re­marque ce pas­sage qui montre l’étendue de son ac­ti­vité in­las­sable et sa haute ri­gueur : «Py­tha­gore ne de­man­dait à ses dis­ciples que sept ans de si­lence pour s’instruire des prin­cipes de la avant que d’en écrire ou d’en vou­loir ju­ger. Sans que per­sonne l’eût exigé, j’ai gardé un si­lence plus ri­gide et plus long dans l’étude des mé­dailles. Ce si­lence a été de trente an­nées. Pen­dant tout ce -là, je ne me suis pas contenté d’écouter un grand nombre de maîtres ha­biles, de lire et d’examiner leurs ou­vrages; j’ai en­core ma­nié et dé­chif­fré plu­sieurs mil­liers de mé­dailles grecques et la­tines, tant en qu’en et en , à Smyrne, à , à Alexan­drie et dans les de l’Archipel»

  1. «Jour­nal», 4 juin 1711. Icône Haut

Bâyazîd, « Les Dits, “Shatahât” »

éd. Fayard, coll. L’Espace intérieur, Paris

éd. Fayard, coll. L’ in­té­rieur, Pa­ris

Il s’agit des «Dits ex­ta­tiques» («Sha­ta­hât» 1) de Bâyazîd Bis­tâmî 2, l’un des pre­miers de la , et aussi l’un des plus cé­lèbres (IXe siècle apr. J.-C.). Cet so­li­taire at­tei­gnit le plus haut de­gré du , c’est-à-dire l’union avec , au point qu’il di­sait être de­venu Dieu Lui-même : «Je me suis dé­pouillé de mon “” comme la vi­père de sa peau. Puis je me suis é : j’étais Lui» 3. Et plus loin : «Louange à moi, louange à moi! je suis [le] Sei­gneur Très-Haut» 4Sub­hânî, sub­hânî! mâ a’zam sha’nî» 5). Ces pa­roles au­da­cieuses, qu’il faut prendre au sens al­lé­go­rique, faillirent lui coû­ter la ; elles coû­te­ront celle de Hal­lâj. Un maître soufi et un contem­po­rain de Bâyazîd, Ju­nayd Bagh­dâdî, les tra­duira en , dans la­quelle elles sont par­ve­nues jusqu’à nous. La du dé­pouille­ment se ma­ni­fes­tait chez Bâyazîd par le re­non­ce­ment au et par la su­bli­ma­tion des actes spi­ri­tuels tels que la . Chaque fois qu’il sou­hai­tait mé­di­ter, Bâyazîd s’enfermait dans sa mai­son et en bou­chait tous les ori­fices, pour qu’aucun bruit n’y pé­né­trât. Si, mal­gré tout, quelque cu­rieux frap­pait à sa porte, il criait : «Qui cherches-tu? — Bâyazîd Bis­tâmî. — Mon en­fant, Bâyazîd Bis­tâmî cherche Bâyazîd Bis­tâmî de­puis qua­rante ans» 6. Comme on ne le voyait ja­mais aux cé­ré­mo­nies ni aux ré­cep­tions, on le lui re­pro­cha : «Ja­dis, les ren­daient vi­site aux ma­lades, as­sis­taient aux fu­né­railles et al­laient pré­sen­ter leurs condo­léances». À quoi il ré­pon­dit : «Ils agis­saient ainsi gui­dés par leur ; ils ne sont pas comme moi qui suis dé­pos­sédé de ma rai­son» 7. On lui de­manda d’où lui ve­nait l’état de , dans le­quel il se trou­vait : «J’ai ras­sem­blé toutes les né­ces­si­tés de la vie, je les ai fa­go­tées avec la corde du conten­te­ment… et je les ai lan­cées dans l’océan du déses­poir. Alors, je fus sou­lagé»

  1. En arabe «شطحات». Par­fois trans­crit «Šaṭaḥāt» ou «Cha­ta­hât». Icône Haut
  2. En بایزید بسطامی. Au­tre­fois trans­crit Baei­zeed Bas­tamy, Baya­zid Bus­tami, Bayé­zid Bis­thâmî, Báya­zyd Bistámy, Baye­zid-Bes­tamy ou Bāyazīd Besṭāmī. En arabe Abû Yazîd Bis­tâmî (أبو يزيد البسطامي). Au­tre­fois trans­crit Abu Ie­zid al Bas­thami, Abu Ya­zid al Bas­tami, Abou-Ye­zid-al-Bos­tami ou Abû-Jezîd el-Bes­thâmî. Icône Haut
  3. p. 59. Icône Haut
  4. p. 44. Icône Haut
  1. En arabe «سبحاني سبحاني ما أعظم شأني». Icône Haut
  2. p. 40. Icône Haut
  3. p. 89. Icône Haut

Jamîl, « Élégie »

dans « Journal des savants », 1829, p. 419-420

dans «Jour­nal des », 1829, p. 419-420

Il s’agit de Ja­mîl ibn Ma‘mar 1 (VIIe siècle apr. J.-C.), poète qui de­vint cé­lèbre par la ten­dresse de ses et la constance de son en­vers Bu­thayna 2 au point qu’on le sur­nomma Ja­mîl Bu­thayna 3le Ja­mîl de Bu­thayna»). On ra­conte que la pre­mière fois que Ja­mîl s’attacha à Bu­thayna fut lorsqu’il alla un jour abreu­ver son bé­tail. Il s’endormit, lais­sant ses cha­meaux re­mon­ter la val­lée au bord de la­quelle était ins­tallé le clan de Bu­thayna. Celle-ci, en al­lant pui­ser de l’ avec une voi­sine, passa près des cha­meaux et les chassa. Elle n’était en­core qu’une fillette. Ja­mîl l’insulta; elle lui ré­pon­dit par des raille­ries qu’il trouva agréables. Alors, il com­posa le poème sui­vant : «Ô Bu­thayna, ce sont des in­sultes qui ont dé­clen­ché notre amour dans la val­lée de Bag­hîd. Nous lui avons adressé des pro­pos aux­quels elle ré­pon­dit par des pa­roles sem­blables. C’est vrai, ô Bu­thayna, que chaque ap­pelle une ré­ponse» 4. Il prit, par la suite, l’habitude de lui rendre vi­site en l’absence des hommes du clan et de ba­var­der avec elle, jusqu’au mo­ment où l’on eut vent de l’affaire. Il de­manda sa main, mais on la lui re­fusa. Lorsqu’on la ma­ria, il conti­nua à la ren­con­trer chez elle à l’insu de son mari. On s’en plai­gnit au gou­ver­neur, et ce­lui-ci or­donna qu’au cas où Ja­mîl ren­drait vi­site à Bu­tayna, il se­rait per­mis de ver­ser son . Ja­mîl s’enfuit au Yé­men; mais chaque , il gra­vis­sait les dunes du dé­sert pour res­pi­rer le vent qui ve­nait du pays de Bu­thayna : «Ne vois-tu pas com­bien je suis éperdu et que mon est dé­fait? Un souffle seule­ment de par­fum de Bu­thayna… il faut si peu à mon et même moins que si peu» 5. On dit que Ja­mîl mou­rut en peu de après. Lorsque la de sa fut par­ve­nue à la Mecque, et que Bu­thayna, après avoir in­ter­rogé le por­teur de cette fa­tale nou­velle, ne put plus dou­ter de la perte de son amant, elle ex­prima sa par les vers sui­vants, les seuls qui se soient conser­vés de sa  : «Certes, l’heure où j’oublierai le de Ja­mîl, est une heure que le cours du temps n’a point en­core ame­née; et puisse-t-elle ne ja­mais ar­ri­ver! Ô Ja­mîl, ô fils de Ma‘mar, quand la mort t’aura frappé, que m’importe d’éprouver les tour­ments de la ou de goû­ter ses dou­ceurs!»

  1. En arabe جميل بن معمر. Par­fois trans­crit Ge­mil, Djé­mil, Ǧamīl ou Djamīl. Icône Haut
  2. En arabe بثينة. Par­fois trans­crit Bo­çaïna, Bo­théina, Bo­theï­nah, Bo­taïna, Bo­taï­nah, Buṯayna, Bu­tay­nah, Bo­thayna ou Bou­thayna. On ren­contre aussi la gra­phie Bathna (بثنة) dont Bu­thayna est le di­mi­nu­tif. Icône Haut
  3. En arabe جميل بثينة. Icône Haut
  1. Dans Abû al-Fa­raj, «La Femme arabe dans “Le Livre des chants”», p. 76. Icône Haut
  2. Dans Jean-Claude Va­det, «L’Esprit cour­tois en », p. 365. Icône Haut

Lâtifî, « Éloge d’Istanbul »

éd. Actes Sud-Sindbad, coll. La Bibliothèque turque, Arles

éd. Actes Sud-Sind­bad, coll. La Bi­blio­thèque turque, Arles

Il s’agit de l’«Éloge d’Istanbul» («Ev­sâf-ı İst­anbul» 1) de Lâ­tifî 2. Au XVIe siècle apr. J.-C., la ca­pi­tale de l’Empire for­mait un tel­le­ment vaste, que cha­cun de ses cô­tés com­po­sait un cli­mat, et cha­cun de ses quar­tiers équi­va­lait à une grande pro­vince. Sa ma­jesté et sa puis­sance in­fi­nies mé­ri­taient et confir­maient le ver­set du  : «une ville telle que ja­mais on n’en créa de sem­blable, dans au­cun pays» 3. Les re­ten­tis­santes ex­pé­di­tions de So­li­man, qui ébran­lèrent l’ et l’, n’arrêtèrent pas les pa­ci­fiques tra­vaux des à Is­tan­bul. On éri­geait des su­perbes, parmi les­quels la mos­quée de So­li­man, chef-d’œuvre de gran­deur dont l’élégante cou­pole était or­née, de la main du cal­li­graphe Ah­med Ka­ra­hi­sari, de cet autre ver­set du Co­ran : « est la lu­mière des cieux et de la ! Sa lu­mière est com­pa­rable à une niche où se trouve une lampe» 4; on bâ­tis­sait des ponts, des ba­zars; et deux cents chan­taient et trou­vaient des au­di­teurs, au mi­lieu du fra­cas conti­nuel que la ap­por­tait des deux rives du Bos­phore. Comme tout jeune pro­vin­cial, Lâ­tifî rê­vait de voir et de fré­quen­ter cette ville dont la re­nom­mée s’élevait jusqu’au fir­ma­ment. Quand le de s’y pro­me­ner et de s’y dis­traire rem­plit tout son cœur et toutes ses pen­sées, cet de lettres quitta son Kas­ta­monu na­tal et loin­tain, et se ren­dit à Is­tan­bul. «Je dé­cou­vris», dit-il 5, «un tel en­semble de mer­veilles et une telle source de cu­rio­si­tés que ja­mais les yeux du n’en ont vu de pa­reilles. Au­cun chantre di­sert en ver­sets et au­cun pro­sa­teur par­fait du verbe, parmi les com­pi­la­teurs dé­bor­dant d’ et les… or­fèvres du vers, n’a été ca­pable de grif­fon­ner ou de gri­bouiller un de belle com­po­si­tion ou un ar­ticle de bonne re­nom­mée, apte à of­frir un d’, une et une à ceux qui… ne l’ont pas vue.» Ce fut pour cette et par un dé­sir de gloire que Lâ­tifî en­tre­prit, mal­gré les «faibles et in­suf­fi­sants moyens» 6 que l’indifférence des ci­ta­dins lais­sait à sa dis­po­si­tion, de faire l’éloge de cette ville en­chan­te­resse, rem­plie de mul­ti­tude, de ce lieu digne d’ et riches, nobles et vi­lains se cô­toyaient dans un brou­haha.

  1. Par­fois trans­crit «Awṣāf-i Is­tan­bul». Icône Haut
  2. Par­fois trans­crit La­thifi ou La­thify. De son vrai nom Abdül­lâ­tif Çe­lebi, dont Lâ­tifî est la forme ad­jec­tive. Éga­le­ment connu sous le sur­nom de Kas­ta­mo­nulu Lâ­tifî («Lâ­tifî, na­tif de Kas­ta­monu»). Icône Haut
  3. LXXXIX, 8. Icône Haut
  1. XXIV, 35. Icône Haut
  2. p. 48-49. Icône Haut
  3. p. 49. Icône Haut

« Les Paroles remarquables, les Bons Mots et les Maximes des Orientaux »

éd. Maisonneuve et Larose, coll. Dédale, Paris

éd. Mai­son­neuve et La­rose, coll. Dé­dale, Pa­ris

Il s’agit d’un re­cueil de arabes, per­sans et turcs. Nul genre d’ n’est plus an­cien que ce­lui des pro­verbes. Son ori­gine re­monte aux âges les plus re­cu­lés du globe. Dès que les hommes, mus par un ins­tinct ir­ré­sis­tible ou pous­sés par la vo­lonté di­vine, se furent réunis en ; dès qu’ils eurent consti­tué un suf­fi­sant à l’expression de leurs be­soins, les pro­verbes prirent nais­sance en tant que ré­sumé na­tu­rel des idées com­munes de l’. «S’ils avaient pu se conser­ver, s’ils étaient jusqu’à nous sous leur forme pri­mi­tive», dit -Ma­rie Qui­tard 1, «ils se­raient le plus cu­rieux mo­nu­ment du pro­grès des pre­mières so­cié­tés; ils jet­te­raient un jour sur l’ de la , dont ils mar­que­raient le point de dé­part avec une ir­ré­cu­sable fi­dé­lité.» La , qui contient plu­sieurs de pro­verbes, dit : «Ce­lui qui ap­plique son à ré­flé­chir sur la Loi du Très-Haut… le sens se­cret des pro­verbes et re­vient sans cesse sur les des » 2. Les de la eurent la même que la Bible. Confu­cius imita les pro­verbes et fut à son tour imité par ses dis­ciples. De même que l’âge de l’arbre peut se ju­ger par le tronc; de même, les pro­verbes nous ap­prennent le ou l’esprit propre à chaque , et les dé­tails de sa pri­vée. On en te­nait cer­tains en telle es­time, qu’on les di­sait d’origine cé­leste : «C’est du », dit Ju­vé­nal 3, «que nous est ve­nue la maxime : “Connais-toi toi-même”. Il la fau­drait gra­ver dans son cœur et la mé­di­ter tou­jours.» C’est pour­quoi, d’ailleurs, on les gra­vait sur le de­vant des portes des temples, sur les co­lonnes et les marbres. Ces , très nom­breuses du de Pla­ton, fai­saient dire à ce phi­lo­sophe qu’on pou­vait faire un ex­cellent cours de en voya­geant à pied, si l’on vou­lait les lire; les pro­verbes étant «le fruit de l’ de tous les peuples et comme le bon sens de tous les siècles ré­duit en for­mules»

  1. «Études his­to­riques, lit­té­raires et mo­rales sur les pro­verbes et le lan­gage pro­ver­bial», p. 2. Icône Haut
  2. «Livre de l’Ecclésiastique», XXXIX, 1-3. Icône Haut
  1. «Sa­tires», poème XI, v. 27-28. Icône Haut

Ibn al Fâridh, « Extraits du Divan »

dans « Anthologie arabe, ou Choix de poésies arabes inédites », XIXᵉ siècle

dans « , ou Choix de poé­sies arabes in­édites», XIXe siècle

Il s’agit d’une tra­duc­tion par­tielle du Di­van (Re­cueil de poé­sies) de ‘Omar ibn al Fâ­ridh 1, poète et arabe, que ses ad­mi­ra­teurs sur­nomment le «sul­tan des deux amours» ou le «sul­tan des amou­reux» en ré­fé­rence à l’ di­vin et à l’amour hu­main. Le , au­quel on ap­plique, par abus, le nom de mys­ti­cisme arabe, a eu peu de ra­cines dans la pé­nin­sule ara­bique et en . Son ap­pa­ri­tion a été même dé­crite comme une ré­ac­tion du asia­tique contre le gé­nie arabe. Il ar­rive que ce mys­ti­cisme s’exprime en arabe : voilà tout. Il est de ten­dance et d’esprit. Parmi les rares ex­cep­tions à cette règle, il faut comp­ter le poète Ibn al Fâ­ridh, né au Caire l’an 1181 et dans la même ville l’an 1235 apr. J.-C. Dans une pré­face pla­cée à la tête de ses poé­sies, ‘Ali, pe­tit-fils de ce poète, rap­porte sur lui des choses éton­nantes, aux­quelles on est peu dis­posé à croire. Il dit qu’Ibn al Fâ­ridh tom­bait quel­que­fois en de si vio­lentes convul­sions, que la sueur sor­tait abon­dam­ment de tout son en cou­lant jusqu’à ses pieds, et qu’ensuite, frappé de stu­peur, le fixe, il n’entendait ni ne voyait ceux qui lui par­laient : l’usage de ses sens était com­plè­te­ment sus­pendu. Il gi­sait ren­versé sur le dos, en­ve­loppé comme un mort dans son drap. Il res­tait plu­sieurs jours dans cette po­si­tion, et pen­dant ce , il ne pre­nait au­cune nour­ri­ture, ne pro­fé­rait au­cune et ne fai­sait au­cun mou­ve­ment. Lorsque, sorti de cet étrange état, il pou­vait de nou­veau conver­ser avec ses amis, il leur ex­pli­quait que, tan­dis qu’ils le voyaient hors de lui-même et comme privé de la , il s’entretenait avec et en re­ce­vait les plus grandes poé­tiques.

  1. En arabe عمر بن الفارض. Par­fois trans­crit Omar ben al Fa­redh, ‘Umar ibnu’l-Fáriḍ, Omar iben Phe­red, Omar-ebn-el-Fa­rid ou Omer ibn-el-Fá­ridh. Icône Haut

Musée le Grammairien, « Les Amours de Léandre et de Héro : poème »

XVIIIᵉ siècle

XVIIIe siècle

Il s’agit des «Amours de Léandre et de Héro» («Ta kath’ Hêrô kai Lean­dron» 1), poème de trois cent qua­rante vers, pe­tit chef-d’œuvre hel­lé­nis­tique qui se res­sent de l’époque de (Ve siècle apr. J.-C.), et que Her­mann Kö­chly dé­fi­nit comme «la der­nière rose du jar­din dé­cli­nant des lettres grecques» («ul­ti­mam emo­rien­tis Græ­ca­rum lit­te­ra­rum horti ro­sam»). En ef­fet, si quel­que­fois un ton simple, naïf et tou­chant élève ce poème jusqu’à ceux des an­ciens Grecs, ces peintres si vrais de la , quel­que­fois aussi des traces évi­dentes tra­hissent une ori­gine tar­dive, tant dans la teinte trop sen­ti­men­tale que dans les or­ne­ments trop re­cher­chés, par les­quels l’auteur a peint les amours et la bru­tale de ses deux hé­ros. Ima­gi­ne­rait-on qu’un poète du d’Ho­mère eût pu écrire comme Mu­sée : «Que de grâces brillent sur sa per­sonne! Les An­ciens ont compté trois Grâces : quelle er­reur! L’ riant de Héro pé­tille de cent grâces» 2. Mais à tra­vers ces ai­mables dé­fauts cir­cule une vague et ar­dente sen­si­bi­lité, une va­po­reuse qui an­nonce par avance le des an­nées 1800. Si By­ron a tra­versé l’Hellespont à la nage, c’est parce que Léandre l’avait fait pour les beaux yeux de celle qu’il ai­mait. Le lec­teur ne sait peut-être pas la lé­gende à l’origine des «Amours de Léandre et de Héro». La voici : Héro était une prê­tresse à Ses­tos, et Léandre un jeune d’Abydos, deux si­tuées en face l’une de l’autre sur les bords de l’Hellespont, là où le ca­nal est le moins large. Pour al­ler voir Héro, Léandre tra­ver­sait tous les soirs l’Hellespont à la nage; un flam­beau al­lumé par son amante sur une tour éle­vée lui ser­vait de phare. Hé­las! Léandre se noya un soir d’orage. Héro, dé­cou­vrant le len­de­main ma­tin son re­jeté sur la grève, se pré­ci­pita du haut de la tour où elle guet­tait son amant et se tua au­près lui. Tel est, en sa pri­mi­tive sim­pli­cité, le fait di­vers sur le­quel un dé­nommé Mu­sée le Gram­mai­rien 3 a fait son poème. Ce fait di­vers est fort an­cien. Vir­gile et Ovide le connais­saient; Stra­bon, qui écri­vait sur la à la même époque où Vir­gile et se dis­tin­guaient par leurs vers — Stra­bon, dis-je, dans sa d’Abydos et de Ses­tos, fait men­tion ex­presse de la tour de Héro; en­fin, Mar­tial y puise le su­jet de deux de ses , dont l’une 4 a été ma­gis­tra­le­ment tra­duite par Vol­taire :

«Léandre conduit par l’
En na­geant di­sait aux  :
“Lais­sez- ga­gner les ri­vages,
Ne me noyez qu’à mon re­tour”
»

  1. En «Τὰ καθ’ Ἡρὼ καὶ Λέανδρον». Icône Haut
  2. p. 11. Icône Haut
  1. En grec Μουσαῖος ὁ Γραμματικός. Icône Haut
  2. «Épi­grammes», XXVb. Icône Haut

Sappho, « La Poésie »

éd. de l’Aire, coll. Le Chant du monde, Vevey

éd. de l’Aire, coll. Le Chant du , Ve­vey

Il s’agit de «La » («Melê» 1) de Sap­pho de Les­bos 2 (VIIe siècle av. J.-C.), la poé­tesse la plus re­nom­mée de toute la par ses vers et par ses amours, et l’une des seules de l’ dont la ait tra­versé les siècles. Stra­bon la consi­dère comme «un pro­dige» et pré­cise : «Je ne sache pas que, dans tout le cours des dont l’ a gardé le , au­cune femme ait pu, même de loin, sous le rap­port du ly­rique, ri­va­li­ser avec elle» 3. J’ajouterais aussi les mots que l’auteur du «Voyage du jeune Ana­char­sis en Grèce» met dans la bouche d’un ci­toyen de My­ti­lène et qui contiennent un ré­sumé élo­quent des hom­mages ren­dus par les Grecs au ta­lent de Sap­pho : «Elle a peint tout ce que la offre de plus riant. Elle l’a peint avec les les mieux as­sor­ties, et ces cou­leurs elle sait au be­soin tel­le­ment les nuan­cer, qu’il en ré­sulte tou­jours un heu­reux mé­lange d’ombres et de … Mais avec quelle force de gé­nie nous en­traîne-t-elle lorsqu’elle dé­crit les charmes, les trans­ports et l’ivresse de l’! Quels ta­bleaux! Quelle ! Do­mi­née, comme la Py­thie, par le qui l’agite, elle jette sur le pa­pier des ex­pres­sions en­flam­mées; ses y tombent comme une grêle de traits, comme une pluie de qui va tout consu­mer». Toutes ces qua­li­tés la firent sur­nom­mer la dixième des muses : «Les muses, dit-on, sont au nombre de neuf. Quelle er­reur! Voici en­core Sap­pho de Les­bos qui fait dix» 4. On ra­conte que Sap­pho épousa, fort jeune, le plus riche ha­bi­tant d’une île voi­sine, mais qu’elle en de­vint veuve aus­si­tôt. Le culte de la poé­sie fut dès ce mo­ment sa plus chère oc­cu­pa­tion. Elle réunit au­tour d’elle plu­sieurs , dont elle fit ses élèves ou ses amantes; car il faut sa­voir que son ar­deur amou­reuse, dont pré­tend qu’elle était «non moindre que le feu de l’Etna» («Ætnæo non mi­nor igne»), s’étendait sur les per­sonnes de son sexe. Il ne nous reste, du grand nombre de ses , , et épi­tha­lames, que quelques pe­tits frag­ments qui se trouvent dis­sé­mi­nés dans les an­ciens scho­liastes, et sur­tout une ode en­tière que Sap­pho fit à la louange d’une de ses maî­tresses.

  1. En «Μέλη». Icône Haut
  2. En grec Σαπφὼ ἡ Λεσϐία. «Mais son nom au­then­tique était Ψάπφω (Psap­phô), au té­moi­gnage de la poé­tesse elle-même et de mon­naies my­ti­lé­niennes. Des mon­naies d’Érésos ont la forme sim­pli­fiée Σαπφώ (Sap­phô) qui est de­ve­nue en grec la forme la plus com­mune et a abouti fi­na­le­ment à Σαφώ (Sa­phô)», dit Aimé Puech. Icône Haut
  1. En grec «ἡ Σαπφώ, θαυμαστόν τι χρῆμα· οὐ γὰρ ἴσμεν ἐν τῷ τοσούτῳ χρόνῳ τῷ μνημονευομένῳ φανεῖσάν τινα γυναῖκα ἐνάμιλλον οὐδὲ κατὰ μικρὸν ἐκείνῃ ποιήσεως χάριν». Icône Haut
  2. Pla­ton dans «An­tho­lo­gie grecque, d’après le ma­nus­crit pa­la­tin». Icône Haut

Roland Holst, « Par-delà les chemins : poèmes »

éd. Seghers, coll. Autour du monde, Paris

éd. Se­ghers, coll. Au­tour du , Pa­ris

Il s’agit d’Adriaan Ro­land Holst 1 (XIXe-XXe siècle), sur­nommé par ses contem­po­rains «le prince des néer­lan­dais». Dans ses qua­rante-deux re­cueils — «Poé­sies» («Ver­zen»), «La Confes­sion du si­lence» («De Be­li­j­de­nis van de stilte»), «Par-delà les che­mins» («Voor­bij de we­gen»), «La Cime sau­vage» («De Wilde Kim»), «Un Hi­ver au bord de la » («Een Win­ter aan zee»), «En route» («On­der­weg»), «Sous les nuages froids» («On­der koude wol­ken»), etc. — Ro­land Holst se sent ap­pelé à par­ler sans cesse d’un pa­ra­dis perdu, pour en in­di­quer le che­min à ceux qui per­pé­tuel­le­ment , «désar­més et vides comme la mer meur­trie, sau­vages comme l’écume qui va vers l’» 2, gardent la d’un ori­gi­nel. So­li­taire par fa­ta­lité plus que par sen­ti­ment, il est le poète de la mer, de l’ et du , le poète des ho­ri­zons re­dou­tables de­vant les­quels la s’arrête et s’étonne. «Qu’elle soit obs­cure et ra­mas­sée comme les forces pri­mi­tives de la , ou lim­pide et fré­mis­sante comme la ligne lu­mi­neuse des eaux et des terres, sa , toute vi­suelle, reste bien dans la tra­di­tion ly­rique», disent les cri­tiques 3. «À tra­vers elle, s’inscrit la quête d’une île “au-delà des vents, au-delà des vagues” et qui se­rait celle de la béa­ti­tude. De là, les grands élans com­man­dés par le de com­mu­nion avec les élé­ments, et le sen­ti­ment nos­tal­gique à l’égard d’une gran­deur per­due que le poète croit éga­rée pour l’.» Ses poèmes, d’une un peu trop sym­bo­lique, ont l’inconvénient de ne pas être as­sez ac­ces­sibles au pu­blic, sauf peut-être «Le La­bou­reur» («De Ploe­ger»), un de ses rares poèmes de­ve­nus po­pu­laires :

«S’il ne m’est pas donné de voir les épis mûrs
Ni à mes mains de les lier par pleines gerbes,
Du moins faites- croire aux mois­sons que je laisse.

  1. Par­fois trans­crit Adria­nus Ro­land Holst. Icône Haut
  2. p. 26. Icône Haut
  1. MM. Ro­bert Laf­font et Va­len­tino Bom­piani. Icône Haut

Bao Zhao, « Sur les berges du fleuve »

éd. La Différence, coll. Orphée, Paris

éd. La Dif­fé­rence, coll. Or­phée, Pa­ris

Il s’agit de Bao Zhao 1, poète (Ve siècle apr. J.-C.). Il était un vé­ri­table maître du «yuefu» 2poème chanté»), au­quel il re­donna une vi­gueur en y ré­in­tro­dui­sant le ton de la po­pu­laire. Ses dix-neuf «yuefu» sur le thème de «La route est dif­fi­cile» 3Xing lu nan» 4) passent pour des mo­dèles ache­vés de ce genre ; ils ne traitent pas seule­ment de la dif­fi­culté des so­li­taires, mais aussi des de la , en par­ti­cu­lier de la de l’. Plus tard, sous les Tang 5, Li Po s’en ins­pira et Tu Fu les ad­mira. Des autres œuvres de Bao Zhao, je re­tiens sur­tout sa longue rhap­so­die in­ti­tu­lée «Chant de la ville dé­vas­tée» 6Wu cheng » 7). C’est une re­mar­quable sur la va­nité des gran­deurs hu­maines, dont voici les pre­miers vers : «Au­tre­fois, au de gran­deur, les es­sieux des chars se tou­chaient, les hommes étaient ser­rés épaule contre épaule le long de ces routes. La plaine était cou­verte de et de fermes, les cris et les chants em­plis­saient la voûte cé­leste. On ex­ploi­tait les ter­rains de sel, on creu­sait les pour en ex­traire du cuivre. Les hommes étaient forts et pleins de ta­lents… Aussi se sont-ils per­mis d’enfreindre les , de né­gli­ger les pré­ceptes royaux; ils ont dressé de hautes for­te­resses, creusé de pro­fonds ré­ser­voirs d’, ils ont pro­jeté de rendre leur des­tin brillant et de de­ve­nir les pre­miers de leur temps. Voici pour­quoi ils ont élevé des bâ­ti­ments et des mu­railles si grands, pour­quoi ils ont mul­ti­plié [les] pa­villons et [les] tours d’observation; leurs édi­fices s’élevaient comme les bords es­car­pés d’un tor­rent»

  1. En chi­nois 鮑照. Au­tre­fois trans­crit Pao Tchao ou Pao Chao. Icône Haut
  2. En chi­nois 樂府. Au­tre­fois trans­crit «yo-fou» ou «yüeh-fu». Icône Haut
  3. Par­fois tra­duit «Les Peines du voyage», «Dif­fi­cul­tés de la route» ou «Ah! que dure est la route!». Icône Haut
  4. En chi­nois «行路難» Au­tre­fois trans­crit «Hsing lu nan». Icône Haut
  1. De l’an 618 à l’an 907. Icône Haut
  2. Par­fois tra­duit «La Ville aban­don­née : “fou”» ou «Rhap­so­die de la ville en ruines». Icône Haut
  3. En chi­nois «蕪城賦». Au­tre­fois trans­crit «Wou tch’eng fou» ou «Wu-ch’eng fu». Icône Haut

Chateaubriand, « Les Martyrs, ou le Triomphe de la religion chrétienne. Tome III »

XIXᵉ siècle

XIXe siècle

Il s’agit des «Mar­tyrs» de , au­teur et , père du chré­tien. Le , le grand mal de Cha­teau­briand fut d’être né entre deux siècles, «comme au confluent de deux fleuves» 1, et de voir les ca­rac­tères op­po­sés de ces deux siècles se ren­con­trer dans ses opi­nions. Sorti des en­trailles de l’ancienne , de l’ancienne , il se plaça contre la , dès qu’il la vit dans ses pre­mières vio­lences, et il resta roya­liste, sou­vent contre son ins­tinct. Car au fond de lui-même, il était de la race, de la de Na­po­léon Bo­na­parte. Même fougue, même éclat, même mo­derne. Si les Bour­bons avaient mieux ap­pré­cié Cha­teau­briand, il est pos­sible qu’il eût été moins vul­né­rable au de l’Empereur de­venu res­plen­dis­sant comme un «large ». Le pa­ral­lèle qu’il fait dans ses «Mé­moires d’outre-tombe» entre l’Empire et la mo­nar­chie bour­bo­nienne, pour cruel qu’il soit, est l’expression sin­cère de la concep­tion de l’auteur, tel­le­ment plus vraie que celle du po­li­tique : «Re­tom­ber de Bo­na­parte et de l’Empire à ce qui les a sui­vis, c’est tom­ber de la dans le néant; du som­met d’une mon­tagne dans un gouffre. Tout n’est-il pas ter­miné avec Na­po­léon?… Com­ment nom­mer Louis XVIII en place de l’Empereur? Je rou­gis en [y] pen­sant». Triste jusqu’au déses­poir, sans amis et sans es­pé­rance, il était ob­sédé par un passé à ja­mais éva­noui et tombé dans le néant. «Je n’ai plus qu’à m’asseoir sur des ruines et à mé­pri­ser cette », écri­vait-il 2 en son­geant qu’il était lui-même une ruine en­core plus chan­ce­lante. Au­cune ne ve­nait le conso­ler ex­cepté la chré­tienne, à la­quelle il était re­venu avec et avec vé­hé­mence. Sa mère et sa sœur avaient eu la plus grande part à cette conver­sion : «Ma mère, après avoir été je­tée à soixante-douze ans dans des ca­chots où elle vit pé­rir une par­tie de ses , ex­pira en­fin sur un gra­bat, où ses mal­heurs l’avaient re­lé­guée. Le sou­ve­nir de mes éga­re­ments [le de mon “Es­sai sur les ”] ré­pan­dit sur ses der­niers jours une grande amer­tume; elle char­gea, en mou­rant, une de mes sœurs de me rap­pe­ler à cette re­li­gion dans la­quelle j’avais été élevé. Ma sœur me manda le der­nier vœu de ma mère. Quand la lettre me par­vint au-delà des mers, ma sœur elle-même n’existait plus; elle était morte aussi des suites de son . Ces deux sor­ties du tom­beau, cette qui ser­vait d’interprète à la mort, m’ont frappé; je suis de­venu chré­tien»

  1. «Mé­moires d’outre-tombe», liv. XLIII, ch. VIII. Icône Haut
  1. «Études his­to­riques». Icône Haut